Nous supputons un quelconque règlement du conflit Paris et Moscou sur l'exécution du contrat de vente (24 janvier 2011), en transferts de technologie, des deux Bâtiments de Projection et de Commandement (BPC) de classe Mistral (les Sebastopol et Vladivostok). Il n'y aurait pas eu de revente à une tierce marine. Selon Bernard Prézelin, l'auteur de Flottes de combat, seules les marines du Canada, Brésil, de l'Afrique du Sud et de l'Inde auraient pu absorber ces quelques 40 000 tonnes.
Les Mistral déplacent
16 500 tonnes à vide pour 21 500 tonnes à pleine charge. Avec 199
mètres de longueur, pour 32 de large, ils disposent d'un pont d'envol de
6400 m². Ils sont assez comparables aux 24 000 tonnes à vide des
porte-avions Clemenceau et Foch (pont d'envol de 8800 m²) mais inférieurs au Charles de Gaulle (42 500 tonnes pour un pont d'envol de 12 000 m²)...
Les
aéronefs, stockés dans un hangar de 1800 m², sont compris entre seize
environ une trentaine (opération Harmattan). Le second hangar (2650 m²)
peut accueillir 59 blindés (dont un escadron de 13 Leclerc). En plus de
l'équipage (177 marins), le navire peut embarquer un SGTIA de 450
personnes dans la durée. Enfin, son radier est apte à mettre en œuvre
deux engins de débarquement rapide (EDA-R), ou deux LCAC de l'US Navy, ou encore quatre chalands classiques.
Loin de la querelle des chiffres du différent franco-russe, nous reprenons le coût de construction du Dixmude (2010) : 450 millions d'euros (les études sont amorties sur les Mistral et Tonnerre). Fois deux, cette somme de 900 millions peut correspondre, alternativement, à : la coque du deuxième porte-avions ; 1 SNA, 1,8 FLOTLOG (futurs pétroliers-ravitailleurs) ; 1,2 FREMM ; 1 FREDA (FREMM de Défense Aérienne) ; 30 B2M ou 18 BATSIMAR. L'intégration de ces bateaux ne pourrait que rendre caduc le plan naval français : Horizon Marine 2025.
Que
faire de ces navires ? La composante amphibie ne connaissait aucun
déficit dans un contexte où l'Armée de Terre et l'Aviation navale
peinent à soutenir les dépassements du contrat opérationnel du livre
blanc 2013. Nous vous proposons néanmoins un déclinaison des
utilisations possibles qui ne peuvent s'imaginer sans un minimum
d'efforts financiers pour adapter les navires, les armer et les faire
naviguer.
Renforcer le Groupe Aéronaval (GAn) ?
Cette escadre repose sur sa pièce maîtresse : le porte-avions Charles de Gaulle.
Faute d'une deuxième unité (dont la commande est attendue depuis 1990),
la diplomatie navale française souffre d'un manque de continuité. La
capacité à durer dans les crises est proportionnelle, non pas aux enjeux
stratégiques, mais en fonction du calendrier du porte-avions.
Les deux nouveaux BPC apporteraient de nouvelles options comme :
- porte-aéronefs : avec un groupe aérien embarqué doté de NH90 Caïman Marine (kit ASM), d'hélicoptères d'attaque Tigre et d'hélicoptères légers, le navire prétendrait à une maîtrise locale du milieu aéromaritime face à un littoral ou à une guérilla navale (dépourvus de soutien aérien),
- configuration possible en navires ateliers pour soutenir navires et aéronefs.
Les
deux options alternent selon la disponibilité du porte-avions. En son
absence, la première option considère son remplacement par un ersatz
qu'est le BPC dans la configuration décrite ci-dessus. La seconde option
voit une configuration temporaire où un Mistral décharge
totalement les navires du GAn de l'entretien des aéronefs. Ils
n'emportent alors que des machines volantes disponibles, et donc plus
d'aéronefs par bateau ! Ce serait plutôt deux hélicoptères par frégate
qu'un seul ou zéro. Le groupe aérien embarqué du porte-avions pourrait
dépasser les 24 Rafale. Cela faciliterait sur le plan logistique les
rotations entre terre et mer et la disponibilité optimale des systèmes
des navires pour durer à la mer.
Un groupe amphibie permanent dans les océans Indien et Pacifique ?
Une
seconde voie d'utilisation possible pourrait être de purement et
simplement baser deux des cinq BPC soit à la Réunion, soit en
Nouvelle-Calédonie, ce qui renforcerait considérablement la visibilité
de l'action de la France.
La
seule manifestation aéronavale tricolore dans ces deux océans est la
mission Agapanthe, trop courte et trop localisée dans l'océan Indien.
L'actuelle mission Jeanne d'Arc en Asie du Sud-Est est une plus-value
incontestable, mais si rare. Cette dernière permet pourtant d'effectuer
des exercices aéroamphibies, notamment avec les forces américaines et japonaises.
Dans
cette optique, le BPC embarque un SGTIA de l'Armée de Terre (généré via
les forces de souveraineté basées à la Réunion ou en
Nouvelle-Calédonie) appuyés par un groupe aéromobile panaché entre
voilures tournantes dédiés à la lutte anti-sous-marine et l'appui des
forces terrestres. Accompagné par une frégate, ce groupe amphibie
permanent peut soutenir une diplomatie de défense plus qu'honorable avec
les pays amis de la France.
Entre
exercices ASM et amphibie, l'action aéronavale de la France devient
extrêmement visible. Et les forces françaises se familiarisent
continuellement avec l'environnement stratégique local.
Diplomatie
active au service de partenariats stratégiques qui se transformeront
plus facilement en liens économiques puisque la France ferait alors le
choix d'être aussi une nation du Pacifique. Représentation que bien des
puissances locales ne lui reconnaissent pas actuellement.
La nouvelle Jeanne d'Arc : soutenir la diplomatie française ?
Un navire, baptisé Jeanne d'Arc,
servirait la diplomatie. Armé par la Marine nationale, il serait
affrêté par la Royale et le Quai d'Orsay. La première trouvant là à
nouveau un navire dédié à la campagne d'application à la mer des élèves
officiers. Le Quai d'Orsay adoptant une ambassade flottante pour
soutenir partout dans le monde les évènements où la France souhaite être
représentée ou contribuer.
La
diplomatie humanitaire en France atteindrait une dimension permanente
grâce à des outils développés à bord de la Jeanne d'Arc et applicables
sur n'importe quel BPC, où qu'ils se trouvent par le jeu de la
projection.
La nouvelle Boussole : un outil supplémentaire au service de la science
Il
est aussi possible d'aménager de manière permanente une de ces unités
amphibie en navire scientifique, dédié à des missions de longue durée
dans tous les océans, des pôles à l'équateur. La Marine nationale
fournirait alors une partie de l'équipage, d'autres administrations
(IPEV, IFREMER, SHOM, etc) transformeraient le navire en laboratoire
flottant. Ses dimensions exceptionnelles ainsi que ses capacités
aéronautiques en ferait un pivot des missions scientifiques flottantes,
capable de durer sur zone, de ravitailler bases et navires, tout comme
de transformer les prélèvements en résultats et articles sans même
retourner au port.
Ce ne sont là que quelques exemples d'utilisations.
Analyse très intéressante, mais cela ne règle pas la question du coût de remise aux normes du circuit électrique, que l'on dit très cher. Et surtout, où trouvera t-on les marins nécessaires ?
RépondreSupprimerCeci dit, peut-être qu'après quelques années d'utilisation, on pourra les revendre au Portugal, Chili ou Brésil qui lorgnent actuellement sur notre Siroco.
Je vous rappelle, monsieur l'anonymous, que les Russes refusent pour le moment toute exportation. Cela peut changer d'ici là, mais pour le moment ce n'est pas possible
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