Une photographie prise dans la salle de réunion de l'Institut 701 (bureau d'étude principal) de CSIC 701 (bureau de conception des porte-aéronefs Type 002 et porte-avions Type 003) dévoile une image générée par ordinateur (Computer-Generated Image (CGI) du porte-avions Type 003 de la Marine de l'Armée Populaire de Libération qui est actuellement en construction. Cette première vue officielle permet d'aborder ce vers quoi tend la marine chinoise.
Dans un premier temps, il s'agit de relever que cette image de synthèse n'a pratiquement rien en commun avec tous les dessins d'artiste qui ont pu être diffusées sur Internet. De manière très générale, ceux-ci présentaient surtout des compositions élaborées avec un certain nombre d'outils dont la base semblait être peu ou prou un porte-avions de classe Nimitz (CVN-68), voire plus souvent, Gerald R. Ford (CVN-78).
Et dans un deuxième temps, il est tout aussi remarquable que les correspondances soient très fortes - voire quasi-parfaites ? - avec la plateforme de simulation de la compatibilité électromagnétique à Wuhan. Tout du moins, ce n'est que du point de vue de l'ilot. Le pont d'envol est très sommairement aménagé par les toitures des bâtiments et il serait bien audacieux d'en tirer quelques conclusions.
Reste à tenter de décrire les caractéristiques nautiques et opérationnelles du Type 003, premier porte-avions chinois. Les Type 001, Type 001/Type 002 ne sont que des porte-aéronefs puisque appartenant à la filière STOBAR. Ne permettant pas à un aéronef à voilure fixe de décoller et d'apponter avec des qualités (autonomie, capacité d'emport, etc) symétriques à celles du même aéronef opérant depuis la terre ferme - ce que permet la filière CATOBAR -, ils ne peuvent légitimement être classés comme des porte-avions.
Le premier facteur dimensionnant l'architecture d'un porte-avions est l'aéronef le plus lourd et le plus rapide embarqué. C'est lui qui défini la "garde à l'arrondi" à partir de laquelle va découler tout le reste : les dimensions de la piste oblique, la position des brins d'arrêt, leur nombre et l'angle que fait cette piste par rapport au pont d'envol. C'est après ces choix que sera défini tout le pont d'envol. Le tout devant être porté et propulsé par la poutre-navire.
Il est bien difficile de distinguer quel est l'avion de combat marine embarqué : la mauvaise qualité de l'image ne permet pas de certifier avec certitude qu'il s'agit du J-15 (~27 - 32 tonnes) en version catapultable (J-15A ?). Mais s'il était question, par exemple, d'une version embarquée du J-20 alors la chose aurait été énergiquement commentée et cet appareil ne semble pas avoir bénéficié de travaux d'adaptation pour cet usage. En outre, le JZY-01 (équivalent chinois de l'E-2 Hawkeye ; masse inconnue) est visible et sur l'image de synthèse du Type 003 et la plateforme de simulation de la compatibilité électromagnétique à Wuhan.
Le nombre de catapultes visibles est au nombre de trois. Il ne semble pas possible d'établir quelle filière technologique a pu être retenue : catapultes à vapeur ou électromagnétiques ? Les deux sont en cours de développement et en phase de démonstration en Chine.
Les choix chinois ressemblent très nettement à ceux des Américains ou presque. Il y a deux catapultes dans l'axe du navire, ce qui interdit la création de zones de parkings pour les aéronefs de retour de vol comme sur, par exemple, les porte-avions français. Par contre, et toujours à l'instar de l'US Navy, les zones de parkings semblent réparties autour de l'ilot. Et là où les porte-avions américains peuvent voir leur pont d'envol être partagés entre deux bordées avec, chacune, deux catapultes et presque deux ascenseurs, les Chinois se restreignent à une bordée asymétrique.
Le nombre d'ascenseurs n'est pas non plus visible de prime abord.
Il n'est pas non plus possible de discerner quelques indices quant à la propulsion, en particulier au sujet de l'énergie retenue. Mais rien n'indique, pour le moment, que la propulsion navale nucléaire puisse être intégrée avant le Type 004 (?).
En quittant le pont d'envol, nous pouvons retenir qu'il s'agira de mettre en œuvre des aéronefs de la classe des 30 tonnes - nouvelle norme que le professeur Coutau-Bégarie relevait avec justesse en 2003 (Hervé Coutau-Bégarie, « Le problème du deuxième porte-avions », Revue de Défense nationale, juillet 2003, pp. 135-144). A moins d'une avancée technologique chinoise, ceci conduit à des catapultes de plus ou moins 90 mètres. Avec trois catapultes de ce gabarit, il y a fort à parier que le porte-avions Type 003 ne déplacera pas moins de 50 000 tonnes. L'image de synthèse tend à suggérer que les deux porte-aéronefs à pont d'envol avec tremplin peuvent être les Type 001 et Type 001A/Type 002. Ce qui reviendrait à dire que par comparaison le Type 003 évoluerait avec des caractéristiques nautiques relativement proches. Le nombre d'aéronefs à peine discernable en raison de la trop basse résolution laisse deviner, environ, 16 aéronefs à voilure fixe sur le pont et, au moins, autant en hangar, si ce n'est plus. Les porte-aéronefs chinois semblent limiter à 24 J-15.
Dans l'ensemble, il y a une "force tranquille" qui transpire des choix chinois avec une montée en puissance aéronavales étalée dans le temps : quatre porte-aéronefs et porte-avions pressentis, à l'extérieur de la Chine sur un faisceaux d'indices, en 2006 et il y en aura probablement quatre à l'arrivée en 2025. Les caractéristiques nautiques et opérationnelles semblent modérées, il n'y a pas de course au tonnage avec la marine américaine comme cela peut se dessiner en Russie avec un Project 23000E Shtorm parfois annoncé au-delà des 110 000 tonnes. C'est peut être aussi le signe d'un budget naval chinois qui demeure plus modeste que certains peuvent arguer et sur lequel pèsera toujours plus de contraintes.
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