04 mars 2021

SLAM-F : illustration d'un navire câblier comme Bâtiment de Guerre Des Mines

© DGA – Forum Innovation Défense.

     À l'occasion de l'édition virtuel (2 - 4 décembre 2020) du Forum Innovation Défense 2020, il avait été proposé, durant la table-ronde « Gagnerle combat de demain » (59'32 - 1'02'56), une présentation du programme Système de Lutte Anti-mines - Futur (SLAM-F) au cours duquel furent montrés ses différents éléments. Il semblerait que pour représenter le futur Bâtiment de Guerre Des Mines (BGDM) ait été employé l'architecture des câbliers d'Alcatel Submarine Networks (ASN).

     En 2000, au titre de sa stratégie de ses activités économiques, la société d'affrètement maritime Louis Dreyfus Armateur noue des partenariats avec la société de télécommunication Alcatel-Lucent et avec Airbus. Concernant cette première collaboration, à travers une société commune dénommée Alda Marine, la commande fut passée à la société sud-coréenne Hyundai Mipo Dockyard pour la mise sur cale de trois câbliers, en 2001. Ils seront baptisés, en novembre 2001, Île de Sein (2002), Île de Batz (2002) et Île de Bréhat (2002). Alda Marine est propriétaire des navires et l'armateur est Louis Dreyfus Armateur et ils naviguent sous Registre International Français.

     Ce sont des unités spécifiquement étudiées pour la pose de câbles sous-marins. Ils ont pour caractéristiques une coque longue de 124,50 mètres entre perpendiculaires et 140,36 mètres hors-tout pour un maître-bau (plus grande largeur) de 23,40 mètres et un tirant d'eau atteignant 12,00 mètres à pleine charge. Le déplacement lège est indiqué pour 8 000 tonnes tandis que le déplacement à pleine charge atteindrait 17 820 tonnes avec un port en lourd de 9 820 tonnes.

Leur propulsion se compose de quatre moteurs diesels 4T-9cyl MaK-Caterpillar 9M32 (4 x 4 320 kW) couplés à quatre générateurs de propulsion électrique (4 x 4 100 kW) qui fournissent l'énergie à deux moteurs électriques Alstom MZ6HXD (2 x 4 000 kW). La puissance est délivrée à deux lignes d'arbre entraînant deux hélices à pas fixe (en tuyères), autorisant les navires d'atteindre une vitesse maximale de 15,4 nœuds. Un générateur de port diesel MaK 8M20 (1 600 kVA / 1 280 kW) subvient aux opérations à quai.

Un système de positionnement dynamique complète les capacités manœuvrières avec quatre propulseurs latéraux (2 x 1 500 kW à l'avant + 2 x 1 475 kW à l'arrière) et un propulseur azimutal (1 x 1 500 kW à l'avant, rétractable).

Pour la pose de câbles sous-marins, ils bénéficient de deux cuves à l'arrière où peuvent être entreposés, dans chacune, 2 500 tonnes de câbles ainsi que de deux cuves supplémentaires permettant l'embarquement de 250 tonnes de câbles de rechanges pour les opérations de maintenance. Les installations, dont un portique arrière de 50 tonnes, permettent les interventions jusqu'à 1 500 mètres (avec ensouillage) et 6 000 mètres (sans ensouillage).

Ces caractéristiques opérationnelles donnèrent lieu à l'emploi ponctuel de ces navires par l'État :

     L'Île de Batz avait remonté les enregistreurs de vol et les débris d'un Boeing 737-300 de la compagnie Flash Airlines qui s'était abîmé au large de Charm el-Cheikh (Egypte), le 3 janvier 2004.

Par exemple, Île de Bréhat fût équipé (2006 - 2009) de matériel de dépollution et de lutte contre les pollutions aux hydrocarbures dans le cadre du plan européen de protection et de prévention des marées noires.

L'Île de Sein et l'Île de Batz furent successivement réquisitionnés afin de participer en 2011 aux opérations de recherche de l’épave du vol 447 Air France perdu en mer le 1er juin 2009 dans l'Océan Atlantique au large du Brésil. L'Île de Sein en remontait même les boîtes noires les 1er et 2 mai 2011 grâce à l'emploi depuis le bord du ROV (Remotely Operated underwater Vehicle) Remora 6000 de la société Phoenix International, capable d'opérer jusqu'à 6 000 mètres de fond. Les boîtes furent localisées à 3 900 mètres. Les dépouilles des passagers et quatre conteneurs de débris furent également remontés.

     Pour en revenir à la guerre des mines et le SLAM-F, il peut être utilement rappelé la composition théorique d'un MLCM dont les éléments sont les suivants :

  • un drones de surface (Unmanned Surface Vehicle (USV), monocoque long d'environ 12 mètres pour un maître-bau d'environ 3.5 mètres et un déplacement d'environ, 12 tonnes (ASV) ; 
  • trois drones sous-marins autonomes (Autonomous Underwater Vehicle (AUV) dont : 
    • deux AUV Détection, la Classification et la Localisation (AUV DCL) : l'A18-M d'ECA opérant comme charge utile le sonar remorqué ou bien l'AUV I ; 
    • un AUV Identification (AUV I) : le robot télé-opéré (Remotely Operated underwater Vehicle (ROV) de neutralisation MuMNS (Multi-Shot Mine Neutralisation System) de SAAB, 
  • un sonar-remorqué T-SAS (TowedSynthetic Aperture Sonar) SAMDIS (Thales) qui peut plonger jusqu'à une immersion de 300 mètres, avec une autonomie allant jusqu'à 30 heures et pouvant être employé par l'USV ou un AUV.

     La vidéo de présentation du programme SLAM-F diffusée au Forum Innovation Défense 2020 mettait donc en exergue l'emploi d'un Module de Lutte Contre les Mines (MLCM) depuis un Bâtiment de Guerre Des Mines (BGDM) qui était ici l'Île de Batz (2002) ou l'Île de Bréhat (2002) eu égard à la mâture comprenant deux antennes SATCOM. Le réaménagement des quatre cuves précitées permet l'embarquement de plus ou moins l'équivalent, en volume, de deux MLCM s'il fallait en croire la présence de deux drones de surface, d'un mélange d'environ huit AUV et sonars remorqués.

 

© DGA – Forum Innovation Défense.

     Sans oublier un hélidrone prenant les traits du SDAM (VSR 700 développé à partir du Guimbal Cabri G2), un élément du SLAM-F n'ayant pas encore été mis en avant, encore moins confirmé : bien que l'emploi de la troisième dimension pour le programme MCM belgo-néerlandais ait consisté dans l'acquisition d'hélidrones Skeldar V-200 UAV du consortium UMS SKELDAR (SAAB - UMS Aero Group).

     La présence d'un câblier en guise de Bâtiment de Guerre Des Mines (BGDM) lors de cette présentation n'avait probablement comme justification que d'illustrer l'emploi du système complet développé en partenariat avec les Britanniques, sans rien présumer de la future entrée en phase de réalisation des BGDM en 2022 avec des livraisons devant débuter à partir de 2024. La LPM 2019-2025 retient un objectif de 4 à 6 BGDM, les BBPD-NG (5) pouvant éventuellement servir de variable d'ajustement.

     Néanmoins, cette illustration aura eu le mérite de vanter les mérites de l'emploi d'un navire de conception et facture civile car cela signifie, par rapport à une construction nationale aux normes militaires, et à budget équivalent, des dimensions sans commune mesure et donc de potentielles utilisations opérationnelles en proportions ou complémentaires : à l'instar de l'intervention jusqu'aux grandes profondeurs (6 000 mètres) ou bien la mise en œuvre d'engins sous-marins de toute sorte.


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