Les @mers du CESM


Les @mers du CESM - 19 avril 1944 :

Le cuirassé Richelieu participe au bombardement de Sabang, base japonaise en Indonésie. Le navire français, ayant rejoint l’Eastern Fleet commandée par l’amiral britannique Somerville, prendra part à trois autres opérations visant des bases navales ennemies. Après 52 mois passés en mer, le bâtiment rentre à Toulon le 1er octobre 1944. À nouveau déployé en Asie du Sud-Est l’année suivante, le bâtiment assistera à la capitulation du Japon dans la rade de Singapour le 23 septembre 1945.





11 novembre 2014

Renforcer la puissance navale française ? Privatiser les bases navales avancées

© Mumuze.com - 2010. Carte remplie par le Fauteuil de Colbert. Les chantiers navals de Damen en vert sur la carte.
Dans le cadre de notre série de billets sur Renforcer la puissance navale française, continuons à casser les codes et à renverser quelques tables. A priori, vous ne faites qu'encourager la démarche. Aujourd'hui, il s'agit d'aborder rapidement une réflexion qui me tient à coeur : le réseau de bases navales avancées. Un navire qui est en mer n'est que la somme de différentes forces qui se rejoignent pour former un capital. Celui ne cesse de se dégrader à chaque jour de mer, entre les avaries et la consommation des différents combustibles.
 
Dans cette optique, un réseau de points d'appui est un multiplicateur de forces. Ceci, dans le sens où ils permettent à une force navale de se réapprovisionner et de se maintenir en condition opérationnelle. Plutôt que de représenter un navire comme un flux qui quitte son port-base et son lieu de mission, nous pouvons le représenter comme une somme de micro-flux. Plus ils sont nombreux, plus le capital opérationnel est haut.

 

Cependant, cette même optique suppose plusieurs choses. Premièrement, c'est la capacité à faire escale autant de fois qu'il est possible. Ce qui nous amène à deux considérations. D'une part, tous les ports ne sont pas amicaux à un navire de guerre. D'autre part, quand bien même ils le seraient, ils ne disposent pas tous des infractures nécessaires.

 

C'est pourquoi la réponse traditionnelle d'une puissance maritime au besoin d'étendre le rayon d'action de ses forces navales a été de disperser des bases navales de par le monde. Le soutien logistique d'une force navale n'est semble-t-il apparu que très tardivement (tout début du XXe siècle).

Malheureusement, la création d'un réseau de bases navales dans la zone d'influence de la puissance maritime considérée est un travail de très longue haleine. Que nous pensions aux Provinces Unies, à l'Espagne, à la France, à l'Angleterre, aux Etats-Unis ou à la Chine, cette entreprise stratégique nécessite plusieurs dizaines d'années, si ce n'est bien plus.

Concentrons nous sur l'exemple français. Encore récemment, à propos d'une fiche de lecture sur l'ouvrage de l'enseigne de vaisseau Mathieu Le Hunsec (" La Marine nationale en Afrique depuis les indépendances - 50 ans de diplomatie navale dans le Golfe de Guinée"), il était loisible de constater que la France n'avait  pas ou n'a pas voulu se donner les moyens d'avoir un réseau de bases navales à la hauteur de ses ambitions. Les points d'appui en Afrique n'avaient rien de comparables avec les arsenaux de la métropole. Ce qui gênait pour soutenir l'Empire, au point qu'un certain Raoul Castex n'écrivait pas moins qu'il fallait soit donner l'indépendance à l'Indochine, soit y construire une véritable base navale pour soutenir une force de 40 navires de guerres.

 

De facto, nous observons tous, aujourd'hui comme hier, que très grossièrement il y a deux catégories de points d'appui naval :

  • les noeuds fondamentaux du réseau, ils se situent près des détroits et autres carrefours stratégiques,
  • les redondances.

 

Cela nous amène à une constatation initiale. Des industriels, pour diverses raisons, constituent aujourd'hui des réseaux avec des points d'appui de par le monde. C'est le cas de l'entreprise navale hollandaise Damen mais aussi de la française DCNS.

 

L'une investit dans les entreprises de réparation navale et se sert de son réseau pour offrir des solution de MCO aux marines clientes de ses navires militaires (l'arrêt technique de la corvette SIGMA de la marine marocaine à Brest). L'autre vend surtout des navires militaires et s'implante par la suite pour soutenir des contrats quand ceux-ci comportent un volet soutien.

 

Actuellement, les contrats de MCO semblent se concentrer sur la capacité vendue par un industriel à entretenir un navire dans un port donné pour qu'il puisse être à "x" % de ses capacités.

 

A l'aune du réseau de chantiers navals de Damen (cf carte), une autre philosophie du MCO pourrait être abordée.

 

Premièrement, un industriel privé peut constituer un réseau de bases avancées. Il n'a pas à négocier avec le gouvernement d'un Etat car, semble-t-il, personne ne s'intéresse vraiment aux entreprises de réparation navale (surtout en France). 

 

Deuxièmement, ce réseau constitué peut offrir de nouvelles capacités en matière de MCO. Le contrat pourrait concerné non plus le seul soutien des systèmes et sous-sytèmes du navire mais bien sa capacité à durer le temps d'une mission. Dans ce cadre, pourquoi ne pas imaginer des solutions énergétiques innovantes comme :

  • un changement de bulbe d'étrave en cours de mission pour mieux s'adapter aux différents rythmes de la vie du navire ;
  • ou tout simplement un carénage rapide pour nettoyer la coque afin qu'elle demeure lisse et optimiser la consommation d'énergie tout au long de la mission (justement, une proposition de Damen Brest).

 

Ainsi, nous pourrions entrevoir la volonté allemande de projeter pendant deux ans ses frégates F125 sans retour au port base avec seulement des relèves d'équipage. Le navire ne reviendrait-il plus que pour les grands carénages et refontes ? La consommation d'énergie des navires serait réduite à hauteur des possibilités offertes pour maintenir les performances d'origines. Au final, les industriels pourraient vendre des jours de navigations et tenter d'en faire le diminuer le coût pour tout le périmètre hors équipage.

 

Dans le cas strictement français,les entreprises DCNS, Piriou, Eiffel peuvent prétendre à ces marchés qui sont bénéfiques avant tout pour elles. L'Etat pourrait "inviter" une entreprise comme CMA-CGM a expérimenté cette manière de faire pour une fraction de sa flotte.

 

Prenons l'exemple hollandais : Damen possède un chantier en Afrique du Sud, deux aux EAU et un à Singapour. C'est une belle couverture de l'Océan Indien, bien qu'incomplète. Ce qui nous amène à considérer qu'un industriel peut s'implanter dans des pays à hauts risques politiques, ce que ne peut pas toujours faire un Etat pour raisons diplomatiques. Imaginons qu'une entreprise française puisse implanter un chantier de réparation navale à Socotra (Yemen) ou dans le Nord de la Somalie.

 

L'intérêt de l'Etat réside dans la localisation géographique des sites. La dispersion de ces derniers dans les mains de plusieurs entreprises peuvent permettre de ne pas heurter les Etats locaux qui pourraient avoir l'impression d'être face à une simple société-écran. Enfin, l'Etat bénéficie d'une concurrence entre industriels et non pas d'une administration unique ayant les apparences du privé dans le cadre d'une concentration exagérée.

 

In fine, l'Etat pourrait recentrer sa Marine sur les noeuds fondamentaux d'un réseau où il est nécessaire de pouvoir soutenir la Flotte en toute indépendance. Les industriels de la navale militaire peuvent de leur côté fonder un réseau de bases avancées d'origine privée. 

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