10 mars 2011

Diplomatie du porte-avions : absence, redondance et logistique



© Inconnu.
De manière surprenante, la Russie bien que pouvant s'appuyer sur deux groupes navals centrés, respectivement, sur les Kuznetsov et Pierre le Grand, voire les deux réunis, est absente physiquement de la partie navale de la crise. Tout comme la France l'est en raison de l'indisponibilité du Charles de Gaulle. Les États-Unis déplaçaient rapidement une Expeditionary Strike Force (ESF) composée d'un Carrier Strike Group (CSG) centré sur l'USS Entreprise ainsi que d'une Expeditionary Strike Group (ESG) centrée quant à elle sur le LHD USS Kearsarge.

La place de ces capital ship dans la gestion de crise en Afrique du Nord voit le symbole du seapower matérialisée par l'intervention des porte-avions français et américain. Les évolutions de ces navires produisent des effets dans la sphère médiatique par l'analogie avec le cuirassé et les bombardements côtiers auquel il était associé dans le prolongement des navires de lignes de la marine à voiles.

Entre parenthèses, les "îles porte-avions" (Sicile, Malte, Crête) démontrent leur manque de souplesse autant pour l'entrée en premier sur un théâtre - le cas de la Libye en l'espèce - que la poursuite de groupes navals comme au temps de la Deuxième Guerre mondiale. Le porte-avions permet de rapprocher le dispositif aérien de la cible visé avec des effets immédiats, voire instantanés dans la sphère médiatique.
La France revient aux affaires dans l'affaire libyenne avec une position diplomatique relativement équilibrée à l'entrée de la crise consécutive aux Printemps arabes. Paris dénonce le régime libyen tout en se ménageant des limites dans la critique. La démonstration de force n'est pas allée jusqu'à l'imitation de la diplomatie navale américaine avec le déplacement d'une ESF. Si cela avait été le cas alors et le Groupe Aéronaval (GAn) constitué autour du porte-avions Charles de Gaulle et le Groupe Amphibie (GAp) centré quant lui autour d'un, voire deux BPC avec l'escorte appropriée soit entre deux et quatre frégates.

La servitude logistique est relativement importante dans les choix effectués. Le porte-avions pouvait difficilement reprendre la mer "rapidement" car les chasseurs avaient déjà regagnés la Bretagne tandis que le flux logistique à destination de la base aéronavale de soutien était déjà bien approvisionné. L'exercice Agapanthe (quatre mois) épuisait une part importante du potentiel opérationnel du GAn. Cela remet sur le devant de la scène autant de la pertinence à rapprocher la base de soutien du groupe aérien embarqué du département du Var où se situe la base navale de Toulon, port base des porte-avions depuis 1974. Tout cela replace dans le débat public l'opportunité d'acquérir un deuxième porte-avions mais aussi des limites parfois atteintes dans la définition française de la permanence aéronavale avec un seul groupe aérien embarqué.

Pourtant, et à ce stade de ce nouveau chapitre initié dans la gestion de crise, le porte-avions est resté au port. Cela n'empêchait nullement un soutien politique et matériel aux opposants libyens qui se sont distingués autant sur le terrain que dans la sphère médiatique. L'accumulation des secours français aux insurgés peut avaliser le message suivant : le régime du colonel est lâché.

Notre diplomatie appuyé sur l'outil militaire nous permet d'influencer voire de décider de la temporalité de la crise autant que cela est possible. S'il fallait accroître l'intensité de l'intervention française, par exemple à destination des forces libyennes et des structures de commandement et de l'État et de l'institution militaire du colonel, alors il s'agirait de mobiliser autant le GAn que le GAp. Sans oublier que la liaison avec l'Armée de l'Air est indispensable afin de prétendre à une persistance aérienne suffisante dans les cieux considérés. 
 

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