Les @mers du CESM


Les @mers du CESM - 19 avril 1944 :

Le cuirassé Richelieu participe au bombardement de Sabang, base japonaise en Indonésie. Le navire français, ayant rejoint l’Eastern Fleet commandée par l’amiral britannique Somerville, prendra part à trois autres opérations visant des bases navales ennemies. Après 52 mois passés en mer, le bâtiment rentre à Toulon le 1er octobre 1944. À nouveau déployé en Asie du Sud-Est l’année suivante, le bâtiment assistera à la capitulation du Japon dans la rade de Singapour le 23 septembre 1945.





02 mars 2021

中國人民解放軍海軍 : destroyers Type 055, entre veille spatiale et capacités anti-satellites

© H. I. Sutton - Forbes. H. I. Sutton, « Chinese Navy May Be First To Get BallisticMissiles », Forbes, 3 septembre 2020.

     Le programme des destroyers Type 055 contient, peut être, des rationalités à explorer du point de vue de leur insertion dans l'ensemble des Armées chinoises, et plus particulièrement entre la Deuxième Artillerie et la Force de soutien stratégique de l'Armée populaire de libération (中国人民解放军战略支援部队), créée en 2015, et dont deux des objectifs est d'atteindre le territoire adverse et l'Espace. En mettant de côté le débat sur le missile balistique anti-navire (Anti-Ship Ballistic Missile (ASBM), il est proposé d'explorer d'éventuelles capacités anti-satellites dont les Type 055 seraient les porteurs et, dans cette perspective, de replacer les missiles balistiques anti-navires, à l'instar des DF-21D et DF-26, dans un nouveau contexte où leur pertinence demeurerait leur portée et moins la question de leur interception.

      Le programme Type 055 est ancien : la Commission Militaire Centrale (CMC) approuvait, en février 1968, une demande de la Marine de l’Armée Populaire de Libération (MAPL) afin de mettre à l’étude un bâtiment spécialisé dans la lutte anti-aérienne, domaine de lutte alors absent des caractéristiques des destroyers du Type 051, et anti-sous-marine, car les frégates anti-aériennes Type 53K n’étaient pas capables de combattre sous la mer tandis que les Type 051 et Type 053K n’avaient que des capacités d’auto-défense en matière de lutte anti-surface et pour toutes ces raisons demeuraient dans la nécessité de bénéficier de la couverture offerte par l’aviation basée à terre.

Le programme Type 055 fut attribué à la ville de Shanghai en août 1968 mais au mois de juillet de l’année 1974, le Bureau de l’industrie de la défense nationale demandait à la MAPL de revoir le programme. Le Conseil d’État et la CMC confiaient au ministère de la construction navale. Mais la conception des principaux équipements – missiles anti-aériens et radars – tarde. Le programme Type 055 est abandonné en 1983, nonobstant ou en raison de l’étude du projet d’acquisition de systèmes anti-aériens Sea Dart ait été envisagé, peut être parallèlement au projet d’acquisition auprès du Royaume-Uni de porte-aéronefs de la classe Invincible.

Et depuis le début des années 1970, d’autres variantes des différents projets devant équiper la MAPL furent lancés pour tenter de combler partiellement les lacunes opérationnelles identifiées.

Le programme fut manifestement relancé au début des années 2000, probablement dans la foulée des différents projets de porte-aéronefs STOBAR, et les destroyers Type 055 furent mis à l’étude le 20 décembre 2009. En avril 2014, une construction du bloc passerelle avec ses superstructures et à l’échelle 1 :1 fut découverte par image satellitaire, au centre de test électronique naval chinois de l’Institut 701, à Wuhan. Le 14 avril 2014 était découpé la première tôle à Jiangnan Shipyard (Group) Co. Ltd. Le Nanchang (南昌) était lancé le 28 juin 2017 et participait au défilé naval du 70e anniversaire (22 – 25 avril 2019) de la MAPL le 23 avril 2019. L’admission au service actif a été prononcé le 12 janvier 2020. 

      Le Type 055 a été qualifié de « destroyer de classe de 10 000 tonnes » (équipage de 380 marins) par l'Armée Populaire de Libération, via le communiqué publié à l'occasion de lancement de la tête-de-série, à Jiangnan Shipyard (Group) Co. Ltd., le 28 juin 2017 : le Nanchang (南昌). L’Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN), dans le cadre de sa typologie des navires militaires, a retenu, pour sa part, la classification de « croiseur lance-missiles » (Guided-missile Cruiser (CG) des bâtiments de la classe Renhai, selon, et désormais, la terminologie de l'OTAN.

À l'occasion du discours prononcé par Zhang Youxia, membre de la Commission Militaire Centrale (CMC ou en chinois 中央军事委员会) et ministre du Département du développement des équipements de la CMC, le programme Type 055 a été présenté comme étant :

Le résultat de la « recherche et le développement totalement indépendants de mon pays » (我国完全自主研制) mené depuis 2009, ce qui pourrait signifier que la totalité de ses équipements et composants sont issus de l'industrie chinoise.

Un « navire de guerre emblématique [ou historique] de la transformation stratégique et du développement de la Marine » (军实现战略转型发展的标志性战舰) sur les plans industriels - car sa conception en plateau et sa production avec un pré-armement poussé des blocs montés dans trois « méga-blocs » - et opérationnels car il est fait référence, dans ce même discours, au fait que le Nanchang soit « équipé de nouvelles armes de défense aérienne, anti-missiles, anti-navires et anti-sous-marins » (备有新型防空、反导、反舰、反潜武器) dont la mise en œuvre bénéficierait d'une « gestion et d’intégration des données » (信息集成), réputée supérieure au Type 052D, avec des capacités afférentes de gestion intégrée du spectre électromagnétique.

     Les caractéristiques opérationnelles les plus intéressantes des destroyers Type 055 ont trait au radar de veille aérienne tridimensionnelle, au système de lancement vertical et donc à deux munitions particulières pouvant y être ensilotées car l'ensemble aurait vocation à constituer une capacité dite ASAT (Anti-SATellite) jusqu'à la basse altitude spatiale (Low Earth Orbit (LEO), c'est-à-dire jusqu'à 2 000 km d'altitude via des liaisons de données vers un C2 à terre pouvant permettre autant de constituer ce segment naval des capacités ASAT que de bénéficier des infrastructures spatiales au service du combat naval.

     Parmi toutes les treize antennes intégrant les superstructures, il y a le radar étoile des mers (海之星) H/LJG-346B ou Type 346B. Il est d'apparence similaire au radar Type 346A (Dragon Eye, dans la terminologie otanienne) des destroyers Type 052C et Type 052D. Mais les panneaux du Type 346B seraient d'une superficie 40% supérieure aux 4,3 x 4,3 mètres des panneaux du Type 346A des Type 052D, ce qui offrirait une puissance brute et une sensibilité supérieures.

Le radar Type 346B de veille aérienne tridimensionnelle - il permettrait d'assurer la conduite de tir de pièces d'artillerie et de missiles - appartient à la catégorie radar à antenne active (Active Electronically Scanned Array (AESA), à quatre faces planes (120° en azimut et 90° en élévation), entièrement numérisé, multifonctions, travaillant en bandes C et S. Les composants des panneaux seraient même constitués de modules à base de nitrure de gallium (Gallium nitride (GaN).

Il en résulterait une portée qui serait largement supérieure à 450 km et atteindrait même jusqu'à 2 000 km d'altitude, la différence s'expliquant tout simplement par la rotondité de la Terre. 

     Le système de lancement vertical des destroyers Type 055 est constitué de lanceurs octuples répartis entre un groupement à l'avant, entre la pièce d'artillerie et le pied du bloc passerelle, fort de huit lanceurs et donc 64 silos, et un deuxième groupement à l'arrière, entre la deuxième cheminée et le hangar aéronautique, comprenant six lanceurs et donc 48 silos.

Chaque silo a un diamètre de 0,85 mètres pour une profondeur régulièrement donnée pour 9 mètres, sans qu'il ne semble possible de déterminer s'il s'agit de la profondeur maximale des silos ou bien de leur profondeur utile. Et il serait encore nécessaire de connaître si la « profondeur utile » doit comprendre, ou non, un cannister. À titre de comparaison, le diamètre des lanceurs octuples Mk41 est de 0,63 mètres mais seulement de 0,558 mètres à l'intérieur du cannister. Le Mk41 Strike Lengh atteint une profondeur utile de 7 mètres, semble-t-il avec le cannister. A contrario, les silos des lanceurs octuples SYLVER atteignent trois profondeurs utiles différentes (4,3 mètres (A43), 5 mètres (A50) et 7 mètres) pour un diamètre maximum de 0,558 mètres et un diamètre utile de 0,53 mètres.

     Les lanceurs verticaux chinois sont réputés pouvoir accueillir toutes les munitions dont les dimensions sont compatibles avec les caractéristiques citées ci-dessus. Et l'intérêt va se porter quant à deux missiles dont l'emploi à bord des destroyers Type 055 a été évoqué, outre d’autres missiles dont leur place à bord d’une plateforme navale spécifiquement étudiée pour la défense aérienne n’est guère surprenante :

  • Missile anti-aérien HQ-9B (~ 200 km) ; 
  • missile d’interception extra-atmosphérique HQ-26 (équivalent au SM-3) ; 
  • missile de croisière supersonique YJ-18B/C (~ 500 km) ; 
  • missile de croisière à longue portée YJ-100 (~ 800 km).

Mais il serait aussi envisagé le missile balistique anti-navire (Anti-Ship Ballistic Missile (ASBM) DF-21D (CSS-5 Mod-4), malgré ses dimensions excédant les dimensions du système de lancement vertical tant en diamètre qu'en profondeur. Ce qui fait dire à certains observateurs que ce serait moins spécifiquement cette munition qui serait considérée que la capacité opérationnelle qui serait, quant à elle, atteinte via la mise au point d'un nouveau missile : version réduire du DF-21D, reprenant la quasi-intégralité des composants ?

     Il est évoqué dans les habituelles sources ouvertes que le système de combat des destroyers Type 055 peut intégrer (et fusionner ?) toutes sortes de données venant provenant d’autres plateformes (sous-marins, bâtiments de combat, aéronefs, satellites et unités terrestres). Et il serait également apte à employer directement les armements des autres bâtiments se trouvant sous son commandement.

Une potentielle capacité dite ASAT (Anti-SATellite) suppose une fusion des informations issues d'une partie de ces capteurs afin que le système de combat parvienne à distinguer les leurres des véritables charges utiles. Les destroyers Type 055, en tant que plateforme navale déployés dans les groupes aéronavals centrés autour des porte-aéronefs STOBAR Type 001 et Type 002, voire des porte-avions CATOBAR des Type 003 (2 ?), voire de futurs porte-avions à propulsion nucléaire Type 004  (2 ?), seraient en mesure, par leur radar étoile des mers (海之星) H/LJG-346B ou Type 346B, participer à l'établissement d'une veille spatiale (Space Situational Awareness (SSA) sur le segment des orbites basses (LEO). Les données seraient transmises (par HF ?) à un C2, situé à terre.

     Et ce segment s'intégrerait dans une capacité plus large. La République Populaire de Chine a mené des programmes de recherche sur le segment opérationnel ASAT depuis les années 1990. Le Department of Defense relevait, en 2003 dans son rapport annuel sur la puissance militaire chinoise, qu'un programme de missile ASAT avait été lancé. Le satellite météorologique FY-1C était abattu au cours d'un essai ASAT, le 11 janvier 2007 et des essais simulés précédemment menés auraient pointé une charge utile d'environ 100 kg (Ian Easton, « The Great Game in Space China’s Evolving ASAT Weapons Programs and Their Implications for Future U.S. Strategy », Project 2049, 24 juin 2009, p. 2).

Le missile serait un DF-21 modifié et qui était déjà lui-même une adaptation au besoin militaire du lanceur civil (CASIC) Kaituozhe-1 (KT-1) dont il serait emprunté des composants : le premier étage ? Le véhicule tueur (ou Kinetic Kill-Vehicle (KKV) serait la charge militaire modifiée d'un missile anti-aérien HQ-19, c'est-à-dire l'une des versions de la famille HQ-9. L'ensemble, en tant qu'arme anti-satellite, a été baptisé SC-19 - à distinguer du HQ-19 dont il ne partage que la charge militaire - par le renseignement américain. Pour atteindre sa cible, le véhicule tueur bénéficierait d'un processus de ciblage jusqu'à la cible soutenu par un réseau de radars terrestres.

Il a été évalué, toujours selon le renseignement américain, que deux lots de 20 missiles SC-19 chacun seraient suffisant pour atteindre tous les satellites militaires américains (EO/SAR/ELINT) évoluant en orbite basse, dès l'ouverture d'un conflit. Et l'une des caractéristiques majeures de ce missile est qu'il puisse être tiré par des plateformes par nature mobiles, des batteries comme des bâtiments de combat donc.

     Il y a une évaluation non-aboutie quant à la couche supérieure des capacités anti-satellites chinoises qui comprendraient une ou deux autres munitions dont l'une serait un missile  « 巨浪-2 » (« vague géante ») ou Jù Làng-2 (JL-2) et l'autre un montage avec le premier étage d'un DF-31 avec les deux étages supérieurs d'un DF-25. Il ne s'agirait rien de moins que d'atteindre et détruire les satellites en orbite géostationnaires de télécommunication en orbite géostationnaire (GEO) et d'alerte rapide (EW), ROEM (ELINT) en orbite équatorial à faible inclinaison (environ 36 000 km d'altitude).

     Et ce n'était pas explicitement mis en exergue mais ce qui porterait un coup à la puissance spatiale, spécifiquement américaine, serait la destruction partielle de la constellation Tracking and Data Relay Satellite (TDRS) qui, faisant le relais entre toutes les autres constellations gouvernementales américaines, accélère la transmission des données et dispense de nombreuses stations sol.

Et plus largement, toutes les fonctions spatiales ne seraient plus vulnérables mais à portée de tir. Et ce propos ne s'étendait donc qu'à la question des missiles à frappe cinétique pouvant être embarqués à bord de plateformes navales : il ne sera donc pas question des autres capacités anti-satellites (micro-ondes, etc) supposant des infrastructures essentiellement, voire exclusivement terrestres.

     Retour à bord des destroyers Type 055 : le discours prononcé à l'occasion du lancement du Nachang, le 11 juin 2017, prendrait donc un tout autre relief quand furent évoquées ses capacités anti-missiles et que, plus tard, dans la presse chinoise, il y a eu ces allusions aux missiles DF-21 et DF-26.

Il est difficile d'exclure que les Type 055 n'ensilotent pas des HQ-19 (SC-19) dont, et par ailleurs, le positionnement opérationnel semble être encore discuté, en ce sens que, et contrairement la vulgate officielle, il serait peut-être moins un intercepteur bas endo-atmosphérique qu'un intercepteur, et donc, haut endo-atmosphérique, voire extra-atmosphérique à l'instar du Terminal High Altitude Area Defense (THAAD). Le système américain interceptant jusqu'à 150 km d'altitude puis aux alentours des 70 à 90 km si la première interception a échoué et oblige au tir d'une seconde munition sur la même cible. D'où les interrogations quant aux senseurs de la charge utile du HQ-19 (SC-19) : infrarouge et radar ?

     Il semblait devoir être exclu que les Type 055 puissent accueillir des DF-21, DF-26 et donc le DF-21 modifié avec les composants du Kaituozhe-1 (KT-1) et doté d'une charge militaire du HQ-19 : le SC-19. Longueur et diamètre des engins paraissent être incompatibles avec les silos d'environ 9 mètres. Et la première série de huit destroyers Type 055 ne présentent pas de silos d'un diamètre égal ou supérieur à 1,5 mètres. Il ne peut pas être exclu que puisse apparaître une variante bénéficiant d'une telle modification des lanceurs, ni même, et par ailleurs, qu'une munition reprenant les caractéristiques du SC-19 soit mise au point, peut être sur le segment opérationnel aujourd'hui couvert par le RIM-161 Standard Missile 3 (SM-3) dont le Block IIA atteindrait 900 à 1050 km d'altitude selon les cibles. 

     Il y aurait donc, et selon cette hypothèse, une offre stratégique où la Marine de l'Armée populaire de Libération panacherait dans la profondeur de son dispositif naval des missiles anti-satellites porteurs d'un véhicule tueur avec la menace de faire tomber les constellations adverses tout en, et peut être, continuant à utiliser les propres constellations chinoises pour localiser et cibler les bâtiments de combat là où les capacités de navigation et de ciblage (GPS, SATCOM) américaines auront été annihilées : d'où, et finalement, le rôle peut être final d'une version embarquée, par exemple, du DF-21D dont la qualité serait moins sa trajectoire balistique que sa portée permettant de soustraire le Type 055 à l'influence opérationnelle d'un Carrier Strike Group (environ 500 nautiques : plus ou moins 1 000 km).

 

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