Les @mers du CESM


Les @mers du CESM - 19 avril 1944 :

Le cuirassé Richelieu participe au bombardement de Sabang, base japonaise en Indonésie. Le navire français, ayant rejoint l’Eastern Fleet commandée par l’amiral britannique Somerville, prendra part à trois autres opérations visant des bases navales ennemies. Après 52 mois passés en mer, le bâtiment rentre à Toulon le 1er octobre 1944. À nouveau déployé en Asie du Sud-Est l’année suivante, le bâtiment assistera à la capitulation du Japon dans la rade de Singapour le 23 septembre 1945.





18 septembre 2016

Le plan naval de Bruno Le Maire (2017-2027)

© JJMM.
Bruno Le Maire, candidat à la primaire du parti politique "Les Républicains" s'était fait remarquer par des propositions très offensives sur la Défense nationale, notamment en faveur de la Marine nationale, en juillet. Samedi 17 septembre, il publiait son "contrat présidentiel". Volumineux (1012 pages) et très détaillé. Sans esprit partisan, il nous semble opportun de discuter de ces propositions, tout comme nous pourrions le faire d'un autre candidat de cette primaire ou d'une autre, ou de tout candidat déclaré à l'élection présidentielle.

Il n'aurait pas été de trop de numéroter les pages dans la "table des matières" (p. 10). Les deux premières page (pp. 175-176) de la partie "Défense" sont peu lisibles.
Les pages suivantes sont plutôt d'une grande clarté et détaillent aussi bien les cibles ajustées des programmes que les coûts d'investissement, de fonctionnement ou de (re)création d'unités. Par exemple, une troisième division Scorpion est évaluée à 5 milliards d'investissement quand ce blog proposait 4,3 milliards pour l'actuelle 3e division. Chacune des trois forces armées reçoit un effort relativement symétrique si les coûts d'investissement et de fonctionnement sont confondus : personne ne sera véritablement fâché.

S'il n'est pas étonnant que le candidat reprenne à son compte une partie des commandes de la LPM actualisée afin de "muscler" ses propositions à peu de frais, c'est très difficile à suivre quand il semble opérer des coupes, certes logiques, par rapport à ce qu'il propose. Par exemple, il souhaite la commande de 40 Rafale supplémentaire (Armée de l'air et Marine confondue ?) sans mentionner ni la modernisation ni les Mirage 2000D : à croire qu'elle est abandonnée face à l'achèvement complet de la tranche 4 de production du Rafale (34 machines).

Les chiffres avancés pour l'état des lieux de la situation des forces en 2017 ne sont pas toujours les bons. Par exemple, l'Aviation navale disposera plutôt de 42 Rafale M et non pas 38. Les Super Etendard Modernisés sont retirés du service depuis juin. La liste n'est pas exhaustive (p. 175). 

Le cadre géopolitique et géostratégique brossé par le "contrat présidentiel" ne fait pas l'impasse sur les enjeux tout en soulignant les carences opérationnelles actuelles (p. 179). Par exemple, il relève l'importance du "phénomène de territorialisation des mers générant des tensions entre pays riverains" ou encore que "les navires français assurent à travers le monde la sécurité des intérêts de la France et s ont les vecteurs de  son influence." Le rôle de la Mer semble entendu ("affirmation du rang de puissance maritime" fiche DEF5).

C'est sous le seul aspect financier, que la dissuasion nucléaire est abordée, ce qui n'est pas satisfaisant. Mais ce n'est pas non plus illogique car le Président Mitterrand avait dit que "La dissuasion, c'est moi". L'important débute par le "sacre nucléaire" (expression de Philippe Wodka-Gallien) suivi de son discours afférent. Toujours en ses deux composantes, elle serait pleinement financée (6 milliards de plus par année fiscale à partir de 2025 contre 3,5 milliards actuellement). Donc les quatre SN3G sont confirmés.

Pour en venir au cœur de notre sujet, l'effort budgétaire supplémentaire pour la Marine nationale s'élève sur la période considérée de 10,8 milliards d'euros en investissement. Le flux financier dédié au fonctionnement serait porté à 1,8 puis 2,2 milliards (p. 182). L'effectif grimperait à 39 000 marins (contre plus de 36 000 aujourd'hui).

16 nouveaux navires de surface (aucun sous-marin) et aéronefs devraient rejoindre la Flotte (pp. 175-176) sur ce qui ressemblerait presque, par sa programmation dans la durée, à un plan naval.  L'effort porte sur ces programmes :
  • lancement d'une nouvelle série d'études pour le deuxième porte-avions puis mise sur cale (2020 pour une entrée en service prévue en 2030 ;
  • Un quatrième FLOTLOG ;
  • 3 FREMM ASM supplémentaires ; 
  • 1 FTI supplémentaire (s'ajoutant aux 5 envisagées) ;
  • 5 patrouilleurs hauturiers ;
  • 3 Atlantique 2 modernisés (en plus de la modernisation de 15 machines) ;
  • 20 NH90 NFH en plus des 27 machines déjà commandées (dont 14 kit ASM). 
Globalement, il y a un retour aux ambitions navales de 2007 avec un format à 30 frégates. 

C'est le premier engagement ferme sur le deuxième porte-avions depuis 2012 où la polémique ayant opposé la candidate socialiste, Ségolène Royal, à celui de l'UMP, Nicolas Sarkozy, voyait ce dernier prendre position en faveur du PA2 (avant de retenir sa décision de 2008 à 2011). Nous sommes loin des formules usées des livres blancs de 1994 et 2008 ("le deuxième porte-avions se fera si les conditions financières et économiques sont réunies"). C'est aussi un retour aux ambitions de Jacques Chirac qui, avec Michèle Alliot-Marie, disait avoir tout fait pour rendre la commande du PA2 irréversible en faisant le choix d'une propulsion conventionnelle pour rejoindre le programme britannique et en commandant les catapultes en 2006.

Le président Hollande avait eu le mérite d'assumer sa non-commande. Quelque part, Bruno Le Maire est sur une ligne similaire quand il déclarait le 11 juillet « le Charles de Gaulle fera en 2017 son deuxième arrêt technique majeur qui le rendra indisponible pendant environ une vingtaine de mois. Il faut savoir ce que l’on veut : soit nous avons un porte-avions et il est disponible tout le temps, soit nous n’en avons pas et il n’est jamais disponible. N’avoir un porte-avions qui n’est disponible qu’occasionnellement en fonction de ses arrêts techniques et pas en fonction des menaces qui pèsent sur la sécurité des français, j’ai du mal à le comprendre. Un porte-avions n’est pas un colifichet, c’est un élément majeur de notre capacité à projeter notre puissance sur les théâtres d’opérations extérieures ». Une prose que l'Amiral Lannuzel n'aurait certainement pas renié !

La commande de trois FREMM à vocation ASM répond très clairement aux difficultés opérationnelles de la Marine nationale qui se plaint d'avoir trop peu de sonars à sa disposition. Avec 9 FREMM ASM, la Royale dépasserait le format demandé en 1997 de 8 unités de ce genre. La défense aérienne de la Flotte monterait à quatre unités, dispositif très classique qui écarte l'ambition d'une cinquième unité. Le format des frégates de premier rang est ramené à 13 unités (4 FDA, 9 FASM).

La FTI serait conservée comme une ambitieuse frégate de deuxième rang couvrant "tout le spectre des missions,  secondant  les  FREMM  dans  les  missions  du  haut  du  spectre tout en assurant des missions d’escorte, de  protection de la ZEE et de coopération." (p. 180) C'est à se demander si la commande des 3 FREMM ASM en plus des 6 premières ne permet pas d'économiser la modernisation des FLF dans l'esprit de Bruno Le Maire.

Le programme BATSIMAR se voit assigné le même cadre géographique ("protection de la ZEE et ses abords") que la FTI tout en demeurant une frégate de troisième rang. 5 unités devraient être mises sur cale "en urgence" avant 2023 sans que la cible finale (évoluant entre 12 et 18 bateaux) ne soit précisée.

L'Aviation navale tiendrait jusqu'en 2030 avec 18 ATL2 et non plus 15 sans qu'un mot soit dit sur le programme AVSIMAR. Les avions de SURMAR ne tiendront pas jusqu'à cette date. Le programme HIL n'est pas cité : il est possible de choisir de ne pas inclure la Royale et ses Panther et de prolonger la série des NH90 NFH, mais est-ce bien adapté pour le remplacement des Alouette III et des Dauphin ?

La présentation du "Combien ?" (p. 182) est très instructive. Nous retrouvons un FLOTLOG pour 500 millions d'euros, une FREMM à 670 (un des chiffres avancés par la Cour des comptes) ou encore un BATSIMAR à 60 millions (alors que la Royale jugerait l'Adroit trop coûteux (~50 millions). A contrario, le coût du NH90 NFH est un peu trop minoré (30 millions contre plutôt 38, voire 45 pour la version avec kit ASM).

C'est pourquoi, malgré les critiques, les devis proposés pour le PA2 (4500 millions) et la FTI (400 millions) ne manquent pas d'intérêt !

Dans le premier cas, cette estimation est très haute par rapport à l'hypothèse de travail de la DGA (2500 millions HT) et le devis pour la coque avancé en 2008-2009 par les Chantiers de l'Altantique (dessin CVF-FR) de 950 millions d'euros, en sus des 1500 pour l'armement. Même en tenant compte de la dernière évaluation financière des deux HMS Queen Elizabeth et Prince of Wales de la Royal Navy (3612 millions d'euros l'unité), c'est très coûteux.
Mais cela s'expliquerait si le ou les rédacteurs avaient retenu ce dernier chiffre comme coût unitaire de production et qu'il y avait additionné les 700 millions de frais d'études attendus sur la période 2004-2009 pour développer les plans du PA2 (d'un tonnage de plus de 70 000 tonnes contre 42 000 pour le PAN). 

Si ce programme était mis en œuvre alors il faudrait s'attendre, avec un deuxième porte-avions mis sur cale en 2020 (dans quelle cale ?), à ce qu'il entre en service avant 2025 et non pas à l'orée 2030.

Par contre, pour la FTI, si le devis à 400 millions l'unité tire lui aussi parti d'une certaine réalité vérifiée chez les protagonistes concernés de cette affaire, ce sera très difficile de financer 5 FTI dans la trajectoire actuelle de la LPM avec 3 annulations de FREMM (1500 millions selon la DGA) plus la revente de pièces de rechange. Il manque 500 millions. 

Ce plan naval gagnerait à être affiné dans le détail. Un septième SNA ne serait pas trop eu égard à l'opération Harmattan où il avait fallu arbitrer entre et la dissuasion et le GAn. Toutefois, il s'agit d'une (rare) déclaration d'intentions dont l'impact financier est évalué et budgétarisé (tout aussi rare). Il est plus facile d'adapter une trajectoire financière ascendante pour rencontrer les demandes du Politique que la courbe inverse.

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