Les @mers du CESM


Les @mers du CESM - 19 avril 1944 :

Le cuirassé Richelieu participe au bombardement de Sabang, base japonaise en Indonésie. Le navire français, ayant rejoint l’Eastern Fleet commandée par l’amiral britannique Somerville, prendra part à trois autres opérations visant des bases navales ennemies. Après 52 mois passés en mer, le bâtiment rentre à Toulon le 1er octobre 1944. À nouveau déployé en Asie du Sud-Est l’année suivante, le bâtiment assistera à la capitulation du Japon dans la rade de Singapour le 23 septembre 1945.





13 octobre 2014

Terre, Air, Mer, Cyber ? La 4ème armée entre coup de com et réalités

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© Inconnu.
 
Le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a récemment fait part de son sentiment quant à la création, dans un proche avenir (“demain”) d’une quatrième armée cyber. Au même titre que l’Armée de terre, la Marine nationale et l’Armée de l’air, l’Armée de cyberdéfense serait donc pourvue de structures organiques et fonctionnelles, d’un état-major et de prérogatives particulières. Une possibilité pour le moins étonnante du fait d’une distribution et d’une intégration des différents acteurs de la cyberdéfense au sein des structures militaires actuelles. Cet article cherche à comprendre la réalité d’une telle évolution ou si les propos du ministre ne sont pas, pour l’essentiel, qu’un habile “coup de com”.


  
Fort logiquement, le ministre a mis en exergue les menaces qui pèsent tant sur le fonctionnement de la France : « Ce que je voudrais vous dire, c’est que les risques concernant le démantèlement ou la pénétration de nos systèmes informatiques sont de plus en plus réels. C’est une menace contre le fonctionnement de notre pays. Il suffirait de s’introduire dans le dispositif qui organise l’électricité ou qui organise le système ferroviaire pour entraîner une perturbation très lourde« . Ce constat qui a pour corollaire les conséquences de telles capacités si elles visaient l’appareil militaire français : « Mais ça peut aussi avoir des conséquences sur notre système de commandement et d’armement. Donc il faut s’organiser désormais pour lutter contre les cybermenaces. Lorsqu’il y a eu la loi de programmation militaire antérieure […], cette question n’était quasiment pas vraiment posée. Depuis cinq ans, on assiste à des menaces, à des tentatives que ce soit par des États ou des groupes terroristes« .

Un espace complexe et inhabitable par l’homme

Sommes-nous face à une évolution nécessaire de la Défense nationale comme semble le sous-entendre le ministre de la Défense ? Remarquons que l’affaire est complexe. Si l’Armée de Terre a vu réduire ses missions de sécurité intérieure a une force d’appoint en cas de crise intérieure, la Marine est plus proche de cette idée de continuum. Insérée dans l’Action de l’État en Mer (A.E.M.), la Marine nationale intervient aux côtés de six autres administrations pour faire respecter la souveraineté française sur les eaux territoriales et les zones économiques exclusives.

Cette organisation complexe est justifiée par la diversité des intervenants et aussi la confusion des acteurs en mer où l’on peut rencontrer aussi bien le commerçant que le pêcheur et le militaire. Tandis que, à terre, les missions de sécurité intérieure relèvent des services concernés du ministère de l’Intérieur sans interférence des armées.

Dans le cyberespace, nous retrouvons cette complexité et cette confusion des acteurs. Les États sont autant présent que les tiers. Le cyberespace, comme l’Océan, est un milieu que l’on peut qualifier de fluide, par opposition aux espaces solides, selon le concept présenté par Laurent Henninger [2]. “Lisses, isomorphes et inhabitables par l’homme” sont bien des caractéristiques applicables au cyberespace qui en font un milieu à part où les actions de force,  techniques et technologiques, nécessitent une arme ou une armée matérielle. Ainsi Olivier Kempf remarquait [3] que les caractéristiques du cyberespace, tant par ses couches (matérielle, logique et sémantique) que par ses acteurs (l’intervention des tiers) créent des conditions d’opacité qui permettent l’offensive stratégique. Dans cette optique, l’apport des moyens offensifs dans le cyberespace, peut être plus encore que les forces spéciales, les moyens de guerre électroniques ou toute autre capacité de renseignement et d’action véhiculées par les trois armées servent aux offensives parfois discrètes mais bien réelles de la France. Dès lors, les conditions de création d’une armée cyber dédiée sont-elles réunies ?

L’apparente logique d’institutionnaliser le cyber par la création d’une armée dédiée

Cette place grandissante du milieu cyber justifierait, pour le ministre de la Défense, la création d’une quatrième armée spécifique à la cyberdéfense (comme peuvent l’être les autres armées -de terre, de mer et de l’air). Loin d’être un ballon d’essai, s’agirait-il alors d’une conviction profonde de M. Le Drian ? Conviction personnelle, libre et hors agenda dans ce cas car aujourd’hui rien dans la loi de programmation militaire ou le pacte Défense Cyber [4] n’évoque un tel projet.

Du point de vue de la communication, l’idée est belle et séduisante. D’un côté, elle évoque une construction historique apparemment simple et logique : puisqu’il y a un milieu cyber source de conflictualités qui menace notre sécurité par des menaces extérieures, alors il (lui) faut une réponse sérieuse (comme aurait pu dire Napoléon). La création d’une armée apte à lutter dans ce milieu est cette réponse. Une idée simple et efficace à présenter aux citoyens, ce que semble faire le ministre : « Donc il faut se prémunir. Et c’est pourquoi, dans la loi de programmation […], il y a sur toute la période un milliard d’euros consacrée à la lutte contre les cybermenaces et pour assurer notre cybersécurité. C’est la menace de demain. Demain, je pense qu’il y aura quatre armées : terre, mer, air et cyber. Parce que c’est un enjeu« .

Dans les faits, nous n’irions pas vers la création d’une quatrième armée. Le verrou budgétaire limite les marges de manœuvre, au moins jusqu’au prochain quinquennat, donc les capacités à traduire l’innovation dans les structures existantes. Ensuite, les chaînes fonctionnelles et opérationnelles actuelles semblent donner satisfaction. Enfin, les gains espérés par cette création qui déstabiliserait l’existant (qui fonctionne) introduirait des contraintes organiques supérieures aux avantages espérées. Finalement, la sortie du ministre de la Défense est habile : continuer de marteler que la France a pris la pleine mesure de la menace cyber et s’est organisée en conséquence, marquer les esprits en faisant coup double puisque s’adressant autant aux citoyens qu’à nos adversaires, faire détourner le regard des difficultés croissantes [5] auxquelles nos troupes engagées sur plusieurs théâtres d’opération sont confrontées.



[3] “Introduction à la cyberstratégie”, Economica 2012

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