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Un site brésilien semblerait annoncé une nouvelle très attendue : le choix du vainqueur du contrat FX-2 au Brésil. Et ce serait le Rafale ! Réflexe
de protection... Nous ne sommes plus à une annonce de victoire, ou
défaite, près dans ce dossier. La guerre économique qui se livre est si
intense.
Première aile : la bataille Brésilienne
Néanmoins,
prenons le temps de poser les choses de façon schématique et très
large. Prenons donc une certaine hauteur de vue. Le Brésil n'est qu'une
des batailles commerciales que se livrent les Etats constructeurs
d'avion de combat. Mais il a la spécificité de pouvoir améliorer les
chances de l'avion qui sera déclaré vainqueur au Brésil pour d'autres
marchés. Dans le cas français, la victoire brésilienne ne constitue
qu'une "aile" d'un vaste "mouvement d'armée". L'intérêt du contrat
sud-américain est triple :
- permettre une première vente export, ce qui saperait lourdement les critiques anti-Rafale ;
- relance sérieusement les ventes exports ;
- baisser la facture du programme en augmentant le volume -et peut être les cadences- et s'arroger un grand nombre d'options sur le continent bolivarien. Certaines informations font état d'une commande total brésilienne pouvant atteindre 108 machines sur le long terme. Et d'autres informations font état que le contrat français contiendrait la possibilité pour le Brésil de vendre le Rafale produit sur son sol à d'autres pays, dont avant tout ses voisins.
Ce
qui est intéressant, c'est que la victoire française, si elle se
réalisait, confirmerait la viabilité du programme Rafale à long terme et
renouvellerait son potentiel export. Et c'est bien ce qui inquiète. Si
l'équation financière du programme tricolor est tendue, elle le serait
d'autant moins avec une commande supplémentaire de 36 machines. Même si
seulement environ 6 d'entre elles seraient produite sur le sol français
-en vertu des demandes brésiliennes- cela permettrait néanmoins
d'augmenter un peu les cadences (ou d'étaler les commandes françaises
plutôt). Mais tout les sous-traitants du programme pourraient profiter
de ce contrat pour répercuter cette hausse de volume sur le coût
unitaire de production.
Deuxième aile : le contrat du siècle en Inde
Et
là, la chose inquiète les concurrents du dernier de Dassault Aviation.
Les américains qui ont certaines difficultés à maîtriser les coûts de
leur dernier né, le F-35. Les communications officielles sur les coûts
du programme se font de plus en plus rare. Maix aux dernières nouvelles,
le coût unitaire dépasserait les 100 millions de dollar. Et rien n'est
sûr quand à la date d'entrée en service de l'appareil. Ce qui explique,
en partie, pourquoi c'est les F-16 et F-18 qui sont alignés par les
Etats-Unis à l'export. Sans compter le fait que certains pays, comme
l'Inde, ne recherche pas d'avions de chasse de "cinquième génération" vu
que les indiens en développe un avec l'aide de la Russie (participation
indienne dans le programme PAK-FA).
Mais
ce ne sont pas les américains qui ont le plus à s'inquiéter. Les
concurrents américains de l'industrie de défense américaine ont tendance
à disparaître. Ceux qui ont le plus à craindre seraient les russes. En
effet, l'une des principales raisons des succès des Sukhoï est bien sûr
son faible prix. Et si jamais le Rafale se vendait en Inde, il ne
finirait pas par atteindre le prix d'un appareil russe. Mais le rapport
qualité/prix s'améliorerait. Et il serait moins onéreux de se doter du
système d'armes français. La presse brésilienne a d'ailleurs transpirée
de craintes russes d'une victoire française. Il était même annoncé un
temps un retour des russes.
C'est
donc le contrat du siècle qui est en ligne de mire. Les contrats
brésiliens et indiens sont en interaction concernant la France. Remporté
le premier signifierait prendre une option sérieuse, mais pas
suffisante, pour remporter le deuxième. L'Inde, c'est 126 machines dont
une trentaine construite en France. C'est un contrat d'une dizaine de
milliards d'euros.
Et
le contexte n'est pas si défavorable. Il y a encore quelques années, un
duel russo-américain était annoncé comme la seule issue de ce contrat.
Depuis, la bataille brésilienne maintient les chances françaises en
Inde. Et l'inattendu retour de l'Eurofighter, ainsi que le démarchage
agressif du Gripen, montre bien que le contrat n'est pas si fermé.
Le centre
Une
fois la décision brésilienne rendue, il y aura un repport des forces
sur l'Inde, forcément, et aussi dans la péninsule arabique. Malgré les
annonces de signature de faramineux contrats d'armement entre les
Etats-Unis, l'Arabie Saoudite et les E.A.U. (pour ne citer qu'eux), il
reste tout de même quelques grosses miètes. Un contrat d'une soixantaine
de machines reste pendant aux E.A.U. où les négociations avancent
discrètement et tout doucement... Ainsi qu'une intention d'achat
manifestée publiquement par le Koweit pour une trentaine de machines.
Quatar, Barhein et Oman ne seraient pas en reste mais ces hypothèses se
sont fait très discrètes pour tout le monde... N'oublions pas le très
étrange marché lybien qui se signale ou se rappelle à notre souvenir
quand il veut, et souvent, pour rien nous apprendre de nouveaux. Ce
"centre arabique" représente un potentiel de commandes d'une centaines
de machine. Ce qui n'est pas rien. Et la France ne reste pas immobile
dans ce coin du monde : ouverture d'une base inter-armes aux E.A.U.,
d'antennes de HEC, du Louvre et de St Cyr... Si ce n'est pas une volonté
de s'implanter fortement dans la région, cela y ressemble. Il est
difficile d'évaluer dans quelle mesure cette influence culturelle peut
être rattachée aux négociations d'armement. Mais des liens doivent bien
exister.
Ce
centre subirait une influence internationale complexe entre, d'une
part, le résultat brésilien, et d'autre part, la bataille indienne qui
ira en s'intensifiant. Au niveau régional, la très lourde implication
américaine dans la région (au sens très large) leur donnera de grands
avantages dans la négociation. Les E.A.U. s'étant, en outre, doté d'une
soixantaine de F-16 block 60. Mais cette influence jouera contre eux
dans l'hypothèses où certains Etats essaieront de ne pas se fournir chez
un fournisseur unique (argument que l'on retrouve contre la France au
Brésil paradoxalement). Enfin, et toujours à l'intérieur de l'échelon
régional, il semblerait, au vu de ce qui se passe depuis plusieurs
années, que le contrat émirati soit le verrou de tout les marchés. Il
n'est pas à exclure que les acheteurs potentiels du coin se grefferont
peut être sur la commande émirati. Un temps, on évoquait une telle
opération pour la Lybie, bien qu'on s'étonne qu'un tel transfert
d'armement vers cet Etat soit aussi facilement accepté. La France
continue d'user de son influence et de ses arguments pour obtenir un
résultat favorable. Encore récemment, des responsables français
n'hésitaient pas à évoquer l'ouverture d'une unité de transformation
Rafale dans la base française des E.A.U.Ce qui plaiderait pour un "pôle
Rafale" et une commande "commune".
Mais ce ne sont que des hypothèses dans un contexte bien obscur où l'information est parcellaire.
Du Centre vers la place forte Européenne
L'Europe
a quelques contrats d'armement figés. C'est paradoxal à dire alors que
bon nombres d'européens ce sont engagés dans le programme Eurofighter
et/ou JSF (F-35). A ce titre, il faut signaler que les Etats qui
achètent ou achèteront le F-35 sont les mêmes, souvent, qui ont achetés
le F-16 (face au Mirage F-1) et le F-104 Starfighter pour la génération
encore avant. De façon similaire, les Etats engagés dans l'Eurofighter
sont presque tous les mêmes que ceux qui été engagés dans le consortium
PANAVIA qui avait donné naissance au Tornado.
C'est
donc une Europe où la France est structurellement isolé depuis deux,
voir trois générations d'appareils. Si la vente des différents Mirage a
été un grand succès, il ne faut pas oublier que c'est principalement
hors Europe. A part la Grèce et l'Espagne, on ne trouve pas d'autres
acheteurs européens d'avions de chasse français. Hors "soeurs latines"
(même si c'est un peu incorrect de qualifier ainsi la Grèce), c'est
l'Europe du Nord qui reste très fidèle aux industriels américains.
Et
pourtant, la situation n'est pas si défavorable. Les Etats-Unis sont
dans une face de repli ou de redéploiment vers l'Asie. Ce n'est pas pour
autant qu'ils ne s'intéresseront plus au marché européen. Pour preuve,
le programme JSF. Mais ils vont bien y perdre quelques influences. Les
difficultés et déboires du programme JSF, et les espoirs déçus de
certains contrats F-16 européens (Pologne) ne vont pas aider à
l'influence américaine. L'OTAN ne constitue plus un bouclier suffisant.
Pour preuve, la réaction polonaise lors de la crise du BMDE : son
appartenance à l'OTAN ne suffisait pas puisqu'elle réclamait le
stationnement de soldat américain via le déploiment de Patriot.
C'est
donc un contexte où la France n'a pas réussi à s'imposer à l'Europe du
Nord, notamment face aux Etats-Unis. En outre, le programme européen
Eurofighter, le second du genre, est en bien grande difficulté et
constitue plus un échec dans la lignée de l'A400M (bien qu'il ait eu
quelques succès export et en aura peut être d'autres). N'oublions pas
l'influence suédoise qui n'est pas mince en Scandinavie et assimilé.
Surtout que, le programme Gripen est aux abois et nécessite
impérieusement une nouvelle commande pour survivre, et surtout un client
pour développer le Gripen NG afin que la Suède garde la compétence de
concepteur d'avion de combat. Dernier facteur, les difficultés du
programme américain JSF qui a eu beu jeu de concerner nombre
d'européens, doit faire face à des retards de calendrier et des
augmentations de coûts qui se découvre année après année. Cette
situation n'a rien à avoir avec les contrats F-16. L'exemple anglais est
frappant : il était prévu que les forces armées britanniques se dotent
de 150, puis 132... Puis 50 F-35B. Mais ce sera finalement une
quarentaine de F-35C !
Le Rafale ne peut qu'être en position d'attente. Et réussir quelques succès dans l'aile ou dans le centre lui donnerait une position extrêmement favorable. Il serait mensonger d'exclure des succès en Europe. La bataille semble bien engager en Suisse où, a priori, un biréacteur lourd n'a pas été jugé trop grand pour le réduit alpin. La bataille anglaise est l'une des moins considérés. Alors que, le rapprochement aéronaval franco-anglais est bien réel. Il a déjà eu pour conséquence (avec la crise financière et économique anglaise) de pousser la Royal Navy a changé partiellement de doctrine. De nouvelles déconvenues financières, technique (F-35) ou politique pourrait pousser le Royaume-Uni à se procurrer le Rafale. C'est une hypothèse que j'avais développé sur Mon Blog Défense.
Je
suis plutôt sceptique pour une obtention d'autres succcès. Les Etats
scandinaves sont plutôts tournés vers les Etats-Unis. Et en absence de
ces derniers, c'est une union de Défense nordique qui refait surface.
Conclusion
C'est
un très intéressant mouvement géopolitique dont il est bien difficile
de rendre compte dans un si court article. Il faudrait presque rédiger
un petit ouvrage avec tout les acteurs concernés pour mieux apprécier
les enjeux. C'est aussi une guerre planétaire qui s'étend sur quatre
continents (Amérique du Sud, Afrique, Europe et Asie). Une guerre où
certaines zones sont en interaction entre elles, mais peut être pas de
la même manière selon les acteurs. Une guerre qui mêle Nord et Sud, pays
industrialisé et émergent.
Certaines
hypothèses feront douter bon nombre d'observateurs, certes. Mais à la
lecture des traités du 2 novembre, bon nombre de préjugés ou de postures
psychologiques ont explosés. Ou, à plus petite échelle, les scénarios
pour le Brésil et l'Inde ont bien évolué d'une année à l'autre, où les
premiers pronostics ce sont parfois révélés totalement faux. Dans le cas
du Rafale, l'évènement "domino" serait la signature d'un premier
contrat à l'aile brésilienne ou au centre. La donne géopolitique serait
entièrement changée dans le monde aéronautique. Et l'affaiblissement de
bon nombre de pays européens et le recentrage américain, avec l'absence
de l'émergence de concurrents venant des pays émergents, seront tout
autant de facteur pour lui donner toutes les chances de réussir une
belle carrière.
Je
réaffirme ici un pari exprimé en commentaire d'un article de Zone
Militaire : 500 commandes export de Rafale. L'enjeu est très grand,
puisque le vainqueur européen de la quatrième génération deviendra le
premier élément structurant des industriels européens pour le futur
avion de combat de cinquième génération. Certains trouvent Dassaut
anachronique et responsable des déboires de son Rafale. Cela me parait
assez confortable pour écarter les lourdes responsabilités politiques de
l'Etat français. Et le programme nEURON montre bien que Dassaut, donc
la France, joue bien ses cartes en Europe.
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