L'Australie a passé plusieurs contrats pour acquérir le P-8 Poseidon (un Atlantique 2 de 85 tonnes contre 46 pour l'original) et le drone MQ-4C Triton (la version maritime du Global Hawk).
L'investissement est très lourd, se compte en plusieurs milliards de
dollars. De plus, c'est le signe d'une ambition très haute dans la
défense des approches maritimes.
Ambitions et concrétisations qui, au passage, redonnent un peu de valeur aux bruits de coursives qui affirment que si le devis pour le programme de 12 nouveaux sous-marins classiques australiens est si haut (18 milliards d'euros, soit plus de deux fois le programme Barracuda) c'est que ce serait pour justifier la location de SNA de classe Virginia.
Ce qui confirme l'intérêt pour cette structuration de la patrouille maritime est l'annonce que Londres allait
entraîner des hommes sur les deux plateformes (P-8 et MQ-4C). Le P-8 aurait même la préférence de la Royal Air Force. A l'approche de la prochaine SDR (Strategy Defense Review),
2015, c'est une marque d'intérêt qui ne passe pas inaperçu.
Sachant que Londres a fermé la porte à un partage des capacités
françaises en la matière, les Atlantique 2, ce qui n'est pas
encourageant pour les ambitions du livre blanc de 2013 (partage des
capacités de protection des approches nationales et européennes).
Le couple P-8 Poseidon/MQ-4C Triton n'est pas
anodin. Et il est intéressant à étudier puisque la France a refusé
d'évoluer dans la voie des HALE (Haute Altitude Longue
Endurance, c'est que le Triton) depuis le livre blanc de 2008.
A priori, le MQ-4C se résumerait à une plateforme SURMAR
(SURveillance MARitime) de longue endurance. C'est-à-dire qu'à l'instar
des appareils du genre, il se contenterait d'embarquer des
senseurs optiques (une boule optronique) et électroniques (AIS et
radar SAR, radar ISAR et ESM).
La différence majeure est qu'il peut tenir l'air pendant 31 heures,
soit le double ce que peut faire un Atlantique 2. Joseph Henrotin disait
à propos des drones MALE (Moyenne Altitude Longue
Endurance) que leur extraordinaire capacité à tenir l'air, milieu où
l'occupation n'était pas possible plus longtemps que quelques heures,
permet d'évoquer la notion de "persistance aérienne".
Les recherches américaines dans cette voie, notamment dans les
dirigeables et les VHALE explorent des capacités beaucoup plus
importantes en la matière.
De ces quelques considérations techniques, il apparaît donc que la
mission du MQ-4C est, dans le cadre du programme global BAMS (Broad Area Maritime Surveillance)
est de surveiller
constamment les espaces maritimes digne d'intérêt pour les
Etats-Unis. Navires et sous-marins ne pourraient être que trahir par une
apparition sur les écrans radars ou une interception
électronique.
A contrario, le P-8 Poseidon (successeur du P-3 Orion, avec
20 tonnes en plus) concentre lui toutes les capacités nécessaires à
l'intervention. L'appareil dispose de très peu de senseurs
(un radar pour l'essentiel) et n'est équipé ni de boule optronique,
ni de détecteur d'anomalie magnétique, ni même de bouées sonores. Ces
capacités sont fournies soit par le MQ-4C, soit par
diverses plateformes déployées depuis une division navale
(hélicoptères, drones, etc...). L'intérêt du P-8 est surtout d'apporter
les armes (torpilles, missiles anti-navires). Sert-il aussi de PC
volant ?
C'est une autre manière de travailler que développe l'US Navy.
En France ce n'est pas le schéma retenu puisque les Atlantique 2 vont
être modernisés (et ils concentrent l'ensemble des
senseurs et des armes qui ont été répartis entre MQ-4C et P-8). Les
NH90 apportent des capacités nouvelles puisqu'ils sont des PATMAR à
voilure tournante grâce à l'embarquement d'un détecteur
d'anomalie magnétique et la capacité à larguer des bouées
accoustiques.
L'Inde, cliente du P-8, ne fait pas non plus le même choix que l'US Navy puisque ses Poseidon seront dotés d'un détecteur d'anomalie magnétique.
Le schéma américain n'est pas inintéressant. Il confirme que les
avions de PATMAR sont avant tout des plateformes de recueil de
renseignement. Les Atlantique 2 français en sont une preuve féroce
puisqu'ils interviennent au-dessus des déserts africains où leurs
capacités de recueil de renseignement optique et électroniques sont
précieuses. Irions-nous vers un rapprochement des avions
PATMAR et ROEM ?
La question de la persistence n'est pas anodine puisqu'elle confirme un entrain américain pour la maîtrise des mers. Mahan a transmis cette vision quand Corbett met en avant la capacité à contrôler localement une interface mer/terre pour permettre la réalisation d'un débarquement. La persistance aérienne a du sens quand elle est exigée, par exemple pour le contrôle des zones économiques exclusives. Est-il nécessaire de surveiller les océans en permanence ?
De plus, la persistence aérienne peut-elle être atteinte par les seuls drones ? Imaginons que la France opte, en remplacement des Atlantique 2 à l'horizon 2030, pour des Airbus A319. S'ils pouvaient être ravitaillés en vol, alors ces appareils atteindraient la même endurance que des drones HALE. Il y aurait la place pour aménager des banettes et un espace de vie dans la cellule. Nous pourrions parler à nouveau de "frégate volante".
La question de la persistence n'est pas anodine puisqu'elle confirme un entrain américain pour la maîtrise des mers. Mahan a transmis cette vision quand Corbett met en avant la capacité à contrôler localement une interface mer/terre pour permettre la réalisation d'un débarquement. La persistance aérienne a du sens quand elle est exigée, par exemple pour le contrôle des zones économiques exclusives. Est-il nécessaire de surveiller les océans en permanence ?
De plus, la persistence aérienne peut-elle être atteinte par les seuls drones ? Imaginons que la France opte, en remplacement des Atlantique 2 à l'horizon 2030, pour des Airbus A319. S'ils pouvaient être ravitaillés en vol, alors ces appareils atteindraient la même endurance que des drones HALE. Il y aurait la place pour aménager des banettes et un espace de vie dans la cellule. Nous pourrions parler à nouveau de "frégate volante".
Enfin, il s'agit de replacer les notions de persistance et
d'intervention dans le cadre de moyens fixes (quid de l'avenir d'un
outil comme SOSUS ? Des radars transhorizon ? AIS ?) et mobiles
(satellites, drones de surface et aérien) beaucoup plus large.
A l'invitation du livre blanc sur la défense nationale de 2013, nous
pouvons nous demander si certaines de ces plateformes ne sont pas
arrivées à un haut degré de transversalité : le PATMAR
s'élèvera-t-il à la qualité d'avions de recueil de renseignement de
tous types au niveau stratégique ?
D'un autre côté, nous pourrions assistés à des progrès
spectaculaires au cours du XXIe siècle dans la mobilité des plateformes
navales, ce qui remettrait au premier plan les navires.En ce sens, le fait de réfléchir dans le cadre d'un vaste programme comme BAMS est intéressant rien qu'à ce titre.
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