L' « ère TRUMP » signifierait l'avènement d'un « nouvel hémisphère occidental », irriguait de nouvelles routes maritimes, dont deux principales : une route de circumnavigation de cet hémisphère, magnifiée par la récente croisière du SSN-767 USS Hampton. Aussi, les projets d'annexion des Canada et Groenland permettraient, in fine, de relier la côte Est des États-Unis à l'Asie du Sud-Est via le passage du Nord-Ouest, délaissant, peut être définitivement, la route péri-asiatique (André VIGARIÉ) ayant porté l'Empire britannique puis justement les États-Unis d'Amérique.
Le SSN-767 USS Hampton (SUBmarine SquadRON 11 (SUBRON 11), basé à la Submarine base de Port Loma, au sein de la Naval Base San Diego et relevant de l'US Pacific Fleet) s'est distingué dans le courant de l'année 2024 par la participation à deux exercices – littéralement aux antipodes – et le franchissement du détroit de Drake.
Le premier est l'exercice quasi-annuel ICEX (ICe EXercise), organisé depuis 1946 et fort de 98 éditions (la dernière étant celle de 2022), dans l'Océan glacial Arctique. Le principe demeure mais la dénomination a été remplacée par « Ice Camp » à l'occasion de l'édition 2024 (99ième édition).
Le 08 mars 2024, dans la Mer de Beaufort (au Nord des côtes de l'Alaska), l'opération Ice Camp était officiellement lancée dès la fin de l'érection du «Camp Whale » (baptisé en l'honneur du SSN-637 USS Whale (classe Sturgeon), 3ième sous-marin à atteindre le Pôle Nord, le 06 avril 1969), après que la glace ait été percée par les SSN-767 USS Hampton et SSN-789 USS Indiana (classe Los Angeles). Cette opération s'étalait sur trois semaines et mêlait plusieurs nations dont le Royaume-Uni, le Canada et la France.
Le deuxième est l'exercice UNITAS LXV. Les manœuvres portuaires et maritimes UNITAS sont menées depuis 1960. Elles sont l'une des manifestation du pacte ou traité de Rio (Inter-American Treaty of Reciprocal Assistance ou Tratado Interamericano de Asistencia Recíproca (TIAR)), signé le 02 septembre 1947 et entrée en vigueur le 03 décembre 1948. Le traité a été invoqué par une ou plusieurs parties à vingt reprises, dans les années 1950 et 1960. L'air géographique du traité repose sur le « continent américain » et ce, jusqu'à 300 miles nautiques de ses côtes : dont le Groenland, les îles Aléoutiennes et une partie de l'Océan glacial Arctique. Et depuis 1999, chaque édition se déploie en trois phases dans les océans Pacifique et Atlantique, ainsi que dans la mer des Caraïbes.
UNITAS LXV débutait le 02 septembre 2024, au large du Chili (02 – 12 septembre 2024) et mêlait 24 nations participantes dont certaines engageaient 17 bâtiments de surface, 02 sous-marins et 20 aéronefs.
Autrement dit, le SSN-767 USS Hampton, après une très probable mission dans l'Océan glacial Arctique consécutive à l'exercice Ice Camp 2024, a basculé depuis la Mer de Beaufort jusqu'à l'Océan Pacifique Sud entre mars et septembre 2024.
Le troisième marqueur géopolitique est constitué par la fin du déploiement du SSN-767 USS Hampton car celui-ci empruntait le détroit de Drake (s'étire du Cap Horn à l'île de Livingston), dans la Mer de Hoces, séparant la Terre de feu et donc la pointe méridionale du continent Sud-Américain de l'Antarctique. Ce passage permettait au SSN de remonter jusqu'au Portsmouth Naval Shipyard (Maine, côte Est des États-Unis) de l'US Navy où il arrivait le 21 novembre 2024, après avoir navigué durant ce déploiement un total de 30 767 nautiques. Il y bénéficie d'un chantier d'Engineered Refueling Overhaul (ERO), devant permettre de le « recapitaliser » par un potentiel opérationnel allongé de près de dix années.
À travers ces deux exercices et ce franchissement du détroit de Drake, il est difficile de ne pas y lire deux, voire trois !, affirmations géopolitiques :
La première et des plus classiques peut être regardée comme une affirmation continue de l'attachement des États-Unis d'Amérique à la doctrine MONROE (02 décembre 1823). Une manière d'interprétée les manœuvres navales UNITAS, comme manifestation de la force du traité de Rio.
L' « ère TRUMP » invite à s'interroger quant à l'interprétation du projet géopolitique de « nouvel hémisphère occidental » par le Brésil, l'Argentine et le Chili, en particulier à l'égard des ressources onshore et offshore et des conséquences sur les contentieux territoriaux existants (Amazônia Azul, archipel des Malouines : par exemple). Vers une résurgence de la « Dreadnought race », catalysant les actuelles programmations de nouvelles flottes de surface et dont l'apogée serait la résurgence de projets de sous-marins à propulsion navale nucléaire ?
La deuxième serait donc l'affaire de cette route de circumnavigation du « nouvel hémisphère occidental ». En effet, la Mer de Beaufort, où se tenait l'Ice Camp 2024, est l'un des deux débouchés du passage du Nord-Ouest, pouvant ouvrir une route maritime dans l'Océan glacial Arctique offrant la possibilité de passer de l'Océan Atlantique à l'Océan Pacifique : sans avoir à contourner l'Afrique par le Cap de Bonne-Espérance ; à franchir le canal de Suez ; ni à emprunter le détroit de Magellan ou le détroit de Drake pour le trafic maritime au départ de la côte Est des États-Unis.
Dans cette perspective, le contentieux entre le Canada et les États-Unis d'Amérique quant à l'étendue de la souveraineté du premier, considérant que ce passage s'étend à travers ses « eaux intérieures » tandis que le deuxième considère que ce sont des « eaux internationales ». Et il y a matière à relever que le franchissement du passage du Nord-Ouest par le SSN-766 USS Charlotte fin 2005, suscitant l'ire canadienne, est ici explicitement évité par le SSN-767 USS Hampton en 2024.
Une annexion du Canada résoudrait le contentieux, probablement par reconnaissance finale de la thèse canadienne par Washington.
La troisième affirmation géopolitique pourrait être une manifestation de la « Two-Ocean Navy » dont le père-fondateur est l'Amiral Alfred Thayer MAHAN et dont le véritable sujet est celui de la concentration navale. Le penseur naval américain dénonçait une politique navale américaine pouvant aboutir à l'existence de « deux marines » dont les qualités militaires seraient fatalement inférieures aux rivales d'alors, c'est-à-dire l'Empire russe et l'Empire du Soleil Levant, à la concentration ponctuelle de toute la flotte américaine contre l'ennemi naval devant être engagé.
Sous ces auspices, l' « ère TRUMP » voulant resserrer, voire rétablir par annexion pure et simple le contrôle américain sur le canal de Panama viserait explicitement à raffermir la capacité à concentrer l'US Navy dans l'Océan Pacifique et face à la Marine de l'Armée populaire de Libération. Depuis la présidence de Président Barak OBAMA (20 janvier 2009 – 20 janvier 2017), 60% de la Marine américaine est concentrée dans le Pacifique. Un éventuel désengagement du système détroit de Gibraltar – canal de Sicile – canal de Suez – détroit de Bab el-Mandeb accroîtrait cette disposition. Un renforcement de la présence dans l'Océan glacial Arctique pouvant être regardé comme un renforcement de la présence dans le Pacifique.
Dans ce cadre, le déploiement, en 2024, du SSN-767 USS Hampton n'est pas sans rappeler que la capacité américaine à concentrer l'US Navy dans l'Océan Pacifique, sans avoir à contourner les Amériques par le Nord via le passage du Nord-Ouest ou par le Sud par le détroit de Drake, repose sur le canal de Panama. Il recèle ses propres fragilités mécaniques et météorologies car le système repose sur un niveau hydrique pouvant être vulnérable. Mais il n'est pas, non plus, insusceptible d'actions de sabotages ou d'éventuelles frappes.
C'est pourquoi le SSN-767 USS Hampton illustre la capacité de l'US Navy à contourner les Amériques par le Nord et le Sud, s'il était stratégiquement nécessaire de le faire. Mais la circumnavigation de ce SSN en 2024 peut être l'un des exemples dont pourrait se saisir le gouvernement de Donald J. TRUMP s'il fallait illustrer la capacité américaine à supplanter des alliés si ces derniers se révélaient incapables d'assurer leurs contributions militaires à la liberté de navigation. Les différentes navigations dans le passage du Nord-Ouest par l'US Navy ou l'US Coast Guard démontraient, aussi, l'incapacité du Canada à défendre sa souveraineté puisque chacune des traversées a été effectuée le plus librement du monde.
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