Les derniers bruits de coursives indiquent
l'aboutissement d'un significatif aggiornamento à l'endroit de la
direction de la Marine nationale, en lien avec l'occupation d'autres emplois
militaires dont les trois qualifiés de « politiques » (conseiller militaire du
Premier ministre, chef du cabinet militaire de la ministre des Armées et
chef de l'état-major particulier du Président). Dans l'attente de la parution
des décrets idoines, il est bien évidemment exclu d'affirmer. Néanmoins, des
tendances sont perceptibles et peuvent, tout du moins, dessiner une possible «
alternance ».
Le premier avait été nommée directeur adjoint du cabinet civil et militaire de la ministre des Armées et prenait ses fonctions au 1er septembre 2018, remplaçant le vice-amiral d'escadre Jean Casabianca (2 août 2015 - 31 août 2020), sous-marinier de son État. Le vice-amiral d'escadre Pierre Vandier avait été pressenti pour être nommé Chef de l'Etat-Major Particulier (CEMP) du Président au début de l'année 2020 mais il est finalement donné comme pouvant être prochainement nommé comme Chef d'Etat-Major de la Marine nationale (CEMM). L'Amiral Christophe Prazuck, actuel CEMM, est donné sur le départ à la fin du mois d'août 2020.
Le vice-amiral d'escadre Jean-Philippe Rolland, actuel ALFAN (AmiraL commandant la Force d'Action Navale), était annoncé pour devenir CEMM mais a été nommé par décret, en date du 4 juillet, CEMP avec une prise de fonction au 1er août 2020. Un surfacier, ayant eu l'heur de commander un porte-avions, succédera à un sous-marinier en la personne de l'Amiral Bernard Rogel à ce poste (6 juillet 2016 - 1er août 2020).
Une première conséquence, à l'endroit de l'équilibre entre les trois Armées, de ces mouvements prévisible et avéré est que sur les trois emplois militaires « politiques » (conseiller militaire du Premier ministre, chef du cabinet militaire de la ministre des Armées et CEMP), la Marine nationale conservera le troisième.
Le chef du cabinet militaire du Premier ministre est actuellement le général de corps d'armée Benoît Durieux depuis le 22 juillet 2017. Le dernier aviateur à avoir occupé ce poste était le général de brigade aérienne Olivier Taprest (14 août 2014 - 31 août 2016) et le dernier marin était le contre-amiral Alain Dumontet (1er août 1998 - 17 septembre 2002), surfacier.
En ce qui concerne le remplacement du vice-amiral d'escadre Pierre Vandier comme chef du cabinet militaire de la ministre des Armées, aucun « terrien » n'a occupé cette fonction depuis le général de brigade Bernard Thorette (15 juillet 1998 - 31 juillet 2002) et le dernier aviateur en date était le général de corps aérien Antoine Noguier (10 septembre 2012 - 31 juillet 2014).
La recherche de l'équilibre entre les trois Armées, autour de ces trois emplois, pourrait, selon une simple logique arithmétique, voir l'Armée de l'Air occuper une partie de ces emplois. Par ailleurs, il semblerait que l'actuel Chef d'Etat-Major des Armées, le général d'armée François Lecointre, soit lui-même appelé à être remplacé au cours des prochains mois. Le général d'armée aérienne Jean-Philippe Douin (9 septembre 1995 - 7 avril 1998) est le dernier officier général de l'Armée de l'Air à avoir été nommé à la plus haute fonction militaire.
Et le futur CEMA, s'il n'était pas le général d'armée François Lecointre, aura à relever un des défis de la deuxième moitié de l'actuelle loi de programmation militaire 2019 - 2025, et non des moindres, qui sera de convaincre de l'intérêt, voire de l'urgence de respecter la programmation dont les fameuses « marches » de 3000 millions d'euros en 2023, 2024 et 2025 contre « seulement » 1700 en 2019, 2020, 2021 et 2022, sans oublier les travaux préparatoires à l'application de la clause de revoyure (article 7 de la LPM 2019 - 2025).
L'ensemble des enjeux qui attendent l'Armée de l'Air seraient, également, à même de justifier un accroissement relatif de son poids dans le dispositif institutionnel car certaines des phases les plus critiques du programme SCAF (Système de Combat Aérien du Futur) se produiront au cours des toutes prochaines années dont la conception, la fabrication et les essais d'un démonstrateur dont le premier vol devrait intervenir en 2026, sans oublier la cinquième tranche de production du Rafale mais également l'ensemble des volets spatiaux et, bien entendu, le renouvellement de la composante aéroportée à l'horizon 2035 tant par la plateforme - le futur NGF (Next Generation Fighter) - que par le vecteur : l'ASN4G (Air-Sol Nucléaire de 4ième Génération) qui pourrait bénéficier d'une première phase exploratoire par le démonstrateur V-max (Véhicule Manœuvrant eXpérimental) en 2021. Les sujets majeurs ne manquent pas.
Une deuxième conséquence, cette fois-ci au regard des équilibres internes entre les différentes forces constituées de la Marine, est qu'il se dessine une alternance entre les sous-mariniers et les surfaciers, voire à l'avantage des marins du ciel.
La direction de la Marine nationale, au prisme des officiers généraux de Marine nommés CEMM, avait été ravie par les sous-mariniers depuis la nommination de l'Amiral Pierre-François Forissier, le 4 février 2008. C'était une première depuis 14 années et la séquence Louzeau - Cotanea (1987 - 1994) que la Marine soit dirigée par un sous-marinier.
Et la dynamique initiée par l'Amiral Pierre-François Forissier se poursuivait par sa succession assurée par un autre sous-marinier, l'Amiral Bernard Rogel (12 septembre 2011). Et son successeur n'était pas stricto sensu un sous-marinier, malgré un passage sur deux de ces bateaux au cours de ces carrières, mais l'Amiral Christophe Prazuck (13 juillet 2016) est monté dans la suite des deux précédents CEMM. La parenthèse s'étalait dans le temps - 8 à 12 années - et dans l'espace avec non pas un retour à la vie civile de l'Amiral Bernard Rogel mais une extension de sa carrière avec son passage à l'Élysée et aux côtés du Président.
Et il est à remarquer, dans cette perspective de l'équilibre entre les forces constituées de la Marine nationale, que l'Inspecteur général de la Marine est souvent, à de rares exceptions observables, issue d'une force dont les priorités stratégiques sont alors à un niveau stratégique pouvant être considéré comme relativement plus bas par la pratique opérationnelle, voire l'intensité des enjeux programmatiques, si ce n'est les deux à la fois. Raison pour laquelle le bruit de coursive donnant, une hypothèse parmi d'autres, l'actuel Amiral commandant la Force Océanique Stratégique (ALFOST) comme prochain Inspecteur général de la Marine, en remplacement donc du VAE Denys de Bonnaventure, est remarquable à plus d'un titre (Jean-Dominique Merchet, « Elysée : l’amiral Rolland nommé chef d’état-major particulier », L'Opinion, blog Secret Défense, 5 juillet 2020).
C'est pourquoi les mouvements prévisible et avéré sont l'indice d'une possible alternance entre la séquence sous-mariniers et une possible dynamique aéronavale à la direction de la Marine nationale, d'où l'évocation d'une « alternance ».
Le VAE Pierre Vandier pourrait devenir le pilote de l'aéronautique navale à occuper le poste de CEMM depuis l'Amiral Alain Oudot de Dainville (15 juin 2005 - 3 février 2008). Et les marins du ciel n'ont occupé le poste de CEMM que de manière épisodique, au contraire des surfaciers et des sous-mariniers qui ont plusieurs fois instaurés de véritables séquences.
Les vice-amiraux d'escadre Pierre Vandier et Jean-Philippe Rolland sont, pour le premier, marin du ciel, et pour le deuxième, surfacier. Mais ils ont en commun d'avoir commandé tous les deux un porte-avions. Cette liaison possible entre les deux hommes n'est pas des moindres puisque ce sont les sous-mariniers de la séquence précédemment évoquée (2008 - 2020) qui ont préparé l'ensemble du dossier de la succession du porte-avions Charles de Gaulle (2001 - 2038 ?).
La séquence des noms des missions du groupe aéronaval - Bois Belleau (novembre 2013 - février 2014), Arromanches (dans le cadre de la mission Chammal (2014 - 2020 ?), trois campagnes (2015 - 2016), Clemenceau (mars - juillet 2019) et Foch (janvier - avril 2020) - débutaient (bataille de Belleau wood, débarquement du 6 juin 1944 par le port artificiel d'Arromanches), aux dires mêmes de la Marine, en l'honneur de la relation franco-américaine. Néanmoins, ce registre symbolique n'apparaissait plus explicitement dès la mission Clemenceau dont le dossier de presse vantait l' « effort de coopération et de partenariat avec l'Orient, chemin que Georges Clemenceau avait lui-même emprunté ».
Néanmoins, il
est tout de même remarquable que chacun de ces noms de mission jusqu'à la
dernière dont le choix n'était pas justifié correspondait à des noms de baptême
de porte-avions français, première coïncidence, et en plus, dans leur ordre
d'admission au service actif dans la Marine nationale, deuxième coïncidence.
Corrélation n'est pas causalité mais l'occasion est trop belle de proposer
l'interprétation suivante que chacune de ces missions portait leurs messages
stratégiques au service d'un seul but : assurer la succession du porte-avions Charles
de Gaulle (2001 - 2038 ?) depuis que cet objectif a été défini par
l'Amiral Bernard Rogel (12 septembre 2011 - 12 juillet 2016) en 2013.
Le Président de la République, selon le calendrier
présenté au salon EuroNaval 2018, et confirmé lors de l'interview donnée à bord
du porte-avions Charles de Gaulle (2001 - 2038 ?) le 14 novembre
2018 au journal télévisé de 20h00 de TF1, s'était engagé à rendre sa décision
au sujet du programme PANG (Porte-Avions de Nouvelle Génération), à
l''aune des conclusions des quatre études rendues en février 2020, à la moitié
de l'année 2020, soit approximativement le milieu du mois de juin de cette
année. Si décision a été prise, elle n'a pas encore été communiquée.
C'est pourquoi les nominations avérée et supposée des
vice-amiraux d'escadre Jean-Philippe Rolland (CEMP) et Pierre Vandier
(CEMM) est peut être en mesure de préfigurer une séquence aéronavale en tant
que première priorité pour la direction de la Marine nationale.
En cas de décision favorable du Président de la
République au sujet de la succession du Charles de Gaulle (2001 -
2038 ?), la mise sur cale de la future unité devrait se dérouler en 2026, et
elle était même espérée dès 2025 avant que ne se produire la crise sanitaire,
alors que toutes ses conséquences ne sont pas encore identifiées.
Toutefois, la ministre des Armées, Mme Florence Parly,
avait confirmé, à l'occasion de la cérémonie du 18 mai en l'honneur de la
découpe de la première tôle du Bâtiment Ravitailleur de Forces (BRF) n°1
- baptisé Jacques Chevallier (2022 ?) -, que le
calendrier visait toujours, et ce comme depuis la formalisation du programme,
un début des essais à la mer en 2036 afin de pouvoir admettre au service actif
le PANG, au plus tard, en 2038 avec un certain nombre de marges de sécurité.
Cela suppose qu'un certain nombre de jalons
préparatoires à ces différentes étapes critiques du programmes auront à être
préparés avec une attention toute particulière de la direction de la Marine
nationale. Le terme de ce soutien du programme en sa phase de réalisation n'est
pas aisé à déterminer.
Et il se remarque que les deux séquences de sous-mariniers à la direction de la
Marine nationale (1987-1994 et 2008-2020) correspondent toutes les deux à une
proposition majeure et une proposition mineure.
Durant la première (1987 - 1994), la Marine aura eu à
gérer l'entrée en phase de réalisation du programme SNG peu après la
mise sur cale du Triomphant (9 juin 1986) et jusqu'à son
lancement (26 mars 1994). À cette proposition majeure devait succéder la
mineure qui devait être la mise sur cale du PAN n°2, officieusement
baptisé Richelieu. Finalement, la mineure aura été constituée de
la fin du programme SNA 72 et des études préliminaires du SMAF (Sous-marin
d'Attaque Futur).
Durant la deuxième (2008-2020), la Marine avait la
responsabilité de l'entrée en phase de réalisation du premier SNA issu du
programme Barracuda, c'est-à-dire le Suffren qui a été mis
sur cale peu avant (19 décembre 2007). Proposition majeure de la période qui
s'achève avec le début des essais à la mer du même Suffren (27 avril
2020) et ce, jusqu'à sa livraison à la Marine avant, et très probablement, le
terme des responsabilités de l'Amiral Christophe Prazuck.
La proposition mineure est alors double puisque si le PANG
est dépositaire d'une exposition publique des plus importantes, la même
période couvrait les premières étapes du programme SN3G (SNLE de 3ième
Génération) précédent l'entrée en phase de réalisation du programme, désormais
arrêtée pour l'année 2023 et ce, très probablement en raison de l'accumulation
de l'équivalent de trois années de retard par la phase d'industrialisation du
programme Barracuda.
Il ne serait alors pas étonnant d'observer une
prochaine alternance à l'occasion soit de la mise sur cale d'un éventuel PANG,
si le Président de la République en décidait ainsi, ce qui se produirait alors
en 2026, voire 2025 comme espéré, ou bien à aux alentours de la mise sur cale
du SN3G n°1 ou bien à l'orée de son lancement quelques années plus tard
afin d'engager l'intensité des différents chantiers du renouvellement de la
composante océanique.
Chef d’Etat-Major de la Marine (CEMM) |
Inspecteur général de la Marine |
Chef d’Etat-Major des Armées (CEMA) |
Chef
de l’Etat-Major Particulier |
PH75 |
Jean
René Joseph
1er
août 1976 |
Amiral |
Général d’armée |
Général de division |
|
Amiral |
PA78 |
|||
Amiral |
Général de division |
Général de corps d'armée |
||
Amiral |
|
|
PA82 |
|
Amiral |
||||
Yves 1er
août 1982 |
|
Général d’armée aérienne
Général d’armée |
Général d'armée |
|
|
||||
Bernard 30
janvier 1987
|
|
|
PA88 |
|
Amiral |
Vice-Amiral |
PAN
PAN |
||
Alain 20
novembre 1990 |
Amiral |
Vice-Amiral |
Général de division
|
|
Jean-Charles 1er
juillet 1994 |
Amiral |
Général d’armée aérienne |
Vice-Amiral |
|
Amiral |
||||
|
Général d’armée |
Général de division
|
||
Jean-Luc
François 2
mai 1999 |
Amiral |
|||
Jean-Louis 1er
juillet 2001 |
|
Général de corps d’armée |
PA2 |
|
Amiral |
Général de division |
|
||
Alain 15
juin 2005 |
Amiral |
Général de corps d’armée |
Vice-Amiral
|
|
Amiral |
||||
Amiral |
||||
Pierre-François |
|
Amiral |
Général de corps d’armée |
|
Amiral | ||||
Bernard
Emile Marc 12
septembre 2011 |
Amiral |
NPA |
||
Amiral |
Général d’armée |
|||
Amiral |
||||
Amiral |
||||
13 juillet 2016 |
Amiral |
|
||
Amiral |
|
|||
Amiral |
Général d’armée |
PANG |
||
VAE août
2020 ? |
|
Amiral |
Légende :
Marins du ciel
SurfaciersSous-mariniers
Commandos
⚓ : a commandé un porte-avions.
Le poste d'inspecteur général sera certainement réservé au major général de la Marine , soit le VAE Gourlez de la Motte.
RépondreSupprimerA chaque changement de CEMM, le major général change également, et si celui-ci ne devient pas CEMM, alors il devient inspecteur général de la Marine.
Le poste de major général est toujours suivi d'un poste à 5 étoiles .