14 octobre 2019

Son'Art : "Le géant de fer" de Brad Bird

© Warner Bross - Le géant de fer.
Brad Bird présente avec Le géant de fer l'un des films d'animation les plus réussis et des plus marquants de toute l'histoire de ce genre au cinéma. L'accueil critique fut logiquement excellent, à la limite d'être dithyrambique mais, paradoxalement, le film ne rencontra pas son public et les recettes furent très modestes. Pourtant, "cerise sur le gâteau" : le film présente le SSN-571 USS Nautilus (30 septembre 1954 - 3 mars 1980) en tant que Sous-marin Nucléaire Lanceur d'Engins (SNLE) avec un pont missile similaire à celui du Gymnote (17 octobre 1966 - 1986).

Le géant de fer est l'adaptation d'une nouvelle du poète américain Ted Hughes (17 août 1930 - 28 octobre 1998) : la première édition britannique est intitulée The Iron Man (1968) mais la première publication aux États-Unis retient comme titre The Iron Man: A Children's Story in Five Nights qui s'imposera afin d'éviter toute confusion avec le personnage de Marvel. Le poète écrivait cette courte histoire afin d'aider ses enfants à faire le deuil de leur mère qui s'était donnée la mort.

"J’ai été attiré par cette histoire. Peut-être parce que j’essayais moi-même de recoller les morceaux après la mort de ma sœur ? Je me suis demandé : ‘et si une arme qui avait été créée pour tuer refusait de le faire ? Et si une arme avait une âme et ne voulait pas être une arme ?" C'est ainsi que Brad Bird présentait le projet à la Warner selon son propre témoignage exprimé dans le documentaire réalisé par (Anthony Giacchino (The Giant's dream, 2016) joint à l'édition DVD du film. Cruel lien entre l'auteur de l'œuvre et l'auteur de l'adaptation : Ted Hugues a été accusé d'être à l'origine des maux ayant permis le passage à l'acte de sa femme. Sa maîtresse s'est également donnée la mort. Ce qui n'empêchera pas celui-ci d'être le poète officiel de la Reine (1984 - 1998). Brad Bird a perdu sa sœur, abattu par son mari.

L'adaptation de Brad Bird s'éloigne du récit de la nouvell de Ted Hugues afin de la condenser au sein d'une même unité de lieu : Rockwell, petite bourgade agricole de l'Etat fédéré du Maine. L'histoire est donc celle d'un enfant vivant avec sa mère et dont le père n'est plus qui découvre un jour un robot géant d'une trentaine de mères empêtré dans les câbles du transformateur local pour les lignes à haute tension. Le contexte international est aussi à haute tension puisque ce robot s'est écrasé au large de la bourgade avant d'être retrouvé par le jeune héros, quelques temps après que Spoutnik (4 octobre 1957) soit en orbite et en pleine crise du missile gap aux États-Unis : le conflit Est-Ouest (1947 - 1991) dans toute sa splendeur.

La nouvelle de Ted Hugues relève plus d'une réécriture du mythe de Georges de Lydda, canonisé en tant que Saint Georges. Le géant de fer peut être assimilé au chevalier. Le poète britannique dépeint l'arrivée de ce robot géant au sein d'une communauté agricole où il dévore tout le matériel faisant le sel de la mécanisation. Capturé, il est enterré. Mais se libère et est protégé par le jeune héros. Il finit par être accepté dans la communauté en promettant de ne plus recommencer ses méfaits. L'appel de son destin de héros est inévitable quand apparaît dans le ciel le "Space-Bat-Angel-Dragon", suffisamment grand pour couvrir l'Australie de son ombre. Saint Georges réinventé ?

Brad Bird projette donc l'œuvre dans triple unités de temps, de lieu et d'action entre la découverte du robot géant et la réaction des forces armées américaines au danger représenté. Le robot se révèle être une arme d'origine extra-terrestre et qui, au contact du jeune héros, se révèle douer de sensibilité. D'où le questionnement central et initialement présenté à la Warner. Par ailleurs, dans la perspective offerte par l'adaptation mise en scènes par le réalisateur américain, il est plus question de La guerre des mondes de H. G. Wells que du mythe de Saint Georges.

Le bijou d'animation qu'est ce film mérite, exige d'être vu : à bon entendeur... 



SSN-571 USS Nautilus 
SSBN-562 
SSBN-598 USS Georges Washington 
Service 
30 septembre 1954 
- 
3 mars 1980 

Octobre 1957 
30 décembre 1959 
- 
24 janvier 1985 
Caractéristiques nautiques  
Longueur 
98,75 
127,82 
116,30 
Largeur 
8,47 
8,47 
10 
Tirant d’eau 
6,70 
6,70 
8,80 
Tonnage lège 
3533 
4563 ? 
5400 
Tonnage pleine charge 
4092 
5296 ? 
6888 
Vitesse (nœuds) 
23 
20 ? 
20 
Propulsion (CV) 
13 400 
13 400 + ? 
30 000 
Réacteur 
Submarine Thermal Reactor 
STR ? 
Submarine 5th generation core Westinghouse 
Autonomie (mn) 
 
 
 
Equipage 
105 
120 ? 
120 
Caractéristiques opérationnelles 
Tubes Lance-Torpilles 
6 x 530 
6 x 530 
6 x 530  
Tubes Lance-Missiles 
16 (Polaris A1/A3) 
12 (Polaris A1/A3) 
16 (Polaris A1/A3) 


Il n'est pas utile de préciser pourquoi le SSN-571 USS Nautilus (30 septembre 1954 - 3 mars 1980) est dépeint ici en SNLE. Le choix est étonnant et peut-être même très savant de la part de l'équipe scénaristique puisque le premier sous-marin à propulsion atomique de l'histoire était bel et bien un sous-marin d'attaque. La volonté de le transformer en SNLE plutôt que de présenter SSBN-598 USS Georges Washington (30 décembre 1959 - 24 janvier 1985) tient peut être à offrir la plus belle référence à Vingt mille lieues sous les mers (1869) de Jules Verne.

Le pont missile de ce SSBN-562 USS Nautilus n'est pas sans rappeler celui du sous-marin français Gymnote (17 octobre 1966 - 1986). Cette forme de pont à l'arrière du massif n'est pas courante peut être même unique. Le Q244 était le premier programme de sous-marin tricolore à propulsion atomique. Les ingénieurs français s'inspirèrent très largement du devancier américain. Sauf pour la propulsion qui signa l'échec du Q244. Le Gymnote fut construit à partir de ses tronçons afin d'obtenir un sous-marin expérimental pour les essais des premiers missiles Mer Sol Balistiques Stratégiques (MSBS) français. A se demander si par un curieux retour le pont du Gymnote n'inspire pas dans le film d'animation la transformation de l'USS Nautilus en SNLE avec, certes, une coque hydrodynamique aux lignes bien plus soignées, le Gymnote ayant été conçu à l'économie.


3 commentaires:

  1. Je regarde énormément d'animés malgré mes 48 ans, mais je doit avouer être passé à coté de celui ci.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Au plaisir si cela peut faire plaisir à un amateur de ce genre cinématographique ! Je suis surpris que vous ne le connaissiez pas déjà mais ce n'est peut être que la conséquence de son manque de succès dans les salles. Il a bénéficié d'une nouvelle sortie en salle lors de la dernière fête du cinéma cette année.

      Supprimer
  2. Jamais entendu parler de ce truc la.

    RépondreSupprimer