© Inconnu. |
La United States Navy (U.S. Navy (USN) et le candidat puis 45e président des États-Unis d'Amérique Donald J. Trump (20 janvier 2017 - 20 janvier 2021) se sont affrontés : l'USN s'opposant à l'application du programme politique du candidat élu, dont l'assise institutionnelle est très faible dans le régime présidentiel américain. Se rendant coup sur coup, l'activité navale américaine fut même, par moment, uniquement innervée par ce conflit. L'U.S. Navy voulait se « transformer » par la doctrine Distributed Maritime Operations (DMO) et le President Donald J. Trump – imitant en cela l'héritage de Ronald Reagan avec sa 600-ships Navy – voulant remonter le format de 308 à 350 puis 355 ships d'ici à 2030. La première manche a été remportée par la Navy... but, and in 2024: Trump Strikes Back?
Il y avait 380 ships dans l'USN en 1938 puis le format fut successivement augmenté, au fur et à mesure de la montée en puissance de l'effort industriel, et donc de guerre, de l' « arsenal des démocraties » pour culminer à 6084 ships en 1944 et même 6768 en 1945. Mais ce nombre chutait à 1248 dès 1946 car de larges parties des bâtiments des numerous fleets furent mothballed (mis en réserve), voire cédés. La cristallisation du conflit Est-Ouest (1947 - 1991) voyait le format osciller entre 800 et 1000 ships (1947 - 1969). D'où dans les années 1960 et surtout 1980 le « creux » engendré par les nombreux désarmements. Il était partiellement compensé dans les années 1980 grâce aux efforts déployés dans les années 1970.
C'était le 40e président des États-Unis d'Amérique (20 janvier 1981 – 20 janvier 1989), M. Ronald Reagan (6 février 1911 - 5 juin 2004) qui fit la promesse de redresser la situation navale américaine, avec le plan 600-ships Navy. L'activité politique déployée touchait pratiquement au but puisque des 800 à 1000 ships de la décennie 1960 qui passèrent à 500 à 600 ships durant la décennie 1970, la situation se stabilisait durant le premier mandant autour de 550 ships. L'apogée fut atteinte durant le deuxième mandat avec 594 ships en 1987, exploit renouvelé à 592 ships en 1989.
Mais une décrue s'amorça au début des année 1990, dans la foulée de la prise des « dividendes de la paix ». Le nombre de ships plongeait de 529 à 471 entre 1991 et 1992 sans jamais remonter au-dessus des 500. Il franchissait le seuil des 400 quand il atteignait 392 ships en 1995, toujours sans jamais repasser au-dessus. En 2003, c'était la limite actuelle des 300 ships qui était franchie : 297 ships. Le point le plus bas - depuis 1930 ! - fut atteint à 271 ships (2015).
Les efforts furent relancés en 2001 afin de pouvoir stabiliser le format autour d’une 310-ships Navy dans le cadre de la Quadrennial Defense Review (QDR) ; puis même jusqu'à une 375-ships Navy, comme annoncé par le President George H. W. Bush (20 janvier 2001 – 20 janvier 2009) dès 2002. Mais dès 2005, les États-Unis hésitaient entre une 260-ships ou une 325-ships Navy. En 2006, la programmation retenait l'objectif de stabiliser la situation à 313-ships, objectif révisé, au sens où la structure a été revisitée, mais qui demeurait à 313-ships en 2011. Il fut ajusté à, et officiellement environ à 310-316 ships en 2012 puis 306 en 2013 et 308 ships en 2015, situation devant être atteinte en 2021.
C'est dans cette perspective historique (1945 - 2015) qu'il s'agit de pouvoir replacer le plan naval du candidat Donald J. Trump qui s'opposait alors avec virulence et à la personne (l'affaire du certificat de naissance) et à l'héritage des deux mandats du 44e président des États-Unis, M. Barack Obama (20 janvier 2009 au 20 janvier 2017). Le format de l'USN devait alors atteindre 308 ships en 2021 grâce aux programmes lancés sous sa présidence mais le nombre de ships était de 285 en 2016, 294 en 2019, 293 en 2020 et, finalement, de 295 en 2021.
Le candidat Donald J. Trump s'engageait, dans le cadre de la campagne électorale relative à l'élection présidentielle (8 novembre 2016), en faveur d'une 350-ships Navy qui était, et aussi, parfois dénommée 355-ships Navy. Une fois élu, et par voie de conséquence : le Congrès adoptait une loi demandant à atteindre le format « as soon as practicable. » LU.S. Navy publiait, le 15 décembre 2016, sa transcription opérationnelle du « force-level goal » par l'actualisation, menée durant toute l'année, Force Structure Assessment (FSA).
Il s'agit d'une analyse dans laquelle la Marine sollicite les contributions des U.S. regional combatant commanders (CCDRs) concernant les types et les quantités de capacités de la Marine que les CCDR jugent nécessaires afin de pouvoir mettre en œuvre la partie de la stratégie militaire incombant à l'USN, puis traduit ces contributions du CCDR en nombres requis de navires, en utilisant les types de navires actuels et prévus. Le FSA détaille donc très précisément les capacités opérationnelles à entretenir et acquérir, notamment les types et les capacités des navires, aéronefs, drones et armements ; la répartition géographique des unités, leurs cycles opérationnels. La conclusion est que la IFSA se traduit par le Long-range Navy shipbuilding.
Mais la réalité des capacités industrielles américaines renvoyées cet objectif à l'orée de l'année 2050. Et l'inertie industrielle ne permettait pas, en l'état, de bousculer l'actuel document Long-range Navy shipbuilding, malgré toute la volonté du President Donald J. Trump. Dès 2019, de haut-responsables de l'USN ainsi que du ministère américain de la Défense soulignaient que le prochain « force-level goal » devant être adopté en 2020 serait le premier à bénéficier d'une évolution significative de l'architecture de la flotte car devant mettre en œuvre les travaux menés dans le cadre de la doctrine Distributed Maritime Operations. Et dès septembre 2020, entre en scène le sujet des plateformes navales dites « non-habitées », c'est-à-dire les drones de surface et sous-marins de grandes dimensions ou « large UVs » (Unmmaned Vessels).
La doctrine Distributed Maritime Operations (DMO) était évoquée dès 2015 et vise à permettre de disperser la Fleet, tout en augmenter sa létalité qui a parfois été, elle-même, comme devant être à terme « distribuée » sur un plus grand nombre de plateformes dont certaines devant être dronisées. Les Distributed Maritime Operations sont un concept d'exploitation de la Fleet soutenu par le Project Overmatch, partie intégrante et matérialisation des objectifs d'un programme inter-services dénommée Joint All-Domain Command and Control (JADC2). L'U.S. Army a le Project Convergence et l'U.S. Air Force l'ABMS (Advanced Battle Management System) et donc la doctrine Mosaic Warfare tandis que l'U.S. Marines Corps travaille au concept opérationnel Expeditionary Advanced Base Operations (EABO) venant appuyer la doctrine DMO.
Dès lors, les débats opposant la White House à l'USN se concentre sur les formats absolu et relatif de la Marine américaine puisqu'il s'agissait de pouvoir arrêter le nombre absolu de « manned ships » : dans un document du 9 décembre 2020, transmis au Congrès dans le cadre des travaux parlementaires relatifs à la FY2021, il a été déclaré que les débats se poursuivaient autour d'un format devant comprendre 382 à 446 manned ships pour 143 à 242 large UVs.
Et cela nous amène à la question du porte-avions dans le cadre de la puissance navale américaine car chacun de ces flattop agrège autour de lui un Carrier Strike Group (CSG) et un Carrier Air Wing (CAW) ainsi qu'une escorte-type et donc, un pion de manœuvre stratégique à la structure qui est un multiple du nombre de porte-avions en service : la bataille politique s'était alors déplacée vers un contrôle politique de la capacité de l'US Navy à respecter le document Optimized Fleet Response Plan Instruction (OFRP), dans la perspective de la rédaction d'un nouveau Force Structure Assessment (FSA) durant l'année 2020, et par une initiative de la White House de lancer une étude relative à l'avenir aéronaval de l'US Navy.
Premièrement, l'étude « Futur Carrier 2030 » fut lancée par l'USN dès mars 2020, menée avec l’appui de l’US Naval Academy, du Naval War College, de la Marine Corps University et de la Naval Postgraduate School. Elle devait bénéficier de six mois de travaux, afin de pouvoir rendre ses conclusions dans la perspective, donc, de la rédaction du nouveau Force Structure Assessment (FSA) au Secrétaire à la Marine (Secretary for the Navy (SECNAV) par intérim, Thomas B. Modly. Il s'agissait alors, en préambule du communiqué de la Marine américaine, de définir les « principes de dissuasion, les missions de présence au niveau mondial, la protection de la sécurité économique américaine ainsi que les combats potentiels avec d’éventuels adversaires ».
En ce qui concerne la structure aéronavale de l'USN, « l’étude définira également les contraintes probables en termes de budget ainsi que la possibilité d’envisager de futures technologies possibles non encore inventées qui pourraient changer l’avenir de l’aviation navale embarquée ».
Deux sujets principaux se dégageaient dans cette étude, à savoir : l'avenir de l'aviation navale embarquée et, partant de là, du nombre de porte-avions et donc de CSG/CAW mais également des perspectives opérationnelles liées à une mise en adéquation et une application opérationnelle d'une coopération entre l'U.S. Navy et l'U.S.M.C. relative aux doctrines Distributed Maritime Operations (DMO) et Expeditionary Advanced Base Operations (EABO).
Pour le Politique, et donc le gouvernement Trump : cela devait se traduire par une confirmation de la volonté de porter le format jusqu'à 12 porte-avions, et donc justifierait en cela une hausse significative du format absolu de l'USN à transcrire dans le futur FSA. Volonté qui devait s'appuyer sur le concept « Lightning Carrier» de l'USMC.
Mais le déroulé des débats a été renversé à l'avantage de l'U.S. Navy car celle-ci déclarait, et ce contre toute attente, qu'elle réfléchissait à un abaissement de son format aéronaval jusqu'à, peut être, seulement huit porte-avions. Une hypothèse d'ores et déjà soulevée quand le SECDEF était Robert Gates (18 décembre 2006 - 30 juin 2011). Cela impliquait donc, comme dans l'hypothèse précédente, un abaissement du nombre de manned ships et de plus grandes marges de manœuvre au profit des large UVs.
L'USN manœuvrait si bien que l'étude « Futur Carrier 2030 » fut abandonnée avant même de parvenir à son terme, ses éventuelles conclusions mettant en danger les résultats à attendre de la rédaction de la nouvelle IFSA et donc de sa transposition par le Long-range Navy shipbuilding plan.
Deuxièmement, l'USN et la White House se sont opposées au sujet du document Optimized Fleet Response Plan Instruction (OFRP), mettant en scène le secrétaire à la Défense (SECretary of DEFense (SECDEF), Mark Esper, et le chef des opérations navales (Chief of Naval Operations (CNO), l’amiral Mike Gilday. La version de l'OFRP alors en vigueur avait été adoptée en 2014 et son intérêt particulièrement stratégique est qu'il est l'un des documents définissant, justement, l’Integrated Force Structure Assessment (IFSA).
L’OFRP (2014) est l’un des documents composant l’Integrated Force Structure Assessment (IFSA). Il définit, selon un cycle de 36 mois au cours duquel les bâtiments sont déployables ou en disponibilité opérationnelle pendant 59% du cycle (21,5 mois). Entre 2008 et 2015, la durée du déploiement d’un Carrier Strike Group est passé d’une moyenne de 6,4 à 9 mois, occasionnant des déséquilibres des plans de charge des chantiers publics et privés au point de remettre en cause le respect de l’OFRP.
Le SECDEF soutenait que l’OFRP ne respectait pas depuis plusieurs années les objectifs de déploiement : il avait été pris en défaut en octobre 2017 quand le Congrès américain s’était inquiété de voir qu’aucun des 6 porte-avions rattachés au SURFLANT (Naval Surface Force, Atlantic) opérationnels. Cette situation inhabituelle était notamment due à l’annulation du déploiement du CVN-75 Harry S. Truman en septembre 2019, du fait de problèmes électriques.
Le CNO avait demandé une réévaluation de l’OFRP lors de sa prise de fonction en août 2019. En réponse aux critiques du SECDEF, le CNO avait affirmé que l’OFRP était, est et serait respecté lors de la conférence WEST 2020. Plusieurs déploiements inopinés de CSG avaient alors été ordonnés par lui afin de montrer que l'USN était toujours en capacité de respecter l'actuel OFRP.
Le mandat du 45e président des États-Unis d'Amérique Donald J. Trump (20 janvier 2017 - 20 janvier 2021) s'achevait sans qu’il ne parvienne à infléchir la volonté de l'U.S. Navy. Le Congrès acceptait plutôt, non seulement de financer les programmes de large UVs mais également la position d'attente de l'USN quant à la définition de ses nouvelles structures de force découlant des doctrines Distributed Maritime Operations (DMO) et Expeditionary Advanced Base Operations (EABO).
Il reste, de l'autre côté de l'océan Atlantique, et plus particulièrement en France, l'impression que l'U.S. Navy aurait admis une certaine obsolescence aux « super-carrier » alors que cela n’a jamais été le sujet ! Les mêmes voulaient voir, dans la réponse à apporter à la menace chinoise, la recherche de nouvelles plateformes aéronavales plus petites, comme le « Lightning Carrier » de l'USMC. Finalement, le nombre de porte-avions n'a pas été modifié. C'était aussi ignorer ou faire semblant d'ignorer que le concept de « porte-avions légers » - au sens de porte-aéronefs STOVL - existe depuis l'introduction des McDonnell Douglas AV-8B Harrier II... et que cette configuration des LHA/LHD des Amphibious Ready Group (ARG) n'a pratiquement jamais été déployée. Par exemple : il ne semble même pas avoir été jamais essayé pour renforcer un CSG, dans le cadre d'une dual-carrier operations.
Match retour en 2024 : Trump Strikes Back?
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire