13 mars 2019

Indian Navy : Code SSN

© Inconnu. L'INS Chakra arborant les couleurs de l'Indian Navy (date et lieu inconnus).
La construction de la flotte sous-marine indienne par introduction de bateau à propulsion navale nucléaire est soutenue par la location quasi continue de Sous-marins Nucléaires d'Attaque (SNA ou SSN (Sub Surface Nuclear) à l'Union des Républiques Socialistes Soviétiques (URSS) puis à la Russie. Rien que pour les besoins de formation, les sommes consacrées témoignent de la montée en puissance de l'Inde en tant que puissance sous-marine. L'annonce de la signature d'un accord inter-gouvernemental en mars 2019 entre Moscou et New Delhi témoigne des moyens consacrés par l'Inde à l'obtention et l'entretien d'instruments de souveraineté pour soutenir son rang sur la scène internationale.

L'Inde devenait la sixième nation membre du club très fermé des marines mettant en œuvre des Sous-marins Nucléaires d'Attaque (SNA ou SSN (Sub Surface Nuclear) dès 1988. Et c'est en 2016 que le premier Sous-marin Nucléaire Lanceur d'Engins (SNLE) de facture indienne est admis au service actif, l'Inde devenant une nouvelle fois la sixième nation en la matière. En novembre 2018, l'INS Arihant achevée sa première patrouille opérationnelle. La perspective d'une permanence à la mer de la dissuasion océanique indienne est reportée à l'après-2020 faute d'avoir suffisamment de bateaux.

Sous la mer, New Delhi détient les deux instruments de souveraineté que possèdent également les cinq membres du conseil de sécurité des Nations unies. Formation onusienne que l'Inde aspire à rejoindre depuis, au moins, l'année 2004 et la formation du G4 (Allemagne, Brésil, Inde et Japon).

Sans tenter de brosser l'historique des aspirations indiennes au recours à l'atome pour la propulsion navale de ses sous-marins, il est remarquable que cette volonté est ancienne (année 1960) et toujours ancrée dans les préoccupations stratégiques indiennes. Pour preuve, le programme de SNLE se poursuit après l'INS Arihant (S-2) et INS Arighat (S3) par deux unités S-4 en construction alors que la cinquième dénommée logiquement S-5 est en cours de conception et est celle qui se rapprochera le plus du tonnage et du nombre de silos des réalisations contemporaines des membres du conseil de sécurité des Nations unies.


Du côté des SNA, un programme pour la conception et la construction de six unités est sur les rails. La Russie se positionne d'ores et déjà en tant que partenaire privilégiée tandis que la France exécute par l'entremise de Naval group le seul contrat de construction en Inde de six sous-marins Scorpène à propulsion classique permettant le renouvellement des bateaux noirs indiens. Et Paris peut faire valoir autant son partenariat stratégique avec l'Inde que celui avec le Brésil, également acquéreur de quatre Scorpène plus la coque d'une unité dont la propulsion nucléaire est à la seule charge du Brésil.

C'est dans cette perspective d'une sous-marinade constituée de bateau à propulsion nucléaire navale servant le rang de l'Inde sur la scène internationale et de ses intérêts de sécurité qu'il s'agit de replacer les locations de SNA à l'Union des Républiques Socialistes Soviétiques (URSS) puis à la Russie. La première location intervient à l'extrême fin des années 1980. Moscou accorde à l'Inde la possibilité de louer pour une période d'environ trois années (1988 - 1991) le K-43, tête de série mais modernisé. L'URSS proposait un SNA alors dépassé par ses propres réalisations puisque la série des Akula était sur les lignes de production à ce moment. New Delhi ambitionnait la mise sur cale d'un premier SNLE au cours années 1990. L'INS Chakra "I" devant surtout servir à l'appropriation des compétences pour la mise en œuvre de la propulsion navale nucléaire. L'essai est d'une durée relativement courte pour des raisons non-déterminées pour l'auteur de ces lignes.

Une nouvelle location d'un SNA désormais de nationalité russe est contractualisée dans les années 2000 pour aboutir avec la mise à disposition de l'Indian Navy du K-152 Nerpa. Le saut technologique est important pour l'Inde par rapport au précédent SNA loué : un Improved Akula I contre un Charlie II. Mais Moscou propose, certes, une unité récemment achevée presque au standard le plus moderne pour une unité de ce type. Mais la Russie devait alors pouvoir lancer à bonne cadence les Type 885 Iassen et Type 885M et modernisés ses propres Akula afin qu'ils deviennent des Akula III ou projet 971M.

La durée de location est bien plus longue que la précédente : dix années (2012 - 2022). Le programme de SNLE Indien est à soutenir et exigera régulièrement des équipages pour chacune des quatre premières unités partant aux essais sur la période (2014 - ~ 2024).


Identification russe 
Projet 670 Skat 
Projet 971I 
Identification OTAN 
Charlie II 
Improved Akula I 
Bateau 
K-43 
K-152 Nerpa
Construction 
1964 1966 
1993 2008 
Essais 
1966 1967 
2008 2009 
Service URSS/Russie 
1967 1988 
2009 2012 (formation sous-mariniers indiens) 
Service Inde 
INS Chakra 'I" 1988 - 1991 
INS Chakra 'II" 2011 - 2022 


Il est aussi remarquable qu'il a été régulièrement question depuis l'année 2012 - comme en témoigne la déclaration d'intentions du ministre de la défense indien A. K. Antony - de la location d'un "second" SNA par l'Inde à la Russie : non pas une deuxième unité pour succéder à la première au terme de son service mais bien une deuxième unité afin de compléter la première. Le K-337 Kuguar qui aurait été considéré dans cette perspective mais ce projet 971U ou Akula II était d'ores et déjà démantelé quand l'Inde étudia la location d'un deuxième SNA. Ce qui n'empêcha pas cette option politico-militaire d'être étudiée, tout du moins citée jusqu'en 2018.

C'est désormais la question du successeur de l'actuel INS Chakra "II" qui occupe une partie des échanges diplomatiques entre Moscou et New Delhi. Les deux capitales signaient au début du mois de mars 2019 un accord inter-gouvernemental pour la location d'un autre Akula pour la somme de 3 milliards de dollars

Signe que l'occupation des espaces sous-marins est bel et bien une priorité stratégique indienne bénéficiant du soutien politique suffisant pour assurer la continuité des efforts engagés. Il est surprenant, par contre, que la location du futur Akula ne débute qu'en 2025 et non pas en 2022. Ce décalage programmé semble assumé mais a priori peu ou pas expliqué.

La somme avancée publiquement peut apparaître comme importante. Il est probable qu'elle soit constituée d'une part d'environ 0,9 à 1 milliards de dollars qui ne concerne que la location du bâtiment, à l'instar de la somme versée pour celle du K-152 Nerpa. Un deuxième tiers de l'enveloppe pourrait concerner l'achèvement d'un Akula ou, plus probablement, sa refonte pour modernisation (sredniy remont). Le dernier tiers pourrait concerner une part de formation et aussi d'adaptation du bateau à des équipements et systèmes de conception indienne.


Identification russe 
Projet 971 
Projet 971 

Projet 971U 
Projet 971 
Identification OTAN 
Akula I 
Akula I 
Akula II 
Akula I 

Bateau 
K-295 Samara 
K-322 Kashalot 
K-337 Kuguar 
K-391 Bratsk 
Construction 
1993 1994 
1986 1987 
1992 1998 ? 
1988 1989 
Essais 
1994 1995 
1987 1989 
Démantelé (1998 - 2003 ?) pour servir à la construction du K-535 Yury Dolgorukiy (SNLE) 
1989 1990 
Service URSS/Russie 
1995 2014 
1989 1998 
1990 2007 
Sredniy Remont 
2014 - 2022 ? 
2007 2018 ? 
2007 2022 ? 
Retour en service 
2022 2032 Projet 971M - Akula III 
2018 – 2028 ? 
2022 – 2032 Projet 971M Akula III 
Service Inde 
INS Chakra 'III" (K-?) 


Quatre bateaux furent tour à tour considérés comme pouvant être loués à l'Inde. Le premier d'entre eux a été écarté en préambule puisque réputé démantelé depuis l'année 2005. Reste alors trois bateaux. Le K-322 Kashalot est cité avec le plus d'insistance : Moscou proposerait alors un Akula I qui ne serait pas modernisé au standard projet 971I ou Improved Akula. Serait-ce en raison d'une adaptation du bateau directement aux équipements et systèmes indiens ? Sa sortie de sredniy remont laisserait largement le temps pour des travaux supplémentaires au chantier sans compromettre le calendrier des essais et de formation d'un équipage indien si besoin était. Mais la marge de sécurité (2018 - 2025) semble bien longue et n'empêche donc pas de considérer deux autres bateaux visés dont les sorties de sredniy remont en 2022 expliqueraient assez bien la date de 2025. Mais ce serait supposé que la rigidité déterminante en la matière soit la disponibilité des bateaux proposés par les Russes et acceptés par les Indiens.

Aussi, il ne semble pas avoir été dévoilé quel sera l'avenir du K-152 Nerpa qui peut, d'une certaine manière, être considérée comme un bateau "neuf" puisque ayant été achevé en 2008. Il serait logique que Moscou lui fasse bénéficier d'un premier sredniy remont afin de lui conférer dix années de service de plus, de nouveau sous pavillon russe. Parmi les candidats pour une nouvelle location, les K-295 et K-391 pourraient espérer après un service dans l'Indian Navy un deuxième et dernier sredniy remont avant le retrait du service tandis que faire naviguer le K-322 sous couleurs indiennes reviendrait à le voir y achever sa carrière opérationnelle.

Enfin, il sera intéressant de se pencher sur la diplomatie sous-marine indienne afin d'apprécier quel rôle est dévolu à ces différents SNA dont le caractère unique devrait les verser à des missions peu routinières, hormis la formation. L'INS Chakra "II" a pu être cité comme un instrument de sea denial. Mais sert-il uniquement à la formation et à chasser des sous-marins chinois ? Pakistanias ?

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire