Les @mers du CESM


Les @mers du CESM - 19 avril 1944 :

Le cuirassé Richelieu participe au bombardement de Sabang, base japonaise en Indonésie. Le navire français, ayant rejoint l’Eastern Fleet commandée par l’amiral britannique Somerville, prendra part à trois autres opérations visant des bases navales ennemies. Après 52 mois passés en mer, le bâtiment rentre à Toulon le 1er octobre 1944. À nouveau déployé en Asie du Sud-Est l’année suivante, le bâtiment assistera à la capitulation du Japon dans la rade de Singapour le 23 septembre 1945.





31 août 2013

Fin du monde en Syrie

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Thibault Leroy nous propose un papier sur la situation actuelle en Syrie. 
 
Interviendront-ils ? N’interviendront-ils pas ? Avec qui ? Pour quoi ? On spécule, c’est médiatique, sur la décision des Occidentaux d’intervenir en Syrie à la suite de l’utilisation de gaz Sarin, le 21 août. Les cabinets américains et européens, incapables de s’entendre avec les Russes et de faire avancer le dossier au Conseil de sécurité, ont opté en parallèle pour un discours beaucoup plus menaçant, laissant craindre ces derniers jours une intervention rapide et ciblée.
 
Le conflit en Syrie est à plusieurs échelles. D’un point de vue local, il met aux prises les forces gouvernementales de Bachar al-Assad à un patchwork de forces « insurgées » : combattants de l’Armée Syrienne Libre, Front Al-Nosra qui regroupe des combattants islamistes, Kurdes. La militarisation de l’opposition, le peu d’informations sur l’emprise réelle du Conseil national syrien, le poids des Syriens de l’extérieur et l’accroissement des réfugiés – ils sont 700 000 au seul Liban – sont autant d’éléments qui encouragent la dynamique centrifuge de la guerre civile syrienne. Même la disparition d’al-Assad demain ne répondrait pas au défi politique posé à l’opposition, le jeu de la révolution n’étant pas à somme nulle. A l’échelle régionale, la déstabilisation du Proche-Orient dessine un tableau en arcs électriques : la plaie demeure ouverte en Irak, toujours victime d’attentats meurtriers ; l’élection de Rohani en Iran n’a pas envoyé de signes tangibles d’un renoncement à son programme nucléaire ; surtout, le Hezbollah intervient aux côtés de Damas dans la guerre civile, tandis que les Israéliens et les Turcs ont vigoureusement réagi aux retombées sur leurs frontières de tirs perdus. Si l’incendie menace de se propager, la balkanisation du Levant est en tout cas à un stade avancé. L’instabilité régionale suffit à dissuader les Etats-majors d’une intervention précipitée, d’autant plus si elle est orchestrée par un axe Occidental loin d’être désiré et lui-même refroidi par ses expériences délicates, en Irak, en Afghanistan et même en Libye.
 
De quelle légitimité peuvent-ils en effet bénéficier ? Les Britanniques se sont appuyés sur l’article VII de la charte de l’ONU lors de la réunion du Conseil de sécurité. Il prévoit, en des termes imprécis, la possibilité d’une intervention de la communauté internationale si un Etat se révèle incapable de protéger sa population civile, et a fortiori s’il se montre coupable de crimes envers elle. Les vetos russe et chinois, prévisibles, ont bloqué l’initiative. Pékin et Moscou s’attachent-ils à de quelconques avantages stratégiques dans la région, négociés avec l’équipe au pouvoir à Damas ? Ou ne s’agit-il pas plutôt, pour eux, de ne pas laisser passer une nouvelle Libye ? Les deux grands émergents peuvent craindre que les Occidentaux aient des buts de guerre cachés en Syrie, et ne souhaitent pas une nouvelle fois les laisser gendarmer le monde selon leurs intérêts.
 
L’ordre des choses aurait voulu que l’issue de la crise syrienne se décide entre diplomates, et la clef se trouvait sans doute à Moscou bien plus qu’à Homs. Ce serait avec un cahier des charges politiques vide que les frégates américaines auraient frappé la Syrie. Sans frein, sans fin, les armées occidentales n’auraient-elles pas été entraînées, une nouvelle fois et malgré elles, dans une violente escalade ? L’issue incertaine n’est certainement pas celle des combats, dont la supériorité mécanique américaine décidera facilement, mais celle de la sortie politique, imprécisée par les gouvernements. Le conflit Syrien ressemble étrangement aux conflits post-guerre froide, du Golfe à la Yougoslavie. Ils nous ont montré qu’on ne décide pas arbitrairement de l’avenir politique d’une nation. La subtile organisation des sociétés n’obéit pas aux lois physiques de la guerre, mais à une chimie instable et dangereuse. Les interventions occidentales des vingt dernières années, policières et justifiées par la morale – mais quelle morale ? –ont été pensées comme un devoir de conscience, mais vécues sur le terrain comme des ingérences contre-productives. Il faut se garder de l’impéritie d’un bellicisme angélique. Il faut accepter une complexité inédite. Le nouvel ordre international ressemble bien à cette « a-polarité » dont l’a qualifié le ministre Laurent Fabius, bien plus qu’une multipolarité organisée entre quelques puissants. L’ancien monde tarde à mourir, le nouveau tarde à paraître : de cette formule de Gramsci, interrogeons-nous sur la Syrie, qui pourrait être le départ d’un nouvel état du monde.
 
 
 Thibault Leroy, doctorant en Histoire, Université Paris 1.

29 août 2013

Les six porte-avions de l'étude du 20 juin 1945

© Inconnu. 1941, localisation non-précisée (les Antilles ?).


L'étude du 20 juin 1945 proposait par la Marine nationale exposait la vue de l'état-major quant à la reconstruction de la Flotte pour l'après-guerre. Les six porte-avions (d'escorte) demandés dans ce cadre peuvent apparaître comme hors de propos avec les contingences d'une France libérée et à reconstruire. Le détail des l'étude présente plutôt un état-major de la Marine très pragmatique.

27 août 2013

Projet de conversion du Jean Bart en cuirassé lance-missiles

© Inconnu. Représentation d'artiste d'un Kentucky lance-missiles, projet assez similaire à ceux de la Royale.


Le regretté Alain Guillerm glissait rapidement dans l’un de ses ouvrages – La Marine de Guerre moderne – 1915-2015 - qu’il avait été dommage que la Marine nationale n’ait pas eu les budgets nécessaires à la conversion du Jean Bart en cuirassé lance-missiles. 

10 août 2013

Loi de programmation militaire et Marine Nationale - Une flotte resserrée frappée de sénescence

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© DCNS. SNA de classe Suffren.
 
Pascal Ramounet, qui a déjé écrit sur le Fauteuil et proposé à l'occasion un nouveau format pour l'Armée de Terre, nous livre un premier jet de ses réflexions sur la nouvelle LPM.
Certains considèrent que le projet de LPM proposé par le ministre de la défense réussit à éviter le pire en préservant les fondamentaux de la défense nationale.
 
Il m’est d’avis que tel n’est pas le cas. La nouvelle LPM poursuit une longue descente aux enfers et assène un nouveau coup de poignard à l’industrie de la défense à l’heure du redressement productif proclamé.
 
Le choix entre le nombre et la qualité qui a fait récemment débat dans le presse spécialisée, trouve ici un épilogue sans appel: Il n’y aura ni le nombre ni la qualité.
 
Je me limiterai dans ce blog à quelques exemples relatifs à la Marine nationale, considérée pourtant comme l’arme la moins touchée par les mesures d’économies budgétaires annoncées.
 
Il s’agit de trois programmes majeurs dont le calendrier est de nouveau étiré au delà du point de rupture.
 
Le programme FREMM qui devait à son origine concerner 17 frégates, format réduit à 11 unités par le livre blanc de 2008, se voit de nouveau amputer, pour atteindre à l’horizon 2019, 8 unités livrées, dont deux anti-aériennes.
 
Bien sur l’acquisition des 3 derniers bâtiments est évoquée, avec quelque réserve, pour l’après 2019……… Au rythme de construction d’une unité tous les 14 mois, la livraison très hypothétique du dernier bâtiment serait repoussée à 2025  (cf dossier de Mer et Marine).
 
Dans la réalité, cela veut dire, que le format de 11 frégates multimissions (FMM) modernes est de la poudre aux yeux.
 
De 2013 à 2020, le format réel de la Marine Nationale sera dans la meilleure des hypothèses, de 7 frégates ASM, dont 1 agée de plus de 30 ans.
 
Nous serons ainsi passés de 17 exemplaires jugés nécessaires à 7 exemplaires jugés suffisants.
 
Si l’on tient compte d’un taux de disponibilité compris entre 60 et 70%, la Marine nationale ne sera en mesure de mobiliser que 4 frégates ASM dans la période 2013 - 2020.
 

situation 2013 situation 2020
Nom
Mise en service
Age en 2013 en années Nom Mise en service Age en 2020 en années
D 641 DUPLEIX 1981 32 D 646 LATOUCHE TREVILLE 1990 30
D 642 MONTCALM 1982 31 D 6... AQUITAINE 2013 7
D 643 JEAN DE VIENNE 1984 29 D 6... NORMANDIE 2014 6
D 644 PRIMAUGUET 1986 27 D 6... PROVENCE 2016? 4
D 645 LA MOTTE PICQUET 1988 25 D 6... LANGUEDOC 2018? 2
D 646 LATOUCHE TREVILLE 1990 23 D 6... AUVERGNE 2019? 1
D 6... AQUITAINE 2013 0 D6….ALSACE 2020? 0
 
On se doit d’observer, que la responsabilité de cette situation ne peut être imputée au ministre de la défense actuel qui doit gérer, comme il peut, un héritage particulièrement lourd. L’application stricte du projet de LPM permettra au moins de rajeunir considérablement une flotte actuellement en décrépitude.
 
Le programme de SNA de la classe BARRACUDA est encore plus caricatural.

Si la mise en service du premier de série, le SUFFREN, est maintenue en 2017, la livraison de son sistership a été repoussée d’un an. Elle n’interviendra qu’en 2020, ce qui nous donne le tableau suivant :
 

situation 2013 situation 2020
Nom Mise en service Age en 2013 en années Nom Mise en service Age en 2020 en années
S 601 RUBIS 1983 30 S602 SAPHIR 1984 36
S602 SAPHIR 1984 29 S603 CASABIANCA 1987 33
S603 CASABIANCA 1987 26 S604 EMERAUDE 1988 32
S604 EMERAUDE 1988 22 S605 AMETHYSTE 1992 31
S605 AMETHYSTE 1992 21 S606 PERLE 1993 30
S606 PERLE 1993 20 S... SUFFREN 2017 3
 
En 2020, 5 des 6 SNA auront plus de 30 ans !

La comparaison avec la grande Bretagne, dont la politique de défense est pourtant décriée, est saisissante : Il est prévu, en 2020, que 6 des 7 SNA de nouvelle génération auront été livrés.
 
Le troisième exemple concerne les vaillants Atlantique 2
 
La Marine nationale dispose de 27 Atlantique 2 (ATL2) livrés de 1989 à 1997, qui sont donc âgés de 16 à 24 ans.
Selon la LPM, 15 d'entre eux sont destinés à être rénovés (radar, système électro-optique, moyens d'écoute, dont des bouées acoustiques numériques...) et 4 seront versés, en l'état à la surveillance maritime.

Parmi les 15 ATL2 destinés à être rénovés, 4 le seront avant 2020, en l'occurrence entre 2018 et 2019.
 
Ici encore, cela veut dire, dans l’hypothèse d’un taux de disponibilité de 70% (à vérifier) que dans la réalité, la MN ne sera capable de mettre en œuvre de façon simultanée, que 3 avions modernes de lutte anti-sous marine en 2020.
 
Les avions de patrouille maritime sont pourtant cruciaux pour la protection des approches maritimes et portuaires du pays, du groupe aéronaval et en premier lieu de la Force océanique stratégique (FOST)
 
Les récents conflits lybiens et maliens ont démontré que leur utilité s’exerce bien au delà des océans. Leur autonomie, leur moyens optroniques et de communication leur permettent d’assurer des missions de missions de surveillance, de renseignement, de détection de cibles et même de bombardement (cf opération SERVAL) au profit des forces terrestres.
 
La surveillance maritime sera dotée pour sa part, outre 4 ATL 2 non rénovés, de 8 Falcon 50, dont 4 équipés de chaine SAR. Les 5 GARDIAN ( Falcon 200) actuellement affectés Outre-mer seront retirés du service en 2015, frappés par une obsolescence avancée (32 ans). Le programme AVSIMAR destiné à les remplacer est repoussé aux calendes grecques.
 
Outre la raréfaction dangereuse des avions de patrouille et de surveillance maritime ce qui frappe, à la lecture de la LPM, est l’absence de gestion globale, c'est-à-dire interarmées et au-delà, interministérielle, de la problématique de la surveillance aérienne, considérée au sens large (reconnaissance, surveillance, identification et désignation….)
 
Chacun dans son coin, avec ses moyens. La MN avec ses ATL2 et ses FALCON, l’armée de l’air avec ses drones MALE US annoncés, l’armée de terre avec ses drones tactiques également annoncés (vraisemblablement des WATCHHKEPPER qui décollent d’une piste en dur ….) et ses 3 ISR de nature inconnue…et les services de la douane qui ont commandé 8 magnifiques Beechcraft King Air 350ER dotés d’un panel complet de capteurs et systèmes de missions (Ocean Master de Thalès, Star Safire III, SlAR Therma, AIS, liaison de données tactiques...).
 
A quand une organisation unifiée de ces moyens disparates ?
 
Au final, ces quelques exemples, qui pourraient être élargis, notamment aux moyens de lutte contre les mines, négligés, et aux navires de patrouille maritime complètement oubliés, alors que la lutte contre les trafics illicites est l’un des défis majeur à relever, donnent une image beaucoup moins réjouissante de la future MN que n’en donne la présentation trompeusement optimiste du projet de LPM.
 
Des corrections s’imposent, messieurs les députés et sénateurs.
Il conviendrait à minima, de
  1. maintenir en 2019, la mise en service du Duguay-Trouin, deuxième SNA de la classe BARRACUDA ;
  2. doubler le nombre d’ATL2 rénovés, soit 8 au lieu de 4 ;
  3. renouveler la flotte de patrouilleurs hauturiers (classe ADROIT amélioré), à raison de 12 unités, soit un bâtiment livré tous les 6 mois.
 
 
Pascal RAMOUNET