© DMO. RMF-22D (rev 3) modifié en novembre 2020. |
Les caractéristiques des ASWF relèvent d'enjeux, opérationnel et historique, qui permettraient à la Composante Marine de dépasser le cadre originel de sa fondation, la guerre des mines et l’escorte, pour détenir, après de nombreux efforts, des capacités dites du « haut du spectre » et ainsi changer de dimension sur le plan stratégique, fondant sa légitimité à demeurer une force navale autonome, permettant à la Belgique de bénéficier de cette autonomie sur le plan stratégique, ce qui ne serait pas le cas avec le non-avènement de ces capacités opérationnelles.
La Deuxième Guerre mondiale accouchait de ce format naval (cf. infra), servant à la création de la Force navale et qui semble, encore aujourd’hui, constituer le paradigme opérationnel de la Marine belge depuis 1946. Ses unités servaient dans la Manche, la Mer du Nord et la Mer Baltique, se concentrant sur les capacités de dragage des mines et d'escorte de convois. Le changement de paradigme butera toujours quant à l'intégration d'une suite lutte anti-sous-marine complète (1964 - 2020) sur les frégates belges. Le programme Anti-Submarine Warfare Frigate (ASWF) ambitionne, non seulement de placer ces bâtiments sur le haut du spectre en matière de lutte sous la mer, mais aussi de leur faire bénéficier de l’intégration de capacités de Défense Anti-Missile Balistique (DAMB) de territoire ou Anti-Ballistic Missile (ABM) de l'OTAN, avec l'ensilotage de missiles RIM-161 Standard Missile 3 (SM-3).
Par un arrêté royal du le 30 mars 1946, signé par le Prince Charles de Belgique, alors régent du royaume (20 septembre 1944 - 20 juillet 1950), la Force navale était créée à partir de la Section belge de la Royal Navy (1940-1945). Cette dernière se composait essentiellement des K193 HMS Buttercup (1941 - 1944) et K226 HMS Godetia (1942 - 1944) de classe Flower (294), de trois patrouilleurs - les FD142 HMS Phrontis (1941 - 1943), l'Electra et le Kernot - et de la 118e escadrille de dragueurs de mines, composée de huit MMS (Motor Mine Sweeper) - les M182, M187, M188, M189, M191, M193, M226 et M1020 -, tous prêtés par la Royal Navy.
Les bâtiments servant à l'escorte étaient les dragueurs de mines océaniques de la classe Algerine (110), construits initialement pour la Marine Royale Canadienne durant la Deuxième Guerre mondiale, dont certains furent transférés à la Force navale : M900 Adrien de Gerlache (1949 - 1969), M901 Georges Lecointe (1950 - 1959), M901 Georges Lecointe (1959 - 1969), M902 Van Haverbeke (1951 - 1960), M903 Dufour I et II (1951 - 1966), M904 De Brouwer (1953 - 1966), M905 De Moor (1953 - 1966).
Type 900 - Type E71 (1964 - 2005)
Afin de pourvoir à leur remplacement, en 1964, la Force navale lançait une étude dénommée Type 900 dont l'objet était de parvenir à la conception d'une frégate anti-sous-marine de moins de 2000 tonnes et capable de mettre en œuvre un hélicoptère, la Marine Royale Canadienne ayant montré la supériorité de l'hélicoptère embarqué pour la lutte anti-sous-marine, dès 1958. Dans le cadre de la sécurité collective prodiguée par l'OTAN, les futures frégates devaient participer à l'escorte de convois dans la Manche, la Mer du Nord et dans l'océan Atlantique, en faisant face à la menace sous-marine soviétique, en pleine expansion depuis 1945.
© Neptunus. Comparaison entre les plans initial et définitif des frégates Type E71 ou classe Wilingen (4). |
L'étude fut menée (1964 - 1971) avec le soutien de la Koninklijke Marine qui travaillait alors sur ses futures frégates de la classe Kortenaer (10). La Force navale achevait la conception du Type 900 en coopération avec les chantiers navals de Boelwerf et Cockerill. Son résultat fut le Type E71. Le gouvernement belge décidait, le 22 décembre 1970, de lancer la construction de quatre frégates Type E71 dans les deux chantiers navals ayant travaillé pour le Type 900. Les quilles furent posées à fond de cale en 1974 et toutes les frégates entrèrent en service en 1978. Elles formèrent la classe Wielingen (Wielingen (1978 - 2006), Westdiep (1978 - 2007), Wandelaar (1978 - 2004), Westhinder (1978 - 1993).
Cependant, entre les plans initiaux et les caractéristiques figées de l'avant-projet, des évolutions matérielles notables sont constatables : la plage hélicoptère a cédé la place au profit d'un lance-roquettes ASM de 375mm, le hangar aéronautique a été remplacé par un roof supportant deux lanceurs doubles de MM38 Exocet (Aérospatiale). Résultat des coups de rabot successifs vis-à-vis du cahier des chargés, il s'agit peut être de trouver ici la fin hâtée de la coopération avec la Koninklijke Marine.
Il en ressortait que les frégates classe Wielingen (4) étaient, certes, aptes à l'escorte de convois mais réduites à un seul sonar de coque, leurs capacités de lutte sous la mer étaient souvent prises en défaut lors des exercices. Il manquait, au minimum, et outre l'hélicoptère embarqué servant à la lutte anti-sous-marine, une antenne linéaire remorquée.
L'affaire pris une tournure politique quand le gouvernement dit Martens VI, sous la direction de M. Wilfried Martens (17 décembre 1981 – 7 mars 1992) eu à se pencher sur la question. En 1986, il avait été étudié l'acquisition de frégates de la classe Van Speijk (6) qui, elles, détenaient une suite anti-sous-marine complète dont un sonar remorqué à immersion variable et des installations aéronautiques permettant la mise en œuvre d'un hélicoptère embarqué spécialisé dans la lutte sous la mer. En contrepartie de leur acquisition, les frégates de classe Wielingen (4) auraient été désarmées. Le projet fut abandonné et les Van Speijk cédées à la TNI-AL.
Le sujet revenait dès 1993 alors que le Westhinder n'était désarmé que pour participer à la réduction des dépenses par le plan de restructuration Delcroix. Il est à noter qu'elle avait été endommagée lors d'un exercice anti-sous-marin au large des côtes norvégiennes.
Il était mis à l'étude, presque simultanément, un projet de rénovation à mi-vie devant venir corriger les déficiences initiales dans la lutte anti-sous-marine. Un projet de quasi-reconstruction est mis à l'étude, avec la reconstruction de l'arrière qui aurait dû recevoir une plage hélicoptère et un hangar aéronautique. La poupe et l'espace sous la plage hélicoptère devait être réaménagée afin que puisse être mis en œuvre une antenne linéaire remorquée et un sonar à immersion variable (SQS-505 ?). En contrepartie, le système Sea Sparrow était installé à l'avant, en lieu et place du mortier ASM de 375 mm. Ce projet, peut être d'inspiration néerlandaise en raison de matériels essentiellement américains, reprenait l'architecture des plans initiaux des Type E71. Et il était abandonné.
© Inconnu. Comparaison
entre l'état des frégates Type E71 ou classe Wilingen (3) et le programme de modernisation alors envisagée. |
Les frégates restantes de la classe Wielingen (3) furent finalement modernisées entre 1996 et 2005. Le système Sea Sparrow était modernisé de la version 7M à 7P. Le radar de veille aérienne WM25 bénéficier de l'ajout de nouvelles fonctionnalités (ECCM, MTI) étendues. Le radar de navigation fut remplacé. Et le sonar de coque le fut également, le SQS-505 cédant sa place au SQS-510.
Les frégates Wandelaar (2004) était faisait l'objet d'une cession aux Forces Navales de la République de Bulgarie (FNRB ou Voennomorski sili na Republika Bǎlgariya) selon les lettres d'une lettre d'intention du 4 décembre 2004 et le transfert a été approuvé par le gouvernement belge le 17 mars 2005. La cession des Westdiep (2007) et Wielingen (2008) était approuvée le 7 décembre 2007.
Acquisition des M-Fregat et modernisation (2005 – 2013)
Au terme de l’étude navale de 2005, la Koninklijke Marine prévenait la Force navale de la prochaine cession de six des huit M-Fregat de la classe Karel Doorman. Le 20 juillet 2005, le gouvernement belge décidait du principe de l'acquisition. Et c'était le 21 décembre 2005 que les Hr.Ms. Karel Doorman (1991 - 2006) et Hr.Ms. Willem van der Zaan (1991 - 2006) furent officiellement acquises par la Belgique et rebaptisées F930 Leopold Ier (2007 - 2030 ?) et F931 Louise-Marie (2008 - 2030 ?), succédant ainsi aux Westdiep (2007) et Wielingen (2008).
La Composante Marine ne recevait pourtant pas, à l’occasion de cette acquisition, l’antenne linéaire remorquée écoute très basse fréquence DSBV-61B : il avait même été demandé aux Néerlandais d’en démonter toute l’installation et les systèmes afférents dans la prévision des futurs travaux de la plage hélicoptère et du hangar aéronautique afin qu’ils permettent la mise en œuvre des futurs NH90 NFH qui ne recevront finalement leurs kits ASM que dans la deuxième moitié des années 2020. Le seul progrès notable, en matière de capacités de lutte anti-sous-marine, fut l’introduction d’un sonar de coque aux caractéristiques supérieures du au SQS-510 des Wielingen.
La Composante Marine et la Koninklijke Marine s’entendaient quant à la participation de la Belgique au Instandhoudingsprogramma M-fregatten (IPM) ou programme d’entretien des M-Fregat dont le principe avait été acquis dans l’acceptation des conclusions de l’étude navale de 2005.
Le programme de modernisation débutait par une Defensie Materieel Proces/Defensie Materieelkeuze Proces (Processus du matériel de défense/ Processus de sélection du matériel de défense (DMP) permettant l’élaboration des plans (2002 – 2008) dont l’objectif opérationnel était l’engagement des bâtiments dans les eaux côtières.
Pour ce faire, une nouvelle mâture était conçue afin d’accueillir un radar de veille aérienne tridimensionnelle SMART-S (Thales Nederland), d’une portée supérieure à 200 km. Il était aussi intégré un radar à quatre faces planes (Active Phased Array Radar (APAR) Seastar/ Sea Watcher 100 (Thales Nederland), apte à suivre et détecter automatiquement les cibles de surface, allant des très petites menaces asymétriques (mines, les nageurs et les périscopes) jusqu’aux bâtiments et navires, et ce : dans toutes les conditions météorologiques. Sa portée est indiquée pour être d’environ 40 km. Un système EO/IR Gatekeeper (Thales) offre une veille panoramique à 360° vis-à-vis des mêmes menaces asymétriques. Un radar de conduite de tir STIR-18 (Thales) complétant le tout.
© Thales. Nouvelle mâture des M-Fregat, au terme du Instandhoudingsprogramma M-fregatten (IPM). |
L’ensemble des pistes détectées par tous les senseurs du nouveau mât sont transmis au nouveau système de combat SEWACO (SEnsor, WeApon, and Command) Mk.VII (Thales Nederland), qui traite automatiquement les pistes reçues.
Les plans de la modernisation retenaient la nécessité d’un agrandissement de la plage hélicoptère et d’une adaptation du hangar aéronautique afin qu’ils puissent permettre la mise en œuvre d’hélicoptères NH90 NFH. En 2007, la Belgique commandait cet hélicoptère pour équiper ses frégates et assurer ses responsabilités dans le sauvetage en mer. Le quatrième appareil a été livré en 2016. Le 21 août 2015, la capacité opérationnelle initiale (Initial Opérational Capability (IOC) a été prononcée au sein de la 40ème escadrille, basée à Coxyde. Et le premier embarquement à bord d’une des deux frégates eu lieu en mai 2020.
La Koninklijke Marine engageait le programme de modernisation des quatre frégates par la passation des premières commandes de matériels dès 2011. Le Zr.Ms. Van Speijk entrait en chantier de modernisation le 16 août 2010. Il en ressortait en avril 2012 pour débuter fin 2012 les essais constructeurs à quai et à la mer. Il reprenait le service en 2013. Le F930 Leopold Ier (2007 - 2030 ?) entrait en modernisation en août 2011 pour en ressortir le 9 août 2012. La frégate Zr.Ms. Van Amstel suivait mi-2012 puis ce fut le tour de la F931 Louise-Marie (2008 - 2030 ?) mi-2013.
Mais le programme de modernisation des quatre M-Fregat divergeait quant aux capacités de lutte anti-sous-marine. La Koninklijke Marine décidait du traitement des obsolescences de l’antenne linéaire remorquée écoute très basse fréquence DSBV-61B. Et, en prenant le parti de réaménagée les locaux de la poupe et sous la plage hélicoptère refondue, ils intégrèrent un sonar remorqué à immersion variable actif à basse fréquence Multi-static Low Frequency Active Passive Sonar (Ultra Electronics). Le sonar de coque était également remplacé par un PHS-36 (Thales).
© Thales. Réaménagement des installations de la poupe des M-Fregat, au terme du Instandhoudingsprogramma M-fregatten (IPM). |
La Composante Marine ne put retenir les mêmes installations. Cependant, les F930 Leopold Ier (2007 - 2030 ?) et F931 Louise-Marie (2008 - 2030 ?) pourraient finalement bénéficier de l’installation de ces équipements afin de préparer les équipages belges à leur mise en œuvre, dans l’optique de la future entrée en service des frégates du programme ASWF.
M-Fregat replacement – Anti-Submarine Warfare Frigate (2013 – 2030)
Le Ministerie van Defensie, à l’issue du Instandhoudingsprogramma M-fregatten (IPM), préparait la succession des M-Fregat de classe Karel Doorman (2) dont la fin de service était alors calculée pour intervenir entre 2018 et 2023. Ce projet devint une coopération quand la Belgique et les Pays-Bas signaient, le 30 novembre 2016, des protocoles d’entente au sujet du remplacement de leurs chasseurs mines (6 + 6) et de leurs frégates multi-missions (2 + 2).
Le White Paper 2018 (Pays-Bas) donnait le calendrier de tous les programmes d'armement hollandais en son appendice IV. Le Replacement of multipurpose frigate, pourvu d'une enveloppe financière 1000 à 2500 millions, porte l'objectif d'assurer le renouvellement des frégates multi-missions de la classe Karel Doorman (2) dont la mission principale est la lutte anti-sous-marine.
Un communiqué de presse du ministère de la défense de Belgique indiquait que les dépenses en matériels à consacrer à la Composante Marine avaient été arrêtées à 2000 M€, en 2017 pour le budget 2018 : soit 932 M€ pour 6 nouveaux chasseurs de mines et leurs systèmes associés et 1 036 M€ pour l’acquisition de deux frégates, une somme arrêtée depuis, environ, 2015. Il est à noter que la Vision stratégique 2030 retenait, outre le format à deux nouvelles frégates, l’intégration d’une capacité anti-missile balistique. La Belgique considérant l’acquisition d’une telle capacité avec des missiles RIM-161 Standard Missile 3 (SM-3).
Le ministre de la défense de Belgique, M. Steven Vandeput (11 octobre 2014 - 12 novembre 2018) , et la minister van Defensie des Pays-Bas, Mme Ank Bijleveld (26 octobre 2017), signaient, le 7 janvier 2018, en marge d'une réunion de l'OTAN, deux protocoles d'entente relatifs à un programme de guerre des mines (12) dont la Belgique prenait la direction et à un programme de frégates (4) dirigé par les Pays-Bas. Le programme batave M-frigate replacement servait de socle à la coopération et était renommé Anti-Submarine Warfare Frigate (ASWF), le 13 janvier 2021.
Le cahier des charges de cette coopération retenait deux objectifs opérationnels majeurs, à savoir la capacité à maintenir ouvertes les voies de navigation nationales, les voies maritimes et les points de passage des forces navales nationales et alliées. Il était alors prévu que l’ASWF n°1 entre en service dans la Koninklijke Marine en 2024, la première, voire la deuxième ASWF, rejoignant la Composante Marine en 2027. La capacité DAMB de territoire/BMD n’en faisait pas parti. Cependant, les deux partenaires s’étaient mis d’accord quant à l’intégration de la capacité à opérer des Unmanned Surface Vehicles (USV). La Koninklijke Marine était particulièrement intéressé par la potentielle capacité de ces futures frégates à travailler avec un sonar multistatique grâce à la mise en œuvre d’USV porteurs d’un ou plusieurs types de sonar. Et les Pays-Bas établissaient même officieusement un lien entre les programmes AWSF et MCM à cet égard car l'USV du premier, servant à la guerre des mines, devait devenir l'USV du deuxième pour la lutte anti-sous-marine. La solution mise en avant pour le MCM par Damen, avec la présentation des capacités ASM de l'USV Seagull (Elbit) ayant reçu une certaine publicité à cet effet.
La responsabilité du développement des avant-projets incombait à la Defensie Materieel Organisatie (DMO). Au moins trois avant-projets (2016 – 2019), dévoilant l'évolution des choix architecturaux, furent présentés au travers des projets A (2014), B (2015) et C (2017). La DMO présentait à des officiers de la Koninklijke Marine, le 18 décembre 2019, l’état de l’avant-projet à cette date. La photographie, diffusée sur un réseau social, fut retirée (Jaime Karremann, « Nieuw beeld vervangers M-fregatten lekt uit », Marineschepen, 18 décembre 2019). Cet avant-projet RMF-22D (rev 3) a une coque longue de 134 mètres pour un maître-bau (plus grande largeur) de 17,1 mètres. Le tirant d'eau est de 7 mètres. Le déplacement à pleine charge prévu est de 5475 tonnes et est même calculé pour 5700 tonnes en fin de vie.
Mais l’avant-projet RMF-22D (rev 3) a été abandonné. C’est la ministre fédérale belge de la Défense (1er octobre 2020), Mme Ludivine Dedonder, qui en donnait les raisons devant la Chambre des représentants, le 10 février 2021. En réponse aux questions de deux députés, elle précisait qu’une phase de conception a été convenue entre bureau binational de projet et le futur constructeur naval Damen Schelde Naval Shipbuilding fin novembre 2020. « La longueur du concept est actuellement d'environ 133 mètres avec un déplacement d'environ 5 700 tonnes. » Ces paramètres sont indiqués comme pouvant encore évoluer jusqu’à la signature du contrat de construction navale (attendu pour la fin de l’année 2021). Néanmoins, les éventuelles prochaines modifications seront minimes puisque la ministre déclarait qu’il y avait un « gel » de la conception de l’AWSF depuis novembre 2020.
Et la ministre insistait sur les décisions prises en concertation par la Belgique et les Pays-Bas, selon les termes du protocole d’accord du 8 juin 2018, « afin de trouver un équilibre entre les futures plates-formes et les budgets fixés […] un certain nombre des compromis ont été faits [qui] n'affectent pas la vision des deux marines et prennent en compte un potentiel de croissance pour les futures frégates. » Elle a même rappelé que « la réalisation éventuelle de la capacité BMD n'est pas couverte par le mémorandum ou l'accord et le budget prévu. »
Le RMF-22D (rev 3) du 18 décembre 2019 laisse place à une nouvelle révision qui disposait de nouvelles dimensions, à savoir une longueur de coque réduite de 134 à 133 mètres et un déplacement de 5 500 tonnes, contre 5 700 tonnes pour la « rev 3 ». Ces différences peuvent apparaître comme minimes mais elles induisent des modifications architecturales fondamentales.
Par exemple, l’extension du roof sur la plage avant, à direction des deux lanceurs verticaux, supprime, de facto, la réserve qui existait sur la « rev 3 » pour l’intégration de deux lanceurs supplémentaires, portant la dotation maximale à quatre lanceurs et donc 32 sabords.
La « rev 3 » comprenait quatre ouvertures latérales dont l’une faisait approximativement 14 mètres de longueur. La nouvelle révision n’intègre plus qu’une seule ouverture, d’une longueur comprise entre 7 et 9 mètres. Encore une fois, de facto, cela interdit la possibilité d’y manœuvrer des semi-rigides de 12 mètres comme les FRISC (Fast Raiding Interception Special Forces Craft) ou bien des USV de 12 mètres, à l’instar des Inspector 125 (ECA group) : ce dernier point était pourtant désiré par la Koninklijke Marine. Cette disparition de la « baie multi-missions » semble même être en contradiction avec la Vision stratégique 2030 puisque ces « frégates multi-missions » risquent de se cantonner à la lutte anti-sous-marine.
La différence de longueur absolue de la coque n’étant que d’un seul mètre entre la « rev 3 » et sa révision, il y a tout lieu de s’étonner de la disparition des dispositions architecturales précitées. Il y a peut être eu la prise de conscience du poids et du volume des installations nécessaires pour lancer et récupérer des embarcations de 18-19 tonnes. D’où l'hypothèse que l'avancement du programme MCM aurait démontré la quasi-impossibilité d'installer le Launch And Recovery System (LARS) des mother-ships (MCM) à bord des ASWF. Il a été présenté que la Belgique, en raison de l’enveloppe figée à 1036 M€, serait source d’une résistance dans le cadre de la coopération. Mais eu égard aux nouvelles dépenses militaires à consentir par les Pays-Bas, et la disparition de ces dispositions architecturales alors que la réduction est, finalement, très minime, il y a matière à s’interroger si le coût d’autres programmes – dont l’acquisition de F-35 supplémentaires – n’a pas obligé les Néerlandais à réduire les caractéristiques des ASWF.
Le cœur du sujet touche plutôt les capacités opérationnelles et donc les compromis cités par la ministre fédérale belge de la Défense, le 10 février 2021. Elle a précisé que l’espace prévu à bord permet l’installation de deux lanceurs verticaux type Mk41 mais que sur la désormais variante belge des ASWF, l'un des deux VLS est désigné comme « provisions pour » et ne sera donc pas installé au neuvage. Des inquiétudes se font jour quant aux capacités de lutte anti-sous-marine dont la question du sonar remorqué à immersion variable. Et la ministre de conclure que « En fonction d'une éventuelle menace future changeante, les dispositions relatives aux systèmes pour la Belgique pourraient être précisées à l'avenir. »
La question des capacités opérationnelles devient un enjeu central de la coopération engagée avec les Pays-Bas car, et selon les termes des protocoles d’entente signés en 2016 et 2018, les bâtiments des programmes MCM et ASWF doivent être « identiques » afin de faciliter les questions d’instruction, d’entraînement et de soutien mais aussi d’emploi opérationnels car une plateforme navale de l’un doit être apte à remplacer celle de l’autre dans une opération. Une différence significative quant aux capacités de lutte sous-marine placerait la Composante Marine dans l’impossibilité de remplir ses obligations au titre de la coopération.
Dans la perspective du format naval atteint par la Composante Marine en 2030, à savoir deux frégates anti-sous-marines (ASWF), six bâtiments de guerre des mines (MCM), deux patrouilleurs côtiers (Ready Duty Ships (RDS) et un navire scientifique) dans le cadre d’une stratégie navale faisant la part belle à la sûreté des accès portuaires, la protection du trafic commercial en Manche, Mer du Nord et dans l’océan Atlantique et à la participation à des coopérations, au titre de l’OTAN à qui elle doit la fourniture d’un escorteur pour trois mois de disponibilité chaque année. Le tonnage progressera avec l’admission au service des nouveaux bâtiments. Mais le format naval restera étonnamment très proche de celui de 1946.
Mais il y a aussi la perspective de la coopération entretenue depuis les années 1970 avec la Koninklijke Marine dont la direction tend vers la fusion. Ce qui revient à dire qu’un renoncement belge sur la question des frégates, de leurs capacités ASM et des ambitions dans la défense anti-missile balistique de territoire, reviendrait à abandonner les capacités navales dites « haut du spectre » et donc à réduire la Composante Marine à une force côtière qui serait, oui, facilement assimilable par les Pays-Bas.
Concernant l'autre aspect de la composante marine, à savoir la guerre anti-mines, c'est ici (pas tout le monde n'aime Twitter, cher marquis):
RépondreSupprimerhttps://defencebelgium.com/2021/03/13/point-de-situation-sur-les-nouveaux-chasseurs-de-mines/
Petites nouvelles concernant le contrat belge de la lutte anti-mines:
Supprimerhttps://theatrum-belli.com/eca-group-choisit-ctm-et-patria-pour-fournir-les-modules-electromagnetique-et-acoustique-pour-la-solution-de-dragage-de-mines-pour-la-marine-belge-et-la-marine-royale-neerlandaise/
Petite information qui a son importance, l'entreprise française iXblue serait à vendre:
RépondreSupprimerhttps://www.latribune.fr/entreprises-finance/industrie/aeronautique-defense/herve-arditty-va-t-il-mettre-sa-pepite-ixblue-en-vente-889605.html