Les @mers du CESM


Les @mers du CESM - 19 avril 1944 :

Le cuirassé Richelieu participe au bombardement de Sabang, base japonaise en Indonésie. Le navire français, ayant rejoint l’Eastern Fleet commandée par l’amiral britannique Somerville, prendra part à trois autres opérations visant des bases navales ennemies. Après 52 mois passés en mer, le bâtiment rentre à Toulon le 1er octobre 1944. À nouveau déployé en Asie du Sud-Est l’année suivante, le bâtiment assistera à la capitulation du Japon dans la rade de Singapour le 23 septembre 1945.





18 octobre 2019

Marinha do Brasil : transfert de la classe Tupi à l'Armada de la República Argentina ?

© Inconnu. Le sous-marin brésilien S-31 Tamoio de la classe Tupi, entré en service en 1995, débutait en novembre 2014 une Période de Maintenance Générale (ou Período de Manutenção Geral (PMG). Carénage intervenant tous les six ans. Les huit tubes lance-torpilles sont bien visibles.
Brasilia et Buenois Aires ont négocié en juin 2019 le principe d'une cession des quatre bateaux de la classe Tupi (Type 209/1400) grâce à un accord entre les deux chefs d'État : ce ne serait plus la fin de la sous-marinade argentine. Décision stratégique remarquable, en particulier si l'opération est menée jusqu'à son terme.

La classe Tupi résulte du remplacement des sous-marins acquis auprès des États-Unis d'Amérique et du Royaume-Uni dans le cadre du Plan de reconstitution des forces de la marine (Plano de Reaparelhamento da Marinha (PRM) lancé 1979. Il aboutissait à l'acquisition auprès de l'industriel allemand Howaldtswerke-Deutsche Werft (HDW) de quatre sous-marins Type 209/1400 (IKL-209-1400).

La quille du premier bateau est déposée dans le chantier allemand en 1985. Les trois bateaux suivants seront construits au Brésil au sein de l'Arsenal de la Marine de Rio de Janeiro où une nouvelle nef d'assemblage est érigée en plus de travaux pour la rénovation et la modernisation d'ateliers et de magasins. Les sous-marins sont alors soutenus et entretenus à la Base de Submarinos da Ilha de Mocanguê construite en mai 1941.

La classe Tikuna (Type 209/1400 Mod), version agrandie, devait compter deux unités et servir de prélude à la mise sur cale du premier sous-marin à propulsion nucléaire brésilien par l'intégration d'une partie de ses futurs équipements et installations. C'est en raison des retards additionnés pendant la phase d'industrialisation du programme que la marine brésilienne révisait ses plans : le deuxième Tikuna est abandonné, ses crédits sont reversés au profit du lancement du programme Submarino Medio Brasilerio (SMB-10).

Ce Programme SMB-10 visait explicitement la construction au Brésil de deux sous-marins d'un déplacement en plongée d'environ 2500 tonnes pour une coque longue de 67 mètres et fort d'un diamètre de 8 mètres afin qu'ils servent de base de développement au SN-BR (Submarino com propulsão Nuclear - BRasileiro).

La classe Riachuelo est l'aboutissement du programme SMB-10. L'offre française fondée sur une version allongée du Scorpène (Scorpène - BRasil (S-BR) présentée par DCNS est sélectionnée en 2008 face aux offres allemande (Type 214), russe (Amur 1650) et suédoise. C'est à cette occasion que le programme Submarino Medio Brasilerio devient le PROgrama de desenvolvimento de SUBmarinos (PROSUB).



Type 209/1400 
Type 209/1400 Mod 
Scorpène - BRasil (S-BR) 

Classe Tupi 
Classe Tikuna 
Classe Riachuelo 
S-30 Tupi (1989 – 2020 ?) 
S-31 Tamoio (1995 – 2022 ?) 
S-32 Timbira (1996 - 2020 ?) 
S-33 Tapajó (1999 – 2023 ?) 
S-34 Tikuna (2007 – 2037 ?) 
S-35 Tapuia (annulé) 
S-40 Riachuelo (2019 – 2049 ?) 
S-41 Humaitá (2020 – 2050 ?) 
S-42 Tonelero (2021 – 2051 ?) 
S-43 Angostura (2022 – 2052 ?) 
Caractéristiques nautiques  
Longueur 
61,20 
62,05 
71,6 
Largeur 
6,20 
6,20 
7,5 
Tirant d’eau 
5,50 
5,50 
5,50 
Tonnage en surface 
1260 
1454 
2000 
Tonnage en plongée 
1440 
1586 
2200 
Immersion (mètres) 
250 
250 
300 + 
Vitesse (nœuds) 
21,5 
25 ? 
21 + 
Propulsion (CV) 
4 x 800 
4 x 940 
4 x 750 
Moteurs diesel 
4 x MTU 12V 493 TY60 
4 x MTU 12V396 
4 x MTU 12V 396 SE84 
Moteur électrique (MW) 
3,7 
3,7 
2,9 
Autonomie (mn) 
8250 à 8 nœuds 
11 000 à 8 nœuds 
13 000 à 8 nœuds 
Equipage 
36 
36 
35 
Caractéristiques opérationnelles 
Tubes Lance-Torpilles 
8 x 533 mm 
8 x 533 mm 
6 x 533 mm 
Nombre armes tactiques 
16 
16 
18 
Tableau n°1 - Programmes contemporains de sous-marins de la Marinha do Brasil


Le programme de 6,7 milliards d'euros comporte la construction au Brésil du Complexo Naval de Itaguaí composé d'un nouveau chantier naval (Itaguaí Construções Navais) et d'une nouvelle base navale (Baía de Itaguaí) où seront construis et soutenus les quatre S-BR et le premier SN-BR, le SN-10 Álvaro Alberto. Par rapport aux prévisions initiales, l'admission au service actif du premier S-BR a glissé de 2017 au mois d'octobre 2020.

Le sort de la sous-marinade brésilienne est loin d'être idyllique, illustrant les tensions pesant sur l'outil : aucun des sous-marins n'est opérationnel. Les S-32 Timbira (1996) et S-33 Tapajó (1999) attendraient depuis plusieurs mois une ultime Période de Maintenance Générale (ou Período de Manutenção Geral (PMG). Les S-31 Tamoio (1995) et le S-34 Tikuna (2007) n'achèveront leur PMG qu'en 2020. Le S-30 Tupi (1989) serait le dernier sous-marin brésilien à avoir navigué début 2019 et n'a pu donc être injecté dans le cycle des derniers PMG.

Les ultimes PMG débutaient en 2018 dans les installations de la Base de Submarinos da Ilha de Mocanguê devraient s'achever au plus tard en 2022 par la PMG du Tupi. Les installations visités, révisés et réparés sont les suivantes :
  • grand entretien des quatre moteurs diesel-électriques,
  • entretien ordinaire des éléments de batterie,
  • entretien du schnorchel,
  • entretien des systèmes de réfrigération
  • réparation des tubes lance-torpilles,
  • inspection et réparation de vannes,
  • réparations structurelles,
  • réparation de tous les aériens (périscope, etc).
A l'issue les quatre sous-marins quitteraient la Base de Submarinos da Ilha de Mocanguê (baie de Rio de Janeiro, légèrement au nord-est sur la côte opposée à la ville) au profit de la Baía de Itaguaí qui est 74 km à l'Ouest de Rio de Janeiro. Les départs et retour de patrouille sont réputés pouvoir y être menés plus disrètement que dans la baie de Rio de Janeiro. Les anciennes installations ayant accouché des IKL-209 devraient être reconvertis au profit des programmes de bâtiments de surface.

Pourtant, l'état-major de la marine brésilienne envisageait une rationalisation de la flotte sous-marine brésilienne tout en doublant son format :

La remotorisation (Roberto Lopes, "Exclusivio: MB quer remotorizar submarinos classe Tupi para permitir travessia da década de 2020", Poder Naval, 28 février 2019) des S-32 Timbira (1996) et S-33 Tapajó (1999) par la dépose des MU 493 par des MTU 396 pour une soixaintaine de millions d'euros permettrait d'harmonier le parc de moteurs avec le S-34 Tikuna et les quatre S-BR. Les MTU 493 déposés serviraient pour les S-30 Tupi (1989) et S-31 Tamoio (1995)

Au début des années 2030, la sous-marinade brésilienne disposerait alors des quatre nouveaux S-BR additionnés au SN-BR et des deux à quatre bateaux de la classe Tupi plus l'unique représentant de la classe Tikuna. Le Plano de Articulação e Equipamento da Marinha do Brasil (PAEMB (2009 - 2030) formalisé en 2009 vise 15 sous-marins classiques en 2047. Avec 9 sous-marins de facture brésilienne en 2030, le plan aurait été respecté à un bateau près en 2030.

Mais la Força de Submarinos, coincée entre les PMG des Type 209/1400 et Type 209/1400 Mod et les futures admissions au service actif des S-BR (2019 - 2022), est confronté à deux faiblesses : le peu de dépenses pour le maintien en condition opérationnelle des bateaux et de grandes interrogations sur les moyens pour soutenir une force de 5 sous-marins.

Il en résulterait l'annonce du placement sur le marché de l'occasion des sous-marins de la classe Tupi pour lesquels l'Argentine est approchée depuis 2017. Mais l'achat ou la location d'un sous-marin classe Tupi semblait avoir avorté en février 2019. L'arsenal de Rio de Janeiro ne semblait pas y trouver son compte et l'amirauté brésilienne a laissé mourir l'idée avec peut être l'intérêt que la marine argentine ne soit pas servie (Roberto Lopes, "Macri decide recuperar o submarino ARA Santa Cruz", Poder Naval, 20 février 2019).

Buenos Aires n'aurait alors qu'un budget de 340,8 à 358,7 millions d'euros : trop peu pour un sous-marin neuf. C'est presque exactement la même somme que celle dépensée pour l'acquisition des quatre patrouilleurs hauturiers auprès de Naval group, donnant ainsi l'ordre de grandeur des programmes d'acquisition de la marine argentine. Un nouveau carénage de l'ARA Santa Cruz pour une vingtaine de millions d'euros se profilait alors à l'horizon.

En avril 2019, l'Amiral Ilques Barbosa Júnior déclarait lors du 129e anniversaire du corps des ingénieurs de la Marine que le Pérou souhaite acquérir deux sous-marins de la classe Tupi : chiffre cohérent avec l'opération de remotorisation envisagée pour les deux unités les plus récentes. Le Pérou n'est pas l'Argentine : sa marine est de l'autre côté du continent (Roberto Lopes, "Exclusivio: MB pode vender dois submarinos IKL-209 à Marinha do Peru", Poder Naval, 21 avril 2019). Lima aurait remplacé ses deux plus anciens Type 209/1200 construits dans les années 1970, sauvegardant son format à six sous-marins.

L'affaire change de dimension au mois de juin 2019. Jair Bolsonaro, trente-huitième président de la République fédérale du Brésil, a pris un certain nombre d'initiatives diplomatiques avec l'Argentine du président Mauricio Macro qui ont abouti à la signature d'accords bilatéraux. Il se devine que le gouvernement argentin aurait reposé la question des Tupi et les deux gouvernements se seraient entendus sur le transfert de deux de ces sous-marins avec une option pour les deux autres bateaux (Jane's Defence Weekly, "Brazil to transfer Type 209 submarines to the Argentine Navy", Jane's Defence, 10 juin 2019).

Cet accord de transfert "2 + 2" ne précise ni les bateaux concernés, ni le calendrier espéré. Selon une certaine logique ce serait les S-30 Tupi (1989) et S-31 Timbira (1995) car les deux attendent leur PMG et sont les plus anciennes unités à ne pas avoir été carénés. Ce qui pose la question de qui réglera la facture pour les travaux, selon quel montant et dans quel chantier. Le programme de remotorisation des S-32 Timbira (1996) et S-33 Tapajó (1999) sera-t-il mené à son terme au profit de la marine brésilienne ou bien proposée à l'Argentine ?

Une livraison avec un entretien léger est l'option retenue mais ne paraît pas être durable sur le plan opérationnel ni politiquement acceptable : les citoyens argentins suivent toujours avec passion les résultats des enquêtes menées suite au naufrage de l'ARA San Juan (15 novembre 2017).

Pour la marine brésilienne, il aurait été décidé de concentrer les efforts sur l'armement en hommes des S-BR de la classe Riachuelo (2019 - 2022) tout en conservant en plus le S-34 Tikuna (2007). Il se devine un arbitrage entre les ambitions des sous-mariniers et les besoins impérieux des surfaciers de la marine brésilienne.




1970 - 1975 
1975 - 1990 
1990 - 2000 
2000 - 2020 
2015 
- 2025 
Classe Salta 
Type 209-1200 
S-31 Salta 
ASA 1973 


RSA 2019 ? 
ASA S-30 Tupi (2020) ? 
S-32 San Luis 
ASA 1974 

RSA 1997 

ASA S-31 Tamoio (2023) ? 

Classe 
Santa Cruz 

Type TR-1700 
S-41 Santa Cruz 

ASA 1984 

RSA 2019 ? 
ASA S-32 Timbira (2020) ? 
S-42 San Juan 

ASA 1986 

Naufrage 2017 
ASA S-33 Tapajó (2023) ? 
S-43 Santa Fe (70%) 





S-44 Santiago Del Estero (30%) 





S-45 (approvisionné et cannibalisé) 





S-46 (approvisionné et cannibalisé) 





 Tableau n°2 - Programmes contemporains de sous-marins de l'Armada de la República Argentina


L'arme sous-marine de l'Armada de la República Argentina bénéficierait d''un rajeunissement de l'âge moyen de ses bateaux de 40,5 à 27 ans. Les Tupi restent des Type 209 que les Argentins connaissent bien. Le désarmement d'autres sous-marins de ce type de par le monde ouvrent la perspective à la création de stocks de pièces de rechanges, de machine-outils.

Les Tupi sont peut être les rares sous-marins qui seront proposés à la revente avec un potentiel de 10 à 15 ans de service. Sur la seule famille des Type 209, les autres marines ont soit des unités plus âgés, soit ne sont pas dans la perspective de vendre leurs bateaux.  Il paraissait inespéré que la marine argentine puisse et maintenir sa sous-marinade et avec un niveau d'activité compatible avec l'entretien de compétences opérationnelles. La perspective d'obtenir jusqu'à quatre bateaux signifie le retour à une permanence à la mer : cela permet de jauger l'importance stratégique de la décision brésilienne de transférer ces bateaux. 

Ce transfert selon un plan "2 + 2" négocié entre les chefs d'Etat argentin et brésilien confirme la bonne entente entre les trois grandes marines sud-américaines (Argentine, Brésil et Chili) quand il s'agit de coopérer pour le bénéfice mutuel de préserver un outil naval de premier plan. Brasilia pouvait refuser de le faire, ce qui aurait laisser l'Atlantique Sud à la seule force sous-marine brésilienne. L'Afrique du Sud n'a pas réussi à faire de ses trois sous-marins une force opérationnelle. Reste à observer si le transfert consommera tout le budget pour l'entretien, voire la modernisation des sous-marins brésiliens par l'Argentine, obérant toute résurrection d'une capacité de construction navale pendant longtemps ou bien si l'Argentine reprendra la programmation navale pour lancer un nouveau programme dont l'aboutissement serait un sous-marin à propulsion nucléaire. Ambition qui n'est pas abandonnée dans les discours.


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