22 octobre 2016

Une contribution navale à la surveillance de l'espace ?

© Jaime Karremann / Marineschepen.nl, achtergrond: Google Earth. Schets; satelliet is niet op schaal, de vorm van de radarbundel is fictief.
Les capacités françaises de surveillance de l'espace sont en pleine modernisation tant pour le traitement des obsolescences (radar GRAVE) que pour la préparation de l'avenir (BEM Monge). La Marine nationale apporte sa contribution grâce à une certaine polyvalence des outils employés pour assurer la crédibilité de la dissuasion. Les travaux menés en Hollande ouvrent des perspectives nouvelles quant à l'intérêt des navires aptes aux missions de défense aérienne. 

Le radar S1850 ou SMART-L des frégates de défense aérienne de la classe De Zeven Provincien de la Koninklijke Marine bénéficie d'un programme de refonte. Le logiciel est mis à jour et l'ensemble du système d'arme devient entièrement numérique. En outre, l'antenne sera à terme constituée par des modules des modules d'émission/réception (TRX-L) la transformant en senseur AESA. Il devient le SMART-L EWC ou encore SMART-L ELR. Le premier radar modernisé doit rejoindre sa frégate en 2017.


La demande initiale de la marine de Ruyter est l'acquisition d'une capacité d'alerte étendue contre les missiles balistiques depuis les frégates LCF. Le fait que les frégates puissent "voir" jusqu'à 2000 km d'altitude ouvre un champ de potentialités englobant, notamment, le suivi des MRBM, IRBM mais aussi des ICBM dans les phases les plus hautes des phases de vol propulsée et balistique

Ces évolutions tendent à accréditer l'idée qu'une division de quatre frégates de défense aérienne est amplement suffisante pour couvrir un territoire grand comme la France contre un ensemble de menaces balistiques, même si la question des missiles intercontinentaux demeure très particulière, à tel point qu'elle est traitée par une couche supplémentaire dans la défense ABM. À moins de croire les accusations russes insinuant que le missile SM-3, par exemple, est capable d'intercepter des ICBM et MSBS/SLBM durant les phases propulsées. 

Une mise en réseau de ces frégates dans le cadre de l'OTAN (ALTBMD), comme cela est discuté et envisagé dans quelques débats de l'alliance, reposerait sur un ensemble d'environ 30 navires (22 SMART-L sont en service dans les marines européennes). À cette aune, il serait abusif d'affirmer qu'elles constituent un important volet d'une DAMB de territoire eu égard à toutes les critiques exprimées quant aux défis opérationnels et technologiques. Cependant, la couverture territoriale serait bien une réalité et si toutes les menaces balistiques ne seraient pas couverte, une grande partie d'entre elles pourrait être traitée... quand des intercepteurs adaptés existent.

Conséquence de cette avancée, et indépendamment des thématiques de la lutte contre les missiles balistiques, ces frégates seront en mesure de  surveiller l'ensemble des objets spatiaux d'une taille minimale d'environ 4 mètres. Cela ne comprend pas qu'une partie des 12 000 débris spatiaux supérieurs à 10 cm et ne comprendrait pas plus le suivi des têtes nucléaires une fois celles-ci séparées du deuxième ou troisième étage du missile. 

Cette résolution bien moins fine que sur un radar comme le GRAVE n'est pas rédhibitoire. Bien au contraire car le saut apparaît comme significatif afin de déclarer une première capacité de surveillance de l'espace focalisée sur satellites évoluant en orbite basse (jusqu'à 2000 km). La liste des nations douées d'une capacité de surveillance de l'espace, même sommaire, tendra à s'accroître inévitablement, presque par accident si la seule dynamique retenue demeure la question balistique dans les débats de l'OTAN avec ou sans l'avatar de la menace iranienne présentée il n'y a pas si longtemps comme la plus prégnante contre l'Europe, justifiant le BMDE. 

Pour en venir au cas français, les capacités de surveillance spatiale repose principalement sur le radar GRAVES. Il permettait à la France de devenir la troisième nation à acquérir une telle capacité après les États-Unis et la Russie. Il permet de suivre des objets jusqu'à 1000 km d'altitude avec une résolution permettant de suivre des objets d'une taille minimale de 10 cm. Le BEM Monge est le pendant naval de ces capacités. Conçu comme outil au service de la crédibilité de la dissuasion pour les essais de missiles balistiques et leur suivi dans l'espace et l'atmosphère terrestre, ses radars et équipements optroniques sont complémentaires du radar GRAVES. Ce dernier repère un ou des objets que le navire peut investiguer. 

Dans la logique des développements hollandais, la modernisation des capacités de défense aérienne de la Marine nationale contribueraient autant au poids de la France dans les débats de l'OTAN sur la DAMB/ABM que dans les capacités nationales de surveillance de l'espace, et donc son rôle diplomatique sur la scène mondiale. 11 navires peuvent bénéficier de telles améliorations. En premier lieu, il s'agit des frégates du programme Horizon à savoir les Forbin et Chevalier Paul. Ce premier rideau d'expérimentation serait là pour essayer et valider la capacité en plus d'éventuels échanges avec les hollandais. Ensuite, selon l'intérêt accordé à une capacité dont l'utilité ira sans cesse croissante pour l'action politico-militaire de la France, d'autres navires pourraient être intégrés à une contribution navale à la surveillance de l'espace : le porte-avions Charles de Gaulle, les frégates des classes Aquitaine et Alsace. Les FTI sont exclues en raison de la taille trop réduire des panneaux de leur Sea Fire 500. 

Aussi bien les capacités de DAMB (de théâtre mais également de territoire dans le cadre des débats à l'OTAN) que de surveillance de l'espace semblent vouées à être l'un des axes fort de la Défense nationale à l'horizon des années 2030. Une refonte est vivement souhaitable des frégates Horizon et FREMM afin d'adapter leurs capacités aériennes. Reste le projet de construction de deux frégates dédiées à la lutte anti-missile balistique en plus des missions plus traditionnelles de défense aérienne. Le Sénat évalué leur coût 1500 millions d'euros. Elles permettraient d'allonger le nombre de frégates de premier rang (dans la droite lignée des FREMM de DA ?), bien trop faible sans une composante de frégates de deuxième rang.

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