Les @mers du CESM


Les @mers du CESM - 19 avril 1944 :

Le cuirassé Richelieu participe au bombardement de Sabang, base japonaise en Indonésie. Le navire français, ayant rejoint l’Eastern Fleet commandée par l’amiral britannique Somerville, prendra part à trois autres opérations visant des bases navales ennemies. Après 52 mois passés en mer, le bâtiment rentre à Toulon le 1er octobre 1944. À nouveau déployé en Asie du Sud-Est l’année suivante, le bâtiment assistera à la capitulation du Japon dans la rade de Singapour le 23 septembre 1945.





05 février 2020

US Navy : déploiement de W76-2 à bord du SSBN-734 USS Tennessee

     
     Le 4 février 2020 a été publié un communiqué par le Pentagone affirmant qu'avait été mené par le SSBN-734 USS Tennessee (Naval Submarine Base Kings Bay (1979), océan Atlantique) la première patrouille opérationnelle de la tête nucléaire W76 mod. 2 (W76-2), probablement entre décembre et janvier 2019. Il s'agit de l'une des recommandations de la Nuclear Posture Review 2018 qui aboutie assez rapidement. Le choix de l'océan, lieu de la première patrouille, ne permet pas de douter que la Fédération de Russie est la principale intéressée par cette évolution même si, de par ses qualités intrinsèques, notamment l'évolution de la portée associée, cette évolution matérielle s'adresse à toutes les puissances visées par la doctrine nucléaire américaine.

La Nuclear Posture Review 2018 (février 2018), dont les travaux préparatoires débutèrent et furent menés sous la férule du général James Norman Mattis (20 juin 2017 - 1er janvier 2019) avant l'élection de Donald J. Trump (8 novembre 2016), proposait, notamment, comme recommandations le développement d'un missile de croisière à changement de milieu (Sea-Launched Cruise Missile (SLCM) porteur d'une charge nucléaire et d'une nouvelle tête nucléaire à faible rendement au profit des Sous-marins Nucléaires Lanceurs d'Engins (SNLE ou Ship Submersible Ballistic Nuclear (SSBN). Deux recommandations pouvant aider à soutenir une posture opérationnelle contre forces que le Pentagone souhaitait depuis, au moins, la Nuclear Posture Review 2010.

L'arsenal nucléaire américain possède à l'inventaire environ 448 missiles Mer-Sol Balistique Stratégique (MSBS ou Submarine Launched Ballistic Missile (SLBM) UGM-133A Trident II ou plus communément appelé Trident 2D5. Sur ces 448 MSBS, 240 sont déployés effectivement sur les SNLE. Les autres, soit plus ou moins 208, servent de volant de pièces de rechanges mais aussi aux de missiles consommables pour soutenir le programme d'essais en vol d'un missile possédant des perspectives d'évolution par le truchement du Trident 2D5 Life Extension Program devant étendre leur service opérationnel de 2028 à 2042.

18 SNLE de classe Ohio de l'US Navy furent mis sur cale et admis au service actif (1976 – 1997). En raison des traités précédemment ratifiées, la Nuclear Posture Review 1994 recommanda de réduire le nombre de SNLE de 18 à 14. Les autres premiers – les SSGN-726 USS Ohio (1981), SSGN-727 USS Michigan (1982), SSGN-728 USS Florida (1983) et SSGN-729 USS Georgia (1984) – furent refondus comme croiseur sous-marin lance-missiles (ou Ship Submersible Guided missile Nuclear (SSGN) entre 2002 et 2006.

Ce qui revient à souligner que le nombre de MSBS Trident 2D5 injectés dans le cycle opérationnel permet de remplir les tubes lance-missiles d'un maximum théorique de douze des quatorze bateaux car chacun d'eux est percé de vingt-quatre tubes mis qui ne reçoivent plus qu'un lot de vingt missiles en raison des choix découlant des traités signés avec l'URSS puis la Fédération de Russie.

Ces 240 MSBS Trident 2D5 peuvent être armés par :

  • 1486 têtes nucléaires W76 mod. 1 (W76-1) d'une puissance nominale de 90 Kt, à raison de 1 à 8 têtes « mirvées » par missile dit « Mk 4A » (2008), de quoi armer un maximun théorique de 185 missiles ;

  • 384 têtes nucléaires W88 d'une puissance nominale de 455 Kt, à raison de 1 à 8 têtes « mirvées » par missile dit « Mk 5 » (1990), de quoi armer un maximun théorique de 48 missiles ;

  • 50 têtes nucléaires W76 mod. 2 (W76-2).

Entre parenthèses, il est à noter que les têtes nucléaires britanniques (~ 160) fabriquées à l'Atomic Weapons Establishment d'Aldermaston équipant et équipant les SNLE de la V-class ou classe Vanguard sont très proches de par leur conception des têtes nucléaires W76 en raison des accords (1958 – 1964) liant les deux pays à ce sujet. Aussi, les MSBS Trident 2D5 employés par les Britanniques (maximum de 65) sont soutenus à la Naval Submarine Base Kings Bay (1979) dont ils semblent orner l'insigne.

La Nuclear Posture Review 2018 postulait le besoin avéré d'une arme nucléaire de faiblesse puissance (« low-yield nuclear weapon ») dont la finalité opérationnelle serait des frappes anti-forces et anti-structures durcies ou enterrées dans la perspective d'une guerre dite « régionale ». Plus précisémment, il s'agirait d'une réponse à l'évolution de la doctrine nucléaire russe suspectée ou clairement accusée selon les protagonistes d'avoir abaissé le seuil d'utilisation de l'arme nucléaire par la « doctrine d'escalade et de désescalade » dont l'existence même fait l'objet d'âpres débats.

En tous les cas, la « low-yield nuclear weapon » doit permettre de rétablir la valeur dissuasive des forces militaires américaines déployées dans les différentes « régions » par une réponse de la même nature et donc rétablir la dissuasion. Son utilité opérationnelle est à contre-balancer avec celle des armes nucléaires tactiques ou « sub strategic » dans le vocable otanien B61 en ses différents « mod. » : les B61 ne sont déployées qu'en Europe et non pas, par exemple, en Asie (Japon, Corée du Sud). Un Trident 2D5 porteur de W76-2 peut combler cette lacune. Aussi, le même missile équipé des mêmes têtes peut être lancé sur ordre du président américain et atteindre sa cible au cours d'une crise en moins d'une heure car le SNLE en alerte est constamment prêt à exécuter cet ordre. Le même tir par B61 suppose un délai plus long en raison de la mise en alerte des forces de l'OTAN aptes à délivrer ces armes.

Cette évolution de la doctrine nucléaire américaine est à rapprocher de celle opérée par la France et révlée lors du discours dit de l' « Ile Longue » (19 janvier 2006) prononcé par le président Jacques Chirac. Il y signifiait que l'ultime avertissement adressé à l'adversaire pouvait viser les « centres de pouvoir, sur sa capacité à agir » et que dans cette perspective « toutes nos forces nucléaires ont été configurées dans cet esprit. C'est dans ce but, par exemple, que le nombre des têtes nucléaires a été réduit sur certains des missiles de nos sous-marins. »

De retour aux États-Unis d'Amérique, la recommandation sur les armes nucléaires de faiblesse puissance fut suivie d'effet puisque fut mis à l'étude dès 2018 la tête nucléaire W76 mod. 2 (W76-2) grâce à l'allocation de 65 millions de dollars via un amendement du 13 avril 2018. Dans la littérature ouverte, il est dit que sa puissance nominale serait comprise entre 5 et 7 Kt, contre 90 Kt pour la W76-1. Puissance réduite et non pas réglable. L'année 2019 aurait vu la mise en production par Pantex Ordnance Plant de la W76-2 à raison de 50 exemplaires. La première - First Production Unit (FPU) - serait sortie de la chaîne dès février 2019 et les dernières auraient été livrées en septembre 2019. La nouvelle venue aurait été déclarée opérationnelle la même année.

Toujours dans la littérature ouverte, deux configurations possibles de MSBS Trident 2D5 ou « Mk 4A » sont évoquées :

  • L'une croit savoir que deux missiles par SNLE de classe Ohio en patrouille recevrait deux MSBS Trident 2D5 chargés chacun à raison de deux W76-2, de quoi armer vingt-cinq missiles, soit douze SNLE de classe Ohio ;

  • l'autre configuration évoquée est beaucoup plus flexible car elle n'évoque la présence que d'un ou deux MSBS Trident 2D5 chargés chacun d'une à huit W76-2.

Le nombre de configurations ne peut être trop grand puisqu'il n'y a « que » dix SNLE sur quatorze pouvant recevoir leur dotation complète en missiles. Et donc cela suppose une « masse critique » à affecter à chaque scénario sur lequel est bâtie la posture opérationnelle.

Il convient de souligner que restreindre le nombre de têtes nucléaires emportées de huit à seulement deux implique un allongement de la portée qui à l'origine de 12 000 km avec toutes ses charges.

Il y aurait donc un balancement entre nombre de cibles pouvant être traitées et portée, entre les océans Atlantique et Pacifique où naviguent les SNLE américains, voire entre zones de patrouille. En effet, plus le SNLE est proche des cibles potentielles, plus le temps de vol de ses missiles est court et plus l'adversaire dispose de moins de temps pour réagir.


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