Les @mers du CESM


Les @mers du CESM - 19 avril 1944 :

Le cuirassé Richelieu participe au bombardement de Sabang, base japonaise en Indonésie. Le navire français, ayant rejoint l’Eastern Fleet commandée par l’amiral britannique Somerville, prendra part à trois autres opérations visant des bases navales ennemies. Après 52 mois passés en mer, le bâtiment rentre à Toulon le 1er octobre 1944. À nouveau déployé en Asie du Sud-Est l’année suivante, le bâtiment assistera à la capitulation du Japon dans la rade de Singapour le 23 septembre 1945.





20 décembre 2012

2022 : vers une contribution navale à la DAMB ?

© Inconnu. Sea-based Anti-Ballistic Missile Intercept System.


C'est par une information de Mer et Marine du 11 décembre qu'il convient de se replonger dans l'évolution de la défense aérienne de la Flotte. Ainsi, il faudrait comprendre que l'état-major de la Marine planche sur les évolutions à apporter pour que, d'une part, les frégates Cassard et Jean Bart puissent aller au bout de leur service sans subir d'obscolenscences majeures, et que, d'autre part, le porte-avions n'en subissent pas non plus, en raison des mêmes causes. C'est-à-dire que le vénérable radar de veille aérienne DRJB-11B (qui équipaient ou équipent les trois navires mentionnés) arrive en fin de vie et ne correspond plus aux standards actuels.


Dès lors, il ne s'agit pas simplement de remplacer trois radars sur autant de navires en service puisqu'il est question de rechercher une standardisation, tout du moins, une certaine homogénéisation des radars de veille aérienne qui équipent les navires de surface de la Royale. Dès lors, on ne peut que constater que :
  • les deux F70 AA, Cassard et Jean Bart, seraient équipées toutes les deux, à terme, et jusqu'à la fin de leur service actif (2021 et 2022), d'un radar SMART-S. 
  • Ces deux frégates doivent être, à l'heure actuelle, remplacées par deux FREDA. En l'état actuel des choses, la proposition des industriels est contenue dans la "FREMM ER" (pour Extended Range) qui supporte un radar Sea Fire 500 à quatre faces planes. 
  • A noter que les deux frégates Horizon, Forbin et Chevalier Paul, sont équipées d'un radar de veille aérienne SMART-L (S1850 dans la désignation de Thales, LRR (Long Range Radar dans la Royale) et par une conduite de tir EMPAR.
  • la prochaine IPER du porte-avions Charles de Gaulle, qui sera aussi l'occasion de sa refonte à mi-vie, pourrait voir la modernisation de sa suite de radars de veille aérienne (DRJB-11B) et de conduite de tir (DRBV-26D et Arabel) soit :
    • par un radar polyvalent (veille et conduite de tir) Herakles (qui équipe actuellement les neuf FREMM ASM),
    • par le même radar polyvalent que les FREDA : le Sea Fire 500.
A terme, soit 2022 et l'entrée en service espérée de la seconde FREDA, il existerait deux grandes options (dans l'hypothèse où il y aurait suffisamment de crédits budgétaires lors de la refonte à mi-vie du porte-avions pour les envisager toutes les deux) :
  • soit le porte-avions s'aligne sur la majorité des frégates, soit sur le radar Herakles, et à ce moment là, les économies d'échelles seront relativement importantes, tout comme celles découlant des évolutions futures ;
  • soit l'effet de série existera tant dans l'acquisition et la mise en oeuvre du nouveau radar, mais à une échelle moindre. 
Dans les deux cas, il y aura un certain "effet de génération" qui sera recherché afin de créer une bulle défense aérienne la plus cohérente possible. C'est ce qui a pu être fait par le passé :
  • Les frégates lance-engins de classe Duquesne étaient les premières frégates1 à mettre en oeuvre des radars de veille aérienne à longue portée : le DRBI-23B. Celui-ci aurait eu un rayon de détection de 400 km.
  • Les unités suivantes, les Cassard et Jean Bart (corvettes C70, puis frégates F70) reçurent le DRBJ-11 (bien que le Cassard reçu en premier lieu le DRBV-15). Ce radar avait une portée similaire à celle de son prédécesseur.
    Les deux navires sont actuellement refondus afin de mettre en oeuvre le SMART-S (d'une portée réduite : de 150 à 250 km de rayon).
  • Enfin, les frégates issues du programme Horizon, les Forbin et Chevalier Paul, disposent du radar S-1850 (ou SMART-L) qui permet d'établir une bulle de détection de 500 km de rayon.
A contrario, le croiseurs Colbert (mais pas le De Grasse) reçut d'importants équipements de veille aérienne lors de sa refonte (1970-1972) : les DRB-20, 23C et 50. A noter que le navire ne reçut pas d'intercepteurs à la hauteur de ses capacités : le MASALCA n'entra jamais en service, contrairement au Talos américian.

Du côté des porte-avions, les Clemenceau et Foch portaient les DRB-20, 23C et 50 de veille aérienne. Ces senseurs seront modernisés, et complétés par la suite par un radar de veille air tridimensionnel : le DRBI-10. Ces deux navires ne mettaient pas en oeuvre d'aéronefs de guet aérien. Il a été nécessaire d'attendre la refonte d'une partie des Alizée pour assurer cette mission qui donne un très grand avantage à celui qui en dispose.
Ainsi, la défense aérienne dans la "génération Clemenceau" usa du même radar de veille aérienne à longue portée : le DRB/DRBI-23. Celle du Charles de Gaulle eut recours au DBRJ-11.

Quant au Charles de Gaulle, ces moyens de veille air consistent en le DRBJ-11 et le DBRV-26D. Il n'y a pas eu de construction de la défense aérienne autour d'un même radar de veille aérienne à longue portée : les Horizon portent le S-1850/SMART-L et les FREMM emporteront l'Heraklès.

Ce qui peut être intéressant de relever, c'est que ces deux choix contiennent des possibilités stratégiques différentes. Si l'on demeure dans le cadre d'une généralisation du radar Herakles, alors le porte-avions et les frégates pourront à loisir perfectionner un réseau de senseurs et d'intercepteurs en vue de constituer une efficace bulle de défense aérienne.

Cependant, le potentiel offert par le nouveau radar de Thales est tout autre sur le plan stratégique. Outre le fait que la Marine passerait à la technologie des radars à face planes, il s'agirait surtout de choisir un radar qui est clairement conçu dans l'optique de la défense anti-missile balistique. Sa portée est annoncée comme étant celle du double de ses prédécesseurs. Sachant que l'avantage du porte-avions, c'est que la puissance électrique disponible (dans le cas où elle est prévue d'être extensible afin d'absorber les évolutions) et la taille de l'ilôt, des aériens permettent d'envisager une version "dopée" pour le porte-avions.

Quoi qu'il en soit, l'éventuel choix de ce radar ouvre la porte à une contribution navale navale à la DAMB. Mieux encore, le fait de l'installer aussi sur le porte-avions ne serait pas non plus une décision anodine puisqu'il serait envisageable de faire travailler en réseau le pont plat avec, au moins, une FREDA.

Dès lors, la France aurait le loisir de déplacer une bulle de défense aérospatiale à sa guise, en fonction de l'évolutions de la menace. Cela permet d'obtenir une couverture anti-missile balistique flexible du monde, en fonction de l'évolution du contexte international. C'est particulièrement avantageux pour offrir une DAMB de théâtre lors d'un engagement.

Mais dans le cadre d'une DAMB de territoires -choix de développement effectué par l'OTAN au sommet de Lisbonne du 20 novembre 2010- cette bulle offrirait un compromis avantageux. La constitution d'un tel bouclier anti-missiles (DAMB de territoires, ABM aux Etats-Unis) s'entend, dans le cadre de la "menace iranienne", par la création de moyens d'alerte avancée dans un premier temps. Généralement, ils se matérialisent comme étant une alerte avancée spatiale (satellite de détection de départ de missiles balistiques par infrarouge) et terrestre (base(s) radar(s). Dès lors, il y a deux grandes options :
  • soit il s'agit d'un dispositif qui combine des moyens mono-azimut : centrés sur la "menace iranienne",
  • soit il s'agit de moyens tous azimut.  
La difficulté qui se pose, c'est l'articulation entre la DAMB de territoires, et la dissuasion nucléaire. Selon les discours des précédents présidents de la République et de l'actuel, celle-ci est tous azimut. Il se pose alors la question de la difficile articulation entre un dispositif de défense spécifique à une menace et la dissuasion. D'autant plus que cette dernière engage des menaces qui pourraient porter atteinte à nos intérêts vitaux, et une DAMB de territories peut affronter bien des menaces qui engageraient nos intérêts vitaux, donc la dissuasion.

Dans cette impasse manifeste, en l'état actuel des choses, la bulle aérospatiale projetée en 2022 offre l'avantage de réaliser la quadrature du cercle. En effet, il s'agit toujours d'une bulle qui peut être centrée sur un secteur géographique. Mais grâce aux capacités de mobilité (stratégique qui plus est) des navires, elle peut se positionner selon le contexte international. Par ces mouvements, cette alerte avancée devient tous azimut (en théorie). Ce serait même constituer au renforcement de la dissuasion conventionnel que de pouvoir montrer, dans un contexte plus ou moins tendu, que cette bulle peut entraver sérieusement la mise en œuvre d'engins balistiques de toutes sortes.

A la remarque près que pour qu'un bouclier de cette sorte puisse être crédible, il faut qu'il soit capable de frapper l'archer adverse, sans quoi, il n'encaissera même pas. Cela revient à remettre sur le devant de la scène la question du développement des intercepteurs, et le coût d'un porte-avions y passerait.

Il n'en demeure pas moins qu'il existe une dernière hypothèse à visiter : celle où l'homogénéisation des radars de la Flotte pousserait à refondre les neuf FREMM ASM afin qu'elles bénéfcient du radar de la FREMM ER (le Sea Fire 500). L'objectif d'une telle hypothèse est de démultiplier la surface couverte par la bulle. Dans cette optique, il y aurait non plus trois plateformes navales, mais douze. Ce qui reviendrait à dire que la conjonction de ces navires permettrait de surveiller une vaste zone, de l'ordre de la région à l'échelle de la planète ?

Cela suppose une mise en réseau et des moyens pour échanger les flux de données pour coordonner, unifier l'image tactique (ou stratégique ?) et centraliser la décision dans une lutte où tout se compte de secondes. C'est en quoi la DARPA nous annonce qu'une hypothétique future liaison tactique qui permettra des échanges de données de l'ordre des 100 Gigabit par seconde entre l'unité et un satellite (afin de renvoyer vers le PC à terre ?).

Dans cette idée-là, la propositions de bulle précédente change d'échelle puisque le groupe navale se constitue au moins à l'échelon régional, là où la proposition précédente se limitait au théâtre. Il y aurait même possibilité de porter l'hypothèse à son paroxysme en questionnant les avantages et inconvénients à adapter le radar à faces planes de Thales sur les trois BPC afin de renforcer le réseau encore.

Dernier acte paroxystique : la nouvelle liaison de donnée rêvée de la DARPA peut permettre d'envisager d'intégrer un navire comme le Monge dans une telle bulle aérospatiale. Ainsi, la couverture serait aussi étendue en surface qu'en altitude.

A partir du moment où l'on rentre dans la logique du développement de la bulle aérospatiale navale, outre la simple homogénéisation des radars entre FREDA et porte-avions, s'enclenche un engrenage qui mène à la surenchère. C'est une logique de densification de la puissance par plateforme qui peut atteindre bien des unités. C'est quelque part flatter l'idée du croiseur polyvalent dont l'Arleigh Burke en est la plus grande matérialisation et vers lequel les FREMM, comme les frégates Suffren et Duquesne en leur temps, pourraient se diriger.
C'est sans parler de l'intérêt non-démontré de constituer une telle bulle alors que la dissuasion traite ces menaces et qu'un engagement "massif" d'engins balistiques de nature à justifier une telle couverture en réseau ne semble pas faire partie des hypothèses d'étude.
Mieux encore, ce serait constater que le maillon le plus faible de ce réseau (outre l'absence d'intercepteurs) serait les liaisons tactiques qui utilisent le "centre de gravité spatial" de notre action, et qui demeure toujours autant vulnérable aux actions terrestres, voire spatiales.

Enfin, une version maîtrisée, rationalisée de cette bulle aérospatiale aurait peut être finalement un intérêt. Il s'agirait d'un scénario où la Syrie, pour une raison quelconque et imaginaire, envisagerait des frappes par missiles balistiques à courte portée contre ses voisins (à une date où, au moins, nos FREDA et notre porte-avions refondu seraient équipés). A ce moment là, il y aurait une séduisante idée où :
  • le porte-avions croiserait en Méditerranée orientale au large de la Turquie,
  • une FREDA en mer Rouge
  • la dernière dans le Golfe Persique.
Alors, il serait potentiellement possible d'offrir une couverture radar aux pays riverains de ces trois points et de coordonner la défense aérienne de la zone contre ces potentielles menace. C'est-à-dire qu'en l'état actuel des choses, surtout avec nos intercepteurs actuels (Aster 30 block 1), il serait possible d'étendre la DAMB de théâtre à une DAMB de territoires limitée à l'interception de missiles balistiques de courte portée (SRBM).

Mais ce ne sont là quelques hypothèses, et il convient d'attendre de lire ce que le pouvoir politique aura choisit à travers le nouveau livre blanc, et ce qui sera transposé en lignes budgétaires dans la future loi de programmation militaire.

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