Les @mers du CESM


Les @mers du CESM - 19 avril 1944 :

Le cuirassé Richelieu participe au bombardement de Sabang, base japonaise en Indonésie. Le navire français, ayant rejoint l’Eastern Fleet commandée par l’amiral britannique Somerville, prendra part à trois autres opérations visant des bases navales ennemies. Après 52 mois passés en mer, le bâtiment rentre à Toulon le 1er octobre 1944. À nouveau déployé en Asie du Sud-Est l’année suivante, le bâtiment assistera à la capitulation du Japon dans la rade de Singapour le 23 septembre 1945.





02 janvier 2020

GAé : F-8E (FN) Crusader rénovés ou Rafale N LF0 (1988 - 1999) ?


© Inconnu.

     Les structures de planification et de gestion des capacités opérationnelles de la Marine nationale furent confrontées à un dossier d'une apparente simplicité : assurer la succession de l'intercepteur du groupe aérien embarqué, le F-8E (FN) Crusader. La conclusion dudit dossier (1988 - 1993) fut une solution opérationnelle totalement obsolète et, pire que tout, dangereuse. Il n'aurait pas été étudié la commande de prototypes supplémentaires dérivés des Rafale M01 et Rafale M02 pourtant plus crédibles, rien que pour la sécurité des pilotes. Pourquoi n'avoir pas conçu une solution intérimaire minimale sur la base du Rafale N ?


Les porte-avions Clemenceau (22 novembre 1961) et Foch (15 juillet 1963) entraient en service sans intercepteur moderne. La mission (1955 - 1966) relevait des S.N.C.A.S.E. Aquilon Mk 20 (25 exemplaires), 202 (25), 203 (40) et 204 (6) répartis entre les flottilles 11F et 16F auxquelles s'ajoutent les escadrilles 2S, 54S et 59S sans oublier le CEPA 10S. Il était le premier avion à réaction de l'aéronautique navale française, remplaçant les Grumman F6F-5/ N Hellcat. Sa carrière embarquée est brève à bord du Clemenceau (1961 - 1963) car, faute d'infrastructures aéronautiques adaptées, les ponts plats précédents ne pouvaient les opérer. Le porte-avions Arromanches (1946 - 1974) attendait 1958 pour être refondu avec une piste oblique.

     Le premier appareil considéré était le McDonnell Douglas F-4A Phantom II, trop long de 3,2 mètres pour passer les ascenseurs axiaux et tribord (16 x 12 mètres, 15 tonnes) des PA54 et PA55. Ses masses à vide (13,7 tonnes) et maximale (18,8 tonnes) outrepassaient les capacités des deux catapultes à vapeur Mitchell-Brown de 50 m type BS 5 qui pouvaient lancer 15 t à 150 nœuds.

L'État-Major de la Marine (EMM) préparait la commande de Vought F-8 Crusader, faute d'une alternative nationale pouvant accoucher d'un intercepteur navalisable (Générale aéronautique Marcel Dassault (GAMD) Mystère IVM, Breguet Br. 1100M). Les essais débutaient le 16 mars 1962 à bord du Clemenceau grâce à deux F-8A du squadron VF-32, première unité de la marine américaine équipée de l'appareil, détachés depuis le CVA-60 USS Saratoga. La société Ling-Temco-Vought (LTV) formalisait sa proposition industrielle à partir du F8U-2NE (F-8E) en lui intégrant des modifications techniques pour l'adapter aux dimensions réduites des porte-avions Clemenceau et Foch. Le contrat signé le 31 juillet 1963 pour 40 monoplaces et 6 biplaces fut remanié à 42 monoplaces en raison de l'abandon de la version biplace par le Congrès. Les exemplaires français seront les derniers des 1261 produits.

Le F-8E (FN) n°1 effectuait son premier vol le 26 juin 1964. Les treize exemplaires suivants sont transportés en France par le porte-avions Arromanches en octobre 1964. En février 1965, c'est le porte-avions Foch qui convoyait les 28 machines suivantes. Le F-8E (FN) n°1 ralliait finalement la France en octobre 1965. Ils équipent les flottilles 12F (1964 - 1999) et 14F (1965 - 1979).

Le système d'arme du F-8E (FN) n'était guère différent - en termes de caractéristiques opérationnelles - de celui embarqué à bord des Mirage IIIE dont le premier exemplaire prend l'air dès 1961 et conçu Centre d’études et de recherches électroniques (CEREL) de la GAMD. Les performances en interception aérienne sont comparables et peu différentes entre les deux appareils. Mais le F-8E (FN) avec les deux missiles anti-aériens de moyenne portée qu'il peut emporter le distinguait des Mirage IIIE et Mirage IIIC et des missiles anti-aériens MATRA 530 qu'ils emportaient. C'est dire combien le F-8E (FN) donnait alors aux marins du ciel un intercepteur à la pointe des exigences opérationnelles.

     La valeur militaire du F-8E (FN) décroissait rapidement. Entré en service en mars 1957 dans l'US Navy, l'appareil était peu à peu retiré des unités de première ligne au cours de la guerre du Việt Nam (1er novembre 1955 – 30 avril 1975) au profit du F-4 Phantom II. Les derniers F-8J Crusader servant comme intercepteur étaient retirés des squadrons VF-191 et VF-194 du CV-34 USS Oriskany en 1976. Ne demeurait que des RF-8G, version de reconnaissance employés jusqu'en 1987.

L'introduction de ce dernier dans les deux seules marines à l'avoir employé depuis porte-avions fut particulièrement exigeante car la longue série des 24 porte-avions de classe Essex héritée de la Deuxième Guerre Mondiale ne voyait alors aucune des bâtiments en mesure de l'opérer, malgré l'achèvement d'une coque (CV-34 USS Oriskany) avec les nouvelles évolutions architecturales et l'intégration de ces dernière (SCB-27A/C) aux huit autres bâtiments (« long hull ») encore en service. Le F-4 Phantom II attendra alors les Kitty Hawk (83 000 t) et Midway (45 000 t) de l'US Navy, lancés dans les années 1960 et 1970. Mêmes contraintes dans la Royal Navy où ces avions sont réservés aux HMS Eagle (55 000 t) et HMS Ark Royal (54 000 t). Seul l'avant-projet PA58 « Verdun » aurait été compatible avec les dimensions intrinsèques de la machine.

     Le programme DAFNÉ (Défense Aérienne des Forces Navales Éloignées) lançait en 1964 devait permettre le développement d'un successeur aux F-8E (FN). Aucun début de commencement d'exécution ne fut donné à aucun des projets proposés (Bréguet Br 120D, Br 120G, Br 122B et GAMD Mirage IIIG), tous trop longs au demeurant (18,8 à 19 mètres). L'état-major de la Marine abandonnait à une date inconnue le programme DAFNÉ.

     Son attention se portait quant au remplacement des Étendard IVM où le Super Étendard l'emportait le 19 janvier 1973 sur le Mirage F1E, ce dernier aurait pourtant été l'occasion de remplacer les F-8E (FN) par une version d'interception navalisée : le groupe aérien embarqué aurait été rationalisé autour d'un unique avion de combat dès les années 1970 - 1980...

Le coût financier de remplacer un Étendard par un autre a pu être un facteur non-négligeable dans la décision politique rendue par Michel Debré, alors ministre d'Etat chargé de la Défense nationale, le 19 février 1973 de retenir le Super Étendard proposait par la GAMD. L'environnement opérationnel était similaire, même si le nouveau venu offrait trois évolutions majeures par rapport aux Étendard IVP/IVM :

Son réacteur Atar 8K50 est une évolution sans réchauffe du 9K50 du Mirage F1. C’est un réacteur simple et fiable à régulation hydromécanique. Mieux motorisé, l’avion affiche une meilleure marge de manœuvre et de meilleures performances en montée.

Le Super Étendard bénéficie d'une voilure dotée de dispositifs hypersustentateurs en vue d’abaisser la vitesse d’approche et la vitesse de prise de brins malgré l’augmentation de la masse maximale autorisée à l’appontage par rapport à son prédécesseur. Le profil est optimisé pour le vol transsonique (l’avion est donné pour Mach 0,97 en palier en vol basse/très basse altitude). Les becs de bords d’attaque couvrent la totalité de celui-ci et la voilure est dotée de volets à double fente avec comme résultat une vitesse de prise de brins abaissée de 133 à 122 nœuds et une masse maxi au catapultage passant de 10,8 tonnes à 11,9 tonnes.

Mais la réelle avancée qui auréole, encor aujourd'hui, le Super Étendard est son système d’arme. Comme aimait à le répéter les ingénieurs et ouvriers de la GAMD dans les années 1970 le Super Étendard était le premier avion de combat français et européen doté d’un système d’arme moderne, élaboré par la Division Système d’Armes de chez Dassault dirigée alors par Daniel Lerouge et développé sur la base de l’expérience du Mirage III Milan. Il permettait une navigation totalement autonome et le tir d’armes « fire and forget » (tire et oublie).

     La Marine nationale essayait pour le compte du Bureau des Programmes de Matériels (BPM) de l'Armée de l'Air le YF-18L Cobra le 28 juin 1978 grâce à deux vols assurés par le capitaine de frégate Michel Debray. Les conclusions des essais furent élogieuses, bien que minorées par certaines qualités de vol du F-8E (FN) qui demeurent supérieures. L'Armée de l'Air retenait, sans surprise aucune, le Mirage 2000 tandis que la Marine nationale repoussait son affaire à la décennie suivante.

Le cœur du fameux dossier des F/A-18 Hornet d'occasion de la Marine nationale semblait débuter lors du lancement par le Président de la République, M. François Mitterrand, du développement d'un avion opérationnel dérivé du démonstrateur Rafale A en 1987. La Marine nationale se serait alors positionnée dans l'optique de la seule commande de F/A-18C Hornet qui est même l' « avion enveloppe » du PA75 (1975 - 1984) et était perçu comma la meilleure option disponible depuis 1978 dans l'optique de remplacer les F-8E (FN) dès 1983.

Les hostilités débutaient par la visite d'une délégation de la société américaine Northrop en France en septembre 1988. Ses membres visitaient même les installations aéronautiques du porte-avions Foch à Toulon. Les dimensions du F/A-18C Hornet furent jugées compatibles avec les ascenseurs, bien que la longueur de la cellule excède d'un mètre ce que permettait théoriquement les ascenseurs. Les masses à vide (11,2 tonnes) et maximale (25,2 tonnes) excèdent largement les capacités des catapultes, bien plus que celles des McDonnell Douglas F-4A Phantom II (13,7 et 18,8 tonnes) et Ling-Temco-Vought Aerospace A-7E Corsair II (8,6 et 19 tonnes). Les quelques modifications des porte-avions (déflecteurs de jet, catapultes) furent jugées mineures et ne devant coûter que le coût d'un F/A-18 par porte-avions Des essais devaient avoir lieu en août 1989, toujours sur le Foch, mais sont annulés en raison de son affectation à l'opération Capselle (août - septembre 1989).

L'affaire prenait une tournure politique et publique en 1989. Dassault aviation s'inquiétait des conséquences de l'acquisition par la Marine nationale de F/A-18 Hornet. Lors de la visite de la délégation de Northrop en 1988, la proposition consistait dans une quarantaine de machines. Les vice-amiraux d'escadre Yves Goupil, major général de la Marine, et Guirec Doniol, chef du SC/Aéro menaient la bataille médiatique pour la rue Royale. Par une interview donnée à Cols bleus (21 octobre 1989), l'Amiral Goupil précisait même la cible de 12 à 15 machines afin d'assurer la soudure entre le retrait des F-8E (FN) et l'introduction des premiers Rafale M dès 1996. L'Amiral Bernard Louzeau, chef d'Etat-major de la Marine nationale, était entendu par la commission Défense et forces armées de l'Assemblée nationale le 11 octobre 1989 sans que les réponses aux questions posées au sujet de ce dossier ne soient publiées dans le compte-rendu de l'audition.

Le ministre de la Défense, M. Jean-Pierre Chevènement, rencontrait le secrétaire à la Défense, M. Dick Cheney, en novembre 1989. La décision tombait le 22 décembre 1989 : aucun achat de F/A-18 Hornet d'occasion. Les conséquences seront la prolongation des F-8E (FN) grâce à un programme de rénovation.

     Le retrait du service actif des F-8E (FN), repoussé de 1983 à 1993 avant l'affaire F/A-18 Hornet d'occasion, bénéficiait d'un nouveau report à 1999. Le taux d'attrition dont souffrit le F-8E (FN) fut élevé : des 42 machines perçues par l'aéronautique navale (1964 - 1965), 23 furent perdues en vol dont six causèrent la mort de leur pilote. En outre, deux machines supplémentaires furent réformées en 1986 et 1989. Seule la flottille 12F est dotée de l'appareil depuis la conversion de la 14F sur Super Étendard (1979).

Les 17 F-8E (FN) survivants subissaient le méfait prodigué par l'Atelier Industriel de l'Aéronautique (AIA) de Cuers-Pierrefeu entre 1990 et 1997, à raison d'une épave tous les 18 mois. Les travaux consistaient dans le changement de la pieuvre électrique, d'une révision générale du radar et des commandes de vol, l'installation d'un ILS, de l'IFF mode 4, d'une nouvelle centrale de cap et de vertical, d'un détecteur d'alerte SHERLOC et d'un siège éjectable Martin-Baker Mk-7 (0/0) à la place du Mk-F5A-F (0/120) et de la visite de la quille ventrale.

Sur les 17 machines rénovées, trois sont réformées dès 1997, année de l'achèvement du programme quand toutes les machines constituaient l'ultime version : le F-8P (FN). La valeur militaire des F-8E (FN) est presque nulle pendant la décennie 1990. Le soutien nécessaire pour chaque heure de vol atteignait 67 heures, en tenant compte, certes, du passage par l'AIA. Les témoignages finissaient par dévoiler un chasseur embarqué souffrant de pannes en plein vol dès les années 1980. Le radar, obsolète, pouvait tomber en avarie en pleine mission.

En poussant plus loin, la Marine nationale avait probablement perdu une capacité d'interception embarquée dès les années 1980. L'armement PA1 des Clemenceau et Foch prévoyait 8 F-8E/P (FN). Il est douteux que la Marine fut en mesure d'abonder ainsi le groupe aérien embarqué. L'opération Capselle (août -septembre 1989) pourrait avoir été le moment de vérité quand les F-8E (FN) Crusader ne soutenaient pas la comparaison face aux MiG-29A syriens dans l'éventualité d'une opposition.

Les Rafale M auraient-ils remplacés les F-8E (FN) Crusader ?

     Les premières livraisons de Rafale M furent décalées de 1996 à 1998 en raison de la décision de céder le porte-avions Foch au Brésil. La planification retenait de le conserver en réserve après l'admission au service du porte-avions Charles de Gaulle (1999) afin de le réarmer lors de la première Indisponibilité Pour Entretien et Réparation (2004 - 2005). Finalement, le Charles de Gaulle voyait son admission au service repoussait à 2001, ce qui ne justifiait plus de conserver le Foch car le PAN n°2 devait être commandé lors de la prochaine loi de programmation militaire et devait être théoriquement disponible lors de la première IPER, de facto décalé. IPER qui fut elle-même décalé de 2004-2005 à 2007-2008 en raison du décalage de l'armement du Charles de Gaulle. Et l'avènement du programme de rénovation des F-8E/P (FN) permettait d'assurer la soudure avec les premières livraisons des Rafale M en fin d'année 1998.

Le 21 avril 1988 était signé le contrat portant construction des prototypes Rafale M01 et Rafale M02 qui effectuaient leur premier vol, respectivement, les 12 décembre 1991 et 8 novembre 1993. Les premiers essais sur pistes équipées de catapultes et de brins d'arrêt sont menés aux Naval Air Warfare Center de Lakehurst et Patuxent River (États-Unis d'Amérique) durant les campagnes USC1 à 4 (juillet 1992 - décembre 1995). Les essais embarqués sont presque menés pendant la même période à bord du porte-avions Foch pendant les campagnes PA1 à PA5 (avril 1993 - février 1998). Le Rafale F1 M1 fut commandé le 26 mars 1993 mais la production des appareils débutée en décembre 1992 fut gelée en novembre 1995.

La première tranche de production ne fut finalement commandée qu'en janvier 1997 avec 13 machines dont 10 Rafale F1. Ils furent livrés en 1999 (1), 2000 (2), 2001 (5) et 2002 (2). Les Rafale M01 à Rafale M06 sont reçus au standard LF1. Le Rafale M07 était le premier Rafale F1. Les premières machines sont portées à ce standard d'ici à mars 2002. La flottille 12F était recréée le 18 mai 2001, le même jour que le porte-avions Charles de Gaulle rejoignait le service. La première capacité opérationnelle des Rafale F1 est prononcée en 2002.

Le point de divergence se situe entre la commande des prototypes du 21 avril 1988 et le 22 décembre 1989 quand est abandonné la commande des appareils américains. La Marine nationale affirmait, et ce fut confirmé dans les faits, l'hérésie qu'était la prolongation des F-8E (FN). Dassault aviation et l'Armée de l'air étaient vent debout contre toute commande de F/A-18 Hornet qui, malgré la modicité de son coût, laissait l'Armée de l'Air portait seule le fardeau des premières annuités du programme ACT-ACM.

En lieu et place du programme de rénovation des F-8E (FN) décidé en décembre 1989, pourquoi ne pas avoir commandé grâce au report des 800 millions de francs un minimum de deux prototypes supplémentaires qui auraient pu être des Rafale N, c'est-à-dire biplace, car le Rafale à deux siège n'avait été pensé avant la deuxième guerre du golfe (2 août 1990 - 28 février 1991) que dans l'optique d'être commandé dans des quantités limitées pour les seules missions de conversion et de formation. Et sans certitude de pouvoir porter ces Rafale N à un standard véritablement opérationnel, ils n'auraient pas représenté une dépense inconsidérée dans l'optique des missions de formation, de conversion et de maintien des qualifications, bien au contraire.

Sur le plan opérationnel, des commandes supplémentaires de quatre machines au cours des années 1990 auraient permis de remplacer peu à peu les F-8E (FN) par un total de six Rafale N. Leur valeur militaire en tant qu'intercepteur auraient relevé du pur bricolage pour mettre au point des capacités opérationnelles à partir des premières moutures du radar RBE2 et de missiles Magic 2, qualifiés sur (1993 - 1996). Mais cela aurait-il était si choquant alors que les premières versions du standard F2 du Rafale devaient être moins performantes que le Mirage 2000-5F en interception ? Le futur Rafale F1 n'était pas sans rappeler les standard S1 à 3 du Mirage 2000 C (1984 - 1985).

L'hypothèse peut paraître hasardeuse tout comme les propositions (1988 - 1993) de perdre la capacité d'interception embarquée dans l'attente des ou de transformer quelques en intercepteur. Le défi technique n'aurait pas été mince de développer plus rapidement que prévu un Rafale BM/Rafale N au profit de la Marine nationale car cela imposait de ré-aménagé l'avant de l'avion et de supprimer le canon à cette fin. Par ailleurs, la résistance culturelle au sein de la Force Maritime de l'Aéronautique Navale (FMAN) aurait été probablement aussi forte qu'au sein dans l'Armée de l'Air à l'introduction des Mirage 2000D.

La cruelle vérité est que les F-8P (FN) rénovés (1993 - 1997) étaient obsolètes depuis 1976 et dans un tel état de délabrement qu'ils avaient une valeur militaire nulle, peut être même depuis les années 1980. La capacité d'interception embarquée était déjà perdue et virtuelle dans l'ensemble. Un simple harcèlement du groupe aéronaval, même par des avions obsolètes, auraient suffi à épuiser le potentiel des F-8E/P (FN).

Les capacités de planification et de gestion des capacités opérationnelles de la Marine nationale furent prises en défaut entre 1976 et 1989. Le retrait des Vought F-8 Crusader des missions d'interception au sein de l'US Navy ne paraît pas avoir été anticipé et aucune réaction ne semble perceptible non plus. L'essai de l'YF-18L Cobra le 28 juin 1978 paraissait sceller une préférence de la Marine pour l'appareil. Le retrait du service d'un lot de 80 F/A-18 Hornet au cours des années 1980 apparaissait pour l'EMM comme la seule solution financière et opérationnelle viable. Entre 1987 et 1989, la Marine réduisait la voilure des essais du programme de rénovation des F-8E (FN), au risque de camoufler involontairement l’irrationalité de l'option.

Mais l'EMM perdait tout sens politique en sous-estimant gravement l'importance stratégique prise par les programmes ACE à ACT-ACM (1983 - 1988). La Marine défendait, d'un côté, l'impérieuse nécessité de maîtriser la troisième dimension pour les opérations navales tout en ayant l'habitude de snober l'industrie nationale, au sens des efforts à consentir, pour la première mission de ce milieu : la supériorité aérienne. D'où les occasions manquées de remplacer le matériel américain entre 1964 et 1973 par des solutions industrielles nationales viables. Ce qui souligne un manque total de sens industriel du même EMM : commandait en 1964 le dernier lot d'exemplaires d'un appareil en fin de production ne pouvait que signifiait une carrière opérationnelle courte et difficile à prolonger sans investissement industriel conséquent. Même erreur avec les F/A-18 Hornet alors que le F-18 E/F Super Hornet effectuait son premier vol en 1995.

Pareil comportement était-il observé pour la maîtrise du milieu sous-marin ? Non car la crédibilité de la composante océanique de la dissuasion exigeait et exige toujours des efforts industriels pour assurer certaines capacités opérationnelles en toute indépendance. Quid de la crédibilité de l'arme nucléaire portée par la FANu ?

Finalement, n'aurait-il pas été plus crédible sur le plan militaire de disposer de six Rafale N entre 1993 et 1999 avec quelques capacités opérationnelles pour l'interception en lieu et place de 17 puis 9 F-8P (FN) obsolètes et à la disponibilité douteuse ?


 Billet mis à jour grâce à la lecture critique de M. Pascal Colombier : merci.


5 commentaires:

  1. Article très intéressant, ou l'on se rend bien compte du manque de vision des états-majors sur certains programmes secondaires mais pourtant essentiels. Je me permets d'attirer votre attention sur des fautes de grammaire assez nombreuses (utilisation de verbes au lieu du participe passé). Bonne continuation.

    RépondreSupprimer
  2. Suite à 2 affectations sur le clem en 75-èè et 82-83, j'ai bien connu ces fameux crous. Très impressionnants au catapultage (bruit, fumée, pc réacteur) mais déjà bien fatigué, souvent indisponible et surnommé déjà "les cercueils volants". A l'appareillage de l'escale de villefranche s mer nous avons d'ailleurs perdu un crous et son pilote au catapultage.

    RépondreSupprimer
  3. Maintenir le crouze au delà de la décennie 1970 est l une des pires séries de decisions de la marine de la Ve République. Il serait intéressant de se pencher sur les rares cas où il ne y a pas eu plantage pour voir ce qui explique les bonnes décisions. J en vois trois importantes qui ont eu un effet positif durable: faire les A69, faire le CDG, adopter le Rafale M. Ça fait peu et ça explique la quasi disparition de notre flotte de guerre.

    RépondreSupprimer
  4. Le crusader, mieux connu sous l'appellation de cercueil volant.

    RépondreSupprimer
  5. LA chose essentielle:

    La Marine n'avait pas envisagé l'importance du programme Rafale dans sa globalité ... Stratégiquement il était inimaginable que le Rafale soit concurrencé par un appareil étranger, c'eut été un désaveu notamment commercial. Rafale engageait les forces pour les 40 ou 50 ans à venir, cet avion était une véritable rupture technologique en devenir (on voit ce qu'il en est aujourd'hui en termes d'efficacité du système d'arme). Cette rupture était incomparablement plus grande que les évolutions entre générations précédentes. Pour ne pas l'avoir compris pour être demeurés sur leurs impératifs propres les marins sont passés à côté de l'occase.

    L'idée hardie aurait été de réformer le F-8 fin des années 80, se concentrer quelques années sur les missions d'assaut, faire voler les crouzemens et des pilotes de Superbe Étendoir sur 2000 RDI voir -5 (ce que firent certains d'entre eux avant l'arrivée du Rafale d'ailleurs) pour acquérir l'expertise du Look down shot down et du Fox 3 et la conserver le temps nécessaire ... Il eut fallu avoir un esprit plus inter-armes et s'interroger sur les risques du GaE à évoluer quelques temps sans intercepteurs. On devait bien se douter de la valeur du F-8 P ... sachant notamment que des essais de fatigue sur la cellule du Crouze n°16 avaient eu lieu au CEAT;

    Certains au sein de la Marine ne se souvenaient pas de la phrase de l'Amiral Sanguinetti (pourtant un pilote lui aussi) en 64 face à un pilote enthousiaste de sa nouvelle monture: "regardez-le bien c'est le dernier avion américain que nous achetons" (exception du E2 certes mais là pas d'équivalent en France). En plus l'option F-18 générait elle aussi des coût et nécessitait une refonte des p-a, ascenseurs, déflecteurs, catapultes, ateliers ... sans parler d'un utilisation a minima de ses capacités (15 t max catapultage ...)

    RépondreSupprimer