© DCNS. Photographie publiée en février 2017. |
Le Suffren aura marché pendant environ deux jours et est positionné au terme de sa marche sur le dispositif de mise à l'eau depuis le vendredi 5 juillet 2019. Il rencontrera son élément dans les semaines suivantes grâce à l'ascenseur sur lequel il reposera alors. Les essais à la mer menés en 2020 verront l'embarquement des armes tactiques qui seront, toutes, nouvelles.
Les Rubis et les Triomphant embarquent des torpilles lourdes F17P mod 2 (~ 30 km) pour les luttes anti-sous-marine et anti-navire ainsi que des missiles SM39 Exocet (50 km) pour la lutte anti-navire. Les Suffren disposeront des torpilles lourdes F21 (+ 50 km), de missiles SM39 Block 2 Exocet (70 km ?) mais introduiront aussi une nouvelle munition : le MdCN (~ 1000 km) en sa version à changement de milieu.
Il convient de souligner que le nombre de Tubes Lance-Torpilles (TLT) demeure inchangé vis-à-vis des Rubis (4 TLT) et des Triomphant (4 TLT). Cependant, le nombre d'armes tactiques embarquées augmente fortement. Il est de 14 armes sur les SNA de classe Rubis. Les Suffren embarqueront 20 armes sur les racks auxquelles s'ajoute la possibilité d'en charge quatre supplémentaires dans les tubes, soit 24 armes au total.
Avec le MdCN la France, après les États-Unis (1984), le Royaume-Uni (1994) et la Russie (2016), mais avant la Chine, l'Inde et peut être même le Pakistan - sans oublier le cas particulier israélien -, rejoint un club très fermé de puissances navales capables de déployer des missiles de croisière sur des sous-marins. Club encore plus restreint s'il ne s'agissait que de retenir les ceux combinant des sous-marins à propulsion navale nucléaire portant des missiles de croisière où la France rejoint les États-Unis, la Russie et le Royaume-Uni. C'est un outil de prestige politique, établissant pour partie le rang de la France sur les mers mais aussi un outil opérationnel.
Torpille lourde F21
Dans l'optique d'assurer le remplacement des torpilles lourdes F17P Mod. 2, le programme Artémis était lancé en 2008. Il fut également dénommé Futur Torpille Lourde (FTL) et les deux noms étaient parfois employés simultanément. Et c'est finalement l'appellation de F21 qui fut retenue.
La revue de conception détaillée du programme Artémis – FTL glissait de l'année 2006 à 2013. Une grande partie de ce glissement calendaire s'explique par un premier retard de deux années pour le lancement des études (2006 – 2008) puis par l'échec de la coopération franco-italienne (2008 – 2010) dont l'objet était l'adaptation de la torpille lourde BlackShark aux besoins français.
Une coopération franco-allemande remplaçait la précédente. Naval group coopérait avec Atlas Elektronik. L'industriel allemand apporte la propulsion de la future F21. La conception des batteries fut confiée à SAFT (Société des Accumulateurs Fixes et de Traction). Ses éléments sont constitués de cristaux de soude. L'énergie n'est produite que par réaction des cristaux de soude avec l'eau de mer inondant la batterie après le lancement de la torpille. Il se dégage alors une chaleur intense par électrolyse.
Ce choix technologique permet de garantir qu'une F21 à l'état inerte ne présente aucun risque. Et cela participe de la politique des MUnitions à Risques ATténués (MURAT) devant servir à bord des bâtiments à propulsion nucléaire de la Marine nationale.
Les premiers prototypes de la F21 bénéficiaient de la conduite d'une vingtaine d'essais dès 2013 à bord du Pégase de Naval group. Au moins un tir d'une F21 d'expérimentation était effectué depuis un sous-marin nucléaire d'attaque de classe Rubis en avril 2015. Les premiers tirs de validation des performances intervenaient au cours de l'année 2016. Les tirs de qualification furent menés entre 2017 et 2018 à bord d'au moins un Rubis.
L'industriel précisait ce matin que depuis la reprise des tirs en 2017, les effectifs de l'usine à torpilles de Gassin (Var) ont été fortement augmentés afin de pouvoir regagner toutes les compétences perdues. En France une nouvelle torpille lourde n'a été mise à l'étude que tous les 30 à 35 ans, ne permettant pas la transmission des savoirs et compétences.
La cible finalement arrêtée pour ce programme est de 93 torpilles lourdes F21 dont 65 furent effectivement commandées en 2017 et les 28 suivants devaient l'être depuis. Et il s'ajoute à celles-ci pour l'entraînement un contrat de prestation de services, de six années, dévolu à Naval group. Il avait été initialement prévu de commander douze torpilles d'exercice puis seulement deux cibles. Il est réaffirmé que les qualités intrinsèques recherchées dans la F21 expliquent partiellement les difficultés et donc les retards. Mais que la nouvelle torpille lourde surpasse toutes les autres.
Le coût total du programme – comprenant études, expérimentations, essais et fabrications des torpilles – était estimé en 2017 à 557 millions d'euros, c'est-à-dire 578 millions d'euros en données corrigées de l'inflation (2019).
Le premier lot de torpilles lourdes F21 opérationnelles était attendu depuis 2015. La livraison fut repoussée à 2017 puis 2018. Le Sénat relevait en 2003 que l'obsolescence de la torpille lourde F17P Mod. 2 devait être atteinte en 2008. Et il se prononçait de nouveau à ce sujet en 2009 pour affirmer que « l'obsolescence technique et opérationnelle sera atteinte en 2015 ». Raison pour laquelle les premières livraisons des torpilles lourdes F21 étaient attendues dès 2015.
F17 Mod 1
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F17 Mod 2
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F17P Mod 2
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Artémis - FTL - F21
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DTCN
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DTCN
|
DTCN
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Naval group
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Mise en service
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1971
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1990
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1988
|
2020
|
Dimensions générales
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Diamètre (mm)
|
533
|
533
|
533
|
533
|
Longueur (mm)
|
5914
|
5384
|
5620
|
6000
|
Masse (kg)
|
1428
|
1397
|
1397 ?
|
1550
|
Capacités de navigation
| ||||
Batterie
|
Argent - zinc
|
Argent - zinc
|
Argent - zinc
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oxyde d’argent/aluminium
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Propulseur
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Hélice contrarotative
|
Hélice contrarotative
|
Hélice contrarotative
|
Hélice contrarotative
|
Vitesse (nœuds)
|
35
|
40
|
35
|
+ 50
|
Portée (km)
|
18,5
|
20
|
29 (24 nœuds - filoguidage)
18 (35 nœuds - autonome)
|
57
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Immersion (m)
|
500
|
600
|
> 600
|
- 1000 < ou - 10 <
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Guidage
| ||||
Filoguidée
|
Oui
(1ière FR)
|
Oui
(cuivre)
|
Oui
(cuivre)
|
Oui
(fibre optique)
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Senseurs
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Sonar passif
(Thomson CSF)
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Sonar actif / passif
(Thomson CSF)
|
Sonar actif / passif
(Thomson CSF)
|
Sonar actif / passif
(Thales)
|
Anti-navire
|
Oui
|
Oui
|
Oui
|
Oui
|
Anti-sous-marin
|
Non
|
Oui
|
Oui
|
Oui
|
Capacité de destruction
| ||||
Charge
|
250 kg HBX-3
(équivalent 450 kg TNT)
|
250 kg HBX-3
(équivalent 450 kg TNT)
|
250 kg HBX-3
(équivalent 450 kg TNT)
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200 kg
Cast-PBX B2211D
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Le SM39 Exocet est dérivé de l'AM39 mis à l'étude dès 1975 et opérationnel en 1977. Le SM39 Exocet fut développé à partir de 1978. Les premières munitions étaient déclarées opérationnelles en 1985. Il s'agit d'une version à changement de milieu de l'AM38, c'est-à-dire qu'un véhicule sous-marin, sorte de torpille protégeant le missile de l'élément marin, est tiré par un TLT duquel le missile est libéré quand le véhicule franchit la surface. Le propulseur s'allume alors et la munition file au ras des flots.
La munition bénéficiait d'une modernisation grâce au Chili. 12 SM39 Exocet furent achetés en 2006 pour armer les deux sous-marins du type Scorpène. Santiago obtenait en 2009 cette modernisation baptisée « Block 2 ». Il s'agissait de numériser la munition et de traiter les obsolescences (remplacement des composants analogiques). Un guidage GPS était, en outre, ajouté conférant une capacité d'attaque contre la terre qui se limite toutefois au trait de côte. Le missile ne possède pas une capacité de suivi de terrain. La portée maximale aurait été portée de 50 à 70 km selon certaines sources.
La Marine nationale n'avait pas commandé cette version mise à jour tandis que l'AM39 bénéficiait d'une modernisation qualifiée elle-aussi de « Block 2 ». Les travaux consistaient également dans la numérisation de la munition. 40 lots prêt-à-monter furent commandés en 2009. Et finalement, en novembre 2013, 40 lots prêt-à-monter furent également commandés au profit des SM39 Exocet. Il s'agit très probablement d'une reprise du SM39 Block 2 destiné aux sous-marins chiliens transcrite dans une version nationale.
MdCN
Le ministre de la Défense, Alain Richard, lançait le 28 février 2002 un programme de développement d'une capacité de tir de missiles de croisière par des plateformes navales. Le programme a été ouvert à la coopération avec le Royaume-Uni et l'Italie dans le prolongement du développement et de l'acquisition des missiles de croisière SCALP-EG/Storm Shadow mais ces deux pays n'ont pas donné suite jusqu'en 2020. L'Italie entretient une réflexion quant à l'acquisition d'une telle capacité au profit de ses FREMM et de ses PPA. Et la Grèce est demandeuse du MdCN depuis 2006.
En septembre 2002 était notifié à MBDA un contrat d'études et de développement de démonstrateurs et prototypes de SCALP-Naval pouvant être employé depuis des bâtiments de surface ou sous-marin par l'entremise de tubes lance-torpilles de 533 mm. Des esquisses de la future munition témoignaient dès 2001 de la préférence pour une solution similaire aux choix du BGM-109C Tomahawk. Le programme est dénommé SCALP-Naval, parfois surnommé « SCALP navalisé » ou même « SCALP Marine ». En septembre 2004, la ministre de la Défense, Mme Michèle Alliot-Marie, visitait les premiers prototypes du Scalp-Naval disposant de boosters et de véhicules sous-marins. La portée des prototypes semblait être d'environ 200 à 300 km.
La DGA notifiait le 29 décembre 2006 un contrat 910 millions d'euros à MBDA (1200 millions d'euros aux conditions économiques de 2017 ou encore 1245 millions en données corrigées de l'inflation (2019) pour le développement et la production de 50 MdCN, et non plus SCALP-Naval depuis 2005, au profit des FREMM (17) et des Barracuda (6). L'équipement des La Fayette a semble-t-il été abandonné entre 1998 et 2006. La portée demandée est explicitement comprise entre 800 à 1000 km.
La campagne de tirs s'est articulée autour de deux sites de DGA essais et missiles, à savoir le site de Biscarrosse (Landes) pour les essais du MdCN à lancement vertical pour bâtiments de surface et le site de l'île du Levant (Var) pour les essais de la version à changement de milieu pour bâtiments sous-marins.
Le premier tir de développement d'un MdCN intervenait le 28 mai 2010. La munition fut lancée par un lanceur vertical représentatif d'un SYLVER A70. Tir qui permettait de valider la phase de départ du missile depuis le silo, sa transition en configuration de croisière et la séparation d'avec le « Système d’Accélération et Basculement » (SAB) ou « booster » en anglais. Le troisième tir (9 juillet 2012) était le premier tir complet de la version à lancement vertical. Il validait la phase terminale du vol du missile avec son guidage autonome par reconnaissance de scène infrarouge. Le cinquième tir (1er juillet 2013) était mené depuis un SYLVER A70. Le logiciel de planification de mission est employé pour la première fois. Et le guidage terminal infrarouge essayé à nouveau.
Le sixième tir de qualification (27 octobre 2014) était un tir de qualification représentatif d'un lancement depuis une frégate. Le MdCN était considéré dès lors comme opérationnel. Le septième tir (19 mai 2015) fut effectué à bord de l'Aquitaine et la Marine nationale devenait la première marine d'Europe de l'Ouest à détenir la capacité à tirer des missiles de croisière depuis des bâtiments de surface.
Les essais de tirs de la version à changement de milieu depuis le site du Levant employaient le Système de QUalification d'Armes par Lancement sous l'Eau (SQUALE) entre 2009 et 2014. Le deuxième tir (8 juin 2011) était le premier tir de développement de la version à changement de milieu du MdCN. Il était mené par l'entremise d'une plate-forme sous-marine représentative d'un lancement par un sous-marin en plongée. Le quatrième tir (24 octobre 2012) était le premier tir complet du MdCN en version sous-marine. Celui-ci validait l'utilisation du GPS pour le guidage en phase terminale du vol, complétant les essais du troisième tir.
La dotation type des Suffren n'a pas été précisée. Cependant, il fut dit que la salve des SNA-NG seraient de quatre MdCN, c'est-à-dire qu'égale logiquement le nombre de tubes lance-torpilles. La dotation-type de MdCN n'était pas non plus indiquée. Elle sera très probablement dimensionnée par les leçons tirées de l'opération Hamilton. Il est probable que l'équivalent de deux salves soit retenu afin de permettre aux futurs SNA de reproduire l'opération Hamilton tout en conservant la faculté de laisser planer la menace de répéter ce scénario au cours d'un même déploiement. Il était aussi indiqué que les Suffren pourront tirer les MdCN en coordination avec les FREMM.
Il me semble que le club restreint associant propulsion nucléaire et missiles de croisière ne réunit pas seulement les Etats-Unis, le Royaume-Uni et bientôt la France. Ajoutez-y la Russie (avec les Yasen emportant le Kalibr, aussi embarqué - mais le conditionnel est encore de rigueur - sur les Oscar-II modernisés) et la Chine (avec la version G du Type 093).
RépondreSupprimerTrès intéressant. Je ne savais pas que le SM 39 avait bénéficié d'une valorisation. Avec toute cette panoplie, les Barracuda auront vraiment les dents longues et bien affutées. Notre flotte sous-marine tactique va faire un bond capacitaire phénoménal.
RépondreSupprimerBien que peu de choses fuitent dans la presse à la suite des exercices interalliés, il sera très intéressant de voir ce qu'il vaut (furtivité, suite sonar, systèmes d'armes) par rapport aux autres nucs occidentaux et notamment à la classe Astute... il faudra sans doute encore un peu de patience. Votre avis ?
RépondreSupprimerBien que peu de choses fuitent dans la presse après les exercices interalliés (ou alors après un certain temps seulement), il sera très intéressant de voir comment il tient son rang à côté des autres nucs occidentaux (furtivité, suite sonar, système d'armes...) et notamment par rapport à l'Astute qui est équipé Thales aussi .... votre avis?
RépondreSupprimerQuatre tubes seulement, cela veut dire que lors du tir de mcdn en salve le soum sera vulnérable sans capacité de riposte immédiate ...
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