27 septembre 2017

BATSIMAR : danger mortel ?

© MICHEL FLOCH.
Le troisième Patrouilleur Léger Guyanais (PLG) n'est pas seulement une lâche réponse capacitaire dans l'attente de BATSIMAR, il est un traître comme sa petite taille le laissait supposer. La commande surprise d'une troisième unité pour ce programme témoigne du désarroi de l'État face aux conséquences de sa politique depuis 2007. Une mauvaise conjonction budgétaire permettrait au "traître" d'abattre froidement BATSIMAR dans le dos. 
 
La ministre de la Défense nationale argue autant de l'augmentation de la fréquence des phénomènes climatiques extrêmes que de la recrudescence des trafics illicites. Sorte de manière polie de reconnaître au plus haut du ministère de la Défense que dans une région mondiale où la lutte contre les différents trafics de drogue est internationale, rassemblant une grande partie des États riverains, centralisée dans un centre de commandement en Floride, cela fait un peu tâche que l'ensemble du dispositif naval français doive abandonner des opérations en cours - qui ne s'improvisent pas mais exige des semaines, voire des mois de préparation - pour porter secours aux citoyens français. 
 
Si ce dernier point est prioritaire et fort louable, c'est une nouvelle consécration d'une "gestion" de crise soulignant à merveille une gestion des risques défaillante. Le troisième PLG n'a un lien avec Irma que dans la mesure où les deux frégates de surveillance ne peuvent plus assurer leurs missions hauturières et/ou nécessitant des capacités aéronautiques faute d'autres moyens comparables de disponible. 
 
Pour faire bonne mesure, les décisions ne sont toujours pas arrêtés quant au budget de la Défense en 2017. Si bien que ce dernier peut autant atteindre le montant initialement voté (32,3 milliards d'euros) et rectifié début 2017 (32,7 milliards d'euros), l'autre alternative est une réduction comprise entre 700 et 900 millions d'euros selon que 700 millions soient dégelés et qui assumera les 200 millions d'euros supplémentaires pour les OPEX et OPINT (1100 millions de prévus, 1300 millions de consommés).
 
Dans cette perspective, d'où viennent c'est 17 à 24 millions d'euros (sans frais d'études et MCO ou avec) pour le troisième PLG ? 
 
Sous un autre horizon, cette décision peut être perçue comme la réplique du plan de relance de 2009 avançant la commande du BPC n°3. Ce dernier était plutôt prévu pour 2020 afin de remplacer avec un sister-ship les TCD de classe Foudre. Afin d'aider les Chantiers de l'Atlantique à travers une situation difficile, la commande publique sur des matériels de guerre apparaît comme l'un des outils de l'État. Et il s'agissait, aussi, d'en user avec parcimonie dans un contexte où la dette se creusait de manière très importante. Plutôt qu'un troisième BPC (450 millions d'euros, en liaison avec l'exportation de deux autres unités pour la Russie (925 millions d'euros), c'était surtout la coque du PA2 (982 millions d'euros) qui était espérée...
 
Du côté de la programmation navale, l'avancement de la troisième unité se faisait au prix du retrait du service actif des deux TCD classe Foudre. Ils possédaient encore 15 à 20 années de potentiel. Par ailleurs, les 450 millions d'euros du bateau aurait été tellement plus apprécié pour une FREMM de plus ou un maintien de la cadence de production donc de livraison. Ou encore le lancement du programme BATSIMAR ! Pour 450 millions, c'est 9 bateaux soit la moitié de la cible visée depuis 2016...
 
Le parallèle mérite d'être étudié entre les deux décisions entre 2009 et 2017 car dans le premier cas c'est une considération purement économique qui modèle la Flotte quand dans le deuxième c'est pour pallier à des ruptures de capacités qui invite, semble-t-il, à faire quelque chose rapidement.
 
Ce qui est à craindre est la prise d'un mauvais cap par un bateau ivre. C'est prendre le risque que le PLG puisse renforcer l'axe Antilles-Guyane, voire Saint-Pierre-et-Miquelon (Fulmar, 30 ans de service en 2021). D'autres zones subissent de très hautes tensions opérationnelles, où les services de l'État sont littéralement dépassés par les évènements : Mayotte (problématique quasi-côtière) et le bassin occidental de la Méditerranée (flux migratoires), voire le Pacifique (deux P400 désarmés en 2020) avec une autre problématique, celle des blue boat.
 
En suivant la logique de la ministre de la Défense nationale et compte-tenu du bien faible coût d'acquisition du PL"G", il est concevable que commander trois PLG supplémentaires soit l'une des options concernant la sauvegarde maritime de l'Archipel France. 
 
Sous d'autres horizons, la Marine nationale a aussi à sa charge le remplacement des Patrouilleurs Côtiers de Gendarmerie. Et aura peut-être à sa charge le remplacement de quelques moyens nautiques des Douanes et des Affaires maritimes eu égard à la logique de la nouvelle division du travail issue des programmes inter-ministériels dans les bâtiments hydrographiques et polaire.

Raison pour laquelle se pose la question suivante : à partir de combien de PLG ce programme deviendra-t-il la solution au remplacement des patrouilleurs ? 
 
Toutes les ruptures temporaires de capacité et les tensions opérationnelles nouvelles n'exigent pas de moyens aéronautiques... Certains des besoins identifiés permettent de se satisfaire d'une couverture héliportée côtière (Guyane, Antilles, Mayotte) quand d'autres zones plus océaniques (Nouvelle-Calédonie) voient une couverture aérienne assurée par des avions de SURMAR. C'était l'un des rares arguments rendant incontournable BATSIMAR.
 
De plus, le CEMM, l'Amiral Prazuck, - lie la cible du programme BATSIMAR au programme P400 sans le nommer. Et pour cause, des unités de 500 tonnes menant des missions hauturières sans hélicoptères invitent difficilement à concevoir que depuis 1982 jusqu'à 2017 les voilures tournantes soient devenues, finalement, indispensables.

Et si ce traître de troisième PLG était BATSIMAR ?
 
Il serait urgent de re-dessiner sa plage arrière pour dégager une plateforme pour hélidrone et un local pour son entretien.

11 commentaires:

  1. Bonjour, pourquoi pas réunir sous une même direction gendarmerie maritime, affaires maritimes, douanes pour plus de simplicités, des besoins navales aéronautiques, et laisser la marine nationale à sa tâche qu'il lui revient, à la rigueur un renfort en cas de besoin ?

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    1. La Marine ne souhaite pas la création d'une marine garde-côtière qui ferait double-emploi, nécessiterait de créer une nouvelle organisation (école, soutien, etc avec ses moyens, en particulier dans les Outre-mer. Et le dispositif aéromaritime des Douanes ne plaide nullement pour se lancer dans cette aventure, c'est plutôt une plaidoirie pour ne plus le reproduire. Les moyens navals de la Gendarmerie maritime sont gérés par la Marine nationale pour la fourniture. Et détachait cette organisation des missions de Défense ne faciliterait pas du tout les choses. Le modèle retenu en France n'est pas celui de l'US Coast Guard qui fonctionne relativement bien dans un pays au budget plus riche. Mais la liaison avec l'US Navy n'est pas évidente.

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  2. "Et si ce traitre de 3ème PLG était BATSIMAR"?
    Et bien ce serait une bonne nouvelle!
    Ces navires sont bien conçus par le Bureau Mauric et ont de bonnes qualités hauturières, ce qui n'était pas le cas des P400 voire des actuels PSP.
    On note au passage que le PLG pour les Antilles est non plus à 700 mais à 750t, preuve sans doute que l'absence de limitation du tirant d'eau comme à Degrad des Cannes permet d'emporter plus de carburants dans les réservoirs.
    Et les évolutions du type liées à son adaptation aux zones, pourraient en faire une plateforme encore plus intéressante.
    Effectivement un hélipad au dessus de la rampe permettrait d'y recevoir un hélidrone comme le VSR-700 mais de plus petit drone comme le Thalès Fulmar (nos ScanEagle à nous...) voire le Camcopter de Schiebel pourraient de toute façon y être employé plus aisément.
    Quant à une version de remplacement de certaines missions des PHM, il ne serait pas difficile d'y implémenter aussi un 76mm ce d'autant que le nouveau 76mm Sovraponte a la masse d'un 40mm...
    On verra sans doute l'évolution au fil des ans du PLG dont le contrat initial prévoyait des options (comme sans doute l'actuel PLG pour les antiles)et ce pour une durée de 8-9 ans :
    Bref largement de quoi commander de ci de là un PLG en fonction des occasions.
    Plutôt que d'en faire un traitre, le PLG est plutôt l'assurance minimale d'avoir un programme BATSIMAR au moins à petite vitesse et avec une plateforme autrement plus effective que les prédécesseurs et certainement plus réalistes qu'un OPV90 de toute manière hors d'atteinte financière.

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  3. Bonsoir Marquis. Les PLG peuvent même être l'épine dorsale de la flotte de patrouilleurs à six ou sept unités commandées. Il suffit que BATSIMAR soit annulé sans qu'on commande plus que quelques PLG supplémentaires pour remplacer le Fulmar et les trois PSP.

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  4. Les F125 allemandes n'ont pas de sonar remarqué 'un seul sonar HF comme un A69 !)
    Le radar des LFY était très correcte pour l'époque (heureusement que 20 ans plus tard Thales a fait des progrès)
    Pour les patrouilleurs à défaut d'hélico, ils leur manque un intercepteur de radar, seul véritable outil pour classifier identifier les pistes détectées par le radar du bord.
    Pour le tonnage, il faut analyser le théâtre d'opération et si un excellent 700t est retenu ne pas lui demander d'envoyer les marins se faire branler 3 semaines dans des mers 4, car i le navire flotte, la mission est sacrifiée.
    Tout est un question d'équilibre et de cohérence. L' A69 requalifié en patrouilleur océanique remplissait le besoin passé, son équivalent "moderne" satisfera aussi le besoin (Lui possédait un intercepteur de radar excellent pour l'époque) Il en faudrait 17 !

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  5. Bonjour. Dans cette article vous vous demandiez si BATSIMAR n'allait pas remplacer les FS ou si des frégates "plus guerrières" allaient les remplacer: http://lefauteuildecolbert.blogspot.fr/2016/09/fregates-de-deuxieme-rang-et-type-31.html. Si l'hypothèse des PLG en lieu et place de BATSIMAR se réalise quid de l'impact sur les choix possibles pour le remplacement des FS?

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    1. Bonsoir,

      Si le PLG devenait une sorte de "Super-P400" - tandis que celui-ci est déjà un "super-PATRA" - alors, oui, les frégates de deuxième rang seraient, de facto, très fortement mises en valeur car seules bâtiments porte-hélicoptères soit basées outre-mer, soit dédiées aux missions de sauvegarde maritime.

      In fine, le besoin d'actions dans la troisième dimension à l'appui de l'action navale peut bénéficier de la proximité du littorale et des administrations détentrices d'hélicoptères dans une certaine mesure. Mais pour certaines régions (océans Indien et Pacifique) et certaines missions (exemple des NARCOPS), c'est bien plus difficile.

      Il y aurait alors la possibilité de nouvelles frégates de surveillance. La Marine pousserait plutôt, à l'instar de la Marina militare avec certains de ses PPA, pour des FTI sauvegarde maritime.

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    2. Bonjour et merci pour votre réponse. La revue stratégique n'a rien précisé, il va falloir encore attendre pour être fixé.

      Vu que les budgets annoncés sont des plutôt des budgets de stagnation que de "remonté en puissance" je suis assez sceptique vis à vis de la demande d'une FTI sauvegarde maritime. Financièrement ça risque de faire monter la facture et opérationnellement je ne sais pas si ça sert à grand chose d'avoir une coque de premier rang pour ça. Vu la faible cadence de production des 5 FTI prévues et le petit nombre de FS à remplacer, pas certains qu'ils y aient des économies d'échelles. A première vue une coque aux normes marine marchande comme les Floréale est plus économique à la construction et à l'entretien tout en étant bien plus adaptée à la mission. Mais bon il y a des éléments qui doivent m'échapper.

      Bien à vous et merci pour vos articles stimulants.

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    3. Bonjour,

      La tendance est à la course à l'armement naval et notre rang n'est pas crédible avec des patrouilleurs hauturiers. C'est pourquoi les amiraux Rogel et Prazuck, comme CEMM, demandent que les Floréal soient remplacées par des "frégates", si possibles dérivées d'un programme de frégates de premier rang. D'autres parient sur le fait que dans moins de vingt ans nous baserons des frégates de premier rang dans les océans Indien et Pacifique.

      Bien navicalement,

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  6. La question de la plateforme porte hélicoptère n'achoppe-t-elle pas sur le peu de machines disponibles ? Ce qui ne risque pas de s'arranger avec la sélection du H160 comme HIL, avec son prix de départ, avant militarisation, à 16 m€.
    Ainsi à moins d'une vraie "rotule" stratégique dument financée, la question d'un OPV océanique avec Hélico embarqué à demeure risque d'être un voeux pieux.
    A ce moment ne serait-il pas plus opportun de miser sur une intégration du VSR-700, dont les possibilités d'armement en feraient un complément utile pour les Narcops par exemple.
    Vous rappelez que les P400 étaient des Super PATRA en suite de la classe Trident.
    Dans le même esprit, le PLG pourrait être une sorte de Super "Patrullero Fulmar" par analogie avec ce patrouilleur espagnol de même tonnage mais doté d'une plateforme compatible Hélo de classe moyenne.
    Or la stabilité du PLG est à mon avis incomparablement meilleure en roulis (excellente stabilisation passive Sire)comme en Tangage(Bulbe d'étrave et Sprayrails).
    L'autre champs à explorer si l'on parle des PLG, c'est leur utilisation comme bateau mère de la guerre des Mines : On a pu voir les tests faits par ECA group de leur système de drones de guerre des mines sur le P901 Castor Belge, cousin de plus petite taille des PLG.
    Fusionner les 18 Batsimar et les 6 navires "mères" de guerre des mines (voire les 4 futurs BBPD) permettrait d'avoir un effet de série sur 28 navires...

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  7. Et pourquoi ne pas commander des patrouilleurs comme l'ADROIT en grande série ils ne couteraient pas très cher et de part leurs dimensions ils sont à même de tenir la haute mer et ont une longue autonomie et une bonne endurance (pour info, l'Argentine souhaite en acheter 4 et le Pérou est très intéressé).

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