Les @mers du CESM


Les @mers du CESM - 19 avril 1944 :

Le cuirassé Richelieu participe au bombardement de Sabang, base japonaise en Indonésie. Le navire français, ayant rejoint l’Eastern Fleet commandée par l’amiral britannique Somerville, prendra part à trois autres opérations visant des bases navales ennemies. Après 52 mois passés en mer, le bâtiment rentre à Toulon le 1er octobre 1944. À nouveau déployé en Asie du Sud-Est l’année suivante, le bâtiment assistera à la capitulation du Japon dans la rade de Singapour le 23 septembre 1945.





21 mars 2021

Marina militare : fin de la croissance en volume ?

© Marina militare. Mer Tyrrhénienne, 5 mars 2015. La FREgate Multi-Missions (FREMM) Carlo Margottini (2014 – 2044 ?) a été aux prises avec les conditions météorologiques défavorables et les conditions de mer rencontrées lors de l'exercice Mare Aperto 15-1.

     La Marina militare avait bénéficié, non seulement de la rédaction de la « legge navale » ou legge De Giorgi dont l'exécution jusqu'en 2021 a permis de soutenir et une croissance en volume - pouvant conduire l'Italie à détenir la plus importante flotte de surface de toute la Méditerranée si l'extension navale était poursuivie - et l'industrie navale italienne. Néanmoins, l'affaire égyptienne et la cession de deux premières frégates semble avoir sonné le glas de cette expansion navale, la volonté politique ne semblant plus suivre. C'est peut être pourquoi les Capi di Stato Maggiore della Marina semblent repositionner le débat opérationnel et politique plutôt sur le comblement des lacunes capacitaires : la lutte anti-sous-marine et la frappe dans la profondeur, dans l'optique de continuer à proposer au Politique de soutenir l'ambition océanique de la Marina Militare, entendue dans le cadre de la « Mediterraneo allargato » (Méditerranée élargie) et de plus restreindre la programmation navale à l'accumulation de plateformes navales dans le cadre d'une alliance officieuse avec l'industrie navale.

     La « legge navale » ou legge De Giorgi du nom du Capo di stato maggiore della Marina Militare, l'Ammiraglio Giuseppe De Giorgi (28 janvier 2013 - 22 juin 2016) fut la première proposée depuis la précédente de 1975 qui avait été prise sous la férule de l'Ammiraglio di squadra Gino De Giorgi (1973 - 1977), le père de l'Ammiraglio Giuseppe De Giorgi. Elle bénéficiait d'un montant prévu de 5800 millions d'euros (2013) qui fut ajustée à 5400 millions d'euros (2014) avant d'être finalement portée à 6700 millions d'euros lors de son adoption en 2015. Mais ce montant fut finalement rectifié à 5428 millions d'euros, soit 5743 millions d'euros en données corrigées de l'inflation (février 2021). Et ce montant permettait le financement des programmes suivants : sept PPA pour 3 936 millions d'euros, le LHD Trieste pour 1126 millions d'euros, le LSS Vulcano pour 325 millions d'euros et les deux UNPAV pour 40 millions d'euros. La Marina militare demandait initialement 10 000 millions d'euros.

Il s'agit d'un financement exceptionnel pour lequel avait été proposé initialement un ensemble de prêts bancaires, sur une durée de dix années. Mais ce « financement innovant » fut abandonné, notamment car les intérêts des prêts diminuaient significativement la somme réellement perçue par la Marina Militare, sans compter les défis lancés aux finances publiques. Et l'une des conséquences quant au changement du mode de financement fut l'ajout d'un septième PPA. Ce financement direct s'ajoutait au budget de la Défense italien afin d'accroître le budget investissements de la Marina Militare et de préserver l'outil industriel car la chute prévisible du tonnage militaire à construire aurait obligé à d'importantes restructurations industrielles. Une autre de ses rationalités consistait dans la reconnaissance politique que, vis-à-vis de l'Aeronautica Militare et de l'Esercito italiano, il y avait un rattrapage financier à concéder à la Marina militare.

     Sa justification stratégique était transposée dans le Libro Bianco per la sicurezza internazionale e la difesa, approuvé par le Conseil suprême de la Défense nationale, le 21 avril 2015. Et sa traduction navale était contenue dans le document Prospettive e orientamenti di massima della Marina militare per il periodo 2015-2025, publié en novembre 2014.

Et dans ce dernier document, il y était notamment question de renforcer les capacités opérationnelles pour la maîtrise du volume sous-marin avec : le programme Type 212 NFS dans la perspective de proposer un relèvement du format de la sous-marinade italienne de huit à douze ou 13 sous-marins, un programme d'avions de PATrouille MARitime (PATMAR) de neuf appareils, des Extra Large Unmanned Undersea Vehicle (XLUUV) pour la lutte anti-sous-marine, la mise sur cale d'un bâtiment de soutien sous-marin, la levée de l'option pour les PPA n°8, n°9 et n°10 car celle-ci expire en mai 2021. Le Documento Programmatico Pluriennale 2019-2021 contient à cet effet de premières mesures.

     Une autre publication - Linee di indirizzo strategico 2019-2034 -, publiée en juillet 2019 et mise à jour en mars 2021, confirmait ces orientations stratégiques, en particulier quant au traitement des lacunes identifiées, et proposait, par ailleurs, le concept de « Mediterraneo allargato » (Méditerranée élargie) depuis le golfe de Guinée jusqu'au golfe Arabo-persique en passant par la Mer Noire. Le programme Pattugliatore Polivalente d'Altura (PPA) en serait la traduction pure et parfaite.

Dans le cadre de cette partie de la programmation militaire italienne ont, notamment, été financés l'achèvement du programme FREMM avec une cible forte de dix unités et le lancement de nombreux programmes navals dont, et parmi les plus emblématiques, les Pattugliatore Polivalente d'Altura (PPA) et Logistic Support Ship (LSS).

     L'Italie entamait une nouvelle phase de ses relations politico-militaires avec l'Égypte début 2018. Il se négociait durant le premier semestre 2019 un volet naval relatif à l'acquisition de plusieurs frégates italiennes par l'Égypte. L'Unità per le Autorizzazioni dei Materiali di Armamento (UAMA) fut entretenue de ces projets en octobre 2019 et y consentait en décembre 2019. Le 21 février 2020, Fincantieri identifiait les FREMM n°9 - Spartaco Schergat (2020) - et FREMM n°10 - Emilio Bianchi (2021), dans la perspective d'un accord pouvant concerner 2 à 6 frégates.

Fincantieri détaillait le cadre définitif de la transaction, lettre du 27 février 2020, afin de solliciter l'autorisation à poursuivre les négociations. L'UAMA, en raison de la loi n°185 de 1990, a rendu son avis quant aux conséquences sur les activités, intérêts et la sécurité des forces armées, également en ce qui concerne les théâtres d'opérations. Le 11 juin 2020, le gouvernement italien donnait son accord à la cession des deux FREMM. Le contrat a été signé courant août 2020, pour 1200 millions d'euros, assortie d'une option pour la construction de deux FREMM supplémentaires.

La Spartaco Schergat (2020) fut mise à l'eau, en janvier 2019, initialement dans l'optique d'être livrée à la Marina militare le 5 juin 2020. Elle a bénéficié aussi de travaux d’adaptation menés par le chantier Fincantieri de Muggiano, notamment pour débarquer certains systèmes, à l'exemple des RECM Nettuno-4100 (Thales) et du CESM Altesse (Thales). Rebaptisée FFG-1002 ENS Al-Galala (2021), elle menait ses essais à la mer à partir de la fin 2019. Elle a été livrée à la Marine égyptienne le 22 décembre 2020. Après plusieurs sorties d'essais et d'entrainement en mer, l' ENS Al-Galala (2021) quittait La Spezia, le 25 décembre 2020, pour rejoindre sa nouvelle base navale d'Alexandrie où elle arrivait le 30 décembre 2020.

L'Emilio Bianchi (2021) fut mise à l'eau, en janvier 2020, initialement dans l'optique d'être livrée à la Marina militare. Elle a bénéficié aussi de travaux d’adaptation menés par le chantier Fincantieri de Muggiano, notamment pour débarquer certains systèmes, à l'exemple des RECM Nettuno-4100 (Thales) et du CESM Altesse (Thales). Rebaptisée FFG-1003 ENS Bernees (2021), elle menait ses essais à la mer à partir de septembre 2019. Et ses essais à la mer sous les couleurs égyptiennes débutaient le 15 février 2021. Elle devrait être livrée à la Marine égyptienne au printemps 2021 (20 mars - 21 juin).

     Dans ce processus, le stato maggiore della Marina Militare introduisait en tant que condition à l'opération d'exportation envisagée, en 2019, que deux autres unités de la « dernière génération » rejoignent la Marina militare d'ici 2024. Le contrat portant la partie réalisation du programme FREMM a bénéficié d'une modification d'une clause afin de permettre le décalage calendaire de la livraison à la Marine militare des neuvième et dixième FREMM : au lieu d'être livrées, respectivement, en 2020 et 2021, elles le seront finalement en février 2025 et en août 2026. Les fonds égyptiens financent la pose de la quille de deux nouvelles frégates. Mais cette modification contractuelle n'a permis que de mettre sur cale deux FREMM GP (General Purpose) et non pas FREMM ASW (Anti-Submarine Warfare).

Il existe une incertitude, semble-t-il pas relevée de l'autre côté des Alpes, quant au potentiel exercice de l'option retenue dans le contrat d'août 2020 qui doit être mise au regard d'une apaprente lenteur quant au commancement de la construction des quatre à six MEKO A200 (TKMS) dont une devra être mise sur cale à Alexandria shipyard (ASY). L'Allemagne approuvé l'exportation de ces bâtiments en avril 2019 et MBDA a reçu notification d'une commande pour des systèmes VL-MICA en septembre 2020. Les deux nouvelles FREMM devant remplacer les Spartaco Schergat et Emilio Bianchi seront-elles les futures frégates pouvant être acquises par l'Égypte, au titre de cette option ? Il semblerait, toutefois, que l'état-major de la Marina militare ait arraché le soutien politique quant à la bonne réception de ces futures frégates.

     C'est cette perspective qui est à souligner ici : la Marina militare pourrait demeurer durablement à un format de seulement huit FREMM et non plus dix, malgré une remise sur cale devant aboutir assez tardivement à une admission au service actif (2025 - 2026). La levée de l'option au profit des PPA n°8, n°9 et n°10, désirée depuis plusieurs années, se fait attendre et semble plutôt être considérée comme perdue. Celle-ci expire en mai 2021. Il est souhaité pour le programme LSS une cible de quatre unités mais pour le moment seule deuxième a été confirmée dans le Documento Programmatico Pluriennale 2020-2022. Il ne resterait plus que plusieurs programmes de bâtiments de surface pouvant accoucher de mises sur cale, à savoir le programme PP(X) trouvant sa concrétisation dans la CSP/PESCO European Patrol Corvette, le programme DD(X) mais aussi les programmes LHD(X) pour le remplacement des TCD/LPD de classe San Giorgio (3).

     C'est à replacer dans un contexte de rétrécissement, voire d'effacement du soutien politique à la constitution d'une marine océanique, ambition stratégique de la Marina militare depuis la legge naval de 1975 : malgré la formalisation du concept de « Mediterraneo allargato », la croisière la plus lointaine fut celle du Cavour (2007) qui l'emmena jusque dans le golfe arabo-persique (2013). Néanmoins, le bassin oriental de la Méditerranée, la mer Noire et même le golfe de Guinée demeure des lieux de déploiements.

     La programmation navale italienne peut être observée en ce sens : c'est-à-dire est-ce que la dépense financière va continuer à se concentrer quant aux lancements de nombreuses plateformes ou bien celle-ci va-t-elle désormais se concentrer, assèchement des fonds de la legge naval et effets de la crise sanitaire aidant, quant au comblement des lacunes capacitaires identifiées dès 2015 ? En supposant que la priorité politique ne dépasse plus le seul entretien des capacités de l'industrie navale italienne afin d'éviter une crise sociale majeure dans un contexte de fragilité particulière des économies nationales, il se poserait donc la question d'un grand aggiornamento naval.

     Le Documento Programmatico Pluriennale 2020-2022 s'intéresse, par exemple, à l'obtention d'une capacité de frappe dans la profondeur avec un volet léger, identifié dans le programme Otomat Mk2 Block IV/Teseo Mk2E (370 km), et un volet Deep Strike New Generation devant concerner un missile de croisière. Mais ce dernier n'est actuellement pas financé.

Par ailleurs, la situation des lacunes en matière de lutte anti-sous-marine, là aussi identifiée dès 2015, doit être mise en perspective : sur 8 à 10 FREMM, seules 4 relèvent de la version ASW ; sur 7 à 10 PPA, seuls 2 à 3 relèveront de la version dite Full et disposeront donc d'une suite anti-sous-marine complète. Un format à comparer avec la Marine nationale qui, sur 15 frégates de 1er rang, aura 13 frégates anti-sous-marines, ne manquant qu'un sonar remorqué à immersion variable aux Forbin et Chevalier Paul. Et ce, dans un contexte où Linee di indirizzo strategico 2019-2034 identifie l'accroissement des menaces sous-marines en Méditerranée, désignant de manière très implicite l'Algérie.

Et pour combler les lacunes identifiées, l'un des griefs italiens les plus avancés est la multiplicité des versions des FREMM et PPA. Mais il n'a semble-t-il jamais encore été proposé devant la commission Défense du Parlement italien de spécialiser les plateformes : aux FREMM, la lutte anti-sous-marine, aux PPA la basse intensité ? Les FREMM de classe Carlo Bergamini (10) bénéficient d'une propulsion CODLOG (COmbined Diesel-eLectric Or Gas) particulièrement adaptée à ce domaine de lutte. Ceci devant entraîner la disparition de la version GP. Et pouvant, cependant, justifier la vente des deux dernières GP ou bien justifier leur transformation en ASW, avec refonte des huit premières unités. Les PPA perdraient les versions Light et Full pour se concentrer sur la version Light +, afin d'être employés en avant et longtemps.

     Il n'en demeure pas moins que seront lancés, en 2021, grâce à la signature des contrats afférents, les programmes suivants : un navire hydrographique majeur Nave Idro-Oceanografica Maggiore (NIOM), un Unità per Bonifiche Subacquee (UBOS) et un navire pour les opérations spéciales et le sauvetage sous-marin (Special & Diving Operations-Submarine Rescue Ship (SDO-SuRS) et la signature du contrat pour le deuxième LSS devrait bientôt tomber. Sans oublier l'affermissement potentiel de l'option égyptienne pour les deux dernières FREMM ou bien la livraison, comme prévue, de celles-ci à la Marina militare. 

D'ici à l'horizon 2025, seront lancées les études préliminaires des trois LXD afin de pourvoir au remplacement de la classe Santi (3) et de leur battellerie. Sans oublier l'entrée en phase de réalisation du programme PP(X) à travers la CSP/PESCO EPC (8), avec un début de la construction en 2025 et une livraison en 2027. Le programme DD(X) doit remplacer les destroyers de la classe Luigi Durand de la Penne (Luigi Durand de la Penne (1993), Francesco Mimbelli (1993) à partir de 2028. Des études seront lancées pour la construction de deux DD(X) à partir de 2025. Il y a quelques doutes quant au fait qu'il parvienne à son terme, en raison du coût de construction, proportionné à son tonnage (10 000 tonnes à pleine charge). Et il servira, au minimum, à raffermir la position italienne dans le cadre de la RMV/MLU du programme Horizon. Il est également prévu le lancement d'un programme Unità Cacciamine di Nuova Generazione (CNG) et une nouvelle classe de Navi Idro Oceanografiche Costiere (NIOC). 

L'industrie navale italienne aurait peut être un plan de charge suffisant pour ne pas avoir à fermer de chantier d'ici à 2030. La croissance en volume semble achevée, malgré l'accumulation de nouveaux programmes qui permettent le renouvellement des dernières capacités n'en ayant pas encore bénéficié. Pour devenir une marine dite océanique, il demeure de nombreux sujets : lourde problématique de ressources humaines, la formation, la logistique navale et donc le niveau des dépenses pour le maintien en condition opérationnelle et, la raison mère de toutes les autres, le peu d'attrait pour l'échelon politique de soutenir cette ambition.

 

4 commentaires:

  1. On peut imaginer en effet un fort ralentissement des constructions navales pour le compte de la marina militare, compte tenu du contexte économique actuel et on voit bien que l'Italie à l'image de la France, cède des FREMM au dépens de sa marine, sans pour autant certifier qu'elles seront remplacées. La marine nationale conservera un format de flotte ASM raisonnable et peut-être elle obtiendra dans la prochaine LPM, la possibilité de posséder à moyen terme une flotte de 18 frégates de premier rang, c'est ce qui est souhaité. Par ailleurs on manque de frégates de défense aérienne, - au moins deux - mais tout n'est pas possible ; les programmes en cours, (bâtiments ravitailleurs de forces et patrouilleurs) limitent évidemment nos ambitions.

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  2. Merci, il est notable que la multiplication des unités, si elle ne sont pas dotées des moyens permettant de répondre aux besoins opérationnels, servent donc uniquement de frégate de premier rang de façade.

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  3. Bonjour, nous confirmons que deux autres FREMM seront construits pour la marine italienne

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  4. Les deux nouvelles FREMM seront équipées du système VDS CAPTAS 4

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