© Naviris. |
En France, il avait été imaginé que le programme FTI (Frégate de Taille Intermédiaire) puisse comprendre une version adaptée à la patrouille hauturière - une précédente esquisse avait été avancée pour faire de même avec une telle version des frégates type F70 dans les années 1990 – afin d’engager la succession des Floréal (6), avant même que la European Light Frigate se propose de le faire. L'actuel chef d'état-major de la Marine nationale, l'Amiral Christophe Prazuck (13 juillet 2016 - 31 août 2020), dans la droite lignée de son prédécesseur, précisait dans la continuité du plan Horizon Marine 2025 et avant même la formulation du plan Mercator qu'il désirait des « frégates » construites aux normes militaires plutôt que marine marchande afin de remplacer les Floréal (6).
Fincantieri et Naval group proposaient alors à la Marina militare (Italie) d'arrêter le programme Pattugliatori Polivalenti d'Altura (PPA) aux sept bâtiments commandés (2 Light, 3 Light + et 2 Full) et donc de ne pas affermir l'option pour trois unités supplémentaires (1 Light, 2 Full). La Marine nationale se voyait proposer d'arrêter la série des FTI ou FDI (Frégates de Défense et d'Intervention depuis le 1er janvier 2019) après deux ou trois unités afin de poursuivre par le programme ELF pour atteindre le format de 15 frégates de premier rang puis d'enchaîner, toujours avec l'ELF, par le remplacement des frégates de surveillance de la classe Floréal (6).
Raisons pour lesquelles l'ELF devait être lancée en 2022, voire 2021. Mais la European Light Frigate est repoussée, en France, avec agacement par le gouvernement et de la Marine nationale au motif que Naval group avait déjà beaucoup demandé et obtenu avec le lancement du programme FTI entre 2013 et 2015 par l'arrêt du programme FREMM. Le côté italien ne paraissait pas hostile au projet de prime abord mais la marine italienne ne semblait pas mécontente de laisser le programme PPA parvenir à son terme (7 + 3).
Le 11 décembre 2017, le Conseil européen a adopté une décision établissant une Coopération Structurée Permanente (CSP ou PErmanent Structured COoperation (PESCO) entre les États membres qui remplissent des critères plus élevés de capacités militaires, au sens de l'article 1er du protocole n°10, et qui ont souscrit des engagements plus contraignants en la matière, au sens de l'article 2 dudit protocole, en vue des missions les plus exigeantes et de contribuer à atteindre le niveau d'ambition de l'Union. Cette décision est assortie de la liste des États membres engagés dans cette démarche. À partir de trois États participants son budget peut être abondé par les fonds européens jusqu’à hauteur de 20%. Rome proposait à l'été 2019 le projet European Patrol Corvette pour les CSP/PESCO. Le Conseil européen a retenu l’EPC dans la 3ième vague des CSP par sa décision du 12 novembre 2019.
Les Marine nationale et Marina Militare formalisaient en juin 2019 un premier besoin d’état-major afin de pourvoir au remplacement des classes Floréal (6) et Comandanti (4), ce qui ouvrait la voie à l'inscription du projet EPC dans le cadre des CSP/PESCO. Des décisions quant à l'allocation des fonds européens seront prises en 2021. Des propositions seront soumises par l'industrie la même année. Le projet EPC entrerait en phase d’industrialisation à partir de 2025 dans cette perspective. Les bâtiments considérés en France et en Italie seraient remplacés à partir de 2027 avec une première livraison au bénéficie de l'Italie.
La European Patrol Corvette devrait être selon la typologie de l'OTAN un « navire de deuxième ligne » (« Limited Warship Unit ») d'un déplacement à pleine charge d'environ 3500 tonnes. Les coques seront longues d'environ 110 mètres pour un tirant d'eau inférieur ou égal à 5,5 mètres. L'acceptation et l'officialisation de la participation espagnole à la CSP/PESCO European Patrol Corvette permet d'apprendre que l'avatar actuel est décliné en trois versions distinctes (Carrascon, « España entra en el programa de la corbeta europea », InfoDefensa.com, 11 mai 2020) :
- EPC optimisée pour la lutte de surface (ASuW) et anti-aérienne (AWD) avec la possibilité d'étendre les domaines de lutte à la lutte anti-sous-marine (ASW) ; le bâtiment étant doté de capacités d'auto-défense ;
- EPC optimisée pour la lutte de surface (ASuW) et bénéficiant d'une autonomie océanique (10 000 nautiques à 14 nœuds) ;
- EPC optimisée pour des missions de patrouille hauturière.
Et c'est de nouveau par l'Espagne - ¡Gracias España! -, plus précisément par la plume d'Augusto Conte de los Ríos qui a commis un beau papier sur le programme et réussi à dénicher ce tableau permettant d'apprendre l'existence de cinq versions distinctes :
© Naviris - Navantia. Augusto Conte de los Ríos, « La EDA y elprograma de la corbeta europea », Global Strategy, 15 janvier 2021. |
Les cibles respectives des Marina militare et Marine nationale sont, toujours pour la première, de huit EPC (remplacement des classes Comandanti (4 unités, 1500 t) et Cassiopea (4 unités, 1500 t). L'Armada Española souhaite cinq à six bâtiments afin de pourvoir au remplacement des corvettes de la classe Descubierta qui furent jusqu'au nombre de six. Les cibles grecque et portugaise ne sont pas encore connues. De même qu'il est pressenti que les Bulgarie et Croatie rejoignent le programme dans un deuxième, d'où peut être une augmentation du nombre de versions de trois à cinq.
À l'occasion de la parution de l'article de Carrascon (« España entra en el programa de la corbeta europea », InfoDefensa.com, 11 mai 2020), il avait été avancé que la Marine nationale visait 9 à 11 EPC, ce qui excédait, de facto, le seul remplacement des frégates de classe Floréal (6).
L'état-major de la Marine a visé à partir de mai 2018 (Vincent Groizeleau, « Ex-BATSIMAR : Des patrouilleurs et peut-être quelque chose de plus gros… », Mer et Marine, 15 mai 2018) non seulement le remplacement des Floréal (6) mais aussi celui des avisos A69 - ou PHM - de classe d'Estienne d'Orves par 3 à 5 EPC. Ces derniers pourraient justifier d'un intérêt français pour une European Patrol Corvette pouvant recevoir des capacités de lutte anti-sous-marine. Ce qui suppose de scinder, une deuxième fois, le défunt programme BATSIMAR en distinguant une série de six Patrouilleurs Océaniques (PO) d'une série de quatre corvettes ou frégates. Mais cette hypothèse s'est éteinte entre fin 2019 et début 2020.
Reste à attendre la prochaine précision afférente à la cible programmatique française et dans quelle mesure va être posé la question du remplacement des frégates de classe La Fayette (3 RMV + 2). La Marine nationale souhaite pouvoir réhausser la trame frégates, notamment avec trois frégates de 1er rang supplémentaires. Demande soutenue par l'actuel et précédent chef d'état-major de la Marine nationale mais aussi par le chef d'état-major des Armées.
Les qualités nautiques de l'EPC Long Range Multi Mission est donc la version ainsi dessinée et demandée afin remplacer les Floréal (6). Leur très forte autonomie - 9000 nautiques (à 14-15 nœuds ?) contre un objectif de 10 000 à 14 nœuds en 2020 et 10 000 à 15 nœuds pour les Floréal - distingue cette version de toutes les autres et il était attendu que la France soit la seule à demander pareille caractéristique, ce qui se poursuit par une autonomie en vivres atteignant les 45 jours contre 21 à 30 pour les quatre autres versions.
La vitesse maximale retenue de 21 nœuds - contre 20 pour les Floréal (6) - incline à penser qu'il s'agit bien de la version Marine nationale. Et elle serait soutenue selon une architecture de la propulsion de type COmbined Diesel eLectric And Diesel (CODLAD), ce qui ouvre quelques perspectives en matière de lutte anti-sous-marine par la potentielle faculté à marcher uniquement sur ou plusieurs moteurs électriques de propulsion.
Il est à remarquer qu'il semblerait que les choix n'aient pas encore été effectués entre une version courte et une version longue, la deuxième se distinguant par une vitesse maximale supérieure (26 nœuds) et une capacité en logements portée de 80 à 100. C'est l'une des deux seules versions des cinq présentées qui est ainsi considérée avec un possible allongement de 10 mètres, ce qui permettrait probablement d'ajouter deux moteurs diesel supplémentaires.
Concernant la taille de l'équipage, est-ce que la taille de l'équipage est donnée pour 80 marins ou bien s'agit-il seulement de la capacité en logements ? La formulation du tableau – « accomodation » - m'invite à considérer qu'il s'agit uniquement du volume de logements. Dans cet ordre d'idées, cela reviendrait à se demander si 80 logements correspondraient bien à ce qui serait nécessaire pour embarquer un équipage, un détachement aéronautique (15-17 ?) et un autre de commando-marines (25 ?). Par déductions successives, l'équipage pourrait être de 60-62 marins contre 83 à 86 pour une Floréal.
Les caractéristiques opérationnelles, et plus particulièrement circonstanciées à l'artillerie, sont intéressantes à plus d'un titre. Elles se répartissent entre la configuration retenue pour la passation d'une commande et les mesures conservatoires permettant un éventuel renforcement.
Le système de combat visé n'a pas encore été précisé : s'agira-t-il d'un dérivé de celui qui pourrait être mis à l'étude au profit du programme HORIZON RMV (ou MLU pour les Italiens) ? Cela ferait sens à l'échelle de la coopération industrielle franco-italienne. Les moyens de communication seront ceux habituellement observés sur les bâtiments de la Marine nationale. Les liaisons de données tactiques L16 et L22 seront très probablement intégrées. Cependant, aucune précision n'a encore été donnée quant à la suite de guerre électronique souhaitée.
C'est une pièce de 76 mm qui est retenue pour la version Long Range Multi Mission et non pas le RapidFire Naval 40 mm CTA (GME Nexter - Thales) alors même qu'une telle pièce avait été envisagée dans le cadre d'un large approvisionnement, selon le nouveau de concept de lutte asymétrique. Il s'agirait peut être de se demander si la mesure conservatoire prise pour un Close-In Weapon System (CIWS) consisterait, justement, dans le souhait de placer le RapidFire Naval 40 mm. Ainsi, la défense anti-aérienne à courte et très courte portées serait significativement renforcée, ce qui s'inscrirait comme l'une des évolutions significatives vis-à-vis des Floréal (6).Et le Narwhal 20B (Nexter) ne serait considéré que par mesures conservatoires alors que, et de manière surprenante, deux pièces de 30 mm sont citées dans la configuration de base.
© Naviris - Navantia. Augusto Conte de los Ríos, « La EDA y el programa de la corbeta europea », Global Strategy, 15 janvier 2021. |
Et le Narwhal 20B (Nexter) ne serait considéré que par mesures conservatoires alors que, et de manière surprenante, deux pièces de 30 mm sont citées dans la configuration de base.
Un système de lancement vertical est retenu, ce qui atteste peut être le mieux d'un renforcement de l'armement vis-à-vis des frégates de la classe Floréal (6) puisque les missiles pouvant être ensilotés impliquent une ambition supérieure en lutte anti-aérienne qui sera, au minimum, à moyenne portée et, donc, voire à longue portée. Deux lanceurs octuples (SYLVER A50 ?) sont retenus dès la configuration de base.
Les capacités de lutte anti-surface se résumeraient toujours à quatre missiles anti-navires, répartis en deux lanceurs doubles. Et seule la version Marina militare - Multi Domain Engagement - se distingue des quatre autres versions par un nombre de missiles anti-navires porté à huit.
Les installations aéronautiques (Luca Peruzzi, « The French Navy Long-Range version », EDR, 19 octobre 2020) visées sont nullement détaillées ici mais il avait été compris, lors de la présentation du programme, que celles-ci seraient dimensionnées pour l'embarquement et le soutien d'un H160M Guépard Marine : remplaçant tous les hélicoptères de la Marine, hormis le NH90 NFH Caïman Marine, la chose est logique. Et les drones embarqués ne se limiteront pas seulement à un SDAM (VSR 700 développé à partir du Guimbal Cabri G2) mais aussi au Système de Mini Drone Marine (SMDM).
Il en ressort que la version Marine nationale - Long Range Multi Mission -, outre une construction aux normes militaires, constituera un renforcement significatif vis-à-vis de la classe Floréal (6) par l'accent mis quant aux capacités de lutte anti-aérienne. La suite de senseurs n'est pas précisée mais il est fortement attendu, outre le radar correspondant au système de lancement vertical envisagé, qu'au moins un sonar de coque ou d'étrave soit retenu et ce ne serait pas une surprise qu'un sonar remorqué à immersion variable le soit également, comme cela est considéré pour les Patrouilleurs Océaniques (PO).
Pourquoi ne pas utiliser nos navires retirés de la fan, les refondre en tant que phm et les utiliser pour surveiller nos ZEE et utiliser les nouvelles fregates seulement au bénéfice de la FAN, cela nous donnera des unités neuves et modernes en plus, car nous en avons bien besoin.
RépondreSupprimerParce que les exportations génèrent de l'argent _ et souvent des retrocommissions. Les capacités de la marine viennent ... au second rang, sinon au troisième.
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