20 novembre 2015

Où sont les marines des États membres de l'Union européenne ?

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Le blog Naval Analyses animé par @D__Mitch se fait régulièrement remarquer sur les réseaux sociaux par l'information relayée et analysée mais aussi par la qualité et la diversité des infographies proposées sur les marines mondiales. Après avoir dressé de beaux tableaux des marines européennes, l'auteur s'est essayé à représenter la puissance navale européenne. 

Le Président de la République annonçait devant le Parlement réuni en Congrès qu'il missionnait le ministre de la Défense de recourir à l'article 42-7 du Traité sur l'Union européenne afin de demander l'assistance des États membres de l'Union pour assister militairement la France "dans la mesure de leurs capacités". Sur le plan naval, il y a quelques marges de manœuvres pour traduire la solidarité en actes... 

Sans avoir effectué le même travail que Naval Analyses, nous nous reconnaissons dans ses résultats. Les chiffres présentés recouvrent, dans chaque catégorie, des programmes existants dont nous avons pu étudier les origines, la production et la mise en service. Nous ne sommes pas dans certaines catégories à un navire près, voire à dix frégates près... Concernant les grandes unités, il nous semble que nous sommes dans le vrai.

Pour toutes ces remarques, nous considérons que pour un navire déployé sur zone, il faut, en moyenne, trois navires : un en mission, un de retour de mission et un à l'entraînement.


Avec 29 destroyer, 125 frégates et 102 patrouilleurs (256 escorteurs), l'Europe manque-t-elle de bateaux ?

La mission Atalante pourrait être assurée ad vita eternam. Les marines européennes possèdent les capacités pour déployer 6 ou 10 frégates, ce qui mobiliserait par roulement de 18 à 30 bateaux. Aussi bien, la capacité à durer à la mer serait bien mieux soutenue avec l'appui fourni par un bâtiment amphibie (14 unités). 

L'Europe pourrait aussi lancer une deuxième opération Atalante dans le Golfe de Guinée où le phénomène de piraterie va croissant et connaît les mêmes violence qu'au large de la Somalie. La mission Corymbe est actuellement orientée sur une construction des capacités des États côtiers à affirmer leur souveraineté dans leur zone économique exclusive. L'Europe pourrait alors lancer une opération civilo-militaire et entretenir une présence navale permanente forte de 4 à 6 escorteurs, soit 12 à 18 navires mobilisés en permanence par roulement.

EUNAVFOR MED ou opération Sophia ne devrait pas poser le moindre problème capacitaire. Pour surveiller les routes empruntées par les migrants et réfugiés à la hauteur de la Libye, de la Syrie et de la Turquie, les marines européennes sont en capacité de fournir pour chacun de ces points 4 à 6 escorteurs. Il y aurait un besoin permanent de 12 à 18 escorteurs, soit 36 à 54 bateaux mobilisés pour soutenir la présence dans la durée. 

Concernant l'opération Barkhane, le soutien logistique et l'acheminent des troupes pourraient être entièrement assuré par les marines européennes à destination des bases et points d'appui français en Afrique occidentale. Avec 14 grandes unités amphibies, l'Union contribuerait ainsi au soutien des opérations militaires françaises.

Le GAn et le Charles de Gaulle pourraient recevoir un accompagnement supplémentaire de ceux de la Belgique (1 frégate), du Royaume-Uni (1 destroyer et, peut-être, 1 SNA), voire de la Russie (le groupe naval centré sur le croiseur Moskva). 

Des pays comme l'Espagne et l'Italie peuvent former un groupe aéronaval centré sur les Juan Carlos Ier et Cavour. Deux groupes aéronavals supplémentaires ? Ces deux navires disposent de chasseurs-bombardiers comme les Harrier (environ dix chacun). 

L'US Navy a, de son côté, envoyé le LHD (Landing Heliport Dock) Kearsarge dans le Golfe Persique. Son groupe est entré en action contre l'ÉI. Les capacités d'action d'une future coalition seraient augmenté d'un coup depuis la Méditerranée orientale (GAn) ou le Golfe Persique (USS Kearsarge).

Aussi, sous l'égide de l'Union européenne ou de l'OTAN, les marines des États membres pourraient déployer une opération aéromaritime comme Artimon ou Enduring Freedom afin de lutter contre les approvisionnement de groupes qualifiés de terroristes par les flux maritimes.  De la Méditerranée orientale jusqu'au Golfe Persique en passant par la Mer Rouge, cette "super mission Atalante" nécessiterait 12 escorteurs supplémentaires (soit 36 navires mobilisés dans la durée) sur cet arc, en plus de la mission Atalante et en soutien à la crise en Syrie. 

L'Europe en a fondamentalement les moyens et pourrait assumer ces six missions, ce qui exigerait pour 46 escorteurs déployés en permanence (somme de nos hypothèses hautes), 136 mobilisés sur 256. En comptant, aussi, le soutien logistique naval à l'opération Barkhane mais aussi le déploiement de deux groupes aéronavals supplémentaires au large de la Syrie ou de l'Irak, il est évident que le potentiel naval ne serait pas entamé mais... utilisé. 

La France n'est pas le seul pays européen dont les citoyens ont versé le sang au cours des dernières années et à être encore menacée. Sur le terrain, l'Irlande (450 000 irlandais se sont engagés au service de la France depuis la guerre de Cent ans, merci) répond présente. Un pays neutre. Sur mer, la Belgique maintient son soutien annoncé de longue date, l'Angleterre augmente le sien. 

Alors, oui, les déclarations de solidarité ne se traduisent pas dans les faits. Eu égard aux capacités navales européennes, ce décalage entre les discours et les actes est insultant.

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