Nous pourrions être à l'aube d'une Révolution navale aussi
importante que l'avènement de la vapeur puis de la propulsion nucléaire.
Toutes deux ont libéré les marines de la servitude du vent du
temps de la marine à voiles. Tentons de défendre le postulat
proposé. Deux évolutions techniques sont, manifestement, d'une
importance capitale.
Étude des avant-projets demandés par l'organe ayant à charge la flotte à construire (Conseil Supérieur de la Marine, Conseil des Travaux, SCEM/PLANPROG, OCA Marine, ASF, etc) et présentés à l'autorité politique. L'enjeu consiste à déterminer comment la Marine engage ces projets dans le processus institutionnel (contrat opérationnel, plan naval ? Loi(s) de financement, etc) pour faire correspondre la flotte à construire avec la flotte répondant au problème militaire français. ISSN : 2271-1163
Les @mers du CESM
Les @mers du CESM - 19 avril 1944 : Le cuirassé Richelieu participe au bombardement de Sabang, base japonaise en Indonésie. Le navire français, ayant rejoint l’Eastern Fleet commandée par l’amiral britannique Somerville, prendra part à trois autres opérations visant des bases navales ennemies. Après 52 mois passés en mer, le bâtiment rentre à Toulon le 1er octobre 1944. À nouveau déployé en Asie du Sud-Est l’année suivante, le bâtiment assistera à la capitulation du Japon dans la rade de Singapour le 23 septembre 1945. | |
30 avril 2014
25 avril 2014
L'avenir de la PATMAR : entre persistance et intervention ?
L'Australie a passé plusieurs contrats pour acquérir le P-8 Poseidon (un Atlantique 2 de 85 tonnes contre 46 pour l'original) et le drone MQ-4C Triton (la version maritime du Global Hawk).
L'investissement est très lourd, se compte en plusieurs milliards de
dollars. De plus, c'est le signe d'une ambition très haute dans la
défense des approches maritimes.
Ambitions et concrétisations qui, au passage, redonnent un peu de valeur aux bruits de coursives qui affirment que si le devis pour le programme de 12 nouveaux sous-marins classiques australiens est si haut (18 milliards d'euros, soit plus de deux fois le programme Barracuda) c'est que ce serait pour justifier la location de SNA de classe Virginia.
Ce qui confirme l'intérêt pour cette structuration de la patrouille maritime est l'annonce que Londres allait
entraîner des hommes sur les deux plateformes (P-8 et MQ-4C). Le P-8 aurait même la préférence de la Royal Air Force. A l'approche de la prochaine SDR (Strategy Defense Review),
2015, c'est une marque d'intérêt qui ne passe pas inaperçu.
Sachant que Londres a fermé la porte à un partage des capacités
françaises en la matière, les Atlantique 2, ce qui n'est pas
encourageant pour les ambitions du livre blanc de 2013 (partage des
capacités de protection des approches nationales et européennes).
Le couple P-8 Poseidon/MQ-4C Triton n'est pas
anodin. Et il est intéressant à étudier puisque la France a refusé
d'évoluer dans la voie des HALE (Haute Altitude Longue
Endurance, c'est que le Triton) depuis le livre blanc de 2008.
A priori, le MQ-4C se résumerait à une plateforme SURMAR
(SURveillance MARitime) de longue endurance. C'est-à-dire qu'à l'instar
des appareils du genre, il se contenterait d'embarquer des
senseurs optiques (une boule optronique) et électroniques (AIS et
radar SAR, radar ISAR et ESM).
La différence majeure est qu'il peut tenir l'air pendant 31 heures,
soit le double ce que peut faire un Atlantique 2. Joseph Henrotin disait
à propos des drones MALE (Moyenne Altitude Longue
Endurance) que leur extraordinaire capacité à tenir l'air, milieu où
l'occupation n'était pas possible plus longtemps que quelques heures,
permet d'évoquer la notion de "persistance aérienne".
Les recherches américaines dans cette voie, notamment dans les
dirigeables et les VHALE explorent des capacités beaucoup plus
importantes en la matière.
De ces quelques considérations techniques, il apparaît donc que la
mission du MQ-4C est, dans le cadre du programme global BAMS (Broad Area Maritime Surveillance)
est de surveiller
constamment les espaces maritimes digne d'intérêt pour les
Etats-Unis. Navires et sous-marins ne pourraient être que trahir par une
apparition sur les écrans radars ou une interception
électronique.
A contrario, le P-8 Poseidon (successeur du P-3 Orion, avec
20 tonnes en plus) concentre lui toutes les capacités nécessaires à
l'intervention. L'appareil dispose de très peu de senseurs
(un radar pour l'essentiel) et n'est équipé ni de boule optronique,
ni de détecteur d'anomalie magnétique, ni même de bouées sonores. Ces
capacités sont fournies soit par le MQ-4C, soit par
diverses plateformes déployées depuis une division navale
(hélicoptères, drones, etc...). L'intérêt du P-8 est surtout d'apporter
les armes (torpilles, missiles anti-navires). Sert-il aussi de PC
volant ?
C'est une autre manière de travailler que développe l'US Navy.
En France ce n'est pas le schéma retenu puisque les Atlantique 2 vont
être modernisés (et ils concentrent l'ensemble des
senseurs et des armes qui ont été répartis entre MQ-4C et P-8). Les
NH90 apportent des capacités nouvelles puisqu'ils sont des PATMAR à
voilure tournante grâce à l'embarquement d'un détecteur
d'anomalie magnétique et la capacité à larguer des bouées
accoustiques.
L'Inde, cliente du P-8, ne fait pas non plus le même choix que l'US Navy puisque ses Poseidon seront dotés d'un détecteur d'anomalie magnétique.
Le schéma américain n'est pas inintéressant. Il confirme que les
avions de PATMAR sont avant tout des plateformes de recueil de
renseignement. Les Atlantique 2 français en sont une preuve féroce
puisqu'ils interviennent au-dessus des déserts africains où leurs
capacités de recueil de renseignement optique et électroniques sont
précieuses. Irions-nous vers un rapprochement des avions
PATMAR et ROEM ?
La question de la persistence n'est pas anodine puisqu'elle confirme un entrain américain pour la maîtrise des mers. Mahan a transmis cette vision quand Corbett met en avant la capacité à contrôler localement une interface mer/terre pour permettre la réalisation d'un débarquement. La persistance aérienne a du sens quand elle est exigée, par exemple pour le contrôle des zones économiques exclusives. Est-il nécessaire de surveiller les océans en permanence ?
De plus, la persistence aérienne peut-elle être atteinte par les seuls drones ? Imaginons que la France opte, en remplacement des Atlantique 2 à l'horizon 2030, pour des Airbus A319. S'ils pouvaient être ravitaillés en vol, alors ces appareils atteindraient la même endurance que des drones HALE. Il y aurait la place pour aménager des banettes et un espace de vie dans la cellule. Nous pourrions parler à nouveau de "frégate volante".
La question de la persistence n'est pas anodine puisqu'elle confirme un entrain américain pour la maîtrise des mers. Mahan a transmis cette vision quand Corbett met en avant la capacité à contrôler localement une interface mer/terre pour permettre la réalisation d'un débarquement. La persistance aérienne a du sens quand elle est exigée, par exemple pour le contrôle des zones économiques exclusives. Est-il nécessaire de surveiller les océans en permanence ?
De plus, la persistence aérienne peut-elle être atteinte par les seuls drones ? Imaginons que la France opte, en remplacement des Atlantique 2 à l'horizon 2030, pour des Airbus A319. S'ils pouvaient être ravitaillés en vol, alors ces appareils atteindraient la même endurance que des drones HALE. Il y aurait la place pour aménager des banettes et un espace de vie dans la cellule. Nous pourrions parler à nouveau de "frégate volante".
Enfin, il s'agit de replacer les notions de persistance et
d'intervention dans le cadre de moyens fixes (quid de l'avenir d'un
outil comme SOSUS ? Des radars transhorizon ? AIS ?) et mobiles
(satellites, drones de surface et aérien) beaucoup plus large.
A l'invitation du livre blanc sur la défense nationale de 2013, nous
pouvons nous demander si certaines de ces plateformes ne sont pas
arrivées à un haut degré de transversalité : le PATMAR
s'élèvera-t-il à la qualité d'avions de recueil de renseignement de
tous types au niveau stratégique ?
D'un autre côté, nous pourrions assistés à des progrès
spectaculaires au cours du XXIe siècle dans la mobilité des plateformes
navales, ce qui remettrait au premier plan les navires.En ce sens, le fait de réfléchir dans le cadre d'un vaste programme comme BAMS est intéressant rien qu'à ce titre.
17 avril 2014
BSAH = BMM ?
![]() |
| © Piriou. La proposition de Kership (Pirou et DCNS) pour le marché des trois B2M. |
C'est officiel, la DGA lance un nouvel appel d'offres pour le programme BSAH. Le Partenariat Public-Privé a échoué (il était évoqué une enveloppe d'un milliard sur "x" années pour huit navires, raison de l'échec de la formule) et cela n'inquiète pas outre mesure pour un projet immobilier situé dans Paris intra-muros (car derrière les murs, les barbares).
15 avril 2014
Renforcer la puissance navale française ? Vers l'avènement du canon planétaire
![]() |
| © Inconnu. Création d'artiste présentant une tourelle double de canons électriques à bord d'un destroyer de l'US Navy. |
Le canon électromagnétique fonctionne selon un un principe qui est "voisin de celui d'un accélérateur de particules car il convertit de l'énergie électrique en énergie cinétique d'un
projectile en mettant à profit la force Laplace produite par l'action de champs magnétique et électrique"
(pages 192-193). Le fonctionnement et les programmes menés pour
développer cette
technologie sont très bien expliqués dans le livre du directeur de
recherche émérite au CNRS Bernard Fontaine (qui avait été interviewé par Mars Attaque pour AGS) : Les armes à énergie dirigée : mythe ou réalité ? (éditions L'Harmattan, Paris, 2011).
24 février 2014
1980 : Quel avion pour la ZEE ?
20 février 2014
"Embarquez !" de Michel Perchoc et André Lambert
Embarquez ! (Marines éditions, 2014) est l'invitation
lancée par Michel Perchoc et André Lambert dans leur dernière
publication. L'ouvrage est préfacé par l'Amiral Rogel, chef
d'état-major de la Marine, et la postface est de Patrick Boissier,
actuel PDG de DCNS.
Invitation qui est loin d'avoir été la seule puisque les deux compagnons d'écriture ont, notamment, publié ensemble Ecole navale (1998), En avant toute (2001) ainsi qu' Esthétique navale (2009) chez Marines éditions. Ils comptent aussi de nombreuses publications individuelles dont la liste est disponible ici.
L'un des deux auteurs, Michel Perchoc, m'avait fait l'honneur de m'entretenir de ce futur livre avec André Lambert qu'était Embarquez ! Je retenais de ces échanges le souvenir d'une future page au sujet d'une des deux tourelles de 380 du Jean Bart.
Au passage, le poids d'une tourelle de 380 des cuirassés Richelieu et Jean Bart était de 2275 tonnes. Tourelle qui était armée par une compagnie de 90 hommes. A titre de comparaison, à la même époque, un contre-torpilleur comme le Tigre déplaçait 2126 tonnes et était armé d'un équipage de 195 hommes...
Embarquez ! est une formidable rétrospective sur la vie à bord des différents navires qui ont fait claquer le pavillon royal puis national sur l'Océan depuis 1780. La première richesse de cette ouvrage est de permettre de retrouver des navires qui n'ont plus l'habitude d'être mis en avant, tel le cuirassé Charlemagne ou le sous-marin Pluviôse. Il y a de très belles surprises et les écorchés d'André Lambert sont d'une grande beauté.
Invitation qui est loin d'avoir été la seule puisque les deux compagnons d'écriture ont, notamment, publié ensemble Ecole navale (1998), En avant toute (2001) ainsi qu' Esthétique navale (2009) chez Marines éditions. Ils comptent aussi de nombreuses publications individuelles dont la liste est disponible ici.
L'un des deux auteurs, Michel Perchoc, m'avait fait l'honneur de m'entretenir de ce futur livre avec André Lambert qu'était Embarquez ! Je retenais de ces échanges le souvenir d'une future page au sujet d'une des deux tourelles de 380 du Jean Bart.
Au passage, le poids d'une tourelle de 380 des cuirassés Richelieu et Jean Bart était de 2275 tonnes. Tourelle qui était armée par une compagnie de 90 hommes. A titre de comparaison, à la même époque, un contre-torpilleur comme le Tigre déplaçait 2126 tonnes et était armé d'un équipage de 195 hommes...
Embarquez ! est une formidable rétrospective sur la vie à bord des différents navires qui ont fait claquer le pavillon royal puis national sur l'Océan depuis 1780. La première richesse de cette ouvrage est de permettre de retrouver des navires qui n'ont plus l'habitude d'être mis en avant, tel le cuirassé Charlemagne ou le sous-marin Pluviôse. Il y a de très belles surprises et les écorchés d'André Lambert sont d'une grande beauté.
Néanmoins, nous sommes à bien des marées de la rétrospective
nostalgique : le livre est résolument tourné vers l'avenir à partir
d'une histoire sans cesse renouvelée. Par là, il y a un message
subliminal des auteurs : la France, pour garder son rang sur mer, a
toujours eu le souci de se doter des fleurons dont elle avait besoin
pour ses grands desseins. Ainsi, Embarquez !
débute par une frégate de 1780 et s'achève par l'Advansea qui est l'illustration de ce que peut être le
vaisseau de combat à l'âge de l'énergie dirigée.
Enfin, ce sont toutes les composantes de la Marine que Michel
Perchoc et André Lambert présentent : dissuasion océanique (et la FANU,
in fine), aviation navale (tant à terre qu'en mer), flotte de
surface, navires de l'Action de l'Etat en Mer, marins du ciel et de
terre. Au total, ce sont près de 40 navires et équipages à découvrir au
fil du livre !
C'est avec la très aimable autorisation de Michel Perchoc que j'ai
la chance de pouvoir vous offrir quelques unes des pages du livre.
J'espère que vous trouverez à leur lecture le même plaisir
que j'ai pu avoir (n'hésitez pas à cliquer pour agrandir).
Bref, Embarquez !
18 février 2014
"Porte-avions" de Henri-Pierre Grolleau
Porte-avions (le pavillon dans le titre indique de quels
porte-avions nous parlons) de Henri-Pierre Grolleau est une agréable
surprise. De premier abord, ces ouvrages (reportage
photographique ? je ne sais) ne m'intéressent pas par rapport à ceux
alternant artistiquement entre noir et blanc.
L'auteur a bénéficié d'une sacrée chance (très certainement
consécutive à son long investissement dans les questions de défense :
quatorze ouvrages sur le sujet) en obtenant l'autorisation
d'embarquer sur plusieurs vaisseaux de l'US Navy :
- le porte-avions USS Dwight D. Eisenhower (CVN-69),
- le navire d'assaut amphibie USS Bataan (LHD-5),
- et sur les navires d'escorte.
Embarquements qui laissent rêveur...
De facto, toute l'unité de l'ouvrage tient en la capacité de
l'auteur à raconter ce qu'est la puissance aéronavale américaine, de la
terre à la mer. De la mise en oeuvre d'un groupe aéronaval
américain jusqu'au dispositif logistique pour le faire durer à la
mer (170 jours de mer sans escale : record de l'USS Theodore Roosevelt en 2001-2002).
Ensuite, les deux embarquements structurent le livre puisque
Henri-Pierre Grolleau nous présente les deux composantes de la puissance
aéronavale américaine :
- les Carrier Strike Group (CSG) centrés sur un porte-avions à propulsion nucléaire,
- les Amphibious Reponse Group (ARG) centré sur un navire d'assaut amphibie des classes Tarawa, Wasp et America.
Le grand point fort de l'ouvrage est de décrire l'environnement
opérationnel nécessaire à la mise de ces "effecteurs de premier rang"
(Joseph Henrotin in Les fondements de la stratégie navale
au XXIe siècle aux éditions Economica).
Nous avons une présentation des structures, des aéronefs, des postes
et opérations critiques de la mise en oeuvre de la puissance aéronavale
américaine.
En ce qui concerne les aéronefs, l'auteur laisse le témoignage d'une
aéronavale qui quitte le modèle des appareils spécialisés pour parvenir
aux appareils polyvalent. Le F-18 E/F Super
Hornet (dont la version spécialisée de guerre électronique, EA-18G Growler, remplace l'EA-6B Prowler) rationalise significativement logistique et les formations. Tout comme
le remplacement de bon nombre de voilures tournantes par le Sikorsky Seahawk (avec toutes ses versions) produit les mêmes effets.
Du côté des structures, les Carrier AIr Wing (CVW) -qui
sont les équivalents du groupe aérien embarqué français-, sont
intéressantes à plus d'un titre. Elles associent les appareils à
leur personnel de manière permanente (la notion de groupe aérien
embarqué ne se dégage en France qu'à partir de l'entrée en service des
Clemenceau et Foch comme l'enseignait Coutau-Bégarie).
Outre les chasseurs F/A-18 et F-18 E/F, les CVW reçoivent aussi un détachement de C-2 Greyhound (une trentaine d'exemplaires seulement), l'avion logistique de l'aéronavale américaine (parfois prêtée à l'aéronavale française qui essaie d'en acquérir).
Et depuis début 2009, le CVW du CVN-74 John C. Stennis embarque deux escadrons d'hélicoptères (les HSC-8 "Eightballers" (MH-60R) et le HSM-71 "Raptors" (MH-60S) : c'est-à-dire que le CVW dispose de tous les aéronefs à voilures fixes et tournantes là où avant chaque navire possédait ses hélicoptères tournantes.
Outre les chasseurs F/A-18 et F-18 E/F, les CVW reçoivent aussi un détachement de C-2 Greyhound (une trentaine d'exemplaires seulement), l'avion logistique de l'aéronavale américaine (parfois prêtée à l'aéronavale française qui essaie d'en acquérir).
Et depuis début 2009, le CVW du CVN-74 John C. Stennis embarque deux escadrons d'hélicoptères (les HSC-8 "Eightballers" (MH-60R) et le HSM-71 "Raptors" (MH-60S) : c'est-à-dire que le CVW dispose de tous les aéronefs à voilures fixes et tournantes là où avant chaque navire possédait ses hélicoptères tournantes.
Cette nouvelle organisation organique répondrait aux principes :
- de concentration (une autorité sur l'ensemble des aéronefs pour concentrer l'effort sur l'action demandée),
- de sélectivité des efforts (entre des actions offensives ou logistiques par exemple) de la puissance aérienne.
A contrario, il ne semblerait pas qu'il existe une organisation
aussi robuste, mais rigide, à bord des LHD et LHA de la marine
américaine. Par exemple, Henri-Pierre Grolleau nous dit que le
groupe aérien embarqué de l'USS Bataan, lorsque l'auteur était à bord, se composait de dix MV-22 Osprey, quatre UH-IN Huey, quatre AH-1W Cobra, sept AV-8B/B+
Harrier et deux MH-60S Seahawk (quatre CH-53 Super Sea Stallion étaient détachés sur les autres navires pour donner plus de place à bord du Bataan). Cette composition
n'est pas fixe et c'est cette souplesse qui fait la force de ces navires et de leur groupe.
A contrario de cette grande palette de capacités aériennes, les USS Bataan et Bonhomme Richard étaient gréés en porte-aéronefs pendant l'opération Iraqi Freedom (2003)
: 24 Harrier et deux hélicoptères (RESCO).
Par ailleurs, l'arrivée du V-22 Osprey apporte un gain considérable l'USMC : l'appareil élargit considérablement l'influence des LHD et LHA grâce son rayon d'action, tout comme il joue désormais le rôle du C-2 Greyhound à bord de ces navires (les deux appareils ont des performances plus que comparables).
Pour illustrer le gain stratégique qu'offre ces deux appareils,
l'auteur relate ainsi que le C-2 peut assurer les liaisons entre la base
navale américaine à Barhein et un porte-avions navigant au
Sud du Pakistan.
Ce qui frappe dans les deux cas c'est l'organisation des navires de
la force (CSG ou ARG) comme d'un réseau de bases aériennes avancées qui
permettent la projection de puissance aérienne. A ce
schéma il faut ajouter les flux logistiques qui décollent de ces
porte-avions et porte-aéronefs (C-2 et V-22) pour s'appuyer sur le
réseau des bases avancées du Military Sealift Command
et de ses navires de par le monde).
Le focus qui est fait par l'auteur sur le Military Sealift Command est un régal particulièrement pertinent au moment où le remplacement des Bâtiments de Commandement et de Ravitaillement
de classe Durance de la Marine nationale est hautement critique.
Ce commandement de logistique navale aligne près d'une centaine de bâtiments armés par des équipages mêlant marins de l'US Navy, fonctionnaires et civils. Les missions du MSC englobent :
- le ravitaillement à la mer (par exemple, les quatre ravitailleurs de combat rapides classe Supply déplacent 49 700 tonnes et filent 26 noeuds contre 41 000 tonnes et 27 noeuds pour le Charles de Gaulle),
- le prépositionnement de forces terrestres (des cargos affrétés transportent matériels et véhicules pour une brigade de 16 000 Marines),
- le transport rapide d'unités terrestres (les JHSV),
- les recherches hydrographique et océanographique.
Par ailleurs, toute les considérations logistiques dans l'ouvrage montrent que tout est fait pour rationaliser, de près ou de loin, les flux afin de les optimiser (de l'organisation des ravitaillements à la mer en passant par le choix d'avions de combat polyvalent). Serait-ce là un témoignage de la culture stratégique américaine, très axée sur Jomini et l'importance que ce dernier donne à la logistique ?
Indéniablement, c'est un très bel ouvrage qui explique avec beaucoup de pédagogie ce qu'est la puissance aéronavale et aéroamphibie américaine. Il est à offrir et peut être source d'inspirations !
12 décembre 2013
Le problème Polaris : le besoin d'une base navale soviétique en Méditerranée
© Wikipédia.
Lancement du SNLE George Washington le 9 juin 1959.
L'interview de l'historien Jesse Ferris dans Guerres et
Histoire (numéro 15 - août 2013, pp. 102-103) est intéressante à plus
d'un titre. Son objet initial est la thèse que l'historien a
développé dans son ouvrage (FERRIS Jesse, Nasser's gamble, How Intervention in Yemen Caused the Sixt-Day War and the Decline of Egyptian Power, Princeton University Presse,
356
p.). Au détour de l'interview, nous pouvons apprendre un détail
intéressant sur le jeu naval en Méditerranée pendant la Guerre froide.
La volonté soviétique de rechercher un débouché en Méditerranée
s'expliquait en grande partie par l'héritage géopolitique de la Russie.
Cette dernière ayant, depuis Pierre le Grand, au moins,
toujours recherchait l'accès aux mers chaudes (libre de glaces toute
l'année) pour contourner les ports russes bloqués par les glaces une
grande partie de l'année (la frontière Nord du
Heartland est l'océan Arctique).
Autre chose, il est impératif pour la puissance navale soviétique de
contourner les détroits turcs. La convention de Montreux garantit le
passage des navires soviétiques (hors porte-avions). Ce
qui n'empêche pas qu'ils sont dans une position de faiblesse
stratégique.
Le 9 juin 1959 le SNLE George Washington est lancé. C'est le premier navire occidental du genre. Il s'agit de cinq navires dérivés de la fameuse classe Skipjack. Armés de 16
missiles Polaris A1, ces vaisseaux noirs sont capables d'atteindre Moscou depuis la Méditerranée.
Nouveauté pour l'époque : ils peuvent lancer leurs engins en
plongée. Problème pour l'Union soviétique qui peinait déjà à suivre les
porte-avions américains qui embarquaient aussi l'arme
nucléaire (d'où le projet de sous-marins nucléaires d'attaque
soviétique de classe Alpha, un projet largement en avance sur son temps
et la construction d'une grande flotte sous-marine dès
Staline et l'après seconde guerre mondiale).
Et donc, les Etats-Unis sont en mesure d'effectuer une première
frappe sur le coeur soviétique depuis une mer qui est un véritable lac
otanien, au point que l'Italie envisage de développer des croiseurs Polaris pour l'OTAN...
Jesse Ferris relate que l'Egypte s'enfonce dans une crise
diplomatique en raison de ses difficultés militaires dans son aventure
au Yemen. Peu à peu, Le Caire se coupe diplomatiquement
des monarchies du Golfe et de ceux qui les soutiennent :
l'Angleterre et les Etats-Unis. Alors que l'Egypte de Nasser était le seul pays à réussir à obtenir des aides des deux Grands,
elle se retrouve enfermée dans un tête à tête avec l'URSS qui maintient son aide.
En 1964, Brejnev remplace Kroutchev. Ce dernier était le grand ami de Nasser, son successeur est moins disposé à la soutenir sans contrepartie. Il y a ce problème avec
la VIe flotte américaine qui patrouille en Méditerranée et protège les premiers SNLE Polaris.
Moscou presse donc Nasser de lui fournir une base navale en
Méditerranée orientale, en
Egypte ou en Syrie (bien que la République Arabe Unie soit dissoute
depuis le retrait syrien en 1961), prolongement naturel de la flotte de
la Mer Noire, pour contrebalancer la menace américaine.
Nasser est bloqué : il a évincé les Britanniques au nom de la
souveraineté égyptienne, dénigré les monarchies du Golfe pour être des
marionnettes de Londres et il ne voudrait pas apparaître comme
celle de Moscou...
C'est un nouvel échec (temporaire) pour l'Union soviétique. Staline
réclamait aux alliés une base navale dans les détroits Turcs et le
contrôle de ces détroits par les Etats de la Mer Noire. Ce
refus n'aide en rien le problème soviétique.
Finalement, en 1971, Moscou et Damas signe un accord qui accorde une base navale à l'URSS dans le port syrien de Tartous.
Finalement, en 1971, Moscou et Damas signe un accord qui accorde une base navale à l'URSS dans le port syrien de Tartous.
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