Le Marin présente le nouveau numéro de son hors-série Navires militaires, actuellement disponible dans les kiosques. Il vous est même possible de consulter quelques pages.
Étude des avant-projets demandés par l'organe ayant à charge la flotte à construire (Conseil Supérieur de la Marine, Conseil des Travaux, SCEM/PLANPROG, OCA Marine, ASF, etc) et présentés à l'autorité politique. L'enjeu consiste à déterminer comment la Marine engage ces projets dans le processus institutionnel (contrat opérationnel, plan naval ? Loi(s) de financement, etc) pour faire correspondre la flotte à construire avec la flotte répondant au problème militaire français. ISSN : 2271-1163
Les @mers du CESM
Les @mers du CESM - 19 avril 1944 : Le cuirassé Richelieu participe au bombardement de Sabang, base japonaise en Indonésie. Le navire français, ayant rejoint l’Eastern Fleet commandée par l’amiral britannique Somerville, prendra part à trois autres opérations visant des bases navales ennemies. Après 52 mois passés en mer, le bâtiment rentre à Toulon le 1er octobre 1944. À nouveau déployé en Asie du Sud-Est l’année suivante, le bâtiment assistera à la capitulation du Japon dans la rade de Singapour le 23 septembre 1945. | |
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04 novembre 2013
17 octobre 2013
"EurOTAN - Visions européennes de la défense et de la sécurité en questions" par Alain Joxe
Les grandes conférences de la métropole
sont l'expression de la politique
culturelle du Grand Lyon et de la ville de Lyon (un acteur de trop
?) pour mettre en valeur les travaux de recherche qui ont lieu sur ce
territoire. Alain JOXE est un sociologue qui est directeur d'études honoraire à l'EHESS et
président du CIRPES (Centre Interdisciplinaire de Recherche sur la Paix et d'Etudes Stratégiques).
05 avril 2013
Tigre de papier ou COMOCO - Vers une Armée de Terre expéditionnaire
© Inconnu. Un CAESAR au Mali.
La
première remarque que suscite l’observation de l’armée de terre est la
disproportion entre ses effectifs, ses équipements, et sa capacité à les
mobiliser en un temps donné.
Il suffit que quelques hommes soient envoyés ici et là sur des opérations extérieures, pour que l’asphyxie soit proche.
A
quoi donc sert-il d’être doté de 4000 VAB, 630 VBCI, 250 chars LECELRC,
quand l’usage de quelques uns épuise les capacités de nos armées.
Le débat sur la réduction du format de l’armée de terre est dépassé. La réalité l’a tué.
La vraie question est de savoir quel est le format cohérent permis par la capacité budgétaire de la France.
- Une absence manifeste de cohérence
L’adjectif
cohérent prend toute son importance, quand à côté de 3500 VAB, 2000
camions logistiques 8X8 Astra, 630 VBCI, nous ne disposons que de 4
drones HARFANG mis à rude épreuve par la campagne Afghane, de 2 NH90
(!!!) destinés à remplacer les valeureux mais antiques hélicoptère PUMA à
bout de potentiel, de 37 hélicoptères de combat TIGRE, 7 ans après leur
première mise en service ….
Le comble est atteint avec le parc de chars LECLERC :
- plus de 450 commandés par l’AT,
- 250 « en service »,
- 29 véritablement disponibles (parc d’alerte et de gestion…..) …..au sein de 4 ( ! ) régiments de chars de combat
Le
15 octobre 2008, lors de son audition par la commission de la défense
de l’assemblée nationale le général IRASTORZA (CEMAT de l’époque) « Statistiquement,
le char LECLERC…tombe en panne au bout de 36 heures de
fonctionnement ….. L’armée de terre dispose pour 140 chars LECLERC
opérationnels (le chiffre tombé depuis à 42) d’un crédit de
fonctionnement moteur de 2 h par semaine »
Les exemples pourraient être multipliés.
L’armée française serait-elle un tigre de papier ?
L’impression
est que le format et la configuration de l’AT sont davantage le
résultat de l’affrontement de groupes de pressions, que le fruit d’une
réflexion cohérente.
Le
lobby militaro-industriel, est souvent dénoncé. La pression des
chapelles internes à l’AT devrait également l’être. Ainsi l’acquisition
récente de 13 LRU, dont les perspectives d’emplois sont plus que
marginales laisse perplexe.
Une
armée compacte, mobile, disponible, bien articulée et bien entrainée,
formant un ensemble cohérent a-t-elle d’avantage de valeur militaire
qu’une armée de papier, issue de la juxtaposition de choix hétérogènes
dictés par l’influence des uns et des autres.
II – Le principe COMOCO
« Dans
un contexte où l’engagement en haute intensité est peu probable et où
les intérêts vitaux de la France sont préservés par la dissuasion, il
faut accepter que la vocation première de l’armée de terre soit
désormais d’être la défense des intérêts de la France au plus vite, au
plus loin et au moindre coût »Michel GOYA (DSI HS 27)
« Le rôle des forces terrestres et la nature de leurs opérations dimensionnantes,
devrait donc demeurer de nature expéditionnaire, mais avec des
temporalités différentes……. C’est sur la capacité à affirmer une
supériorité opérative claire que résideront les clés du succès ». Benoît BIHAN (DSI HS 27)
Quelques constats s’imposent :
1/ La France n’a plus d‘ennemi à ses frontières terrestres ;
2/
Le défense militaire de ses intérêts s’opère en conséquence au -delà de
ses frontières : espace littoral et aérien, espace terrestre extra
hexagonal ;
3/
Son armée de terre doit en conséquence être configurée dans un objectif
de projection, dont la poursuite dépend essentiellement de deux
paramètres liés : La masse à projeter, la capacité de projection.
4/
Son réseau d’alliances diplomatiques exclut la situation où la France
aurait à subir seule une attaque militaire majeure de ses intérêts.
Ces
préalables dessinent les contours d’une armée de terre capable de
conduire seule et avec succès hors de frontières hexagonales des combats
du fort au faible ou de participer à une action militaire
multinationale.
Trois caractéristiques fortes :
- La Cohérence
- La Mobilité,
- La Compacité
Il s’agit d’une armée de terre COMOCO (cohérente, mobile, compacte).
1/ Cohérente
Cela
a déjà été dit, l’armée de terre ne doit pas être conçue par
sédimentation de décisions successives. Son format, son organisation,
ses équipements doivent être déterminés dans leur ensemble dans un même
temps.
Le
choix ne doit pas se faire, à coût budgétaire équivalent, entre 4
hélicoptères TIGRE ou 3 drones MALE ou 10 VBCI, mais en considérant le
rapport indispensable entre nombre de drones, d’hélicoptères de combat
et des véhicules de combat d’infanterie pour mener une action efficace,
dans un cadre d’emploi de référence.
La
cohérence en matière d'équipement se traduit par l'absence de maillon
faible qui serait de nature à fragiliser l'ensemble du dispositif. Un
maillon faible c'est l'absence ou l'insuffisance d'équipement nécessaire
à la cohérence de l'ensemble (exemple des drones) ou un équipement
manifestement obsolète qui ruine l’efficacité permise par la qualité des
autres équipements.
2/ Mobile
La
mobilité opérative d’une force appelée à intervenir hors de son
territoire dépend des capacités de projection disponibles. Celles de la
France se limitent à deux vecteurs principaux : 3 BPC pour la voie
maritime, 50 hypothétiques A 400 M, à l’avenir, pour la voie aérienne.
Cette capacité est structurante. Elle doit commander le format, l’organisation et les équipements de la future AT.
La
capacité de projection aérienne, en particulier, devrait imposer le
gabarit des véhicules blindés appelés dans le cadre du programme
SCORPION à remplacer les AMX 10 RC, les SAGAIES et les VAB.
Un A 400 M peut transporter dans une soute de moins de 18 m de long une charge de 30t sur 4500kms.
*On
entend souvent que le VBRM, futur remplaçant des VAB, prendrait la
forme d’un véhicule blindé à roues de la classe des 20t. C’est une
hérésie, quand l’AT dispose d’un nombre suffisant de VBCI de 28t. Au
côté d’un EBRC de moins de 30t qui pourrait pour des raisons d’économie
et de logistique être issu du VBCI (train roulant et appareil propulsif)
les nécessités d’une projection d’urgence appellent des véhicules de la
classe des 10 t, comme le CRAB et le PVP XL de PANHARD. Ainsi ,3 A 400M
pourraient transporter à 4500 km, un module de 2 CRAB, 4 PVP XL et 3
VBL
3/ Compacte
La
compacité résulte naturellement des scénarios d’emploi de l’AT
(intervention asymétrique limitée et contribution à une force
multinationale), de la capacité de projection, et, en toutes hypothèses,
des contraintes budgétaires de la France.
En
matière militaire, le nombre est une qualité essentielle. Pour des
raisons de coût, les armées occidentales ne peuvent associer le nombre
et la qualité des équipements. Renoncer à des équipements performants,
c'est-à-dire à une forme de supériorité à priori sur l'adversaire, c'est
accepter la possibilité de pertes humaines nombreuses. Les sociétés
occidentales, qui refusent l'idée de la mort, ne peuvent faire ce choix.
L'occident, pour des raisons financières et socioculturelles est
condamné à choisir la course technologique comme palliatif à des
effectifs décroissants.
III - Proposition d’organisation
Peu
de moyens budgétaires et des moyens de projection limités signifient
d’évidence une armée de terre au format de nouveau réduit.
Les
conditions d’emploi envisagées conduisent à classifier les forces en
fonction de leur capacité de projection, et en corollaire de leur
puissance et de leur capacité à durer dans la zone de conflit.
Le recours systématique au GTIA lors des récentes OPEX, montre que l’organisation traditionnelle est devenue surannée.
Les
contraintes de projection et la variabilité des conflits soutiennent le
principe d’une armée modulaire, étant admis que cette modularité ne
doit pas affecter la cohésion.
Il est proposé pour résoudre ce paradoxe apparent un dispositif mixte :
- Une force d’engagement d’urgence constituée des forces spéciales de l’AT ;
- une force de projection rapide, privilégiant la mobilité opérative et la cohésion sur le couple puissance-protection, qui serait organisée autour d’un ensemble de modules autonomes formant des ensembles organiques, car appelés le plus souvent à opérer de conserve ;
- une force de décision, plus puissante mais moins mobile au niveau opératif, composée de modules autonomes, appelés à renforcer la force de projection rapide, sans lien organique entre eux.
Mobilité opérative | Couple puissance- protection | Durabilité | |
Force d'engagement d'urgence | maximale | faible | faible |
Force de projection rapide | forte | moyenne | moyenne |
Force polyvalente de renforcement | faible | forte | forte |
Forces de soutien | faible | - | forte |
Un exemple de format possible :
| ||
3 REG opérations spéciales | ||
| ||
1 Brigade haute mobilité (montagne) | ||
1 REG de chars légers (9 modules de 6 chars chenillés classe 30 t + une réserve de 6 chars, soit un total de 60 chars légers chenillés) | ||
3 REG infanterie (3 fois 9 modules de 9 VHM infanterie – 1 VHM Dépannage – 1VHM trans/PC – 1 VHM Drones -1 VHM sanitaire- 2 VBL MILAN, soit 351 VHM) | ||
1 REG artillerie (9 modules de 6 VHM Mortier 120 soit un total de 54 VHM mortier de 120, + 3 modules de 6 VHM JUMPER, soit un total de 18 VHM JUMPER) | ||
1 REG soutien haute mobilité | ||
1 Brigade parachutiste | ||
4 REG infanterie parachutiste (4 fois 9 modules de 3 CRAB+ 13 PVP XL +3 VBL, soit 108 CRAB + 468 PVP XL + 108 VBL) | ||
1 REG artillerie parachutiste (18 PVP XL Mortier 120 + 18 PVP XL JUMPER) | ||
1REG soutien parachutiste | ||
| ||
1 REG de char de combat (9 modules de 6 LECLERC + une réserve de 6 chars, soit un total de 60 LECLERC + 9 modules de 2VBCI mortier de 120 mm sous tourelle+ 1 module de réserve, soit 20 VBCI mortier de 120) | ||
2 REG de cavalerie blindée (2 fois 9 modules de 6 EPRC + une réserve de 6 EPRC, soit un total de 120 EPRC) | ||
4 REG infanterie (4 fois 9 modules de 9 VBCI – 1 VBCI MPC – 1 VBCI Dépannage – 1 VBCI Drones -1 VBCI sanitaire-– 2 VBL, soit 468 VBCI) | ||
2 REG artillerie (2 fois 9 modules de 6 CAESAR 155, soit 108 CAESAR 155 + 2 fois 3 modules de 6, soit 36 CAESAR FIRE SHADOW ) | ||
1 REG artillerie AA (MICA + C-RAM ) | ||
1 REG Renseignement (RADAR +DRONES) | ||
1 Reg soutien | ||
ALAT |
La terminologie « régiments (REG) » et « brigades » est utilisée par commodité de langage.
Un
« régiment » serait formé de modules pouvant intervenir isolément.
Cette autonomie, qui pourrait être comparée à celle des cellules dans un
corps humain, présente l'avantage de permettre une continuité d'action
en cas de perte d'un ou plusieurs modules. Elle permet également
d'adapter la taille du "régiment" aux contraintes budgétaires, en
ajustant le nombre de modules qui le constituent, sans ruiner la
cohérence du dispositif.
Ainsi
un module d’infanterie parachutiste pourrait être composé comme suit : 9
PVP XL infanterie (72 voltigeurs) – 3 CRAB 25 mm - 1 PVP XL trans/PC
- 1 PVP XL Drones -1 PVP dépannage - 1 PVP XL soutien sanitaire-2 VBL
MILAN -1 VBL MISTRAL. L’ensemble serait transportable par 5 A 400 M.
Un
module d’artillerie parachutiste pourrait être composé comme suit : 6
PVP XL M 120 (ou JUMPER) – 3 VBL appui – 1 VBL MISTRAL – 1 PVP XL trans/PC – 1 PVP XL Drones . L’ensemble serait transportable par 4 A 400M.
09 octobre 2012
Qu’est ce qu’un trois-ponts ?
L'auteur du blog "Trois Ponts"
me fait l'honneur de répondre longuement et de manière très complète à
quelques questions concernant ces navires de ligne : un grand merci à
lui !
21 septembre 2012
Crédibilité de la doctrine nucléaire nationale face à l’évolution de l’anti-missile balistique, par le général Pinatel
© DGA. Le SNLE Le Téméraire a été admis au service actif en 1999.
Le
général Pinatel me fait l’honneur de m’expliquer son point de vue sur
la question de la DAMB (Défense Anti-Missile Balistique) de territoire
otanienne (couplée à l’ABM -Anti-Ballistic Missile- américain)
et sur ses conséquences sur la dissuasion nationale. Ce qui suit est le
résultat de ce dialogue où j’ai pu lui demander si l’ABM américain
pouvait avoir quelques conséquences sur l’évolution de notre dissuasion
nucléaire.
Quand le général mène la fronde contre la défense antimissiles balistique de territoire de l’EPAA (European Phased Adaptive Approach)
de l’administration Obama, l’équivalent de l’ABM américain, en Europe,
il aime revenir sur les fondements des dissuasions nucléaires américaine
et française.
Les
explosions des deux premières bombes nucléaires américaines sur
Hiroshima et Nagasaki (1945) s’accompagnent après la guerre d’une
volonté de « dominance » des États-Unis qui souhaitent tirer
les bénéfices politiques du pouvoir nucléaire et ne le partager avec
personne. Dès lors, ils commencent à pratiquer une dissuasion « du fort au faible » c’est-à-dire à développer une capacité de première frappe
suffisante pour désarmer tout adversaire potentiel et se mettre ainsi à
l’abri de ses représailles. C’est l’explosion de la bombe atomique
soviétique (à fission, le 29 août 1949) qui va permettre l’apparition
d’un dialogue entre les deux puissances nucléaires. Mais c’est aussi
l’apparition d’autres bombes -anglaise, française et chinoise- qui
achève de complexifier le jeu nucléaire qui n’est plus un « je »
américain. Dès lors, les États-Unis ne peuvent retrouver la suprématie
nucléaire, c’est-à-dire une capacité de première frappe sans risque de
représailles, qu’en disposant d’un bouclier anti-missile efficace.
Ainsi, le RIM-8 Talos, engin anti-aérien de la série « T » des
années 60, était semble-t-il une première ébauche d’une défense contre
les missiles balistiques pour l’US Navy.
La
crise de Cuba de 1962 permet de calmer le jeu et de poser les bases
d’un dialogue fructueux (sur le plan nucléaire) entre les deux
supergrands, et le traité ABM de 1972 enterre, pendant un temps, toutes
prétentions à casser l’équilibre qui s’est construit entre les deux
grands.
La dernière bataille de la
Guerre froide a été la relance de la course aux armements dans les
années 80, dont le point d’orgue est le lancement de l’Initiative de Défense Stratégique (IDS) du président Reagan, qui a conduit à l’épuisement de l’économie soviétique.
L’URSS
disparue, l’IDS et ses suites perdureront : le traité ABM n’est plus
là, et les États-Unis tentent de saisir l’occasion pour reconstruire une
« dominance » de l’espace mondial, tant par des moyens
conventionnels que nucléaires. L’ABM doit permettre de retrouver la
suprématie nucléaire perdue avec l’apparition de la bombe soviétique et
la prolifération nucléaire. La mise sur pied d’un système antimissile
efficace permettrait de mettre en échec la dissuasion « du faible au
fort » des nouvelles ou potentielles puissances nucléaires.
En
effet et c’est une constante, une partie importante des stratèges
américains ont toujours refusé la logique de la dissuasion nucléaire car
elle revient à accepter, si elle échoue, de subir une première frappe
adverse avant de riposter. Or la mentalité «cow-boy» est
fortement ancrée chez les militaires et les stratèges américains : c’est
celui qui dégaine et qui tire le plus vite qui sort vainqueur de
l’affrontement. C’est dans cette logique et, en dehors de tout mandat de
l’ONU, que, prenant prétexte de l’existence d’armes de destruction
massive en Irak, le texan George Bush junior a décidé la seconde Guerre
du Golfe ; c’est pour cela aussi qu’un débat existe actuellement aux
États-Unis sur la nécessité de lancer une attaque préemptive contre le
potentiel nucléaire iranien en cours de constitution.
Il va s’en dire que le pari est audacieux, au regard des résultats de l’avatar actuel de l’ABM : les missiles GBI (Ground Based Interceptor) ont, au mieux, une réussite de 50%. Ce sont plutôt les missiles SM-3 de l’US Navy
(couplés au système AEGIS) qui donnent les meilleurs résultats lors des
essais : autour de 70%. Bien entendu, il est difficile de parler d’un
bouclier avec une telle passoire. L’interception de missiles balistiques
d’une portée de 2000 km, comme celle du missile iranien Sejil 2,
est, en effet, très difficilement réalisable car, entre le moment où le
tir est décelé et la phase d’impact, on ne dispose que de 15 à 20
minutes pour prendre une décision, lancer un missile anti-missile et
espérer toucher une cible qui fonce vers la terre à une vitesse de 4 à 6
km par seconde.
Pour
qu’un bouclier anti-missile soit efficace, il devrait être capable
d’arrêter à coup sûr un missile équipé d’une tête nucléaire. Cela
implique un système en alerte 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, un
processus de décision quasi-automatique et surtout une capacité
démontrée d’interception de 100%. En effet, on ne peut pas accepter le
risque qu’un missile équipé d’une tête nucléaire atteigne son objectif.
Or il n’existe aucune preuve qu’un taux d’interception voisin de 100%
soit réalisable.
C’est
pour cette raison que tous les théoriciens de l’arme nucléaire, et en
particulier Lucien Poirier et le Général Gallois, ont bâti une stratégie
basée sur la dissuasion nucléaire du faible au fort:
signifier à tout agresseur potentiel qu’une attaque qui mettrait en
cause nos intérêts vitaux entraînerait automatiquement des représailles
nucléaires massives sur ses villes. Dès lors, il n’est pas question de
concurrencer les deux grands et de tenter de pouvoir annihiler une force
considérablement supérieure. Mais les forces stratégiques françaises
doivent pouvoir mener des représailles, même après une première frappe
destinée à détruire son potentiel nucléaire. Le vocable utilisé sera
l’expression de « capacité de seconde frappe » et les SNLE seront
l’incarnation de cette expression. Il y aura également une composante
terrestre fixe (le plateau d’Albion).
Le
problème inhérent à cette capacité de dissuasion est qu’elle
s’apparente à une stratégie du tout ou rien. Que faire donc si les
divisions soviétiques menaçaient d’envahir notre territoire? La
stratégie de dissuasion est alors complétée par la notion « d’ultime
avertissement » que doivent donner à l’adversaire l’arme nucléaire
tactique, lui signifiant que nous considérons que nos intérêts vitaux
sont mis en cause par son agression. Les forces atomiques nationales
vont ainsi s’articuler entre celles dédiées à l’ultime avertissement
(Mirage IV, missiles Pluton) et celles devant causer des dommages
considérables à un éventuel assaillant, au point de le dissuader de
tenter l’aventure.
Les
vecteurs nucléaires français ont très bien traversé les épreuves à coup
de modernisations successives. D’une part, des « aides à la
pénétration » ont même été inclues pour tenir compte des développements
en URSS et aux États-Unis, puis face aux développements américains issus
de l’IDS. D’autre part, les missiles balistiques français embarqués à
bord des SNLE ont évolué du M-2 au M-51. Cette succession d’évolutions a
permis d’augmenter considérablement les zones de patrouilles des
navires de la FOST (grâce à l’augmentation de la portée des missiles
embarqués), et par conséquence, de renforcer leur crédibilité rendant
leur localisation encore plus difficile.
Enfin,
est-ce que la France doit participer à la défense antimissile
balistique de territoire, adoptée dans son principe à l’OTAN ? La
réponse découle des explications du général Pinatel : non, ce n’est pas
l’intérêt de la France de favoriser tout ce qui peut affaiblir sa
capacité de dissuasion nucléaire. Mais surtout, l’EPAA de
l’administration Obama (relance des sites de l’ABM américain en Europe
suite à l’échec du projet de l’administration Bush -installation de
missiles GBI-, qui ne permettait aucune protection des territoires
européens contre les menaces balistiques) n’est dirigée, dans les
discours, que contre la « menace » iranienne. Dans cette optique, il y
aura l’installation et le pré positionnement de missiles SM-3 (les
destroyers Arleigh Burke AEGIS/SM-3 de la Rota, Espagne, et d’autres destroyers et croiseurs AEGIS en mer Noire). Hors, et comme l’explique très bien le général dans un de ses billets, la menace iranienne n’existe pas contre l’Europe !
Les
développements de l’ABM servent, notamment, et peut être
essentiellement, à faire tourner les industries de défense américaines.
Une partie des Européens y répondent favorablement en s’équipant de
missiles SM-3 pour leurs navires, construits autour du système AEGIS
qu’ils ont acquis. C’est par exemple le cas des Pays-Bas
qui viennent de franchir le pas en annonçant la mise à jour du système
d’armes de leurs navires et l’acquisition de missiles SM-3. Les marines
de la Norvège, du Danemark et de l’Espagne pourraient franchir également
le pas. Dans ce cas ou bientôt ces cas, il ne s’agit pas tant de
répondre à une menace. Comme pour le programme JSF, et surtout, comme
pour le contrat du siècle où ces pays ont acquis des F-16, il est
question d’acheter la présence américaine en Europe : ces dépenses
militaires aux États-Unis compensent les frais de stationnement des
troupes américaines en Europe.
Pour
conclure, le général Pinatel insiste bien pour affirmer que la
dissuasion nucléaire française est crédible et que c’est notre seule
assurance pour nous garder de tout acte hostile recourant à des « armes
terribles » (discours de l’Île Longue de 2006 du Président Chirac) et
qu’elle nous permet de préserver notre rang.
01 septembre 2012
Amiens, Marseille : ascension aux extrêmes ?
© Collection Marc Pilot. Un canon de 75mm sur le boulevard Alsace-Lorraine (Amiens) en 1940.
Ce
genre de quartier ressemble un peu à tout les autres morceaux de ville
qui, en France ou ailleurs, par divers cheminements, a fini par se
ghettoïser. Dans un premier temps, les premières populations de ces
"quartiers HLM" s'en allèrent s'installer ailleurs, pour d'autres formes
de logement. Il ne restait donc que les populations qui ne pouvaient
pas s'offrir une autre forme de logement.
La
"crise" passant par là, et la population de ces quartiers
s'uniformisant, ces territoires s'appauvrissent. Une partie des
activités économiques et administratives s'en vont ailleurs, notamment
pour suivre les populations qui ont besoins de ces services et qui ne
sont plus là. La violence monte en puissance, limite après limite. Elle
est dans un premier temps, manifestement, le signe d'un ennui, d'un
désespoir, d'un appel à l'aide. Dans un second temps, la violence gagne
une signification : c'est un langage, un dialogue, une conversation.
Il
s'agit pour ses émetteurs d'envoyer un signal aux multiples facettes
mais à la signification simple et unique : le territoire change de
maître. C'est un temps quasi féodal où tout et n'importe quoi échappe
aux règles de l'ancien empire politico-administratif qu'était la
République. Des activités économiques qui sont normalement prohibées
dans l'empire finissent par se développer sur le territoire. Elles
occupent les acteurs. Elles catalysent aussi la violence puisque les
seigneuries se recomposent et vont s'adapter à la modification des flux
économiques et financiers. De nouveaux seigneurs émergent. La violence
n'est plus le signe de l'ennui mais bien l'expression d'une lutte de
réseaux pour le pouvoir. "Il est rare qu’un État veuille la guerre
pour elle-même, mais il veut être puissant et cette volonté provoque
finalement une situation qui rend la guerre inévitable" disait Julien Freund (L’essence du politique, op. cit., p. 596).
Cette
lutte remodèle les structures sociales du territoire, tout s'adapte
autour du nouvel ordre qui se met en place. La paix sociale, nouvelle
version, s'achète elle aussi. Comment ? Par la même monnaie que celle de
l'ancien maître : de l'argent pour pourvoir au bonheur matériel des
habitants du territoire. Une partie d'entre eux est directement
intéressé aux activités économiques illégales. Comme le dit Abou Djaffar ("Ne pas voir que l’argent de la drogue fait vivre des quartiers entiers avec l’assentiment de la République, c’est être aveugle").,
les activités économiques du territoire ne sont pas encore régulées. Il
faut un nouveau maître, et il veut presque automatiquement tenter de
gagner les monopoles économique et celui de l'autorité. La lutte fait
donc rage entre les divers seigneurs pour étendre leur fief. Il s'ensuit
alors une spirale ascendante où les acteurs tentent de grossir et de
supprimer leurs rivaux.
Le
pouvoir se complexifie avec l'apparition des châtellenies : des
seigneuries dont le seigneur est nommé par un autre au pouvoir plus
grand. Il doit répondre de ses activités à son suzerain. Les derniers
vestiges de l'ancien empire tendent alors à tomber dans cette lutte pour
le pouvoir : les services publiques s'en vont ou fonctionnent tant bien
que mal.
Il
y a même un phénomène qui apparaît : des frontières. Les seigneurs et
leurs porte-armes s'occupent de qui à le droit d'intervenir, de venir ou
de passer sur le territoire. Ce sont les "officiers" qui sont les plus
particulièrements visés par ce filtrage. Les nouveaux maîtres en sont
déjà à la régulation des activités du territoire. L'ancien empire a beau
envoyer ses troupes, elles ne peuvent même pas arbitrer les luttes
entre seigneurs, et encore moins reprendre pied.
La
bataille fait rage chaque jour entre les seigneurs et les vassaux. Il y
a deux issues à cette situation : ou bien il y a un vainqueur et la
violence s'apaise, ou bien le poids des seigneurs s'équilibrent et la
violence s'auto-entretient.
C'est
une histoire suffisamment abstraite pour s'appliquer à tous les
quartiers de France qui sont en perdition. C'est bien un défi d'autorité
qui est lancé à l'Etat.
Cette lutte pourrait très bien s'apparenter à un phénomène décrit par Clausewitz : la guerre. Elle "est un acte de violence destiné à contraindre l’adversaire à exécuter notre volonté" (Carl von Clausewitz, De la guerre, chap. 1, §2, p. 51). Et selon Clausewitz, la guerre est un le moyen d'une lutte politique puisque, "en
effet, elle exprime directement la réalité fondamentale et
caractéristique de la politique : la domination de l’homme sur l’homme" (Carl von Clausewitz, De la guerre, chap. 1, § 24, p. 67).
Il y a eu la constitution de seigneuries dans ces quartiers. Elles ont
évolué jusqu'à un état féodal où il y a seigneurs et vassaux. Les
premiers ont acquis le pouvoir de ban, les seconds exécutent. Les
seigneuries les plus importantes disposent de troupes, de revenus
fonciers, d'une justice, des moyens de réguler les activités
économiques, etc... L'Etat n'a pas disparu. Mais il s'agit bien d'une
lutte politique entre des seigneurs locaux et l'Etat. Il s'agit de
l'affrontement de volontés et la place de l'Etat comme détenteur
légitime de la violence et maître politique suprême est contesté. C'est
pourquoi il s'agit de réponses du politique qui sont attendues.
Il
y a eu des émeutes dans la ville d'Amiens. Le déchaînement de violences
est loin d'être extraordinaire pour une ville qui est habitué à ce que
les affaires de ses quartiers du Nord se règlent par bagarres de rues et
de multiples incendies de voitures. L'éruption de violences sort de
l'ordinnaire par sa concentration de destructions sur laps de temps très
court et la destruction de biens qui ne sont habituellement pas visés
(dont une maternelle, cible devenue habituelle des émeutiers en France).
Le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, s'est empressé de se rendre
sur place et d'ordonner le renfonrcement des effectifs de la police. Des
journliastes lui demandèrent combien de temps ces pomiers anti-émeutes
allaient rester sur place ? Le ministre de répondre qu'ils resteraient
jusqu'à ce que les lois de la Répulibuqe s'appliquent dans les quartiers
Nords d'Amiens. La réponse du politique est forte, mais elle
correspondait à quoi ? Il y a deux réponses possibles : ou bien le
ministre voulait dire que les policiers supplémentaires étaient destinés
à réguler une violence extraordinnaire par rapport à celle qui est
quotidienne, ou bien qu'il fallait revenir au statu quo antes,
c'est-à-dire revenir à avant le temps féodal. Le défi n'est pas le même,
et pourtant, l'Etat est défié depuis de très nombreuses années.
A
Marseille, le problème semble être rigoureusement le même : il y a une
féodalisation des quartiers nords de la ville et la guerre fait rage
pour savoir qui sera le maîre des territoires féodaux et des activités
économiques illicites. Cette guerre des féodaux de Marseille est plus
médiatisée car cette contrée est plus riche, et peut donc se fournir
plus aisément en armes (là où à Amiens les armes de guerres se font peut
être plus rare par manque de moyens, même si elles sont très
présentes). Une sénatrice, Samia Ghali, a
lancé une demande attendue : l'envoi de l'Armée à Marseille. Abou
Djaffar condamne fermement, avec une "certaine ironie", l'appel de la
sénatrice à la force militaire. Deux personnes expliquent très bien le
pourquoi de cette demande :
- Julien Freund disait que l'Armée "est le détenteur dans l’État de la violence suprême et extrême, à laquelle celui-ci a recours en période exceptionnelle, soit que la situation lui paraisse désespérée, soit que l’adversaire ait dépassé le seuil de ce qu’il juge tolérable" (Julien Freund, "La finalité de l’armée", Études polémologiques, n° 20-21, avril-juillet 1976, pp. 31-47).
- Abou Djaffar disait donc : "Alors, donc, l’armée. Pourquoi l’armée ? Pardi, pour remplacer la police. Ah. Mais alors, dans ce cas, si on remplace la police par l’armée, c’est pour faire la guerre, non ? Pour faire ce que la police n’a pas le droit de faire, comme, je ne sais pas moi, tirer sans sommation, tirer pour tuer, tabasser les prisonniers (Les quoi ? Les suspects ? Ah non, désolé, il n’y aura plus de suspect en zone de combat, il y aura des ennemis et des civils). A nous, les perquisitions sans commission rogatoire, les arrestations arbitraires, les violences volontaires. Ben oui, parce que, Madame la Sénatrice, vous ne croyez pas que le déploiement du 126e RI, du 2e REP ou du 17e RGP va permettre de garantir les droits constitutionnels des citoyens ? Si ?"
Que
ces situations soient répondent rigoureusement aux caractéristiques de
la guerre, c'est un débat. Il n'est pas tellement question de le
trancher, mais bien de constater que nous avons un beau laboratoire en
France. Si nous avions pu l'avoir avant la guerre d'Afghanistan, cela
eut été une grande chance. L'objet d'étude de ce laboratoire est
précisément le moment où un conflit bascule. Comment est-ce que la
situation en Afghanistan a basculé d'une guérilla larvée et embryonnaire
à une guérilla permanente ? Comment est-ce que les choses ont dégénéré
en Syrie ? Pourquoi pas comparer avec l'Algérie, l'Indochine ? Il serait
osé de tout comparer, et ce n'est pas nécessaire. Mais dans tout ces
théâtres, il a fallu redevenir maître de sa volonté pour l'emporter, ne
plus être dépendant du comportement que nous impose l'adversaire, pour
gagner la "guerre".
En
France, l'Etat entend bien être le maître ultime du pouvoir : celui
d'édicter les normes, de réguler les activités économiques et d'assurer
la sécurité, ce ne sont là que quelques exemples. Il s'agit presque
d'une obligation car si l'Etat ne possède pas ses pouvoirs par un moyen
ou un autre il se met en danger face à d'autes maîtres qui administrent
quelques territoires. C'est la même chose en Syrie. En Afghanistan il
s'agissait aussi de construire un Etat pouvant survivre face à d'autres
rivaux politiques.
Et
donc, il y a ce formidable laboratoire où l'on peut observer de quelle
manière se construit ces acteurs politiques rivaux. Tout comme il est
possible d'observer la très difficile entreprise pour faire imposer
"son" autorité à des territoires qui ne la veulent pas. C'est une
entreprise complexe et difficile et qui est multiformes. L'Union
européenne serait la spécialiste des opérations "civilo-militaires" :
des opérations guerrières où une mission civile sert à construire
l'administration du territoire à pacifier.
Cette
entreprise de pacification et de reconquête de l'autorité de l'Etat ou
de la puissance désireuse de la gagner suppose une volonté farouche. Les
acteurs d'en face cherchent bien souvent à atteindre un but qui peut
aussi bien être leur prospérité économique et le développement de leur
modèle. Ils connaissent les risques de la guerre, ils en respectent les
règles. Face à de tels acteurs, il faut une volonté de fer et un
savoir-fair politique qui fait honneur au Politique. En France il y a
des ZEP, des ZUP et des ZSP : est-ce que face aux évènements d'Amiens ou
de Marseille le Politique s'est-il mobilisé pour réunir ses moyens, les
coordonner et engager une lutte pour reconquérir son autorité ? La
volonté est la clef de la réussite d'une telle entreprise. C'est un
combat de titans pour les politiques que de gagner le temps nécessaire
pour concentrer suffisamment d'attention sur un tel problème afin de
construire les outils pour le régler.
S'il
ne s'agit pas d'un processus d'ascension aux extrêmes, tel que théorisé
par Clausewitz, il s'agit bien d'une guerre, ou tout du moins, d'un
phénomène qui s'en approche. Abou Djaffar le dit parfaitement bien : le
nombre de personnes tuées à Marseille pour règlements de compte liés au
trafic de drogue n'est que de 19 personnes. Ce n'est rien : chaque année
10 personnes meurt à cause de requins quand c'est 100 personnes qui
décèdent par la faute de méduses. C'est là que le basculement peut être
intéressant à étudier, là où il n'a peut être pas pu être très
perceptible en Afghanistan ou ailleurs. La résonnance médiatique donnée à
ces évènements montent crescendo, sans forcément qu'il y ait de rapport
avec leur importance relative. Le pouvoir politique suprême est défié,
qui plus est, sur son propre territoire. Il doit s'engager, et le faire
de façon crédible : on ne rétablit pas les lois républicaines dans les
quartiers nords d'Amiens en quelques jours avec quelques cars de
policiers et de CRS. Il y a aussi l'intervention d'autres acteurs qui
par intérêt ou par maladresse (terrible force que la maladresse) peuvent
tout faire basculer. Imaginez que l'intervention de l'Armée à Marseille
devienne une demande récurrente des français, de la société ? Les
politiques doivent gérer une telle ascencion : le Président de la
République et ses ministres de l'Intérieur et de la Défense ont répondu
que non, l'Armée n'interviendrait pas. Elle a beau intervenir en Italie
pour tenter de supprimer les mafias, et pourtant, elles sont toujours
là.
Nous
sommes à moment clef où l'Etat est ouvertement défié. Sa réponse est de
temporiser. Cela fonctionne assez bien. Sauf que depuis que cette
solution est utilisée faute de mieux, les seigneuries prospèrent et
s'étendent. Il y a donc les deux autres réponses qui peuvent encore être
apportées : la reconquête administrative par les services concernés ou
bien le recours à l'Armée et tous les risques que cela implique. Il n'a
pas encore été question des risques de collisions qui peuvent intervenir
avec une flambée de violences face à des populations qui souffrent et
des acteurs qui ne font pas que du commerce : quid des agents
déstabilisants qui prêchent des discours religieux ou autre pour gagner
les cœurs et les esprits ? Il ne faudrait pas leur offrir un terreau
extra-ordinaire.
Il y a eu bien des débats sur la contre-insurrection, les opérations anti-guérilla, la pacification et encore bien d'autres choses. Ce qui se passe à Amiens et Marseille est une lutte de pouvoir. L'Etat a tous les outils pour rétablir la légalité républicaine. Mais il doit faire face à deux défis : réguler le processus de la violence et construire une volonté de réussir sur le long terme.
Le dernier livre blanc évoquait un "continuum entre la sécurité et la Défense". Il est difficilement perceptible à Amiens et Marseille : s'il faut les forces militaires pour combattre le trafic de drogues à l'extérieur de nos frontières, elles ne sont pas nécessaires pour intervenir dans nos quartiers perdus. Il faut des douaniers, des policiers pour réguler les trafics, et bien d'autres services encore. Il ne faut pas des patrouilles de blindés. Même, les personnes visées s'en accomoderaient très bien, comme cela a pu être vu ailleurs. L'Etat perdrait de sa superbe et de son autorité. C'est à questionner la pertinence de ce continuum.
Il y a eu bien des débats sur la contre-insurrection, les opérations anti-guérilla, la pacification et encore bien d'autres choses. Ce qui se passe à Amiens et Marseille est une lutte de pouvoir. L'Etat a tous les outils pour rétablir la légalité républicaine. Mais il doit faire face à deux défis : réguler le processus de la violence et construire une volonté de réussir sur le long terme.
Le dernier livre blanc évoquait un "continuum entre la sécurité et la Défense". Il est difficilement perceptible à Amiens et Marseille : s'il faut les forces militaires pour combattre le trafic de drogues à l'extérieur de nos frontières, elles ne sont pas nécessaires pour intervenir dans nos quartiers perdus. Il faut des douaniers, des policiers pour réguler les trafics, et bien d'autres services encore. Il ne faut pas des patrouilles de blindés. Même, les personnes visées s'en accomoderaient très bien, comme cela a pu être vu ailleurs. L'Etat perdrait de sa superbe et de son autorité. C'est à questionner la pertinence de ce continuum.
Ces
deux laboratoires sont vraiment très intéressants : quand est-ce qu'un
cap est franchi dans la violence au point de faire basculer une
situation d'un désordre civil à une situation de guerre ? Comment
peut-on reconstruire une légalité tout en évitant une montée aux
extrêmes ? Comment jugule-t-on la violence ? Comment construit-on une
volonté pour parvenir au bout d'une telle bataille ? Comment rétablit-on
la hiérarchie de l'autorité avec un Etat au sommet ? Peut-on placer un
Etat au sommet de la hiérarchie de l'autorité partout ?
Il faut donc une volonté, diffuser cette volonté, des discours, une façon de penser, une idéologie ou une doctrine, et construire les outils pour parvenir au but fixé. Il faut définir ce dernier de manière suffisamment précise pour qu'il puisse être atteint. Il faut penser le rapport à la violence. Il faut savoir comment bouleverser la hiérarchie sociale pour la remodeler. Il faut donc l'intervention du politique. L'Armée n'est que l'outil ultime du politique, elle ouvre la voie à une autorité pilotée par le politique à qui l'on demande souvent d'assurer la sécurité et l'ordre dans une sorte de contrat social. Mais en définitive il faut surtout l'intervention de la qualité essentielle du politique : la compromission. Il n'y a que le politique pour faire des compromis, se compromettre et compromettre les autres pour déstabiliser un système social pour mieux le reconstruire. Le militaire ne sait pas faire, il n'a pas la souplesse nécessaire car il ne peut pas compromettre comme le politique.
Il faut donc une volonté, diffuser cette volonté, des discours, une façon de penser, une idéologie ou une doctrine, et construire les outils pour parvenir au but fixé. Il faut définir ce dernier de manière suffisamment précise pour qu'il puisse être atteint. Il faut penser le rapport à la violence. Il faut savoir comment bouleverser la hiérarchie sociale pour la remodeler. Il faut donc l'intervention du politique. L'Armée n'est que l'outil ultime du politique, elle ouvre la voie à une autorité pilotée par le politique à qui l'on demande souvent d'assurer la sécurité et l'ordre dans une sorte de contrat social. Mais en définitive il faut surtout l'intervention de la qualité essentielle du politique : la compromission. Il n'y a que le politique pour faire des compromis, se compromettre et compromettre les autres pour déstabiliser un système social pour mieux le reconstruire. Le militaire ne sait pas faire, il n'a pas la souplesse nécessaire car il ne peut pas compromettre comme le politique.
"C'est grotesque, c'est ubuesque, nous ne sommes pas en guerre civile". Jean-Claude Gaudin, maire de Marseille.
"Mobiliser l'armée face au grand banditisme n'est en aucun cas une solution. En revanche, la population de ces cités le vivrait comme un véritable appel à la guerre civile ! La seule réponse cohérente est de déployer, dans les plus brefs délais, de nouveaux moyens policiers, formés à gérer ce genre de conflits sur le terrain". Jean-Claude Gaudin, maire de Marseille.
"Mobiliser l'armée face au grand banditisme n'est en aucun cas une solution. En revanche, la population de ces cités le vivrait comme un véritable appel à la guerre civile ! La seule réponse cohérente est de déployer, dans les plus brefs délais, de nouveaux moyens policiers, formés à gérer ce genre de conflits sur le terrain". Jean-Claude Gaudin, maire de Marseille.
01 août 2012
La question de la base française au Niger cache-t-elle celle de l'avenir de l'Armée de Terre ?
L'ancien
Président de la République, Nicolas Sarkozy, avait dans la foulée de
son élection, commandé un nouveau livre blanc. Celui-ci a redéfini les
périmètres de l'outil militaire français, et ses zones d'intervention.
C'est une chose qui n'est pas faite très régulièrement : le premier
livre blanc remonte à 1972 et le second à 1994 -sans oublier le
quatrième qui pourrait arriver d'ici sous peu.
Cet
ouvrage consacrait donc l'arc de crises. Une de ses conséquences, avec,
peut être (on ne sait plus trop) celles de la RGPP (Révision Générale
des Politiques Publiques) et celles de la, énième, réforme des Armées.
24 mai 2012
La nouvelle phalange macédonienne ?
© Star Wars Republic Commando. Soldats ARC (Advanced Recon Commando). |
L’arrivée du système FELIN (Fantassin à Equipements et Liaisons INtégrées) a pu laisser certains évoquer l’expression d’ « hoplite numérique« .
Alors que le système est actuellement essayé en Afghanistan, et qu’il
le sera certainement sous d’autres cieux, d’autres innovations
permettent d’envisager des évolutions encore plus radicales. Si
l’introduction de ce système peut être comparé à l’apparition de la
radio dans Cavalerie blindée, il faudrait peut être voir encore plus
loin, et imaginer une recréation de la phalange macédonnienne…
15 mai 2012
Entretien avec Xander - L'esthétique du vaisseau de 74 canons
© Xander. |
Bonjour Alexandre de Oliveira. Vous tenez le blog Xander
-nom qui vous sert également de pseudonyme. Merci d'avoir accepté de
répondre à quelques questions à propos de votre travail et d'un certain
attrait pour la Mer et ses navires.
© Xander. |
13 juillet 2011
Evolution du monde maritime et appropriation des mers, quelle stratégie pour la France ?
Chloé Maillier, l'administratrice en chef de Turquoises au large
-qui continue son beau projet pédagogique à la rentrée avec la Marine
nationale !- s'est rendue au colloque mentionné dans le titre. Cette
dernière nous offre un compte-rendu, très soigné afin d'appréhender la
teneur des échanges.
21 mars 2011
Rus Navy Intelligence
© Inconnu. Croiseur porte-aéronefs Amiral Kuznetsov.
Un
colloque, c'est très productif puisque j'ai pu y croiser Igor Delanoë.
Ce doctorant de l'université de Nice prépare une thèse sur l'influence
russe en Méditerranée. Le coeur de ce travail est comment la flotte
Russe de la Mer Noire, ce qu'on appelle peu ou prou l'Eskadra, est un
outil militaire au service de la géostratégie russe pour la
Méditerranée. C'est une très belle thèse qui ne manquera pas de nous
intéresser.
Pendant le colloque, il est intervenu sur ce thème : "La gestion du littoral oriental en Mer Noire pendant les campagnes caucasiennes des années 1830 1840 : blocus, appuis et exploitation". A l'heure où l'Afrique du Nord et la péninsule arabique sont secouées par des révoltes plus ou moins "sincères" ou "spontanées", il peut être très bon de découvrir ou de redécouvrir l'agissement des services dans le Caucase. Dans son intervention, le doctorant mettait en relief l'action de la flotte de la Mer Noire en soutien à la conquête dudit territoire par la Russie. Une des contrariétés de cette action maritime, c'était l'intervention étrangère par des moyens détournés, qu'il fallait bien sûr combattre pour Moscou. Ainsi, il a été expliqué que la Grande Bretagne faisait parvenir des armes aux peuples résistants à la conquête russe. Pourquoi ce soutien via les services ? Afin que de rendre difficile d'accès une zone qui ouvrirait l'une des portes des Indes à la Russie ! Oui, dès le XIXe siècle, c'était déjà, quelque part, la guerre d'Afghanistan. N'oublions pas qu'une fois la Mer Noire et la Mer d'Azov furent transformées en lac russe, la situation conduisit à la guerre de Crimée.
Pendant le colloque, il est intervenu sur ce thème : "La gestion du littoral oriental en Mer Noire pendant les campagnes caucasiennes des années 1830 1840 : blocus, appuis et exploitation". A l'heure où l'Afrique du Nord et la péninsule arabique sont secouées par des révoltes plus ou moins "sincères" ou "spontanées", il peut être très bon de découvrir ou de redécouvrir l'agissement des services dans le Caucase. Dans son intervention, le doctorant mettait en relief l'action de la flotte de la Mer Noire en soutien à la conquête dudit territoire par la Russie. Une des contrariétés de cette action maritime, c'était l'intervention étrangère par des moyens détournés, qu'il fallait bien sûr combattre pour Moscou. Ainsi, il a été expliqué que la Grande Bretagne faisait parvenir des armes aux peuples résistants à la conquête russe. Pourquoi ce soutien via les services ? Afin que de rendre difficile d'accès une zone qui ouvrirait l'une des portes des Indes à la Russie ! Oui, dès le XIXe siècle, c'était déjà, quelque part, la guerre d'Afghanistan. N'oublions pas qu'une fois la Mer Noire et la Mer d'Azov furent transformées en lac russe, la situation conduisit à la guerre de Crimée.
Tout
ces travaux permettent à l'auteur de maîtriser l'histoire navale russe,
et il sera plaisant de suive l'actualité de la Marine de Guerre de la
République Fédérale de Russie à travers son blog,
que je ne peux que vous recommander. Oui, le docteur entretien un blog.
Je lui ai présenté les intérêts de cet outil. En réalité, je ne faisais
que répéter ce qu'Olivier Kempf
m'avait dit, argumentation qui m'avait alors convaincue ! Donc, un
officier de l'Armée de Terre pousse à la création, directement et
indirectement, de deux blogs de navalistes...
Ce nouveau blog sera bien sûr un très intéressant complément d'Ice Station Zebra de Daniel Besson qui s'intéresse lui aussi beaucoup à ces deux sujets que sont et la conquête du Caucase et de l'avenir de la Flotte Russe. Ces deux là ont beaucoup de chose à se dire (et personnellement je vais me mettre à apprendre à parler russe, c'est assez pratique) !
Ce nouveau blog sera bien sûr un très intéressant complément d'Ice Station Zebra de Daniel Besson qui s'intéresse lui aussi beaucoup à ces deux sujets que sont et la conquête du Caucase et de l'avenir de la Flotte Russe. Ces deux là ont beaucoup de chose à se dire (et personnellement je vais me mettre à apprendre à parler russe, c'est assez pratique) !
Il ne manquerait plus que Red-Stars.org reviennent en service pleinement actif et on parlerait alors d'une vague russe sur la blogosphère de défense francophone !
Bonne lecture !
Bonne lecture !
05 janvier 2011
Meilleurs voeux pour l'année 2011 depuis le 24e fauteuil
En l'an De Grasse deux mille onze nous vous souhaitons de bons voeux !
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