Les @mers du CESM


Les @mers du CESM - 19 avril 1944 :

Le cuirassé Richelieu participe au bombardement de Sabang, base japonaise en Indonésie. Le navire français, ayant rejoint l’Eastern Fleet commandée par l’amiral britannique Somerville, prendra part à trois autres opérations visant des bases navales ennemies. Après 52 mois passés en mer, le bâtiment rentre à Toulon le 1er octobre 1944. À nouveau déployé en Asie du Sud-Est l’année suivante, le bâtiment assistera à la capitulation du Japon dans la rade de Singapour le 23 septembre 1945.





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17 octobre 2013

"EurOTAN - Visions européennes de la défense et de la sécurité en questions" par Alain Joxe

 
Les grandes conférences de la métropole sont l'expression de la politique culturelle du Grand Lyon et de la ville de Lyon (un acteur de trop ?) pour mettre en valeur les travaux de recherche qui ont lieu sur ce territoire. Alain JOXE est un sociologue qui est directeur d'études honoraire à l'EHESS et président du CIRPES (Centre Interdisciplinaire de Recherche sur la Paix et d'Etudes Stratégiques).

05 avril 2013

Tigre de papier ou COMOCO - Vers une Armée de Terre expéditionnaire


http://infos.fncv.com/public/2013/mali-caesar-canon-artillerie-france.jpg
© Inconnu. Un CAESAR au Mali.

Pascal Ramounet nous offre un billet de sa plume pour nous présenter sa réflexion sur le devenir de l'Armée de Terre dans le contexte actuel.


La première remarque que suscite l’observation de l’armée de terre est la disproportion entre ses effectifs, ses équipements, et sa capacité à les mobiliser en un temps donné.
Il suffit que quelques hommes soient envoyés ici et là sur des opérations extérieures, pour que l’asphyxie soit proche.
A quoi donc sert-il d’être doté de 4000 VAB, 630 VBCI, 250 chars LECELRC, quand l’usage de quelques uns épuise les capacités de nos armées.
Le débat sur la réduction du format de l’armée de terre est dépassé. La réalité l’a tué.
La vraie question est de savoir quel est le format cohérent permis par la capacité budgétaire de la France.
  1. Une absence manifeste de cohérence
L’adjectif cohérent prend toute son importance, quand à côté de 3500 VAB, 2000 camions logistiques 8X8 Astra, 630 VBCI, nous ne disposons que de 4 drones HARFANG mis à rude épreuve par la campagne Afghane, de 2 NH90 (!!!) destinés à remplacer les valeureux mais antiques hélicoptère PUMA à bout de potentiel, de 37 hélicoptères de combat TIGRE, 7 ans après leur première mise en service ….
Le comble est atteint avec le parc de chars LECLERC :
  • plus de 450 commandés par l’AT,
  • 250 « en service »,
  • 29 véritablement disponibles (parc d’alerte et de gestion…..) …..au sein de 4 ( ! ) régiments de chars de combat
Le 15 octobre 2008, lors de son audition par la commission de la défense de l’assemblée nationale le général IRASTORZA (CEMAT de l’époque) «  Statistiquement, le char LECLERC…tombe en panne au bout de 36 heures de fonctionnement ….. L’armée de terre dispose pour 140 chars LECLERC opérationnels (le chiffre tombé depuis à 42) d’un crédit de fonctionnement moteur de 2 h par semaine » 
Les exemples pourraient être multipliés.
L’armée française serait-elle un tigre de papier ?
L’impression est que le format et la configuration de l’AT sont davantage le résultat de l’affrontement de groupes de pressions, que le fruit d’une réflexion cohérente.
Le lobby militaro-industriel, est souvent dénoncé. La pression des chapelles internes à l’AT devrait également l’être. Ainsi l’acquisition récente de 13 LRU, dont les perspectives d’emplois sont plus que marginales laisse perplexe.
Une armée compacte, mobile, disponible, bien articulée et bien entrainée, formant un ensemble cohérent a-t-elle d’avantage de valeur militaire qu’une armée de papier, issue de la juxtaposition de choix hétérogènes dictés par l’influence des uns et des autres.
http://infos.fncv.com/public/2013/.qatar-char-leclerc-camouflage-sable_m.jpg
© Inconnu. Char Leclerc à l'exercice Gulf Falcon au Quatar.
II – Le principe COMOCO
« Dans un contexte où l’engagement en haute intensité est peu probable et où les intérêts vitaux de la France sont préservés par la dissuasion, il faut accepter que la vocation première de l’armée de terre soit désormais d’être la défense des intérêts de la France au plus vite, au plus loin et au moindre coût »Michel GOYA (DSI HS 27)
« Le rôle des forces terrestres et la nature de leurs opérations dimensionnantes, devrait donc demeurer de nature expéditionnaire, mais avec des temporalités différentes……. C’est sur la capacité à affirmer une supériorité opérative claire que résideront les clés du succès ». Benoît BIHAN (DSI HS 27)
Quelques constats s’imposent :
1/ La France n’a plus d‘ennemi à ses frontières terrestres ;
2/ Le défense militaire de ses intérêts s’opère en conséquence au -delà de ses frontières : espace littoral et aérien, espace terrestre extra hexagonal ;
3/ Son armée de terre doit en conséquence être configurée dans un objectif de projection, dont la poursuite dépend essentiellement de deux paramètres  liés : La masse à projeter, la capacité de projection.
4/ Son réseau d’alliances diplomatiques exclut la situation où la France aurait à subir seule une attaque militaire majeure de ses intérêts.
Ces préalables dessinent les contours d’une armée de terre capable de conduire seule et avec succès hors de frontières hexagonales des combats du fort au faible ou de participer à une action militaire multinationale.
Trois caractéristiques fortes :
  • La Cohérence
  • La Mobilité,
  • La Compacité
Il s’agit d’une armée de terre COMOCO (cohérente, mobile, compacte).
1/ Cohérente
Cela a déjà été dit, l’armée de terre ne doit pas être conçue par sédimentation de décisions successives. Son format, son organisation, ses équipements doivent être déterminés dans leur ensemble dans un même temps.
Le choix ne doit pas se faire, à coût budgétaire équivalent, entre 4 hélicoptères TIGRE ou 3 drones MALE ou 10 VBCI, mais en considérant le rapport indispensable entre nombre de drones, d’hélicoptères de combat et des véhicules de combat d’infanterie pour mener une action efficace, dans un cadre d’emploi de référence.
La cohérence en matière d'équipement se traduit par l'absence de maillon faible qui serait de nature à fragiliser l'ensemble du dispositif. Un maillon faible c'est l'absence ou l'insuffisance d'équipement nécessaire à la cohérence de l'ensemble (exemple des drones) ou un équipement manifestement obsolète qui ruine l’efficacité permise par la qualité des autres équipements.
2/ Mobile
La mobilité opérative d’une force appelée à intervenir hors de son territoire dépend des capacités de projection disponibles. Celles de la France se limitent à deux vecteurs principaux : 3 BPC pour la voie maritime, 50 hypothétiques A 400 M, à l’avenir, pour la voie aérienne.
Cette capacité est structurante. Elle doit commander le format, l’organisation et les équipements de la future AT.
La capacité de projection aérienne, en particulier, devrait imposer le gabarit des véhicules blindés appelés dans le cadre du programme SCORPION à remplacer les AMX 10 RC, les SAGAIES et les VAB.
Un A 400 M peut transporter dans une soute de moins de 18 m de long une charge de 30t sur 4500kms.
*On entend souvent que le VBRM, futur remplaçant des VAB, prendrait la forme d’un véhicule blindé à roues de la classe des 20t. C’est une hérésie, quand l’AT dispose d’un nombre suffisant de VBCI de 28t. Au côté d’un EBRC de moins de 30t qui pourrait pour des raisons d’économie et de logistique être issu du VBCI (train roulant et appareil propulsif) les nécessités d’une projection d’urgence appellent des véhicules de la classe des 10 t, comme le CRAB et le PVP XL de PANHARD. Ainsi ,3 A 400M pourraient transporter à 4500 km, un module de 2 CRAB, 4 PVP XL et 3 VBL
3/ Compacte
La compacité résulte naturellement des scénarios d’emploi de l’AT (intervention asymétrique limitée et contribution à une force multinationale), de la capacité de projection, et, en toutes hypothèses, des contraintes budgétaires de la France.
En matière militaire, le nombre est une qualité essentielle. Pour des raisons de coût, les armées occidentales ne peuvent associer le nombre et la qualité des équipements. Renoncer à des équipements performants, c'est-à-dire à une forme de supériorité à priori sur l'adversaire, c'est accepter la possibilité de pertes humaines nombreuses. Les sociétés occidentales, qui refusent l'idée de la mort, ne peuvent faire ce choix. L'occident, pour des raisons financières et socioculturelles est condamné à choisir la course technologique comme palliatif à des effectifs décroissants.
http://idata.over-blog.com/4/22/09/08/France/Armee-de-Terre/VBCI/VBCI-couv-tim-dossier-equipement.jpg© Inconnu.
III - Proposition d’organisation
Peu de moyens budgétaires et des moyens de projection limités signifient d’évidence une armée de terre au format de nouveau réduit.
Les conditions d’emploi envisagées conduisent à classifier les forces en fonction de leur capacité de projection, et en corollaire de leur puissance et de leur capacité à durer dans la zone de conflit.
Le recours systématique  au GTIA lors des récentes OPEX, montre que l’organisation traditionnelle est devenue surannée.
Les contraintes de projection et la variabilité des conflits soutiennent le principe d’une armée modulaire, étant admis que cette modularité ne doit pas affecter la cohésion.
Il est proposé pour résoudre ce paradoxe apparent un dispositif mixte :
  • Une force d’engagement d’urgence constituée des forces spéciales de l’AT ;
  • une force de projection rapide, privilégiant la mobilité opérative et la cohésion sur le couple puissance-protection, qui serait organisée autour d’un ensemble de modules autonomes formant des ensembles organiques, car appelés le plus souvent à opérer de conserve ;
  • une force de décision, plus puissante mais moins mobile au niveau opératif, composée de modules autonomes, appelés à renforcer la force de projection rapide, sans lien organique entre eux.

Mobilité opérativeCouple puissance- protectionDurabilité
Force d'engagement d'urgencemaximalefaiblefaible
Force de projection rapidefortemoyennemoyenne
Force polyvalente de renforcementfaibleforteforte
Forces de soutienfaible-forte


Un exemple de format possible :


  • Force d'urgence
3 REG opérations spéciales


  • Force de projection rapide
1 Brigade haute mobilité (montagne)
1 REG de chars légers (9 modules de 6 chars chenillés classe 30 t + une réserve de 6 chars, soit un total de 60 chars légers chenillés)
3 REG infanterie (3 fois 9 modules de 9 VHM infanterie – 1 VHM Dépannage – 1VHM trans/PC – 1 VHM Drones -1 VHM sanitaire- 2 VBL MILAN, soit 351 VHM)
1 REG artillerie (9 modules de 6 VHM Mortier 120 soit un total de 54 VHM mortier de 120, + 3 modules de 6 VHM JUMPER, soit un total de 18 VHM JUMPER)
1 REG soutien haute mobilité
1 Brigade parachutiste
4 REG infanterie parachutiste (4 fois 9 modules de 3 CRAB+ 13 PVP XL +3 VBL, soit 108 CRAB + 468 PVP XL + 108 VBL)
1 REG artillerie parachutiste (18 PVP XL Mortier 120 + 18 PVP XL JUMPER)
1REG soutien parachutiste



  • Force polyvalente de renforcement


1 REG de char de combat (9 modules de 6 LECLERC + une réserve de 6 chars, soit un total de 60 LECLERC + 9 modules de 2VBCI mortier de 120 mm sous tourelle+ 1 module de réserve, soit 20 VBCI mortier de 120)

2 REG de cavalerie blindée (2 fois 9 modules de 6 EPRC + une réserve de 6 EPRC, soit un total de 120 EPRC)

4 REG infanterie (4 fois 9 modules de 9 VBCI – 1 VBCI MPC – 1 VBCI Dépannage – 1 VBCI Drones -1 VBCI sanitaire-– 2 VBL, soit 468 VBCI)

2 REG artillerie (2 fois 9 modules de 6 CAESAR 155, soit 108 CAESAR 155 + 2 fois 3 modules de 6, soit 36 CAESAR FIRE SHADOW )

1 REG artillerie AA (MICA + C-RAM )


1 REG Renseignement (RADAR +DRONES)

1 Reg soutien

ALAT


La terminologie « régiments (REG)  » et « brigades » est utilisée par commodité de langage.
Un « régiment » serait formé de modules pouvant intervenir isolément. Cette autonomie, qui pourrait être comparée à celle des cellules dans un corps humain, présente l'avantage de permettre une continuité d'action en cas de perte d'un ou plusieurs modules. Elle permet également d'adapter la taille du "régiment" aux contraintes budgétaires, en ajustant le nombre de modules qui le constituent, sans ruiner la cohérence du dispositif.
Ainsi un module d’infanterie parachutiste pourrait être composé comme suit : 9 PVP XL infanterie (72 voltigeurs) – 3 CRAB 25 mm - 1 PVP XL trans/PC - 1 PVP XL Drones -1 PVP dépannage - 1 PVP XL soutien sanitaire-2 VBL MILAN -1 VBL MISTRAL. L’ensemble serait transportable par 5 A 400 M.
Un module d’artillerie parachutiste pourrait être composé comme suit : 6 PVP XL M 120 (ou JUMPER) – 3 VBL appui – 1 VBL MISTRAL – 1 PVP XL trans/PC – 1 PVP XL Drones . L’ensemble serait transportable par 4 A 400M.

09 octobre 2012

Qu’est ce qu’un trois-ponts ?

© Léon Haffner, vaisseau trois-ponts sous voile.

L'auteur du blog "Trois Ponts" me fait l'honneur de répondre longuement et de manière très complète à quelques questions concernant ces navires de ligne : un grand merci à lui !


21 septembre 2012

Crédibilité de la doctrine nucléaire nationale face à l’évolution de l’anti-missile balistique, par le général Pinatel


http://www.meretmarine.com/objets/500/11370.jpg
© DGA. Le SNLE Le Téméraire a été admis au service actif en 1999.

Le général Pinatel me fait l’honneur de m’expliquer son point de vue sur la question de la DAMB (Défense Anti-Missile Balistique) de territoire otanienne (couplée à l’ABM -Anti-Ballistic Missile- américain) et sur ses conséquences sur la dissuasion nationale. Ce qui suit est le résultat de ce dialogue où j’ai pu lui demander si l’ABM américain pouvait avoir quelques conséquences sur l’évolution de notre dissuasion nucléaire.

Quand le général mène la fronde contre la défense antimissiles balistique de territoire de l’EPAA (European Phased Adaptive Approach) de l’administration Obama, l’équivalent de l’ABM américain, en Europe, il aime revenir sur les fondements des dissuasions nucléaires américaine et française.

Les explosions des deux premières bombes nucléaires américaines sur Hiroshima et Nagasaki (1945) s’accompagnent après la guerre d’une volonté de « dominance » des États-Unis qui souhaitent tirer les bénéfices politiques du pouvoir nucléaire et ne le partager avec personne. Dès lors, ils commencent à pratiquer une dissuasion « du fort au faible » c’est-à-dire à développer une capacité de première frappe suffisante pour désarmer tout adversaire potentiel et se mettre ainsi à l’abri de ses représailles. C’est l’explosion de la bombe atomique soviétique (à fission, le 29 août 1949) qui va permettre l’apparition d’un dialogue entre les deux puissances nucléaires. Mais c’est aussi l’apparition d’autres bombes -anglaise, française et chinoise- qui achève de complexifier le jeu nucléaire qui n’est plus un « je » américain. Dès lors, les États-Unis ne peuvent retrouver la suprématie nucléaire, c’est-à-dire une capacité de première frappe sans risque de représailles, qu’en disposant d’un bouclier anti-missile efficace. Ainsi, le RIM-8 Talos, engin anti-aérien de la série « T » des années 60, était semble-t-il une première ébauche d’une défense contre les missiles balistiques pour l’US Navy.

La crise de Cuba de 1962 permet de calmer le jeu et de poser les bases d’un dialogue fructueux (sur le plan nucléaire) entre les deux supergrands, et le traité ABM de 1972 enterre, pendant un temps, toutes prétentions à casser l’équilibre qui s’est construit entre les deux grands.
La dernière bataille de la Guerre froide a été la relance de la course aux armements dans les années 80, dont le point d’orgue est le lancement de l’Initiative de Défense Stratégique (IDS) du président Reagan, qui a conduit à l’épuisement de l’économie soviétique.

L’URSS disparue, l’IDS et ses suites perdureront : le traité ABM n’est plus là, et les États-Unis tentent de saisir l’occasion pour reconstruire une « dominance » de l’espace mondial, tant par des moyens conventionnels que nucléaires. L’ABM doit permettre de retrouver la suprématie nucléaire perdue avec l’apparition de la bombe soviétique et la prolifération nucléaire. La mise sur pied d’un système antimissile efficace permettrait de mettre en échec la dissuasion « du faible au fort » des nouvelles ou potentielles puissances nucléaires.

En effet et c’est une constante, une partie importante des stratèges américains ont toujours refusé la logique de la dissuasion nucléaire car elle revient à accepter, si elle échoue, de subir une première frappe adverse avant de riposter. Or la mentalité «cow-boy» est fortement ancrée chez les militaires et les stratèges américains : c’est celui qui dégaine et qui tire le plus vite qui sort vainqueur de l’affrontement. C’est dans cette logique et, en dehors de tout mandat de l’ONU, que, prenant prétexte de l’existence d’armes de destruction massive en Irak, le texan George Bush junior a décidé la seconde Guerre du Golfe ; c’est pour cela aussi qu’un débat existe actuellement aux États-Unis sur la nécessité de lancer une attaque préemptive contre le potentiel nucléaire iranien en cours de constitution.

Il va s’en dire que le pari est audacieux, au regard des résultats de l’avatar actuel de l’ABM : les missiles GBI (Ground Based Interceptor) ont, au mieux, une réussite de 50%. Ce sont plutôt les missiles SM-3 de l’US Navy (couplés au système AEGIS) qui donnent les meilleurs résultats lors des essais : autour de 70%. Bien entendu, il est difficile de parler d’un bouclier avec une telle passoire. L’interception de missiles balistiques d’une portée de 2000 km, comme celle du missile iranien Sejil 2, est, en effet, très difficilement réalisable car, entre le moment où le tir est décelé et la phase d’impact, on ne dispose que de 15 à 20 minutes pour prendre une décision, lancer un missile anti-missile et espérer toucher une cible qui fonce vers la terre à une vitesse de 4 à 6 km par seconde.

Pour qu’un bouclier anti-missile soit efficace, il devrait être capable d’arrêter à coup sûr un missile équipé d’une tête nucléaire. Cela implique un système en alerte 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, un processus de décision quasi-automatique et surtout une capacité démontrée d’interception de 100%. En effet, on ne peut pas accepter le risque qu’un missile équipé d’une tête nucléaire atteigne son objectif. Or il n’existe aucune preuve qu’un taux d’interception voisin de 100% soit réalisable.

C’est pour cette raison que tous les théoriciens de l’arme nucléaire, et en particulier Lucien Poirier et le Général Gallois, ont bâti une stratégie basée sur la dissuasion nucléaire du faible au fort: signifier à tout agresseur potentiel qu’une attaque qui mettrait en cause nos intérêts vitaux entraînerait automatiquement des représailles nucléaires massives sur ses villes. Dès lors, il n’est pas question de concurrencer les deux grands et de tenter de pouvoir annihiler une force considérablement supérieure. Mais les forces stratégiques françaises doivent pouvoir mener des représailles, même après une première frappe destinée à détruire son potentiel nucléaire. Le vocable utilisé sera l’expression de « capacité de seconde frappe » et les SNLE seront l’incarnation de cette expression. Il y aura également une composante terrestre fixe (le plateau d’Albion).

Le problème inhérent à cette capacité de dissuasion est qu’elle s’apparente à une stratégie du tout ou rien. Que faire donc si les divisions soviétiques menaçaient d’envahir notre territoire? La stratégie de dissuasion est alors complétée par la notion « d’ultime avertissement » que doivent donner à l’adversaire l’arme nucléaire tactique, lui signifiant que nous considérons que nos intérêts vitaux sont mis en cause par son agression. Les forces atomiques nationales vont ainsi s’articuler entre celles dédiées à l’ultime avertissement (Mirage IV, missiles Pluton) et celles devant causer des dommages considérables à un éventuel assaillant, au point de le dissuader de tenter l’aventure.

Les vecteurs nucléaires français ont très bien traversé les épreuves à coup de modernisations successives. D’une part, des « aides à la pénétration » ont même été inclues pour tenir compte des développements en URSS et aux États-Unis, puis face aux développements américains issus de l’IDS. D’autre part, les missiles balistiques français embarqués à bord des SNLE ont évolué du M-2 au M-51. Cette succession d’évolutions a permis d’augmenter considérablement les zones de patrouilles des navires de la FOST (grâce à l’augmentation de la portée des missiles embarqués), et par conséquence, de renforcer leur crédibilité rendant leur localisation encore plus difficile.

Enfin, est-ce que la France doit participer à la défense antimissile balistique de territoire, adoptée dans son principe à l’OTAN ? La réponse découle des explications du général Pinatel : non, ce n’est pas l’intérêt de la France de favoriser tout ce qui peut affaiblir sa capacité de dissuasion nucléaire. Mais surtout, l’EPAA de l’administration Obama (relance des sites de l’ABM américain en Europe suite à l’échec du projet de l’administration Bush -installation de missiles GBI-, qui ne permettait aucune protection des territoires européens contre les menaces balistiques) n’est dirigée, dans les discours, que contre la « menace » iranienne. Dans cette optique, il y aura l’installation et le pré positionnement de missiles SM-3 (les destroyers Arleigh Burke AEGIS/SM-3 de la Rota, Espagne, et d’autres destroyers et croiseurs AEGIS en mer Noire). Hors, et comme l’explique très bien le général dans un de ses billets, la menace iranienne n’existe pas contre l’Europe !

Les développements de l’ABM servent, notamment, et peut être essentiellement, à faire tourner les industries de défense américaines. Une partie des Européens y répondent favorablement en s’équipant de missiles SM-3 pour leurs navires, construits autour du système AEGIS qu’ils ont acquis. C’est par exemple le cas des Pays-Bas qui viennent de franchir le pas en annonçant la mise à jour du système d’armes de leurs navires et l’acquisition de missiles SM-3. Les marines de la Norvège, du Danemark et de l’Espagne pourraient franchir également le pas. Dans ce cas ou bientôt ces cas, il ne s’agit pas tant de répondre à une menace. Comme pour le programme JSF, et surtout, comme pour le contrat du siècle où ces pays ont acquis des F-16, il est question d’acheter la présence américaine en Europe : ces dépenses militaires aux États-Unis compensent les frais de stationnement des troupes américaines en Europe.

Pour conclure, le général Pinatel insiste bien pour affirmer que la dissuasion nucléaire française est crédible et que c’est notre seule assurance pour nous garder de tout acte hostile recourant à des « armes terribles » (discours de l’Île Longue de 2006 du Président Chirac) et qu’elle nous permet de préserver notre rang.

01 septembre 2012

Amiens, Marseille : ascension aux extrêmes ?


http://www.picardie-1939-1945.org/IMG/jpg/canon_Amiens2.jpg 

Ce genre de quartier ressemble un peu à tout les autres morceaux de ville qui, en France ou ailleurs, par divers cheminements, a fini par se ghettoïser. Dans un premier temps, les premières populations de ces "quartiers HLM" s'en allèrent s'installer ailleurs, pour d'autres formes de logement. Il ne restait donc que les populations qui ne pouvaient pas s'offrir une autre forme de logement.

La "crise" passant par là, et la population de ces quartiers s'uniformisant, ces territoires s'appauvrissent. Une partie des activités économiques et administratives s'en vont ailleurs, notamment pour suivre les populations qui ont besoins de ces services et qui ne sont plus là. La violence monte en puissance, limite après limite. Elle est dans un premier temps, manifestement, le signe d'un ennui, d'un désespoir, d'un appel à l'aide. Dans un second temps, la violence gagne une signification : c'est un langage, un dialogue, une conversation.

Il s'agit pour ses émetteurs d'envoyer un signal aux multiples facettes mais à la signification simple et unique : le territoire change de maître. C'est un temps quasi féodal où tout et n'importe quoi échappe aux règles de l'ancien empire politico-administratif qu'était la République. Des activités économiques qui sont normalement prohibées dans l'empire finissent par se développer sur le territoire. Elles occupent les acteurs. Elles catalysent aussi la violence puisque les seigneuries se recomposent et vont s'adapter à la modification des flux économiques et financiers. De nouveaux seigneurs émergent. La violence n'est plus le signe de l'ennui mais bien l'expression d'une lutte de réseaux pour le pouvoir. "Il est rare qu’un État veuille la guerre pour elle-même, mais il veut être puissant et cette volonté provoque finalement une situation qui rend la guerre inévitable" disait Julien Freund (L’essence du politique, op. cit., p. 596).

Cette lutte remodèle les structures sociales du territoire, tout s'adapte autour du nouvel ordre qui se met en place. La paix sociale, nouvelle version, s'achète elle aussi. Comment ? Par la même monnaie que celle de l'ancien maître : de l'argent pour pourvoir au bonheur matériel des habitants du territoire. Une partie d'entre eux est directement intéressé aux activités économiques illégales. Comme le dit Abou Djaffar ("Ne pas voir que l’argent de la drogue fait vivre des quartiers entiers avec l’assentiment de la République, c’est être aveugle")., les activités économiques du territoire ne sont pas encore régulées. Il faut un nouveau maître, et il veut presque automatiquement tenter de gagner les monopoles économique et celui de l'autorité. La lutte fait donc rage entre les divers seigneurs pour étendre leur fief. Il s'ensuit alors une spirale ascendante où les acteurs tentent de grossir et de supprimer leurs rivaux.

Le pouvoir se complexifie avec l'apparition des châtellenies : des seigneuries dont le seigneur est nommé par un autre au pouvoir plus grand. Il doit répondre de ses activités à son suzerain. Les derniers vestiges de l'ancien empire tendent alors à tomber dans cette lutte pour le pouvoir : les services publiques s'en vont ou fonctionnent tant bien que mal.

Il y a même un phénomène qui apparaît : des frontières. Les seigneurs et leurs porte-armes s'occupent de qui à le droit d'intervenir, de venir ou de passer sur le territoire. Ce sont les "officiers" qui sont les plus particulièrements visés par ce filtrage. Les nouveaux maîtres en sont déjà à la régulation des activités du territoire. L'ancien empire a beau envoyer ses troupes, elles ne peuvent même pas arbitrer les luttes entre seigneurs, et encore moins reprendre pied.

La bataille fait rage chaque jour entre les seigneurs et les vassaux. Il y a deux issues à cette situation : ou bien il y a un vainqueur et la violence s'apaise, ou bien le poids des seigneurs s'équilibrent et la violence s'auto-entretient.

C'est une histoire suffisamment abstraite pour s'appliquer à tous les quartiers de France qui sont en perdition. C'est bien un défi d'autorité qui est lancé à l'Etat.

Cette lutte pourrait très bien s'apparenter à un phénomène décrit par Clausewitz : la guerre. Elle "est un acte de violence destiné à contraindre l’adversaire à exécuter notre volonté" (Carl von Clausewitz, De la guerre, chap. 1, §2, p. 51). Et selon Clausewitz, la guerre est un le moyen d'une lutte politique puisque, "en effet, elle exprime directement la réalité fondamentale et caractéristique de la politique : la domination de l’homme sur l’homme" (Carl von Clausewitz, De la guerre, chap. 1, § 24, p. 67). Il y a eu la constitution de seigneuries dans ces quartiers. Elles ont évolué jusqu'à un état féodal où il y a  seigneurs et vassaux. Les premiers ont acquis le pouvoir de ban, les seconds exécutent. Les seigneuries les plus importantes disposent de troupes, de revenus fonciers, d'une justice, des moyens de réguler les activités économiques, etc... L'Etat n'a pas disparu. Mais il s'agit bien d'une lutte politique entre des seigneurs locaux et l'Etat. Il s'agit de l'affrontement de volontés et la place de l'Etat comme détenteur légitime de la violence et maître politique suprême est contesté. C'est pourquoi il s'agit de réponses du politique qui sont attendues.

Il y a eu des émeutes dans la ville d'Amiens. Le déchaînement de violences est loin d'être extraordinaire pour une ville qui est habitué à ce que les affaires de ses quartiers du Nord se règlent par bagarres de rues et de multiples incendies de voitures. L'éruption de violences sort de l'ordinnaire par sa concentration de destructions sur laps de temps très court et la destruction de biens qui ne sont habituellement pas visés (dont une maternelle, cible devenue habituelle des émeutiers en France). Le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, s'est empressé de se rendre sur place et d'ordonner le renfonrcement des effectifs de la police. Des journliastes lui demandèrent combien de temps ces pomiers anti-émeutes allaient rester sur place ? Le ministre de répondre qu'ils resteraient jusqu'à ce que les lois de la Répulibuqe s'appliquent dans les quartiers Nords d'Amiens. La réponse du politique est forte, mais elle correspondait à quoi ? Il y a deux réponses possibles : ou bien le ministre voulait dire que les policiers supplémentaires étaient destinés à réguler une violence extraordinnaire par rapport à celle qui est quotidienne, ou bien qu'il fallait revenir au statu quo antes, c'est-à-dire revenir à avant le temps féodal. Le défi n'est pas le même, et pourtant, l'Etat est défié depuis de très nombreuses années.

A Marseille, le problème semble être rigoureusement le même : il y a une féodalisation des quartiers nords de la ville et la guerre fait rage pour savoir qui sera le maîre des territoires féodaux et des activités économiques illicites. Cette guerre des féodaux de Marseille est plus médiatisée car cette contrée est plus riche, et peut donc se fournir plus aisément en armes (là où à Amiens les armes de guerres se font peut être plus rare par manque de moyens, même si elles sont très présentes). Une sénatrice, Samia Ghali, a lancé une demande attendue : l'envoi de l'Armée à Marseille. Abou Djaffar condamne fermement, avec une "certaine ironie", l'appel de la sénatrice à la force militaire. Deux personnes expliquent très bien le pourquoi de cette demande :
  • Julien Freund disait que l'Armée "est le détenteur dans l’État de la violence suprême et extrême, à laquelle celui-ci a recours en période exceptionnelle, soit que la situation lui paraisse désespérée, soit que l’adversaire ait dépassé le seuil de ce qu’il juge tolérable" (Julien Freund, "La finalité de l’armée", Études polémologiques, n° 20-21, avril-juillet 1976, pp. 31-47).
  • Abou Djaffar disait donc : "Alors, donc, l’armée. Pourquoi l’armée ? Pardi, pour remplacer la police. Ah. Mais alors, dans ce cas, si on remplace la police par l’armée, c’est pour faire la guerre, non ? Pour faire ce que la police n’a pas le droit de faire, comme, je ne sais pas moi, tirer sans sommation, tirer pour tuer, tabasser les prisonniers (Les quoi ? Les suspects ? Ah non, désolé, il n’y aura plus de suspect en zone de combat, il y aura des ennemis et des civils). A nous, les perquisitions sans commission rogatoire, les arrestations arbitraires, les violences volontaires. Ben oui, parce que, Madame la Sénatrice, vous ne croyez pas que le déploiement du 126e RI, du 2e REP ou du 17e RGP va permettre de garantir les droits constitutionnels des citoyens ? Si ?"
Que ces situations soient répondent rigoureusement aux caractéristiques de la guerre, c'est un débat. Il n'est pas tellement question de le trancher, mais bien de constater que nous avons un beau laboratoire en France. Si nous avions pu l'avoir avant la guerre d'Afghanistan, cela eut été une grande chance. L'objet d'étude de ce laboratoire est précisément le moment où un conflit bascule. Comment est-ce que la situation en Afghanistan a basculé d'une guérilla larvée et embryonnaire à une guérilla permanente ? Comment est-ce que les choses ont dégénéré en Syrie ? Pourquoi pas comparer avec l'Algérie, l'Indochine ? Il serait osé de tout comparer, et ce n'est pas nécessaire. Mais dans tout ces théâtres, il a fallu redevenir maître de sa volonté pour l'emporter, ne plus être dépendant du comportement que nous impose l'adversaire, pour gagner la "guerre". 

En France, l'Etat entend bien être le maître ultime du pouvoir : celui d'édicter les normes, de réguler les activités économiques et d'assurer la sécurité, ce ne sont là que quelques exemples. Il s'agit presque d'une obligation car si l'Etat ne possède pas ses pouvoirs par un moyen ou un autre il se met en danger face à d'autes maîtres qui administrent quelques territoires. C'est la même chose en Syrie. En Afghanistan il s'agissait aussi de construire un Etat pouvant survivre face à d'autres rivaux politiques.

Et donc, il y a ce formidable laboratoire où l'on peut observer de quelle manière se construit ces acteurs politiques rivaux. Tout comme il est possible d'observer la très difficile entreprise pour faire imposer "son" autorité à des territoires qui ne la veulent pas. C'est une entreprise complexe et difficile et qui est multiformes. L'Union européenne serait la spécialiste des opérations "civilo-militaires" : des opérations guerrières où une mission civile sert à construire l'administration du territoire à pacifier.

Cette entreprise de pacification et de reconquête de l'autorité de l'Etat ou de la puissance désireuse de la gagner suppose une volonté farouche. Les acteurs d'en face cherchent bien souvent à atteindre un but qui peut aussi bien être leur prospérité économique et le développement de leur modèle. Ils connaissent les risques de la guerre, ils en respectent les règles. Face à de tels acteurs, il faut une volonté de fer et un savoir-fair politique qui fait honneur au Politique. En France il y a des ZEP, des ZUP et des ZSP : est-ce que face aux évènements d'Amiens ou de Marseille le Politique s'est-il mobilisé pour réunir ses moyens, les coordonner et engager une lutte pour reconquérir son autorité ? La volonté est la clef de la réussite d'une telle entreprise. C'est un combat de titans pour les politiques que de gagner le temps nécessaire pour concentrer suffisamment d'attention sur un tel problème afin de construire les outils pour le régler.

S'il ne s'agit pas d'un processus d'ascension aux extrêmes, tel que théorisé par Clausewitz, il s'agit bien d'une guerre, ou tout du moins, d'un phénomène qui s'en approche. Abou Djaffar le dit parfaitement bien : le nombre de personnes tuées à Marseille pour règlements de compte liés au trafic de drogue n'est que de 19 personnes. Ce n'est rien : chaque année 10 personnes meurt à cause de requins quand c'est 100 personnes qui décèdent par la faute de méduses. C'est là que le basculement peut être intéressant à étudier, là où il n'a peut être pas pu être très perceptible en Afghanistan ou ailleurs. La résonnance médiatique donnée à ces évènements montent crescendo, sans forcément qu'il y ait de rapport avec leur importance relative. Le pouvoir politique suprême est défié, qui plus est, sur son propre territoire. Il doit s'engager, et le faire de façon crédible : on ne rétablit pas les lois républicaines dans les quartiers nords d'Amiens en quelques jours avec quelques cars de policiers et de CRS. Il y a aussi l'intervention d'autres acteurs qui par intérêt ou par maladresse (terrible force que la maladresse) peuvent tout faire basculer. Imaginez que l'intervention de l'Armée à Marseille devienne une demande récurrente des français, de la société ? Les politiques doivent gérer une telle ascencion : le Président de la République et ses ministres de l'Intérieur et de la Défense ont répondu que non, l'Armée n'interviendrait pas. Elle a beau intervenir en Italie pour tenter de supprimer les mafias, et pourtant, elles sont toujours là.

Nous sommes à moment clef où l'Etat est ouvertement défié. Sa réponse est de temporiser. Cela fonctionne assez bien. Sauf que depuis que cette solution est utilisée faute de mieux, les seigneuries prospèrent et s'étendent. Il y a donc les deux autres réponses qui peuvent encore être apportées : la reconquête administrative par les services concernés ou bien le recours à l'Armée et tous les risques que cela implique. Il n'a pas encore été question des risques de collisions qui peuvent intervenir avec une flambée de violences face à des populations qui souffrent et des acteurs qui ne font pas que du commerce : quid des agents déstabilisants qui prêchent des discours religieux ou autre pour gagner les cœurs et les esprits ? Il ne faudrait pas leur offrir un terreau extra-ordinaire.

Il y a eu bien des débats sur la contre-insurrection, les opérations anti-guérilla, la pacification et encore bien d'autres choses. Ce qui se passe à Amiens et Marseille est une lutte de pouvoir. L'Etat a tous les outils pour rétablir la légalité républicaine. Mais il doit faire face à deux défis : réguler le processus de la violence et construire une volonté de réussir sur le long terme.

Le dernier livre blanc évoquait un "continuum entre la sécurité et la Défense". Il est difficilement perceptible à Amiens et Marseille : s'il faut les forces militaires pour combattre le trafic de drogues à l'extérieur de nos frontières, elles ne sont pas nécessaires pour intervenir dans nos quartiers perdus. Il faut des douaniers, des policiers pour réguler les trafics, et bien d'autres services encore. Il ne faut pas des patrouilles de blindés. Même, les personnes visées s'en accomoderaient très bien, comme cela a pu être vu ailleurs. L'Etat perdrait de sa superbe et de son autorité. C'est à questionner la pertinence de ce continuum.

Ces deux laboratoires sont vraiment très intéressants : quand est-ce qu'un cap est franchi dans la violence au point de faire basculer une situation d'un désordre civil à une situation de guerre ? Comment peut-on reconstruire une légalité tout en évitant une montée aux extrêmes ? Comment jugule-t-on la violence ? Comment construit-on une volonté pour parvenir au bout d'une telle bataille ? Comment rétablit-on la hiérarchie de l'autorité avec un Etat au sommet ? Peut-on placer un Etat au sommet de la hiérarchie de l'autorité partout ?

Il faut donc une volonté, diffuser cette volonté, des discours, une façon de penser, une idéologie ou une doctrine, et construire les outils pour parvenir au but fixé. Il faut définir ce dernier de manière suffisamment précise pour qu'il puisse être atteint. Il faut penser le rapport à la violence. Il faut savoir comment bouleverser la hiérarchie sociale pour la remodeler. Il faut donc l'intervention du politique. L'Armée n'est que l'outil ultime du politique, elle ouvre la voie à une autorité pilotée par le politique à qui l'on demande souvent d'assurer la sécurité et l'ordre dans une sorte de contrat social. Mais en définitive il faut surtout l'intervention de la qualité essentielle du politique : la compromission. Il n'y a que le politique pour faire des compromis, se compromettre et compromettre les autres pour déstabiliser un système social pour mieux le reconstruire. Le militaire ne sait pas faire, il n'a pas la souplesse nécessaire car il ne peut pas compromettre comme le politique.

"C'est grotesque, c'est ubuesque, nous ne sommes pas en guerre civile". Jean-Claude Gaudin, maire de Marseille.

"Mobiliser l'armée face au grand banditisme n'est en aucun cas une solution. En revanche, la population de ces cités le vivrait comme un véritable appel à la guerre civile ! La seule réponse cohérente est de déployer, dans les plus brefs délais, de nouveaux moyens policiers, formés à gérer ce genre de conflits sur le terrain". Jean-Claude Gaudin, maire de Marseille.

01 août 2012

La question de la base française au Niger cache-t-elle celle de l'avenir de l'Armée de Terre ?


© Inconnu. Un ERC 90 "Sagaie".

L'ancien Président de la République, Nicolas Sarkozy, avait dans la foulée de son élection, commandé un nouveau livre blanc. Celui-ci a redéfini les périmètres de l'outil militaire français, et ses zones d'intervention. C'est une chose qui n'est pas faite très régulièrement : le premier livre blanc remonte à 1972 et le second à 1994 -sans oublier le quatrième qui pourrait arriver d'ici sous peu.

Cet ouvrage consacrait donc l'arc de crises. Une de ses conséquences, avec, peut être (on ne sait plus trop) celles de la RGPP (Révision Générale des Politiques Publiques) et celles de la, énième, réforme des Armées.

24 mai 2012

La nouvelle phalange macédonienne ?

© Star Wars Republic Commando. Soldats ARC (Advanced Recon Commando).

L’arrivée du système FELIN (Fantassin à Equipements et Liaisons INtégrées) a pu laisser certains évoquer l’expression d’ « hoplite numérique« . Alors que le système est actuellement essayé en Afghanistan, et qu’il le sera certainement sous d’autres cieux, d’autres innovations permettent d’envisager des évolutions encore plus radicales. Si l’introduction de ce système peut être comparé à l’apparition de la radio dans Cavalerie blindée, il faudrait peut être voir encore plus loin, et imaginer une recréation de la phalange macédonnienne…

15 mai 2012

Entretien avec Xander - L'esthétique du vaisseau de 74 canons

© Xander.






Bonjour Alexandre de Oliveira. Vous tenez le blog Xander -nom qui vous sert également de pseudonyme. Merci d'avoir accepté de répondre à quelques questions à propos de votre travail et d'un certain attrait pour la Mer et ses navires.


© Xander.





13 juillet 2011

Evolution du monde maritime et appropriation des mers, quelle stratégie pour la France ?



Chloé Maillier, l'administratrice en chef de Turquoises au large -qui continue son beau projet pédagogique à la rentrée avec la Marine nationale !- s'est rendue au colloque mentionné dans le titre. Cette dernière nous offre un compte-rendu, très soigné afin d'appréhender la teneur des échanges.

21 mars 2011

Rus Navy Intelligence



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© Inconnu. Croiseur porte-aéronefs Amiral Kuznetsov.

Un colloque, c'est très productif puisque j'ai pu y croiser Igor Delanoë. Ce doctorant de l'université de Nice prépare une thèse sur l'influence russe en Méditerranée. Le coeur de ce travail est comment la flotte Russe de la Mer Noire, ce qu'on appelle peu ou prou l'Eskadra, est un outil militaire au service de la géostratégie russe pour la Méditerranée. C'est une très belle thèse qui ne manquera pas de nous intéresser.

Pendant le colloque, il est intervenu sur ce thème : "La gestion du littoral oriental en Mer Noire pendant les campagnes caucasiennes des années 1830 1840 : blocus, appuis et exploitation". A l'heure où l'Afrique du Nord et la péninsule arabique sont secouées par des révoltes plus ou moins "sincères" ou "spontanées", il peut être très bon de découvrir ou de redécouvrir l'agissement des services dans le Caucase. Dans son intervention, le doctorant mettait en relief l'action de la flotte de la Mer Noire en soutien à la conquête dudit territoire par la Russie. Une des contrariétés de cette action maritime, c'était l'intervention étrangère par des moyens détournés, qu'il fallait bien sûr combattre pour Moscou. Ainsi, il a été expliqué que la Grande Bretagne faisait parvenir des armes aux peuples résistants à la conquête russe. Pourquoi ce soutien via les services ? Afin que de rendre difficile d'accès une zone qui ouvrirait l'une des portes des Indes à la Russie ! Oui, dès le XIXe siècle, c'était déjà, quelque part, la guerre d'Afghanistan. N'oublions pas qu'une fois la Mer Noire et la Mer d'Azov furent transformées en lac russe, la situation conduisit à la guerre de Crimée.

Tout ces travaux permettent à l'auteur de maîtriser l'histoire navale russe, et il sera plaisant de suive l'actualité de la Marine de Guerre de la République Fédérale de Russie à travers son blog, que je ne peux que vous recommander. Oui, le docteur entretien un blog. Je lui ai présenté les intérêts de cet outil. En réalité, je ne faisais que répéter ce qu'Olivier Kempf m'avait dit, argumentation qui m'avait alors convaincue ! Donc, un officier de l'Armée de Terre pousse à la création, directement et indirectement, de deux blogs de navalistes...

Ce nouveau blog sera bien sûr un très intéressant complément d'Ice Station Zebra de Daniel Besson qui s'intéresse lui aussi beaucoup à ces deux sujets que sont et la conquête du Caucase et de l'avenir de la Flotte Russe. Ces deux là ont beaucoup de chose à se dire (et personnellement je vais me mettre à apprendre à parler russe, c'est assez pratique) !

Il ne manquerait plus que Red-Stars.org reviennent en service pleinement actif et on parlerait alors d'une vague russe sur la blogosphère de défense francophone !

Bonne lecture !

05 janvier 2011

Meilleurs voeux pour l'année 2011 depuis le 24e fauteuil

http://www.archeosousmarine.net/images/seduisant_brest.jpg
© "Le port de Brest", huile de J.F. Hue, 1793, Musée de La Marine, Paris.

En l'an De Grasse deux mille onze nous vous souhaitons de bons voeux !