12 février 2013

Action sous-marine dans la bande littorale et TRM


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© Inconnu.

De l’avis de tous, ou presque, l’avenir de l’action navale est majoritairement à une plus grande place des sous-marins dans les flottes. Les vaisseaux noirs possèdent quelques caractéristiques, différentes de celles de la surface. Parmi celles-ci, on peut noter une capacité à recueillir plusieurs types de renseignement au plus près de la source (tant que celle-là est proche de la fameuse bande littorale des 200km où se concentre 80% de la population mondiale). Mais aussi de pouvoir le faire, et d’agir sans élever le niveau de la crise. Le sous-marin est ainsi invisible aux senseurs de la sphère électromagnétique, tant qu’il ne franchit pas le dioptre.
C’est cette invisibilité qui lui confère des capacités de froudroyance très recherchées, à travers les forces spéciales et les missiles de croisière.

Le problème du sous-marin, c’est son relatif isolement vis-à-vis de ce qui se trouve au-dessus dioptre. Les ondes électromagnétiques ne franchissent pas la surface, ce qui protège les vaisseaux noirs mais les isole également. Cependant, il y a de nouvelles technologies qui laissent espérer que le sous-marin pourra de plus en plus receuillir du renseignement lorsqu’il sera à immersion périscopique.

Il y a, donc, au moins deux grands moyens qui permettent au sous-marin de s’affranchir de cet isolement :

Le premier d’entre eux est le radar. Dès la seconde guerre mondiale les premiers radars furent installés sur bien des sous-marins, dont ceux de l’US Navy et ils rendirent bien des sevices pour détruire la flotte de commerce japonaise. Plus largement, il évite au sous-marin de naviguer que par la seule vue de son périscope ou des veilleurs. Mais aussi de voir au-delà de l’horizon. Le radar de veille aérienne se fait rare parmi les submersibles, tandis qu’il est plus courant chez les submersibles qui restent longtemps en surface. C’est ce que proposait DCNS à travers son submersible SMX-25 qui est pourvu d’un radar de veille aérienne. Mais le projet des anciens arsenaux ne dit pas si c’est un radar digne des grandes frégates de défense aérienne ou si l’ambition est moindre.

L’autre grand moyen est un développement des moyens de communication. Il y a forcément de tout à bord d’un sous-marin. Les U-Boat émettaient et recevaient leur traffic par ondes de la gamme HF. Guy de Malbosc et Jean Moulin (" Guerre des codes et guerre navale") nous expliquent comment c’était un enjeu de percer le chiffrement des communications allemandes.

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© Inconnu. SNA de la classe Virginia (US Navy).


Depuis lors, la plus grande évolution est venue des communications spatiales. La Marine rechercha très tôt (dès les années 60) la possibilité  de communiquer avec ses navires de par le monde. L’Espace est donc venu offrir de formidables possibilités en la matière. Les communications spatiales sont mêmes supposées être très sûres puisque bénéficiant de gammes de longeur d’ondes très directives, donc relativement dures à intercepter (là où les ondes HF sont très évasives).

Le radar RBE-2 du Rafale arrive enfin pleinement à mâturité grâce à l’entrée en service de sa version la plus évoluée à antenne active (radar dit AESA). L’on peut apprendre dans le DSI du mois de janvier 2013 que ce radar se compose de x modules : les TRM. Ceux-ci constituent l’antenne proprement dite du radar. Mais par rapport aux antennes à balayage mécanique et/ou électronique des précédentes générations, il serait possible, désormais, avec les TRM de subdiviser l’action de l’antenne en répartissant x TRM par x tâche. Ainsi, une partie de ces modules pourrait effectuer des recherches en mode air-air quand l’autre partie s’occuperait simplement de carthographier le sol.

Plus loin encore dans l’exploitation du potentiel des TRM, il serait envisageable de les utiliser comme moyen de communication. Ces modules pourraient, grâce à un faisceau d’énergie dirigée (lire "Les armes à énergie dirigée : mythe ou réalité ?" de Bernard Fontaine), envoyer des données à des débits comparables aux dernières prouesses des communications spatiales. La chose ne sera pas inintéressante pour remplacer les actuelles liaisons 11 et 16 et permettre à un groupe d’attaque de travailler en réseau (capacité déjà actuelle, mais avec des échanges de données sans commune mesure avec ce qui se fait actuellement).

Le sous-marin, là-dedans, peut rêver à -peut être...- bénéficier des avancées offertes par ces TRM. On peut imaginer qu’il puisse rentrer dans l’appendice d’un mât périscopique. Si l’on observe certains mâts des Virginia et des Astute, il est possible d'apercevoir des mâts optimisés pour réduire autant :
  • le sillage engendré par leur hissage
  • que leur SER (Surface Equivalente Radar).
De par leur volume, il semble aussi abriter un certain nombres d’équipements, certainement pour receuillir du renseignement.

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© Inconnu. Le premier Rafale livré avec son radar AESA (RBE-2 à antenne active).

Les SNA de la classe Suffren (programme Barracuda) peuvent légitimement nous laisser croire qu’ils bénéficieront de ce type de mât car leur conception générale semble tourner pour aussi, mais pas seulement, opérer dans la bande littorale.

Dans cette optique, l’on peut imaginer deux choses :
  • un mât de veille aérienne qui aurait des portées intéressantes grâce à l’emploi d’un certain nombre de TRM. Il semblerait que le volume du cône du Rafale soit plus ou moins similaire à celui de l’appendice d’un mât de Astute.
  • Un mât de communication à base de TRM, mais pas seulement.
Il faut dire que la seconde option laisse entrevoir des possibilités très intéressantes en matière de cyberstratégie. L’ouvrage d’Olivier Kempf («  Introduction à la Cyberstratégie ») nous dit que le degré de coertition de l’action cybernétique est inversement proportionnel à sa discrétion. Cependant, dans le cadre d’un conflit déclaré, un certain nombre de nations (Israël, Etats-Unis notamment) semblent avoir laissé filtrer quelques bruits sur les capacités de leurs aéronefs en matière d’actions cybernétiques. Ils auraient recours à leurs capacités de guerre électronique pour développer des capacités cybernétiques afin de mieux mener leurs missions de suppression des défenses aériennes ennemies. Au vu de ce que faisait les SNA français pendant la guerre en Libye, où ils recueillaient du renseignement au large des côtes, tout porte à croire que des mâts remplis de TRM offriraient quelques possibilités intéressantes.

11 février 2013

2013 : essais et expérimentations d'une "French MEU (SOC)" ?


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© Michel BEZ - Marine Nationale.

Plusieurs choses sont proposées à l'heure actuelles pour structurer les forces armées françaises après la rédaction du nouveau livre blanc. D'un côté, notamment, il y a les tenants de la pause stratégique. De l'autre côté, d'autres sont plus convaincus par la nécessité de continuer à participer aux affaires du monde, et arguent du fait que si la crise malienne éclate ou que le Nord-Kivu appelle à l'aide, c'est que l'on laisse de l'espace à des forces politco-militaires qui déplaisent aux valeurs de la France de A à Z. C'est pourquoi il vaudrait mieux continuer à soutenir une défense en avant et surtout au devant des crises naissantes.

L'avantage de la première option, c'est que cela pourrait être un bel exercice logistique. Mais rien ne dit qu'une pause stratégique en France irait de paire avec un large débat, débridé, où des choses capitales seraient remises en cause. A quoi bon s'arrêter pour discuter si l'on n'ose pas ? La pause aura été une pure perte. Et si on peut parler, alors pourquoi s'arrêter ? Certes, quand les processus s'arrêtent, il y a plus de marges de manœuvre, mais il est aussi possible de s'adapter sans tenter de se retirer du monde.

La seconde option est plus exigeante puisqu'il s'agit de s'adapter, en essayant des idées plus ou moins neuves, plus ou moins originales, sans arrêter la machine. Si nôtre budget militaire ne s'est pas effondré, il faut le considérer comme très contraint. Michel Goya souligne, par ailleurs -dans "Res militaris - De l'emploi des forces armées au XXIe siècle"-, la nécessité de se ménager des marges d'innovations et d'expérimentations pour entretenir la modernité d'une machine guerrière.

Donc, il serait toujours possible d'essayer des choses. Là, jonction va être faite entre deux choses :
  • la première est le tryptique qui est proposé. Il s'appuie sur une déconcentration des forces dans tout l'Archipel et de par le monde grâce aux bases installées à l'étranger. La concentration de nos forces de manœuvre se réaliserait grâce aux troupes embarquées en mer ou projetées par voie aérienne grâce à nos différentes bases.
  • La seconde est une évolution assez profonde de nos forces amphibies qui les verrait gagner en autonomie et de les structurer à la manière de groupes amphibies permanent.
En vérité, ce ne serait que porter à son paroxysme une manière de structurer les forces qui est déjà en œuvre :
  • depuis plusieurs années déjà, la mission Jeanne d'Arc (qui remplace le croiseur porte-hélicotères du même nom) embarque une sorte de SGTIA aéromobile. Ce n'est pas permanent, mais cela devient "régulier", même si la période considérée est assez courte. La force de frappe diplomatique de cet embarquement est important puisque nos forces amphibies ont pu s'entraîner avec diverses armées dans les océans Indien et Atlantique.
  • Ensuite, il y a eu la mission Corymbe qui était dotée du BPC Tonnerre alors que la crise ivoirienne était proche de sa résolution militaire en 2011. Les forces aéromobiles embarquaient dans le navire ont été d'une aide précieuse dans la capitale ivoirienne pour soutenir le renversement du président sortant.

Les conditions financières permettraient de s'essayer à une expérimentation de la seconde idée précitée afin de l'insérer dans le schéma présenté dans le premier point. 

Les Marine Expeditionnary Unit (Special Operation force Capable) de l'US Marines Corps américain est un grand modèle. Ces groupes amphibies américains comprennent des outils pour déplacer 1800 Marines (par groupe) à travers le monde. Mais aussi, ils peuvent faire durer leurs groupes aéromobiles (hommes comme matériels) à la mer pour les projeter à tout moment, comme un groupe aéronaval peut le faire.

Cette expérimentation française pourrait tirer parti des moyens actuels. Le premier de ceux-ci est un cadre opérationnel existant : la mission Jeanne d'Arc. Il s'agirait de la renforcer, le temps d'une mission, pour expérimenter une structuration de nos forces amphibies pouvant déboucher sur deux groupes amphibies permanent à l'avenir. Hors, la mission Jeanne d'Arc ne comprend que de faibles moyens pour faire durer à la mer une force aéroterrestre pendant le temps d'une campagne. Et c'est bien normal puisque ce n'est pas le but de la mission.

Pour palier ce déficit, il est proposé :
  • de constituer ce groupe à travers trois navires : un BPC, le TCD Siroco et une frégate d'accompagnement.
  • Le BPC apporte des moyens de commandement hors du commun avec les autres marines de l'OTAN (hors US Navy), un hôpital embarqué et les installations nécessaires pour embarquer un groupe aéromobile. Le BPC embarquerait des ateliers, autant pour les blindés et les voilures tournantes que pour les navires de la mission Jeanne d'Arc
  • Le TCD emporterait des hommes, leurs blindés (quitte à en décharger le BPC d'une partie) et des soutes pleines de carburant pour servir comme pétrolier-ravitailleur auxiliaire.
  • La frégate d'escorte fourirait la bulle de défense contre toutes menaces à la force et pourrait appuyer un débarquement de vives forces.

La force aéroterrestre embarquée devra, à l'instar des Marines, se comporter comme l'aile amphibie des Armées françaises. S'il n'est pas nécessaire d'embarquer le nombre d'hommes maximun permit par les installations (920 (450 (BPC) + 470 (TCD), il pourrait s'agir de proposer un format original. Depuis quelques temps déjà, les BPC servent de bases terrestres mobiles : par exemple, cela a encore été vu en Somalie où le Mistral servait de base de départ du raid du commando du Service Action (DGSE) quand le Dixmude transportait un SGTIA en direction du Mali.

Il serait alors plus intéressant d'installer à bord de cette mission Jeanne d'Arc alourdit l'ossature d'une alerte Guépard : "Le Guépard est l'alerte prise par une brigade pendant six mois, capable de mobiliser jusqu'à 5 000 hommes. Il est coupé en plusieurs modules, à commencer par le commandement à l'échelle d'un bataillon. Ensuite, le Guépard d'urgence est de deux types : l'extrême urgence, des parachutistes capables d'être projetés directement (aujourd'hui au Mali, nous n'avons pas une force TAP, troupes aéroportées) ; une composante motorisée, des VAB du 2e RIMA dans le cas du Mali, qui tenaient l'alerte 12 heures ; nous avons aussi des alertes à 48 heures, 72 heures... Il existe également le Guépard de décision, quand il s'agit de décider de l'avenir de la bataille, fournir un gros effet de niveau brigade face à une menace conséquente, par exemple un GTIA (groupement tactique interarmes) avec trois compagnies de VBCI, un escadron de chars Leclerc, plus un environnement d'artillerie, de génie et un d'éclairage et d'investigation..."
Ainsi, les BPC et TCD de l'expérimentation embarqueraient le cinquième théorique d'une alerte Guépard. Pour ainsi dire, l'on pourrait même avancer que cette mission Jeanne d'Arc prendrait l'alerte Guépard avec les forces mises en alerte en France. L'articulation des moyens se ferait comme suit :
  • L'alerte Guépard serait partagée entre la réserve en métropole et la réserve en mer.
  • Un Guépard d'urgence qui serait décomposé en deux structures :
    • "L'extrême urgence, des parachutistes capables d'être projetés directement..."
    • La force amphibie pourrait alors projeter rapidement un ou deux SGTIA motorisés, voire mécanisés (pourquoi ne pas inclure un demi-escadron de Leclerc et une ou plusieurs batteries d'artilleries à bord ?).
  • Le Guépard de décision se partagerait lui aussi entre la métropole et la mer. Le partage se ferait d'autant mieux que la force amphibie du Guépard d'urgence pourrait comprendre des éléments du Guépard de décision.
    Le Guépard d'urgence amphibie pourrait permettre de préparer un point de chute au Guépard de décision entier pour trouver une base de départ pour le rassemblement avant la projection finale vers le théâtre.
Que cette expérimentation puisse être un jour menée, ou non, cela souligne néanmoins le besoin crucial d'avions ravitailleurs, d'avions de transport tactiques et stratégiques et d'un contrat d'affrêtement d'avions civils pour projeter quelque chose équivalent à une brigade.
Ainsi, le temps d'une mission Jeanne d'Arc, la France augmenterait sa dissuasion conventionnelle en facilitant la projection du Guépard de décision, ou, tout du moins, d'une partie de ses éléments (comme un demi-escadron de chars Leclerc et des batteries d'artillerie prépositionnées, elles aussi) qui renforcerait le Sea basing français, tel qu'il est actuellement mené. Plus largement, cela validerait, ou non, l'éventuelle plus value apportée par un groupe amphibie à trois unités.

07 février 2013

Colloque "Les sous-marins d'attaque dans l'action navale"


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© Inconnu.

Est le nom du colloque organisé par le Centre d'Etdues Supérieures de la Marine le mardi 18 décembre 2012.

Après les introductions prononcées par le CV Finaz (nouveau commandant du CESM) et par l'IGA1 Cousquer (DGA), le colloque commença véritablement après l'introduction du premier thème - « le besoin opérationnel du sous-marin dans l'action navale »- par l'animateur du jour, monsieur Lamarque, journaliste à France Inter.

« Les sous-marins dans la vision stratégique des espaces maritimes » était la première communication du colloque, prononcée par le VAE (2S) D’Arbonneau. Il ne faudrait pas se limiter au bon mot de l'amiral (« telle est la célèbre formule du maréchal de Mac Mahon : "que d'eau, que d'eau" -et encore maréchal, vous n'avez pas vu toute celle qui est en-dessous ! »). Mais bien comprendre que ce bateau permet d'avoir une mobilité stratégique à l'échelle mondiale, si tant est qu'il est pourvu d'une propulsion nucléaire, et qu'il peut agir sans élever le niveau de la crise. L'un de ses principaux avantages est de pouvoir s'approcher de l'épicentre de la crise pour collecter divers types de renseignement, à la source même, tant que celle là est dans la bande littorale. Et quand il lance ses armes, c'est une action presque forcément foudroyante puisque douée d'une surprise éclatante.

L'intervention suivante, « Évolutions des techniques et tactiques dans l’histoire du sous-marin », était prononcée par le CV (R) Eudeline. L'auteur s'est concentré sur l'apparition du sous-marin sous les mers. Après quelques mots sur les mentions de navires sous-marins par les auteurs de l'Antiquité, le communicant choisissait de faire naître le sous-marin en France. Tant il est vrai que Paris était en avance sur son temps en lançant des engins révolutionnaires pour l'époque : le Plongeur (1863), le Gymnote (Q 1 - 1888 – 1908), le Gustave Zédé (Q 2 - 1893 – 1909), le Morse (Q 3 - 1899 – 1909) et le Narval (Q 4 - 1900 – 1909).
Attribuer une telle paternité française à la création des submersibles et sous-marins est bien téméraire et ne pourrait que faire réagir les Américains (CSS Huntley) ou encore les Espagnols, au moins. Cependant, il est indéniable que la France est une nation pionnière.

« Un sous-marin d’attaque, à quoi cela sert ? », telle était la question qui introduisait le propos du CV Mesnet (CICDE). Ne pouvant déborder sur le programme Barracuda car il était le sujet central du thème suivant, l'auteur s'est alors borné à présenter ce qu'il était possible de faire à l'heure actuelle. Il a été question des missions qui peuvent être menées par un sous-marin d'attaque, et en particulier celles qui peuvent être menées par les sous-marins nucléaires d'attaque que possèdent la France. Ainsi, il a été question de missions comme le blocus naval défensif que le SNA Saphir, l'un des sous-marins qui y ont participés, a pu mener au large du Monténégro pendant la guerre du Kosovo (1999). Cas intéressant qui montre que si l'action navale pure (sans actions vers la terre) ne peut forcer la décision, tout du moins, elle peut fortement l'influencer, en empêchant les monténégrins de rejoindre l'alliance serbe, en réduisant les capacités de manœuvre de l'adversaire (c'est toute la philosophie d'un penseur comme Sir Julian S. Corbett). Les actions menées en Libye (2011) et au quotidien, mais ne bénéficiant d'aucune publicité, ont pu aussi être rappelées (renseignement de toutes sortes, dépose de forces spéciales).

Le point de vue d'une marine étrangère a été celui de l'Angleterre, proposait par l'attaché naval de l'ambassade de Grande-Bretagne à Paris. Le Captain Nicholas Stanley a ainsi pu montrer que Royal Navyet Marine nationale partageaient bon nombre de points communs quant à la place du SNA (le sous-marin d'attaque est aussi nucléaire en Angleterre) dans l'action navale et son utilisation par les deux pays. Plus précisément, l'officier anglais mettait en avant qu'il évait été très important pour Londres de mettre en oeuvre des missiles de croisière depuis ses SNA pour participer à l'entrée en premier sur les théâtres, avec l'US Navy. Raison pour laquelle des Tomahawk furent achetés.

Selon une procédure bien huilée, le second thème - « L'état de l'art, les programmes et la prospective »- fut introduit de la mêne manière que le premier par l'animateur. Sheldon Duplaix (Service Historique de la Défense) à travers « Les sous-marins dans le monde et leur prolifération », ce grand spécialiste des sous-marins et des porte-avions, brossa un tableau statistique très complet sur la diffusion de ce bateau de par le monde. Il montrait en quoi la Guerre froide se faisait ressentir sur la possession de sous-marins à travers les deux Grands. Et comment la fin de cette période amorça une décrue spectaculaire dans le nombre de sous-marins en service sur la planète. Par ses chiffres, il voulait aussi attirer l'attention sur le fait que si les sous-marins de toutes sortes voyaient leur nombre de réduire dans l'Atlantique Nord et dans le Pacifique Nord, il ne cessait d'augmenter dans d'autres zones et de se démocratiser, en tout particulier dans l'Asie du Sud-Est, mais pas seulement (Océan Indien et Atlantique Sud également).

« État de l’art et prospective technique », intervention de l'ICA Dugué (DGA) permettait à la salle de suivre où en était les enjeux technologiques et ce qu'il serait possible de faire demain et après-demaine. Une telle prospective n'était pas inutile alors que les nouveaux SNA de la classe Suffren, sont conçus pour offrir 40 années de service.

Mais le colloque atteignit son apogée quand, après toutes ces communications qui revisitaient l'histoire du sous-marin de ses origines à aujourd'hui, du pourquoi au comment faire en passant par le pourquoi, il fut question du programme Barracuda. « Le programme français : Barracuda » fut alors présenté par trois personnes (c'est dire l'enjeu) : CV Ginisty (EMM, officier programme), ICA Le Yaouanc (directeur du programme (DGA), et M.Dufour (directeur du programme (DCNS). Outre les nouvelles capacités offertes par ces futurs vaisseaux noirs dans l'action vers la terre (« dry dock shelter » accessible par sas pour nageurs de combat et Missile de Croisière Naval (MdCN), il a été question de la philosophie du nouveau SNA. Comme le disait le CV Ginisty, les SNA Rubis ont été conçus pour quelques missions de la Guerre froide, et finalement, ils n'ont servi essentiellement qu'après sa fin. Hors, ils ont pu s'adapter à leurs nouvelles et inédites missions, malgré un un volume très rentabilisé. C'est pourquoi si le tonnage double d'une classe (Rubis) à l'autre (Suffren), ce n'est pas seulement pour faire progresser la discrétion acoustique (bénéficiant des avancées des SNLE-NG), mais essentiellement pour rendre les nouveaux venus plus modulaires. Les grandes fonctions du bord sont regroupés géographiquement avec des volumes supplémentaires afin de faire évoluer les bateaux dans le temps. Ainsi, ils seront prêts à mener les missions de demain, alors que personne ne sait de quoi il en retourne vraiment aujourd'hui.
Cette intertitude de l'avenir fut rappelée par la question d'un auditeur, adressée au CV de la Royal Navy : « commandant, est-ce que l'ordre de lancement peut être donné au SNLE de Sa Majesté en patrouille en toute indépendance ou faut-il l'accord de Washington ? ». L'officier britannique botta en touche, affirmant qu'il n'y avait pas d'officiers américains à bord. Cependant, cela permet d'introduire l'avenir, c'est-à-dire la succession des SNLE français de la classe Le Triomphant et il n'est pas dit qu'une coopération significative soit possible avec Londres. Avenir qui ne doit pas manquer d'occuper le VA De Coriolis, commandant les forces sous-marines et la force océanique stratégique qui conclua le colloque, non sans repartir avec la maquette du Suffren, de quoi patienter jusqu'à la mise à l'eau dudit bateau, en 2016.

03 février 2013

"Guerre des codes et guerre navale" de Guy Malbosc et Jean Moulin


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L’ouvrage reçu de Marines Editions nous offre encore une excellente étude. Celle-ci mériterait même de figurer dans n’importe quelle bibliothèque type d’une personne qui s’intéresse à la stratégie navale, voire à la stratégie tout cours.

Récemment c’était l’ouvrage d’Olivier Kempf - «Introduction à la Cyberstratégie» - qui se chargeait de nous introduire dans une stratégie particulière qui transcende tous les milieux. Plus précisémment, l’auteur nous disait que le cyberespace est né et vit par l’apparition et le développement de la spère électromagnétique.

C’est bien pourquoi l’ouvrage de Guy de Malbosc et de Jean Moulin complète le dispositif puisqu’il va être question de comprendre concrètement les enjeux de cette sphère électromagnétique pour les communications tactiques. En effet, en temps de guerre comme en temps de paix, il faut pouvoir assurer le secret des communications entre les ambassades, pour les services de renseignement et pour les mouvements des Armées et des Flottes afin qu’elles soient toujours en contact avec leur pouvoir politique.
Pour ce faire, il est nécessaire de coder d’une quelconque manière les communications. «Guerre navale et guerre navale» nous offre ainsi une belle introduction sur l’apparition des premiers moyens de codage jusqu’aux enjeux du chiffrement de la seconde guerre mondiale.

Mais l’on entre dans le vif du sujet quand les auteurs abordent les enjeux des codes de la première, mais avant tout de la seconde guerre mondiale.

Le premier théâtre d’action reprend la bataille menée par les Alliés pour déchiffrer les communications allemandes. Ainsi, depuis l’apparition de la machine Enigma en sa version commerciale jusqu’à celle de l’Enigma M4 de la Kriesgmarine, la lutte fut permanente. Combat qi commença en Pologne où les premières recherches pour déchiffrer cee que codait une machine furent entreprises avec un certain succès. Il faut dire que cela remet à l’honneur le travail des services secrets polonais qui appportèrent aux Alliés les premières pierres en la matière, si ce n’est les plus importantes.
On y découvre aussi le rôle important des services français : non, ils ne se sont pas contentés d’être des passeurs entre le travail des SR polonais et les anglais. Oui ils ont eux aussi pu apporter des informations indispensables pour réussir à vaincre Enigma par l’intermédiaire d’un allemand retourné. Guy Malbosc n’hésite pas à dire que pour lui c’est l’espion du cercle car on ne trouve pas mieux que cette source qui transmet des documents stratégiques avec la certitude de leur valeur et de la provenance de leur contenu...

La seconde bataille est la poursuite de la guerre par  l’Angleterre. L’enjeu de la guerre des codes apparaît ici car il y a une lutte permanente entre les flottes, et finalement surtout entre Royal Navy et Kriegsmarine, pour déchiffrer le traffic radio de l’autre. Enjeu essentiel pour les allemands afin de connaître l’ordre de bataille et le déplacement des groupes de combat de la marine anglaise. Enjeu non moins essentiel pour la marine anglaise pour pouvoir dérouter un convois si jamais un U-Boat est dirigé dessus.

La troisième bataille se situe dans le Pacifique, théâtre généralement oublié alors que le capitaine de vaisseau (R) Eudeline rappelait récemment («Les sous-marins d’attaque dans l’action navale») que c’est pourtant le théâtre où une guerre des communications fut réussi : les sous-marins américains coulèrent à eux-seuls 55% de la flotte de commerce japonnaise. L’étendue du Pacifique et le temps nécessaire aux mouvements justifiaient une attention toute particulière aux communications. Mais il y avait ce raté de Pearl Harbor : un message japonais annonçant plus ou moins l’attaque avait été déchiffré mais non exploité.

C’est finalement une des leçons essentielles du livre de Guy Malbosc et de Jean Moulin : il n’y a de richesse que d’hommes.
Le premier enjeu humain de la guerre des codes est ainsi industriel et scientifique : il faut des têtes bien faites pour comprendre ce qu’ils se passe, comment se code les messages adverses et imaginer des parades. La présentation des «bombes» (qui renvoie à la lutte pour obtenir les premiers "calculateurs" et la lutte qui s'amorça ensuite pour disposer de supercalculateurs en grand nombre) montre combien cette guerre a besoin d’imagination et d’inventivité.
Le second enjeu humain renvoie directement aux organisations humaines : une fois qu’il est possible de déchiffrer le traffic de l’adversaire, nécessité est de pouvoir exploiter le renseignement obtenu. Et là, l’on atteint la partie la plus difficile de la lutte puisqu’il faut adapter des schémas administratifs en pleine guerre pour analyser et diffuser des renseignements tous en protégeant les sources alors que l’intertie propre des administrations peut être contre cet objectif.

Enfin, l’on observera de la lutte permanente entre offensive et défensive :
  • attaquer les codes adverses,
  • sécuriser les siens. 
De là s'observe une certaine victoire anglaise puisque le dernier code de la Royal Navy restera inviolé par les allemands.