07 octobre 2019

Son'Art : "Bermuda Tentacles" de Nick Lyon


Bermuda Tentacles (2014) de Nick Lyon, film de série B, possédait les matériaux nécessaires à lui assurer, au moins, le statut de film remarquable à défaut de jamais prétendre à être un chef d'œuvre. Une mauvaise mobilisation des ressources font regretter bien des choix du réalisateur. Mais il est partiellement pardonné pour son choix, bien que discutable, d'avoir transformé le DDG-51 USS Arleigh Burke en croiseur de bataille.

Le synopsis est banal pour un tel film : le président des États-Unis d'Amérique voyage à bord d'Air Force One. Survolant le célèbre triangle des Bermudes, par un malheureux hasard, la violence d'une tempête condamne selon l'équipage l'avion présidentiel. Il s'empresse donc d'évacuer le président par une capsule de survie. Une task force de l'US Navy est en route pour retrouver le POTUS quand tout à coup...

Le film est rangé ou tout du moins s'est présenté comme un film d'horreur et de science fiction. Prétentions douteuses car il aurait gagné plutôt à se réclamer son rattachement au surnaturel. La science fiction est peu, voire pas du tout patente dans cette production, sauf à considérer que l'aperçu d'un vaisseau extra-terrestre suffit à caler le sujet. C'est loin de ce qu'avait brillamment réussi à faire Abyss (1989) de James Cameron.  

La distribution des rôles parvient à retenir Linda Hamilton dans le rôle de l'Amiral Hansen. Mais cette dernière semble dépasser dans la fiction par les évènements et le quatrième mur est brisé quand l'actrice véhicule, surtout, le sentiment que son rôle est aussi épais que du papier à cigarette. Recruter Sarah Connor pour proposer l'engoncer dans le rôle d'un amiral dépasser par les évènements, pas énergiques et d'un conventionnel : il fallait le faire et cela a été fait. Difficile de s'attacher aux autres rôles qui n'ont pour existence que les clichés et caricatures qu'ils véhiculent. Par exemple, le héros est une tête brûlée indisciplinée. And, so what ?

Les décisions du réalisateur sont peu compréhensibles. L'accent est mis sur des scènes sans grand intérêt quand tous les ressorts du fantastique sont à peine esquissés.

Par exemple, il est douteux qu'une partie probablement conséquente du budget servent à filmer l'impressionnante task force constituée d'un porte-avions et d'un cuirassé affrontant le monstre aux tentacules. Des images d'archives des mêmes bâtiments auraient suffi et un central opérations sous la pression de dégâts inexpliqués, voire d'une ou deux pertes aux causes introuvables auraient probablement été plus efficace. Du fantastique.

Même les scènes d'action révèlent surtout les faiblesses de la réalisation : quelle drôle série de décisions tactiques que d'affronter un monstre marins avec une escadre, cernée par des tentacules, à l'arrêt. Pas loin du "terminé barres et machines". Et ces bâtiments parvenant à fournir autant d'hommes sur les ponts tirant au fusil d'assaut sur des tentacules peu émues par les bordées de 406 mm (16 inch) du BB-61 USS Iowa. Aucune peur, aucun risque ou presque que l'un des personnages ne décèdent.

C'est d'une légèreté coupable après l'oubliable Battleship (2012) de Peter Berg qui avait la décence de faire du cuirassé un personnage à part entière de l'intrigue capable d'être armé par des hommes, de donner, de recevoir des coups. Le BB-63 USS Missouri peut en remonter au BB-61 USS Iowa sur le plan cinématographique.

Par contre, la cachette fantasmagorique du monstre avec ces épaves d'horizons divers, d'époques variées n'est pas mis en scène. A peine montrée. Les mythes du triangle des Bermudes et du kraken sont convoqués sans être exploités. Aucune narration particulière ni vision transmise par le réalisateur de ce qu'ils apportent à l'histoire.

C'est pourquoi de tout ce fatras de bonnes intentions au résultat insipide il ne reste que ce "monstre" : le DDG-51 USS Arleigh Burke refondu par les arts spéciaux en croiseur de bataille puisque non-cuirassé.
Le destroyer du type Flight I est débarrassé en sa plage avant de la pièce de 127 mm (5-inch/54) et de son système de lancement vertical jusqu'au tiers arrière du bâtiment. Plus de plage hélicoptère non plus. Deux massives tourelles de 406 mm (16 inch) trônent fièrement en chasse et en retraite. Réduction homothétique de celles de l'Iowa. Même s'il est très douteux que le destroyer de 9000 puisse porter ces deux tourelles avec leur puit, décuirassés ou non, calibre réduit ou non.

L'intégration au château de l'USS Arleigh Burke de quelques tourelles doubles de 127 mm est plutôt une bonne décision puisqu'il a été débarrassé de tous ses silos. C'est raccord avec l'âge canonique des tourelles triples.

Le réalisateur était peut être pré-destiné à demander cette réalisation par son patronyme qui évoque autant la capitale des Gaules qu'une classe avortée de cuirassés français. Chose raccord avec l'entièreté du film : cette curieuse réalisation ne sert pas le scénario. Il y avait déjà un cuirassé.

Le seul intérêt, certes léger, est certainement de matérialiser qu'une batterie principale constituée d'une ou deux tourelles triples, quelque soit la technologie mobilisée (à poudre, électrique ou électromagnétique), exigera son linéaire de coque, et partant de là sa part au tonnage, s'il fallait poursuivre sur des bâtiments de guerre polyvalent. La loi immuable de l'augmentation du tonnage... 

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