Nous nous sommes déjà fait l'écho (Rafale Marine Biplace, JSF et collision)
 de « l'intérêt » opportuniste manifesté par les Britanniques à propos 
du Rafale. Nous avons même tenté de montrer qu'une renaissance du Rafale
 N n'était pas à exclure si on prenait nos voisins d'outre-Manche au mot
 (et donc faire semblant de ne pas voir que le partenariat français est 
le pion modérateur des échanges « diplomatiques » sur le programme JSF 
entre États-Unis et Royaume-Uni).
Dans un autre article (UCAV et aéronavale)
 nous abordions l'intérêt de diffuser la puissance aérienne via des 
porte-aéronefs. Nous reprenions ainsi à notre compte la demande de 
l'amiral américain Zumwalt des années 70 de ne pas compter uniquement 
sur des porte-avions lourds. Et dans le cas de la France, de développer 
le potentiel des BPC via des drones embarqués pour tenter de mettre en 
oeuvre ses idées en prenant comme cadre une opération amphibie.
Dans
 un commentaire laissé par un anonyme sur « <span>Rafale et 
aéronavale britannique</span> », une personne montre l'intérêt de 
parler coopération autour du Harrier et d'observer le renouveau actuel 
de l'Entente Cordiale.
Un partenariat de nouveau en pleine expansion
Notre
 confrère le Mamouth fait connaître l'imminence du comité 
interministeriel sur les drones : en avril peut-être, avant l'été 
sûrement. Il recense les trois solutions existantes pour le 
développement de capacités intérimaires : américaine avec le Predator, 
israélienne avec le Héron et anglaise avec le Mantis. Cette dernière 
ayant l'avantage d'associer un industriel hexagonal de référence, 
Dassault, avec un industriel « transmanche », Thales. C'est une nouvelle
 possibilité qui apparaît dans le renouveau franco-britannique après les
 déclarations faites sur un développement conjoint de l'aéronavale ainsi
 que les appels à un approfondissement des partenariats.
On
 semblerait presque être revenu dans les années 60-70 avec les 
programmes Lynx, Puma, Jaguar... ou Concorde. D'ailleurs, à cette 
époque, il est bien connu que le Jaguar « M » a été testé sur 
porte-avions français, mais il est moins souvent évoqué le fait que le 
Harrier ait servi aux mêmes offices...
Diffusion de la puissance aérienne sur mer
Dans
 notre tentative d'étude sur un drone embarqué (UCAV) nous nous basions 
sur une hypothèse pleine et entière. C'est-à-dire un recadrage du 
programme nEUROn vers des capacités air-air et
la
 capacité d'apponter sur navire. Et ce, sans oublier de le développer 
dans l'optique d'une intégration sur BPC. Beaucoup d'incertitude et 
aucune volonté politique face un défi industriel de taille.
Dans
 cet article on prenait le parti de plaider pour une meilleure diffusion
 de la puissance aérienne sur mer en multipliant le nombre de 
plates-formes via les BPC. On évitera de se mentir en disant qu'un drone
 ou tout autre appareil embarqué dans un « mode décollage et 
atterrissage court » (ADAC) se fait sur un compromis. Face à cette 
faculté avantageuse on se doit de concéder pour sa mise en œuvre un 
sacrifice non négligeable sur les capacités de l'appareil en vitesse, en
 emport de d'armes et en rayon d'action. Un Harrier ou un F-35B auront 
des caractéristiques déficitaires sur ces points face au Rafale et au 
F-18.
Un nouvel Harrier, et pourquoi pas ?
Dans
 ce contexte, reprendre le développement d'un « Harrier III » sera plus à
 la portée des gouvernants britanniques et français. C'est un programme 
techniquement faisable. Il s'agirait d'intégrer les dernières évolutions
 en science des matériaux pour alléger l'appareil à vide (et gagner sur 
son potentiel d'action) ainsi que de faire évoluer son système d'armes 
et sa motorisation (le moindre gain est bénéfique). Il faut rappeler que
 la bête a initialement été développée par les Anglais, puis fut revue 
et corrigée en collaboration avec les Américains. C'est dire si le 
programme serait presque par tradition une vertu de la coopération.
Le
 nouvel appareil pourrait mettre à profit d'autres programmes existants 
(Rafale et Eurofighter) pour récolter des « pièces » de manière à 
diminuer son coût. Et de même optimiser la logistique de ses composants.
 C'est l'idée du développement du F-16 : tenter de réduire les coûts en 
se fournissant sur étagère. Ce dernier avait su tirer quelques avantages
 d'une telle philosophie à l'export ... Une philosophie reprise par le 
programme nEUROn : récolter les compétences existantes pour établir un 
démonstrateur.
Enfin, il serait bon 
de privilégier un cadre bi-national ou étendu le plus restreint 
possible, les structures des programmes Eurofighter, NH90 et A400M 
n'ayant pas donné satisfaction. D'autant plus qu'une étude systématique 
des surcoûts constatés n'a pas était faite publiquement. Enfin, comme le
 signale notre lecteur, il serait bon que ce programme se fasse hors 
cadre OTAN (les programmes otaniens ont toujours eu comme résultante 
d'acheter américain, le FIAT GR91 en témoignera). Et encore mieux comme 
le rappelle notre lecteur encore une fois : « en tenant "en laisse" les 
industriels (Dassault, BAE Systems...): Sinon, c'est inutile de perdre 
son temps!!! ». On aura en mémoire le « professionnalisme » des cadres 
d'EADS dans la conduite de l'A400M (des délits d'initiés suspectés aux 
déboires de l'avion).
Intérêt indéniable pour les Européens
Dans
 le cadre d'un programme JSF déficient qui pourrait voir sa version « 
Harrier » être justement supprimée, la France et l'Angleterre pourraient
 investir un créneau plus que porteur. Ce serait la seule alternative 
assez crédible. Le Sea Gripen et l'Eurofighter N le sont moins à nos 
yeux car la Suède n'a jamais développé d'appareil embarqué et le second 
est critiqué pour sa fragilité structurelle dans une telle 
configuration. Il faudrait donc équiper les 4 BPC français, les 2 
porte-aéronefs espagnols et les 2 navires italiens. Sans oublier le 
dilemme anglais : le choix fait avec leur porte-avions était adapté à un
 avion ADAC. Les difficultés du JSF feraient (conditionnel) qu'il serait
 envisagé de passer à une version CATOBAR (moyennant 1 milliard de 
livres de modifications). Les sujets de Sa Gracieuse Majesté sont-ils 
donc des girouettes ? La question difficile est de savoir s'il est 
possible de négocier et le Rafale et le Harrier III.
Il
 faut voir aussi que ce serait une cible de « 120 » appareils dont il 
serait possible de modérer largement le coût face à celui du JSF. Ce 
programme pourrait être présenté comme un pas franchi dans la 
constitution d'une Europe de la défense et dans la maîtrise des coûts.
Un intérêt indéniable dans la mêlée de l'export
Dans
 le contexte plus précis d'une collaboration franco-britannique, un 
nouvel Harrier ne signifierait donc pas obligatoirement une coopération 
sur le Rafale marine. Ce ne serait pas non plus un chasseur européen « 
seul à l'export pour les porte-aéronefs ». Pour équiper ce type de 
navire ne faisant pas appel à des catapultes (à l'image des navires 
indiens), il existe une concurrence qui s'est accrue avec l'annonce de 
la possibilité de développement du Sea Gripen et de l'Eurofighter N via 
la poussée vectorielle (le Rafale pourrait en faire autant à ce train 
là...). Il faut aussi compter sur le Mig-29K qui a remporté une nouvelle
 commande en Inde. Mais un Harrier III serait plus crédible grâce à 
l'image véhiculée par la réussite de l'appareil jusqu'ici (il équipe 
déjà la marine indienne).
Une petite conclusion
Notre
 lecteur a peut être pointé du doigt la nouvelle tendance lourde en 
Europe. Après les programmes des années 60-70, les sommets de 
Saint-Malo, ce serait le retour du partenariat franco-britannique. Dans 
les drones, un programme Harrier III ou de nouveaux projets dans les 
hélicoptères (le Super Lynx peut être mais l'EH101 serait peut être 
contradictoire avec le NH90 et le futur programme HTH dont nous 
reparlerons), voire un développement aéronaval commun, les possibilités 
sont grandes. De telles avancées restent conditionnées à une volonté 
politique forte. Et il faudra attendre les élections législatives en 
Grande-Bretagne et les choix faits par le nouveau gouvernement via un 
White Paper sur la défense. D'ici là, beaucoup d'eau aura coulé entre 
les rives de la Manche et il faudra suivre les discussions entre 
industriels et militaires pour tenter de voir dans quelle direction 
souffle le vent.
Publié initialement sur : http://defense-jgp.blogspot.com/2010/03/du-rafale-n-au-harrier-sur-bpc-par.html


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